25.11.05


CULTIVER LES IRIS
L’opinion d’une spécialiste : Michèle Bersillon.

Question : Pour vous, cultiver les iris, c’est quoi ?

Réponse : Les iris, cela ne se limite pas aux émotions d’un concours mi-mondain mi-professionnel ! C'est le bêchage d'une nouvelle plate bande en hiver, les soucis pour les plantes qui subissent les intempéries et le froid. Après, il y a toute la préparation du jardin en fin d'hiver : nettoyage des feuilles mortes, apport d'engrais, application d'insecticide, anti-insectes du sol, etc. et le début de l'éternel désherbage. Ensuite, vient le printemps avec ses merveilles et, si on a beaucoup de chance, un ou deux miracles, la frénésie des hybridations et l'immense satisfaction qu'on ressent quand on contemple le jardin fleuri, parfumé et paisible. L'été :Repiquage des semis et désherbage, désherbage et . . . désherbage, le tout avec la chaleur, les taons, aoûtats et autres pestes, et parfois les tempêtes de grêle ! C'est aussi le moment des envois et échanges et la récolte des graines avec tous les espoirs qui vont avec. Automne et le début de l'hiver, c'est le nettoyage du jardin pour la saison morte, le choix des semis et ensuite la plantation des graines, la recherche des pedigrees . . . et les rêves. Et les concours dans tout cela ? Quelques jours tous les deux ou trois ans. Si les plantes qu'on a envoyé concourir fleurissent au bon moment, c'est-à-dire les dates choisies pour le concours, on a une toute petite chance d'une récompense et d'applaudissements, mais il ne faut pas trop y compter ! Pour moi, la récompense est le miracle d'une fleur qui s'ouvre pour la première fois : tout est là. (voir photo semis 0252A).
FRESH AIR

L’un des plus jolis iris bleu clair qu’il m’ait été donné de voir ces derniers temps s ‘appelle FRESH AIR (Hager 89). C’est une fleur qui mérite bien son nom, car sa couleur est d’une fraîcheur et d’une netteté rarement atteinte, de plus, la barbe blanche ne vient en rien détourner l’attention que l’on porte au coloris. La corolle elle-même est typiquement « Hager », c’est à dire admirablement proportionnée, symétrique, un peu ronde, avec de douces ondulations. Pour compléter le tableau, il semble que les boutons soient nombreux et que la plante se porte bien et pousse sans problèmes.

Comme tous les iris bleus d’aujourd’hui, celui-ci rassemble les gènes des trois familles de bleus des origines, mais si ses deux parents sont aussi des iris bleus, ils ont néanmoins des antécédents très différents.

Du côté paternel, le bleu est de mise depuis trois générations. A la première c’est WELCOME ABOARD (Hager 88), bleu clair à fines barbes jaunes, qui prend l’ascendant. Lui-même provient de MAESTRO PUCCINI (Benson 72), bleu moyen, un peu gris, et d’un semis blanc issu de ICE SCULPTURE (Hager 73) et de GEOMETRICS (DuBose 75). Ce blanc est en fait un blanc « de bleu » puisque aux générations précédentes on trouve SHIPSHAPE (Babson 69 – DM 74), puis PACIFIC PANORAMA (Neva Sexton 60 – DM 65), puis SOUTH PACIFIC (Kenneth Smith 52), LADY ILSE (K. Smith 50) et CAHOKIA (Eva Faught 46). Quant à MAESTRO PUCCINI, ses parents, VAN CLIBURN (Benson 61) et TIDELANDS (Buttrick 61), et ses grands-parents sont bleus, tous d’origine bleue avec une équitable représentation des trois grandes familles de base.

La branche maternelle est bien plus diversifiée. Il faut noter tout d’abord que la « mère » de FRESH AIR est un sibling bleu du fameux EDITH WOLFORD (Hager 86 – DM 93). Mais on peut dire qu’on trouve de tout dans le pedigree de celui-ci. Du bleu, avec encore une fois CAHOKIA ; du rose aussi par GRADUATION GIFT (Midge Awalt 55) et par DREAMCASTLE (Cook 43) ; du blanc grâce à NEW HORIZON (Fay 46) et BROTHER CHARLES (Reckamp 48) ; du jaune avec BUTTERSCOTCH KISS (Plough 59) ; mais aussi des bitones et des bicolores, MELODRAMA (Cook 56), COMMENTARY (Babson 63), des amoenas, WHOLE CLOTH (Cook 57 – DM 62), MERRY MADRIGAL (Babson 82), un plicata (STEPPING OUT (Schreiner 64 – DM 68) et, évidemment, des variegatas, LILAC CHAMPAGNE (Hamblen 65), GUITAR COUNTRY (Plough 71), FREEDOM ROAD (Plough 77). Il s’agit d’une délicate cuisine, mais ici ce ne sont pas les saveurs mais les couleurs que l’on mélange.

Le résultat est une plante pratiquement parfaite. C’est tellement vrai qu’à ma connaissance aucun hybrideur n’a utilisé FRESH AIR pour réaliser de nouveaux croisements. Cette fleur est un aboutissement, comme on en rencontre par moment, une voie sans issue parce qu’il n’y a aucun perfectionnement à lui apporter. Il est simplement dommage que les producteurs français n’aient pas importé cette variété, qu’on ne peut donc admirer que dans le jardin de quelque amateur passionné, qui n’est pas rebuté par les pièges de l’importation qui guettent souvent les particuliers.
RÉCRÉATION

Voici la description officielle d’une variété très connue. Devinez laquelle, dans la liste ci-dessous :
« TB, 76cm, MT. Pétales pose pastel orangé ; sépales crème devenant orange aux épaules, plus rose au bord ; barbes orange clair, base crème ; ondulé, dentelé ; parfum doux et épicé. »

ALDO RATTI
BUC ARCADES
DESIRIS
MENESTREL
TITANIUM
RÉCRÉATION ( réponses)

Toutes les variétés indiquées descendent de VANITY, mais la description donnée est celle de BEVERLY SILLS.

18.11.05


PETIT DICTIONNAIRE DU MONDE DES IRIS

Dans ce dictionnaire, je compte mettre, au fil du temps et de l’inspiration (l’ordre alphabétique propre aux dictionnaires viendra après !), la définition commentée de la plupart des mots du langage des iris. Commençons par…

Remontant (en anglais = rebloomer) ; syn. Polyanthésique.
Adjectif et nom masculin. Du verbe remonter.
Définition selon le Petit Robert : « Qui redonne des feuilles, des fleurs, des fruits, après la période de floraison normale. »
Appliqué aux iris, ce mot désigne les variétés qui produisent des tiges florales plus d’une fois au cours d’un cycle végétatif.
On distingue plusieurs niveau de remontance :
· Les remontants occasionnels, qui sont des variétés qui ne présentent qu’une tendance sporadique à produire de nouvelles tiges florales au cours d’une même année.
· Les remontants cycliques, qui développent deux cycles complets au cours d’une même année ; ils n’ont pas besoin d’une période de froid (vernalisation) pour produire de nouvelles pousses. Des nuits fraîches suffisent à provoquer l’apparition de nouvelles tiges.
· Les remontants perpétuels, qui produisent des tiges florales tout au long de l’année. Leur période de floraison n’est pas contrôlée par la longueur de la période d’éclairement, mais par la température du sol. La variété LICHEN – Byers 89 - (photo) est dans ce cas.
Des iris qui ne fleurissent qu’au printemps peuvent, s’ils sont croisés avec des variétés remontantes, produire des semis remontants. Ils sont porteurs du gène qui élimine le besoin de vernalisation.
SAPPHIRE HILLS
Un concentré de bleus

Si, au début des années 30, il y avait quatre familles d’iris bleus, l’une d’entre elle s’est rapidement éteinte, ou, plus exactement, s’est fondue avec l’une des autres. Je veux parler de la famille MISSOURI, qui, alliée à GREAT LAKES, a donné naissance à CHIVALRY pour ne plus former qu’une même famille. Les deux autres lignées ont eu une descendance plus longue, mais aussi elles se sont unies pour donner, dès les années 50, des sujets mêlant les gènes des trois origines. Il en est ainsi de SAPPHIRE HILLS (Schreiner 71). Pour bien suivre cette fusion des différentes familles, il faut remonter aux grands-parents de SAPPHIRE HILLS. On a la chance d’avoir des renseignements généalogiques presque complets concernant cette variété et on peut ainsi bien suivre les adjonctions successives des différents éléments. Remontons donc chaque branche…

Les quatre grands-parents de SAPPHIRE HILLS s’appellent GALILEE (Fay 55), SALEM (Schreiner 57), SYLVAN STREAM (Schreiner 61) et MELISSA (Hinckle 54). Tous sont des iris bleus, et trois sur quatre rassemblent déjà les gènes des trois familles.

Commençons par MELISSA, le quatrième grand-parent, parce qu’il est un peu différent des autres en ce sens qu’il arrive tout droit, par l’intermédiaire du bleu indigo ZARA (Hincle 51) du fameux blanc SNOW FLURRY (Rees 39) ; mais un semis d’Eva Faught, spécialiste des bleus, croisé avec ZARA, est assurément à l’origine de sa couleur bleue marine, alors que SNOW FLURRY, qui est tout de même un blanc issu de bleus, lui a transmis les gracieuses ondulations de sa corolle.

Pour arriver à cumuler tous les gènes, il a fallu croiser des variétés qui, dans les années 50, n’avaient encore rassemblé que ceux de deux familles. Ainsi, pour GALILEE, qui est un bleu à barbes blanches, couleurs qu’il a léguées à son petit-fils ; c’est BUTTERFLY BLUE (Fay 52) qui a fourni les gènes des familles Great Lakes et Santa Clara. Ces derniers figurent également dans les chromosomes de BLUEBIRD BLUE (Fay 52). BUTTERFLY BLUE et BLUEBIRD BLUE ont en effet l’un et l’autre pour parent CAHOKIA (Faught 46) qui détient le potentiel de la famille Santa Clara et a engendré un très grand nombre d’iris bleus. BLUEBIRD BLUE a fait en plus l’apport des gènes de la famille Helen McGregor. Un mélange à peine différent a abouti à SALEM : HARBOR BLUE (Schreiner 54) a apporté les parties Great Lakes par QUICKSILVER (Schreiner 50), et Helen McGregor par JANE PHILLIPS (Graves 49). Le croisement BLUE RHYTHM X SYLVIA MURRAY, quant à lui, a fourni les gènes des familles Great Lakes et Santa Clara. Les premiers viennent de SYLVIA MURRAY (Norton 44), un bleu pâle, les seconds de BLUE RHYTHM (Whiting 45 – DM 50). SYLVAN STREAM, bleu moyen, descend comme le précédent de HARBOR BLUE et c’est aussi BLUE RHYTHM, via PIERRE MENARD (Faught 48), qui lui a apporté les gènes Santa Clara.
GALILEE et SALEM d’un côté, PARISIAN BLUE (Schreiner 64), qui est le croisement de Sylvan Stream X Melissa, de l’autre, sont à l’origine de SAPPHIRE HILLS. Cet iris a toutes les qualités qui auraient pu faire de lui un vainqueur de la Médaille de Dykes : il est vigoureux et florifère, ses fleurs sont de belle taille, ondulées, délicatement frisées, et, par-dessus tout, sa couleur est du plus beau bleu qui soit, d’une pureté presque parfaite (c’est à peine si quelques veinules sombres apparaissent aux épaules) et la barbe sait se faire discrète, en blanc pointé d’or. Cette superbe variété valait bien ce petit travail d’archives, qui paraîtrait sans doute plus clair si je pouvais ajouter un arbre généalogique.
RÉCRÉATION

Voici la description officielle d’une variété très connue. Devinez laquelle, dans la liste ci-dessous :
« TB, 91cm, MO. Rose corail, uni, dentelé, barbe mandarine. »

AVALON SUNSET
BEVERLY SILLS
BUC VAPOREUX
COUP DE CŒUR
DAMOISELLE
RÉCRÉATION ( réponses)

Ce sont toutes des variétés aux pétales roses, et aux sépales blancs bordés de rose.

11.11.05

TÉMOIGNAGE
Une chimère

Il arrive que la nature balbutie. C’est ce qu’a constaté Colleen Modra, qui est une productrice d’iris australienne (son site, www.impressiveirises.com.au , est à visiter). Elle a envoyé le message ci-dessous (qu’elle m’a autorisé à reproduire) sur le forum de discussion « iris-photos », à propos d’une malformation constatée sur la variété SONG OF NORWAY (Luihn 79 – DM 86) :

« Voici la meilleure chimère que j’ai jamais vue. Une moitié de la fleur est normalement blanc bleuté, l’autre moitié est franchement bleue. Sur la même tige, une autre fleur présente un sépale et un pétale moitié blanc, moitié bleu.

SONG OF NORWAY est à la base un bleu avec une ou plusieurs copies d’un gène blanc dominant qui supprime la pleine expression du bleu. Cependant, très rarement, dans une partie d’une fleur ou d’une tige florale, ces gènes manquent leur coup et laissent apparaître l’entière couleur sous-jacente. C’est ce qu’on appelle une chimère. »

Parmi les lecteurs d’Irisenligne, quelqu’un a-t-il fait pareille constatation ? Si oui, qu’il veuille bien poster un commentaire pour faire profiter tout le monde de son opinion.
VARIATIONS SUR LE THÈME DU HALO

Au début des années 80, David Niswonger conçut le projet de créer toute une série de variétés dont la caractéristique serait de comporter un liseré autour des sépales, dans le plus grand nombre possible de coloris. Certes les iris de ce type ne sont pas forcément rares, notamment ceux qui sont blancs cernés de jaune, mais l’originalité vient de la recherche d’un même type sous un grand nombre de couleurs.

L’hybrideur a commencé par ce qui était peut-être le plus facile : un iris blanc entouré de jaune. Le défi était de faire mieux que ce qui existait à l’époque, et il a pratiqué comme c’est toujours le cas, par endogamie. Il a choisi un descendant du célèbre BRIDE’S HALO (Mohr H. 73 – DM 78), dénommé EXUBERANT (Mohr H. 81), qui se présente avec des pétales oranges, et des sépales blancs largement cernés d’orange, qu’il a croisé avec un semis de CHARTREUSE RUFFLES (Rudolph 76). Le résultat, qui est aussi le premier de la série, se présente dans le style de DEBBY RAIRDON (Kuntz 65 – DM 71) ou de JOYCE TERRY (Muhlestein 74), mais avec une meilleure saturation du jaune, des sépales d’un blanc plus pur et une bordure jaune bien nette. Il a été baptisé HALO IN YELLOW (Niswonger 89). Dans les même temps Niswonger a croisé CRYSTAL DAWN (Rudolph 75), lui aussi du type Joyce Terry, mais en clair, et MULBERRY CRUSH (Niswonger 78), superbe iris magenta, très frisé. Le résultat a été un dénommé HALO IN PINK (Niswonger 89), la version rose de HALO IN YELLOW. Vint ensuite la version orange qui s’appelle, comme prévisible, HALO IN ORANGE (Niswonger 89), et qui est le fils de HALO IN PINK et de EXUBERANT, dont il a été question plus haut, et à qui il ressemble énormément, même s’il est d’un orange plus clair et d’un blanc plus franc.

Voilà pour le premier paquet. Un autre paquet de trois est apparu cinq ans plus tard. Le premier de ceux-ci est HALO IN ROSEWOOD (Niswonger 93) qui allie les qualités de MINTED HALO (Mueller 87) – lavande cerné de cuivre – et de KABAKA (Niswonger 85) – dans les mêmes tons, mais liseré de bronze. Il a des pétales vieux rose, et des sépales lavande clair cernés du vieux rose des pétales. HALO IN CREAM (Niswonger 92) est le premier de la seconde génération, celle qui provient des trois variétés de 1989. C’est une nouvelle coloration du type Joyce Terry. Cette fois la couleur fondamentale est un jaune crémeux qui recouvre les pétales et entoure les sépales d’un fin liseré. Au plan des couleurs comme à celui de la plante, c’est une réussite. HALO IN GOLD (Niswonger 92) complète la deuxième série. Ce n’est qu’une version plus sombre du précédent et la fleur me semble de moins bonne tenue. L’un et l’autre, frères de semis, descendent de HALO IN YELLOW auquel a été apporté la teinte plus soutenue de PEACH BAND (Rudolph 83).

L’arrivage suivant est composé lui aussi de trois iris. Ils ont été enregistrés en 1998, soit neuf ans après les premiers. Dire qu’ils apportent vraiment du nouveau serait exagéré. Ce ne sont que des déclinaisons des précédents, un peu comme le remake un peu plat d’un film qu’on a bien aimé. HALO IN BURGUNDY et HALO IN PEARL, qui sont frères de semis, reproduisent l’effet obtenu avec HALO IN ROSEWOOD, à peu de choses près. Ils ont hérité de la jolie forme des fleurs de leur « mère », HALO IN CREAM, ce qui fait leur charme. La couleur de base du premier est un vieux rose assez soutenu, avec des sépales mauves entourés de vieux rose. Pour le second on peut parler de rose bruyère et de blanc perle (d’où le nom). C’est tout. Celui qui diffère un peu est HALO IN PEACH. Comme on peut s’y attendre sa couleur de base est un rose pèche et le halo pèche se place autour de sépales bien blancs. Au point de vue de la forme, disons que la fleur est plutôt raide et un peu vieillotte. Il a pour origines à la fois HALO IN ROSEWOOD et HALO IN YELLOW, associés à PEACH BAND déjà cité et au bicolore NEFERTITI’S DAUGHTER (Niswonger 91) qui allie le rose, le gris et… un liseré vieux rose.

On aurait pu imaginer que Dave Niswonger allait continuer son travail car toutes les couleurs voisines du jaune n’ont pas été approchées : les tons mordorés – ambre, miel, cannelle… - les jaunes tendant vers le vert – vanille, anis, chartreuse… - ainsi que les bruns. Il a cependant arrêté son expérience car il n’avait plus rien à prouver. Sauf à continuer de se répéter, ce qui n’aurait eu aucun intérêt, ni pour l’obtenteur, ni pour la communauté des iris. Il faut néanmoins saluer la performance d’hybrideur que représente cette série de neuf variétés. Niswonger est un grand professionnel qui possède admirablement les lois de la génétique et les règles de l’hybridation. Comme un musicien classique démontre son habileté en développant des variations sur un thème donné, il a nous a offert une intéressante et jolie musique florale.
RÉCRÉATION

Voici une liste de cinq variétés obtenues par Joë Ghio. Devinez quel est leur point commun.

CUTTING EDGE
HIGHNESS
JUSTMARRIED
ROMANTIC MOOD
WINNING EDGE
RÉCRÉATION ( réponses)

Ces variétés sont les seuls iris jaunes à avoir obtenu la Dykes Medal.

4.11.05

LES FRANÇAIS ET LES IRIS

Si l’on en juge par le nombre de nouvelles variétés d’iris qui sont enregistrées par des amateurs français depuis quelques années, jamais l’iridophilie ne s’est aussi bien portée dans notre pays. Pour confirmer cette impression, il n’est que de voir le nombre de nouveaux lecteurs de ce blogue et la quantité de messages échangés sur le forum de discussion Iris.fr. alors que l’ancien forum, Parlons-Iris, n’avait eu aucun succès. Pourtant la SFIB, l’association qui devrait fédérer tous les amateurs français, traverse une crise majeure : nombre d’adhérents en baisse constante, absence de renouvellement de ses dirigeants, par défaut de candidatures, assemblée générale en présence d’un nombre minimal de membres, impossibilité matérielle de maintenir la parution trimestrielle du bulletin, Iris & Bulbeuses… La réussite de l’organisation de la grande compétition Franciris 2005 cache en réalité une désaffection profonde des nouveaux amateurs d’iris pour toute structure trop formelle, dont l’organisation reste figée et dont les activités, peu nombreuses, faute de bonnes volontés, se cantonnent à des manifestations plutôt élitistes et où les iris n’ont, en général, qu’une place accessoire. La question de la survie en l’état de la SFIB a même été posée lors de l’assemblée générale de cette année. Mais personne n’a osé prendre la décision d’un sabordage qui pourrait prendre la forme d’une dissolution de l’association suivie de la création d’une section « Iris » au sein de la SNHF. La SFIB va donc continuer, avec pour seule réelle perspective l’organisation, et, souhaitons-le, le succès de Franciris 2007. Mais cette manifestation reste assujettie à l’intérêt en terme d’image qu’en tire Tecomah, l’école qui l’accueille et lui assure son rayonnement… L’avenir paraît donc bien morose. Mais l’iridophilie française est bien vivante, et les amateurs d’aujourd’hui, souvent jeunes, se tournent apparemment vers Internet pour chercher des informations et tisser des liens.

Je voudrais qu’Irisenligne leur fournisse une bonne part de ce qui leur manque.
BAPTÊME

Ce n’est pas évident de donner un nom de baptême à une nouvelle variété. A plusieurs reprises ce sujet à été abordé dans ces chroniques, mais cette fois il est prévu de faire le tour complet de la question.

Bien sûr les règles ont évolué au cours du temps, à la fois pour éviter des abus et pour ouvrir un peu plus l’éventail des possibilités, car il faut pouvoir donner un nom nouveau alors que des milliers ont déjà été utilisés. Les règles sont celles de la Nomenclature Internationale des Plantes Cultivées. On va les examiner une à une et voir quelles difficultés peuvent apparaître dans leur application.

1) Les noms de personnes.
Pour que le nom d’une personne soit donné à un iris, il faut soit que cette personne soit décédée depuis plus de dix ans, soit qu’elle ou ses ayants droit ait donné une autorisation écrite. Pour Vitali Gordodelov, il n’y a donc eu aucun problème pour qu’il choisisse le nom de GRAF TOLSTOY (1976) pour l’une de ses nombreuses obtentions. En revanche Lawrence Ransom a du demander à la dédicataire une autorisation pour donner un l’un de ses cultivars le nom de GLADYS CLARKE (2000). Mais il n’est pas possible à un mineur de donner cette autorisation ; alors on triche un peu. Richard Cayeux a-t-il voulu honorer l’une de ses filles ? Il a été obligé de baptiser la variété prévue pour cela SIXTINE C.(94). Le C est là pour Cayeux, évidemment.

2) Les titres.
Il ne serait plus possible aujourd’hui d’enregistrer MADAME FRANÇOIS DEBAT (Cayeux 57), mais il n’y a pas eu d’obstacle à ce que le nom de DOCTOR NOLAN HENDERSON (Hedgecock 2000) soit attribué. Parce que ce ne sont que les titres M. Mme, Melle etc.. qui sont interdits, en quelque langue que ce soit.

3) Nombres et symboles
Les choses se compliquent un peu à ce niveau. En effet les symboles, nombres, signes de ponctuation ou abréviations sont interdits, mais seulement s’ils ne sont pas essentiels pour le sens du nom. Ainsi R. Cayeux a-t-il eu le droit de donner le nom de TROIS MOUSQUETAIRES à l’une de ses dernières obtentions (2004) parce qu’il s’agit pratiquement d’une expression dont les éléments sont inséparables. De même rien ne s’est opposé à ce que Joyce Meek choisisse P.T. BARNUM (79) car les initiales sont partie intégrante du nom. Mais on entre là dans le domaine de l’interprétation donnée à la règle par le « registrar » de l’AIS.

4) L’article
Là encore le dernier mot restera au « registrar » car si un nom commençant par un article (dans n’importe quelle langue) est en principe interdit, il sera tout de même accepté si cet article est « nécessaire » dans la langue en question. LA BELLE AUDE (Ségui 82) a été retenu, mais ce n’était pas évident. En fait l’opposition que le « registrar » pourrait mettre tient à sa capacité de connaître ce qui, dans la langue considérée est nécessaire ou non, et il n’est pas forcément polyglotte, surtout lorsque, avec la mondialisation de l’extension de l’iris, des langues « exotiques » sont utilisées (aux USA, qui parle le breton, le basque, l’espéranto ou l’ouzbek ?) Des anomalies apparaîtront nécessairement, mais elles ne sont pas graves à ce niveau.

5) La langue
La seule langue interdite est le latin, pour cause de confusion possible avec les noms botaniques. Toutes les autres langues sont admises. Cela peut devenir un vrai casse-tête car on baptise des iris dans des pays chaque année plus nombreux. Une autre règle précise qu’un nom déjà utilisé dans une autre langue ne peut pas être repris après traduction. Mais comment savoir ce que veut dire tel ou tel nom dans une langue dont le « registrar » n’a aucune connaissance ? Il existe déjà des doublons en ce domaine. Ainsi Lech Komarnicki n’aurait pas du être autorisé à baptiser un iris BIALA NOC (97) parce qu’en polonais ce nom veut dire « nuit blanche », et que le nom de NUIT BLANCHE a été accordé à Pierre Anfosso en 1979. Enfin, pas plus qu’un nom identique à la langue près, n’est permise l’infime variation d’un nom déjà donné. Mais cette règle subit ou risque de subir les mêmes entorses que la précédente, pour les mêmes raisons. Il existe un moyen d’éviter ces malentendus et ces risques de confusion : que le nom proposé soit présenté à l’enregistrement à la fois dans la langue choisie et dans une langue commune, qui, pour moi, devrait être l’espéranto, mais qui pourrait être, plus vraisemblablement, l’américain. C’est une suggestion que je vais d’ailleurs faire à l’AIS.

6) Les mots et les lettres
Jusqu’à une époque récente, les noms composés de plus de trois mots étaient interdits. Il y a seulement quelques années qu’on est passé à quatre mots pour un nom. Dans ces conditions l’appellation PRINCESSE CAROLINE DE MONACO (Cayeux 97) est tout à fait légale. Ce nom à rallonge respecte également la limite des trente lettres pour un même nom. La règle des quatre mots vient en aide aux langues qui, comme le français, font usage de prépositions et d’articles ; auparavant, par exemple un nom comme COURONNE DE LA MARIÉE n’aurait pas été admissible, alors que les Schreiner ont eu la possibilité de nommer un BRIDAL CROWN (81). Les langues qui se passent de prépositions et les langues agglutinantes étaient outrageusement avantagées, notamment l’anglais ou son cousin l’américain.

7) Les noms d’espèces
Autre interdiction, les noms qui contiendraient le mot « iris » ou tout autre mot pouvant désigner une espèce végétale, notamment celles du genre « Iris ». C’est aussi pour éviter les confusions avec les noms botaniques.

8) L’ego de l’hybrideur
La règle suivante concerne essentiellement les obtenteurs de langue anglaise (ou américaine, évidemment). Il s’agit d’empêcher une appropriation excessive ou mégalomaniaque en utilisant la forme progressive (celle qui fait référence au génitif des langues saxonnes, avec un ‘ en fin de mot, suivi d’un s). Dans cet ordre d’idée, le nom de SCHORTMAN'S GARNET RUFFLES (Schortman 81) me semble en infraction à la règle puisque le nom de l’obtenteur en personne est à la forme progressive. En revanche le nom de PANDORA'S PURPLE (Ensminger 81) ne pose pas de problème car la belle Pandore a pu avoir une mauvaise idée, mais elle n’a jamais hybridé le moindre iris ! La règle suivante est dans le même ordre d’idée : pas d’exagération dans les qualités prêtées à la variété dénommée. LE MEILLEUR DE TOUS est un nom qui serait rejeté, à juste titre. Il est également interdit de choisir comme nom un adjectif, seul, lorsque celui-ci peut être considéré comme désignant une caractéristique de la plante : FRISÉ serait rejeté, FRISOUNETTE (Ségui 98) a été normalement admis.

9) Les noms oubliés
Des noms déjà donnés peuvent être tombés en désuétude, ou bien la plante baptisée a disparu. Dans le premier cas, le nom reste inutilisable sauf si celui qui veut s’en servir à son tour obtient la permission de celui qui a été le premier utilisateur. C’est contraignant, mais justifié. Dans l’autre cas, pour une reprise d’un nom déjà donné, il faut s’entourer de précautions, en particulier il faut s’assurer auprès du premier dénominateur que l’iris n’a pas été distribué et qu’il n’a pas été utilisé en hybridation pour une variété elle-même enregistrée. Toujours la même précaution pour éviter, cette fois, les erreurs de paternité.

On voit que donner un nom à une nouvelle variété n’est pas une affaire simple. Heureusement l’imagination humaine n’a pas de limites et les hybrideurs imaginatifs n’ont pas à se faire de soucis.
QUAND FLEURISSENT LES SEMIS

Dans son dernier catalogue, Keith Keppel donne quelques conseils aux apprentis hybrideurs. Venant d’une sommité comme Keppel, ces conseils doivent être considérés avec le plus grand sérieux. Je sais que de nombreux lecteurs de ce blogue s’amusent à hybrider. Ce qui suit devrait les intéresser.

« A mon catalogue d’il y a deux ans, j’avais ajouté une page expliquant comment réaliser soi-même des semis, pour apprendre à bien faire et pour en tirer du plaisir. Comme au moins quelques lecteurs avaient apprécié cette page, j’ai pensé, cette année, à continuer la discussion.

Commençons par rappeler quelques points. D’abord, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Si vous commencez avec quelque chose de médiocre qualité, vous pouvez compter que vous n’obtiendrez que de la qualité médiocre à la génération suivante. Utilisez ce que vous trouverez de mieux qui corresponde à vos objectifs. Cela veut dire en particulier des variétés qui poussent bien, qui ont une bonne résistance aux maladies, qui sont saines, avec un joli feuillage, qui ont un nombre de pousses raisonnable, dont le branchement est capable de maintenir les fleurs au-dessus du feuillage et suffisamment écartées pour qu’elles ne soient pas serrées, avec des tiges suffisamment fortes pour qu’elles ne versent pas. Et bien sûr, que les fleurs soient en nombre, en taille et en forme qui vaillent la peine. Après tout combien y a-t-il de variétés d’iris cultivées uniquement pour leur feuillage ?

La couleur est le facteur le plus souple avec lequel on ait à travailler. Une planche de semis peut comprendre des roses, des jaunes, des crème, des blancs, de même que des mauves et des violets. Tout cela côte à côte. Mais la couleur ne sert à rien si les semis ne possèdent pas les qualités de base énoncées ci-dessus : ils ne sont pas prêts pour une carrière commerciale. (D’accord, on aimerait découvrir une touffe à fleurs rouge pompier avec de fortes tiges, après tout, il y a des exceptions à toute règle !)

Les grands iris d’aujourd’hui se trouvent à environ vingt-cinq générations des espèces de départ, et ils contiennent du matériel génétique issu de plusieurs espèces différentes. Ils sont aussi tétraploïdes, ce qui signifie que les combinaisons génétiques possibles quand on effectue un croisement sont incompréhensibles pour la plupart d’entre nous. Il y a tellement de facteurs différents, chacun d’entre eux pouvant intervenir simultanément, qu’il n’y a pas deux semis qui soient exactement semblables, même s’ils peuvent paraître identiques.

Alors, quel sera votre point de départ ? Cela dépend de ce que vous voulez obtenir. Si vous voulez simplement quelque jolie fleur de votre propre fabrication, croisez les meilleurs variétés (en assortissant les couleurs) et attendez les semis à fleurir. Mais si vous êtes curieux et aventurier, choisissez le but que vous voulez atteindre, prenez les moyens qu’il faut pour y parvenir (comptez un peu aussi avec la chance !). Un jaune à barbe rouge feu ? Un plicata noir et blanc à barbe mandarine ? Un bicolore inversé, brun sur blanc, avec des éperons ? Attention : vous n’atteindrez peut-être pas le but que vous visez, mais vous découvrirez des choses intéressantes en cours de route. Souventefois les semis vous feront prendre la tangente, vous suggérant de nouvelles routes à suivre, vers des destinations que vous n’aviez pas imaginées au départ.

Il est important d’interpréter ce que vous voyez. Il y a deux sortes de pigments de base. Les teintes froides, du bleu au violet-noir en passant par le mauve et le rose orchidée, proviennent de pigments solubles dans l’eau. Les teintes chaudes (crème, jaune, orange, rose) sont solubles dans les corps gras. Elles ne se mélangent pas et elles sont contrôlées par des séries de gènes différents. Par exemple, le modèle plicata est un modèle « froid » ; le modèle « Joyce Terry » ( pétales jaunes, sépales blancs liserés de jaune) est « chaud ». Quand un plicata bleu est combiné à un unicolore jaune, vous pouvez obtenir un plicata brunâtre sur fond jaune. Remplacez l’unicolore jaune par un jaune et blanc du modèle « Joyce Terry » et vous aurez un plicata brun sur fond blanc ( parce que seule la partie jaune de la fleur aura été couverte par le dessin plicata bleu). Et si vous utilisez un amoena jaune (pétales blancs, sépales jaunes) avec le même plicata bleu, vous verrez des pétales plicata bleu et des sépales jaunes bordés de dessins plicatas brunâtres.

Pour visualiser quelles teintes doivent être mariées pour obtenir un effet de couleur différent, rien ne vaut un plicata à fond coloré. A peu près tous les plicatas ont au moins un fond blanc auprès des barbes, même si la couleur de fond est le crème, le jaune, le rose, le rose saumon, l’orange ou n’importe quel ton chaud. Faites attention aux marques plicatas sur les épaules et près de la barbe, là où le fond est blanc. Ensuite regardez à côté, là où le fond coloré apparaît, et vous remarquerez que la couleur du plicata change. C’est la conséquence du mélange visuel des deux types de pigments, qui nous permet de voir des couleurs qui n’existent pas vraiment. Dans la variété CARAMBA, les pointillés violacés sur le fond blanc paraissent d’un brun café dès que le fond devient jaune. Examinez d’autres plicatas pour voir les différentes combinaisons. Vous voulez du rouge ? Cela ne sera pas le rouge pompier que vous espérez, mais sachez que les meilleurs iris « rouges » résultent de la combinaison d’un revêtement de violet rosé sombre sur un fond d’un jaune d’or brillant.

Alors, maintenant, à vous de jouer ! »
RÉCRÉATION

Voici une liste de cinq variétés qui, pour une raison ou une autre, ont toutes eu un moment de célébrité. Devinez quel est leur point commun.

DEBBY RAIDON
NEW MOON
OLA KALA
SPUN GOLD
TRULY YOURS
RÉCRÉATION ( réponses)

Ces variétés descendent toutes du fameux brun TOBACCO ROAD.