Rien que pour les grands iris, de 1940 à 2000, il a trouvé onze variétés qui ont joué de malheur. Nous allons reprendre ici cet inventaire pour la perspicacité de son analyse.
Cela commence avec ‘Snow Flurry’ (Rees, 1939), dont chacun sait qu’il a été injustement sous-estimé, voire même ignoré, alors qu’on s’accorde maintenant pour reconnaître qu’il a été un élément majeur de l’évolution de l’horticulture des iris. Perry Dyer fait le constat que « si aujourd’hui un cultivar présente des ondulations, il y a toutes les chances pour que son lignage remonte à ‘Snow Flurry’. »
Le rose ‘Ballerina’ (David Hall, 1951) est considéré comme l’un des meilleurs roses et le fait qu’il n’ait pas reçu la DM est attribué à ce qu’il est de la même lignée que ‘Cherie’, lequel a été récompensé dans les moments où ‘Ballerina’ aurait pu l’être. Dyer dit de lui : « Pour moi, ‘Ballerina’ était le meilleur en performances. Quand vous voyez ces roses voluptueux, richement ondulés, obtenus aujourd’hui par Joë Ghio, le plus souvent leur héritage fait appel au travail de D. Hall. »
Les variétés du modèle « Emma Cook » sont à la mode : Le vainqueur de la DM 2007, ‘Queen’s Circle’ (Kerr, 1999), et celui du dernier Florin d’Or, ‘Vento di Maggio » (Bianco, 2012) sont là pour le prouver. ‘Emma Cook’ (Cook, 1959), avec sa fleur blanche et son liseré bleu sur les sépales, a été suivi de multiples associations du même genre, dans toutes les couleurs. S’il n’a pas reçu la DM, c’est peut-être parce que son obtenteur avait déjà placé à ce niveau trois de ses variétés entre 1955 et 1964…
Perry Dyer fait de ‘Cup Race’ (Buttrick, 1963) la victime de la compétition entre les obtentions originaires de la Côte Est et celles de la Côte Ouest. Il explique qu’à l’époque ‘Cup Race’, originaire de la Nouvelle Angleterre, s’est trouvé en concurrence avec ‘Winter Olympics’ (Brown O., 1963) et que celui-ci a eu une bien meilleure distribution, donc a été vu par beaucoup plus de juges. Dyer admet que « la distribution est la clef pour avoir des chances dans le système américain des récompenses. »
Nathan Rudolph, l’obtenteur de ‘Lemon Mist’ (1972, fait partie, comme dit Perry Dyer, de la bande de Chicago, où l’on trouve aussi Dave Hall, et Orville Fay. Ces trois obtenteurs se plaçaient parmi les meilleurs de leur époque et ont récolté cinq DM en 15 ans, dont une pour ‘Pink Taffeta’ (Rudolph, 1968). Il est probable que les juges, au moment d’apprécier ‘Lemon Mist’, même si c’est la meilleure variété de Nate Rudolph, n’ont pas voulu ajouter une nouvelle récompense au palmarès des gens de Chicago…
‘Country Manor’ (Eleanor Kegerise, 1973) est un autre produit de la Côte Est. Il a très certainement souffert de ne pas être entré d’emblée au catalogue d’un grand pépiniériste (son obtentrice s’est chargée elle-même de sa commercialisation). De ce fait les juges ne l’ont sans doute pas vu assez souvent et sont passés à côté d’une variété exceptionnelle, d’un blanc crème remarquable.
Ce n’est pas à un manque de notoriété que Perry Dyer attribue l’échec de ‘Going my Way’ (Gibson, 1972), mais au fait que la récompense suprême a été attribuée dans la même période à ‘Kilt Lilt’ (Gibson, 1970). En tout cas les juges, en l’occurrence, ont oublié une variété qui, commercialement, a été un succès considérable, au demeurant bien mérité.
Une autre variété que Dyer regrette de ne pas avoir vu récompensée à sa juste valeur, c’es ‘Joyce Terry’ (Muhlestein, 1974). Il est vrai que cet iris a atteint un point de célébrité tel qu’on cite son nom quand on veut parler d’un iris aux pétales jaunes et aux sépales blancs bordés du jaune des pétales. Cependant il n’y a de regret à avoir que s’il y a eu cabale ou tricherie. Il n’y a aucune raison que cela soit le cas en ce qui concerne ‘Joyce Terry’ : la compétition a été rude et comme il ne peut y avoir qu’un vainqueur…
Quand Dyer avance le nom de ‘Holy Night’ K. Mohr, 1983) parmi ceux que le destin n’a pas gâté, cela m’étonne un peu. Il est vrai que ce ‘Holy Night’, n’a pas été bien distribué en Europe et qu’on ne le connaît guère. C’est sans doute pourquoi je ne partage pas l’avis d’un bon connaisseur comme Perry Dyer à propos de cette variété.
En revanche je suis bien de son avis au sujet de ‘Touche’ (Hamblen, 1969) qu’il cite parmi les mal-aimés des juges. D’une manière plus générale j’estime que Melba Hamblen n’a pas été récompensée comme elle le méritait. Plusieurs de ses iris ont tutoyé la DM, notamment ‘Extravagant’ (1983) en 1991, mais la première marche du podium est allé à d’autres. ‘Touche’ fait partie des variétés qui pouvaient prétendre à la plus haute récompense. Dyer le décrit très bien : « une combinaison riche en couleur avec des pétales rose-abricot doux et des sépales entre lilas et lavande, complétée d’une barbe rose crevette. » Et quand on connaît la descendance de ‘Touche’, on peut déplorer la malchance de Madame Hamblen.
La dernière variété à faire l’objet d’un commentaire compatissant se nomme ‘Rhonda Fleming’ (Mullin, 1993). Dyer laisse entendre que la rigueur de Ron Mullin envers ses propres obtentions et sa profonde discrétion ont desservi le destin de cette première introduction qui est pourtant un coup de maître.
Quoi qu’on puisse dire, et si les échecs des variétés ci-dessus sont regrettables, il faut admettre le fait qu’une compétition qui ne désigne qu’un seul vainqueur fait nécessairement des malheureux. Choisir entre deux compétiteurs également valeureux laisse forcément beaucoup de regrets pour celui qui n’a pas été retenu.
Illustrations :
‘Ballerina’
‘Cup Race’
‘Holy Night’
‘Rhonda Fleming’
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