‘TIPHAINE FRANÇOIS’
C’était, je crois, en 1999, au temps où Luc Bourdillon dirigeait en double attelage avec son frère l’entreprise familiale. Il m’avait demandé de venir à Soings en Sologne pour que je lui donne mon avis sur les semis qu’il avait réalisés et qu’il comptait enregistrer et commercialiser, avant une dernière sélection. Je suis donc allé à cette pépinière que je connais depuis mes débuts dans le monde des iris et où j’ai sympathisé avec Michel Bourdillon et son épouse. Les iris en question étaient plantés dans un carré situé à gauche en arrivant dans la propriété, le long de l’allée principale. Il y avait dans ce carré un grand nombre de variétés en fleur et avec Luc nous avons arpenté le terrain en examinant une par une les nombreuses touffes pour apprécier les qualités et les défauts des unes et des autres. Nous étions en général d’accord et c’est après cette sélection ultime qu’ont été commercialisés les iris « maison » qui font aujourd’hui partie du fond de commerce de la famille Bourdillon. Malheureusement, pour des raisons qui m’échappent, Pascal Bourdillon n’a pas jugé bon de faire enregistrer ce patrimoine lequel demeure donc inconnu au bataillon des iris, même si, cette année, les pedigrees de chacun figurent au catalogue.
Ce n’est pas le cas des occupants d’une autre partie du carré que j’ai visité. Comme je demandais à Luc de quoi il s’agissait, il m’a répondu que c’était des variétés obtenues par un ami de son père, Jean-Jacques François, et qui allaient être commercialisés sous peu. Il y avait dans cette bordure des plantes fort jolies (et d’autres plutôt banales, il faut dire), et l’une d’elles a retenu mon attention. Il s’agissait de ‘Tiphaine François’ (JJ. François, 2000).
De toute sa carrière d’hybrideur, Jean-Jacques François n’a enregistré que onze de ses obtentions. Je lui en connais au moins quatorze auxquelles il a donné un nom, mais trois elles sont restées dans l’incognito. Elles ont été enregistrées en trois groupes, bien que leur origine soit à peu près de la même époque : 3 variétés en 1998, 6 en 2000 et les 2 dernières en 2002. De cette production restreinte, je ne retiendrai que deux ou trois iris qui se situent dans la moyenne de qualité des variétés de leur époque, et surtout de ce ‘Tiphaine François’ qui s’installe sur la première marche du podium.
Il est décrit comme ceci : « S. white, base yellow, blue veining; style arms white to yellow, light violet on midrib; F. lavender blue, veined darker; beards orange yellow, violet white at end. » Soit, en français : « pétales blanc à base jaune et veines bleues et côtes violet clair ; bras du style blanc devenant jaune ; sépales bleu lavande avec des veines plus sombres ; barbes jaune orangé pointées de blanc violacé. » Autrement dit, un amoena bleu lavande. Ce qui fait la différence et le mérite de cette fleur française, ce sont ses amples ondulations et ses sépales larges. Le cœur un peu doré ajoute de la profondeur au coloris.
Comme c’est parfois le cas chez les obtenteurs amateurs, le pedigree déclaré manque de précision puisqu’on ne connaît que son côté maternel. Il s’agit du très beau bleu ‘Jean Hoffmeister’ (J. Gatty, 1982), descendant lui-même du célèbre ‘Five Star Admiral’ (Marsh, 1974).
‘Tiphaine François’, en plus de ses qualités propres, a pour moi valeur de souvenir. Souvenir d’une journée enrichissante, en compagnie d’un homme sensible et agréable, dont j’ai pu constater qu’il avait le sens des croisements fructueux, et qui aurait pu devenir un hybrideur reconnu si les aléas de la vie ne l’avait pas conduit à déserter le monde des iris, là où il avait sûrement une place toute trouvée.
Illustrations :
‘Tiphaine François’ (François, 2000)
‘Jean Hoffmeister’ (Gatty, 1982)
‘Five Star Admiral’ (Marsh, 1974)
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