Le 30 avril 1993 a disparu un homme dont la trace dans le monde des iris est indélébile : James Gordon Douglas. C’était un enfant de Nashville (Tennessee) ou il a passé l’essentiel de sa vie. Il a mené de front une activité de pharmacien, d’homme d’affaire et de passionné d’horticulture. Sous son impulsion, l’activité horticulturelle de la ville de Nashville, dès las années 20, ont fait connaître celle-ci à travers tous les Etats-Unis. Geddes Douglas était à la tête de tout cela, avec, entre autres, un rôle de commentateur des événements liés à l’horticulture sur la télévision régionale, de 1954 à 1969.
Bien avant la guerre, Nashville était déjà un endroit dont on parlait chez les amateurs d’iris. Certains hybrideurs de renom s’y étaient fait connaître, comme James Kirkland ou Clarence Connell, de même que Robert S. Sturtevant, le jeune frère de la grande obtentrice Grace Sturtevant, qui devait devenir rédacteur en chef du Bulletin de l’AIS. Pour un homme curieux de tout ce qui concerne les plantes, il était normal que Geddes Douglas se lance dans l’hybridation des iris. Il paraît qu’il a commencé en 1931, à 29 ans. En tout cas il a enregistré son premier iris en 1934. Son nom ? ‘Francesca’. Une variété dont le titre de noblesse est d’être à l’origine de ‘Titian Lady’ (Douglas, 1941), le premier iris blanc à barbes mandarine. Par la suite sont apparus ‘Amadine’ (1948), ‘Pagan Princess’ (1948), mais surtout ‘Extravaganza’ (1944). On s’accorde pour dire que cette variété n’a en elle-même aucun intérêt particulier si ce n’est d’être un catalyseur dans le but d’obtenir des amoenas de première qualité. De son croisement avec le fameux ‘Wabash’ sont nés deux jalons importants : ‘Gaylord’ (1949) et ‘Criterion’ (1950). ‘Bright Hour’ (1949) l’excellent amoena bleu, serait le fils de ‘Criterion’. ‘Headlines’ (Brummit, 1953), BDM en 1959, est issu du croisement (Extravaganza X Louise Blake), ce dernier étant un fils de ‘Wabash’. Paul Cook, au demeurant un ami intime de G. Douglas, allait ruiner l’intérêt de la souche ‘Extravaganza’ avec son ‘Progenitor’ et les descendants de celui-ci qui devaient marquer pour toujours le modèle amoena.
Mais l’amitié entre Douglas et Cook allait avoir une autre conséquence. Celle d’offrir à Geddes Douglas un nouveau champ d’expérimentation : celui des iris nains et en particulier des SDB. Travaillant dans les années 50 avec le matériel de Paul Cook, Geddes Douglas allait devenir le véritable créateur des SDB. C’est en portant le pollen des grands iris de Cook sur des I. pumila qu’il a obtenu les premiers « lilliputs », un nom qui devait rester à ces petits iris si décoratifs et si variés. Parmi ses premières obtentions dans ce nouveau domaine, il faut citer `Helen's Child' (1954), bleu clair, `Happy Thought' (1953), jaune soufre, `Pigmy Gold' (1953), jaune vif, ou `Dark Star’ (1954), violet pourpré. C’est ce rôle essentiel qui vaut au nom de Douglas de figurer dans le titre de la médaille qui récompense chaque année le meilleur SDB.
A côté de son travail d’hybrideur, Geddes Douglas s’est aussi fait remarquer par la qualité de ses écrits concernant l’hybridation. Plusieurs articles parus dans le Bulletin de l’AIS, dans les années 40 notamment, ont retenu l’attention pour leur sérieux et leur intérêt scientifique. D’ailleurs son intérêt pour la chose écrite devait l’amener, dès 1946, à devenir rédacteur en chef de la revue, fonction qu’il a exercée jusqu’en 1960.
Il se disait que G. Douglas possédait un petit livre où il avait noté des tas de renseignements qui ne se trouvaient pas dans les check-lists (parfois il est vrai celles-ci laissent véritablement le chercheur sur sa faim tant les informations enregistrées sont succinctes). Finalement, en 1980, ce précieux document a été fourni à l’AIS qui l’a confié à son conservateur Larry Harder. C’est la dernière collaboration de Geddes Douglas avec un univers auquel il a par ailleurs largement donné et qui lui garde son affectueuse admiration.