26.7.15

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Ça y est ! 

Iris au Trescols renaît ! Avec une jolie collection de nouveautés de toutes sortes où dominent néanmoins les arilbreds, Lawrence Ransom prend un nouveau départ qui va faire plaisir à tous ses fans et, en général, à tous les amateurs d'iris de grande qualité.

HOMMAGE AUX SCHREINER'S

La firme Schreiner est la pépinière d'iris la plus importante au monde, et cela dure depuis 1925. C'est Carlos Ayento, le responsable du jardin « Brighton Park » à Chicago qui a eu l'idée de réunir, autant que cela soit possible, une photo de toutes les variétés enregistrées par l'illustre famille. Bien sûr il y a des trous dans sa collection, surtout concernant les variétés les plus anciennes, mais telle qu'elle est, c'est un magnifique hommage. Nous reprendrons ici quelques-uns de ces clichés (et quelques autres, pour exprimer aux Schreiner's toute notre reconnaissance. 

 Douzième partie : Les années 2000/2004 


'Millennium Sunrise' (2000) (Rustler X (((Orange Beauty x (((Real Delight x Glittering Amber) x Orange Parade) x (Golden Ice x (Merry Belle x Glittering Amber)))) x Hula Girl) x (((((Amethyst Flame x Lavish Lady) x Arctic Flame) x White Taffeta) x semis Craig #57) x (Leisure Day x semis)))) 


'Midnight Majesty' (2001) ((Best Bet x ((Sailor's Dance x ((Pacific Panorama x Parisian Blue) x Sapphire Hills)) x semis) x Mystique)) X Hello Darkness) 


'Strange Brew' (2002) ((Fancy Brass sib, x Spanish Leather) X (Syncopation x Bohemian)) 


'Magical Glow' (2003) ((Fireside Glow x parent mâle de Avalon Sunset) X Good Show)

N'OUBLIONS PAS LES FONDAMENTAUX ! (Deuxième partie)

Dans un précédent texte a été abordée la revue des variétés fondamentales de la famille des grands iris. Elles étaient cinq, mais, au fur et à mesure que j'en faisais brièvement le portrait, je me suis rendu compte que certaines autres méritaient tout autant de ne pas sombrer dans l'oubli. C'est pourquoi je reviens aujourd'hui sur le sujet. C'est même dès le début que je me suis dit qu'il fallait aller au-delà des cinq variétés retenues. En effet peut-on parler de 'Whole Cloth' sans dire un mot de ses deux alter ego que sont 'Melodrama' et 'Emma Cook' ? En route, donc, pour un nouveau tour d'horizon.

 'Melodrama' et 'Emma Cook' ou les cousins indissociables. 

 Dans le but d'améliorer le coloris bleu dont il s'était fait une spécialité, Paul Cook a fait usage de son petit 'Progenitor'. Après plusieurs croisements et recroisements, la souche (Progenitor X Shining Waters) qui s'est révélée être un vrai trésor génétique, fut enfin mariée au rose orchidée 'Dreamcastle' (Cook 43). Le résultat : un iris agréablement ondulé, avec des pétales d’un bleu violacé clair qui va en s’assombrissant jusqu’au violet vif, sur les sépales. En prime ce semis était une plante de belle taille, bien branchue et avec de nombreux boutons. Il fut baptisé 'Melodrama' (Cook 56).

 Une autre série de croisements utilisant les mêmes géniteurs – et quelques autres – donna naissance à 'Emma Cook' (Cook, 1957) qui est le plus clair des deux : les pétales sont d’un blanc à peine bleuté, de même que les sépales qui comportent un large liseré en dégradé de bleu s’intensifiant vers le bord (l’effet d’inhibition généré par 'Progenitor' s’est étendu largement sur les sépales), il est légèrement ondulé.

 'Melodrama' est à l’origine d’une foule d’iris bitones, bicolores ou plicatas, soit en ligne directe, soit par l’intermédiaire de ses descendants. Il existe plus de 220 variétés dans le pedigree desquelles figure le nom de 'Melodrama', ce qui laisse supposer que des centaines (voire des milliers) d'iris portent ses gènes. Quant à 'Emma Cook', il est présent dans le pedigree de nombreuses variétés très diverses, dont l'inépuisable 'Condottiere' (Cayeux, 1978) dont il a été question la dernière fois, mais plus particulièrement dans celles qui, comme lui, comportent une large inhibition de la couleur sur les sépales, si bien qu'on parle couramment des fleurs du modèle Emma Cook.

 En fait, parmi les variétés basiques, peut-être aurait-il été plus justifié de citer 'Progenitor' puisque c'est celle-là qui a apporté la révolution. Mais j'ai trouvé préférable de distinguer ses trois descendants principaux, chacun ayant eu une lignée distincte.

 'Pinnacle' et 'Sunset Snows', ou l'apport de Nouvelle-Zélande. 

Emily Jean Stevens est une dame néo-zélandaise à qui le monde des iris doit beaucoup. C'est elle qui a créé les deux variétés dont il va être question maintenant parce qu'elles ont constitué un apport magistral dans la recherche des amoenas jaunes et roses.

 Le premier, 'Pinnacle' (1945), est resté très longtemps la référence en matière d’amoena jaune. Son pedigree s'écrit (Magnolia X (Gudrun x (Lady Morvyth x Rangatira))), ce qui ne dit rien puisque, seul parmi ses antécédents, le blanc 'Gudrun' (Dykes, 1934) a atteint une certaine célébrité en enlevant la Médaille de Dykes britannique dès 1931. Des trois autres on n'a pas de descriptions officielles. Toujours est-il que son introduction sur le marché américain par la famille Schreiner a permis son utilisation en hybridation par de nombreux obtenteurs à la recherche d'amoenas autres que blanc/bleu. Parmi ses enfants ou petits-enfants on trouve, certes, des amoenas jaunes, comme 'Serene Duet' (D. Palmer, 1976), mais aussi de nombreux amoenas pèche, rose ou orangés, comme 'Delicato' (Schreiner, 1972), obtenus en le croisant avec une variété rose. Le second, 'Sunset Snows' (1963), dérive de 'Youthful Charm' (Stevens, 1961) lui même provenant d'une base amoena jaune associée à une variété rose.

'Sunset Snows' est un amoena rose pas franchement pur, mais faisant faire un grand pas en avant dans une matière réputée immensément difficile. Il a donné naissance notamment à 'Ambrosia Delight' (Niswonger, 1982) et 'Festive Skirt' (Hutchings, 1973). Il se trouve aussi derrière 'Sugar Magnolia' (Schreiner, 1998). Mais surtout il est la base de l'immense travail, pas encore achevé, de Barry Blyth sur ce sujet qui lui tient tant à cœur.

 'Mary Randall' ou comment voir la vie en rose 

 À comparer les images de 'Cherie' (D. Hall, 1948 – DM 1951) et de 'Mary Randall' (O. Fay, 1950 – DM 1954) on se dit que l'hybridation des iris roses a avancé à pas de géants. Le premier a une forme simple, basique, et une couleur un peu fade ; le second est le type parfait de l'iris classique, d'un rose franc et soutenu. Dès son apparition, tout le monde des iris s’est rendu compte qu’un grand pas avait été franchi dans les progrès de l’hybridation. Il se présente en fait comme un iris rose vif, infus de crème, avec des barbes oranges. Mais quand on dit « rose », il s’agit de ce rose que les Américains appellent « pink » et que l’on n’a pas de mot équivalent pour définir. Un rose bleuté, à qui l'on peut prêter le nom de rose orchidée. Il a fleuri pour la première fois au printemps de 1948. Son pedigree se décline : (New Horizon X (Pink Cameo x Cherie)). A son propos son obtenteur a écrit quelques années plus tard : « J’ai su aussitôt que j’ai vu la première fleur, que cette plante était exactement celle que je voulais… combinée avec 'Snow Flurry', 'Pink Cameo', 'Fleeta' et 'Native Dancer', elle est à l’origine de tous mes bleu-mauve à barbes rouges…elle est porteuse d’assez de gènes rouges pour produire de l’orange en la croisant avec des jaunes issus d’une lignée de roses. » Effectivement, dès la première génération on lui trouve des enfants dans ces différents coloris sans compter le blanc. Et avec le temps sa descendance directe s'est considérablement accrue, au point qu'on trouve sa trace dans le pedigree de 345 variétés enregistrées, ce qui est un des plus forts taux d'utilisation de tout l'irisdom. Ce qui veut dire qu'il ne doit pas se trouver beaucoup de variétés modernes qui ne compte pas 'Mary Randall' parmi leurs ancêtres.

 Il n'est pas exagéré de dire que 'Mary Randall' mérite bien sa place au firmament des variétés de base du monde des iris d’aujourd’hui, aux côtés de toutes ces merveilleuses variétés dont il est question dans cette chronique et celle qui l'a précédée. Il a fait voir la vie en rose à tant de monde !

 'Black Forest' ou le côté noir du rêve. 

 « Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve » (Charles Baudelaire : La Chevelure). 

 La plupart des iris noirs, ou tendant vers le noir, descendent aujourd’hui d’une variété de base qui se nomme 'Black Forest' (Schreiner 1945). Cette variété a partagé avec 'Sable' (Cook 1938) le titre de « l’iris noir », du fait de l’intensité de son coloris. 'Sable' s’est révélé être une sorte d’aboutissement, car ses descendants, hormis 'Sable Night' (Cook, 1950), n’ont pas manifesté un réel progrès par rapport à leur géniteur sauf en direction d’autres sortes d’iris foncés. En revanche 'Black Forest' a démontré un puissant avenir génétique qui a été utilisé plus de cent fois aussitôt après son apparition.

Le noir a toujours été une des couleurs favorites de la Firme Schreiner et en 2008, à propos de 'Raven Girl', le « noir » de l'année, on lit dans son catalogue que cette variété est qualifiée « d’aboutissement de la lignée vieille de 63 ans qui a commencé avec ‘Black Forest’ ». Sur les origines de ce ‘Black Forest’ lui-même, voici ce qui en est dit dans « The World of Irises » : « Les Schreiner ont croisé ‘The Black Douglas’ avec un semis sombre issu d’une lignée de rouges, et de ce croisement a résulté ‘Ethiop Queen’, introduit la même année que ‘Sable’ de Paul Cook. ‘Ethiop Queen’ croisé avec ‘Dymia’, a donné ‘Black Forest’, de taille un peu courte mais avec un ton de noir d’une profondeur inconnue chez les eupogons. » Les Schreiner ont tout de suite compris ce qu’ils pouvaient espérer de ce ‘Black Forest’. Ils en ont exploité habilement les aptitudes et furent suivis en cette voie par de nombreux obtenteurs.

C'est cette universalité qui place 'Black Forest' dans le peloton des variétés fondamentales car le rêve de Baudelaire s'est toujours vérifié.

 'Wild Jasmine' et 'Fancy Tales' ou les couleurs de l'étrange. 

 Ces deux variétés ont en commun d'être à l'origine de cultivars aux coloris hors des sentiers battus. 'Wild Jasmine' (Hamner 83) est un variegata-plicata avec des pétales jaune soutenu, couleur qui est aussi celle du fond des sépales, lesquels sont couverts d’un tissu brun-rouge, plus sombre au centre, alors que la couleur du fond, presque blanche sous les barbes, réapparaît en lisière. Ce fut une des variétés essentielles de la recherche de Richard Ernst qui en fit un usage intensif associé à 'Edna's Wish' (Gibson 83). 'Fancy Tales' (Shoop, 1980) se présente avec des pétales blancs et des sépales en dégradé rayé de mauve violacé avec des épaules pêche. Ils n'ont rien de commun. 'Wild Jasmine' vient de deux variegata-plicatas très proches l’un de l’autre et d’ailleurs l’un et l’autre descendants de 'Radiant Apogee' (Gibson 64), alors que 'Fancy Tales' et relié à 'Wine and Roses' (Hall, 1963) à travers plusieurs générations de semis riches en amoenas roses.

Ils sont à mettre l'un et l'autre dans la catégorie des iris fondamentaux pour être à la base de deux modèles apparus seulement au début des années 2000 mais qui ont suscité une rare émulation chez les hybrideurs. Il s'agit du modèle « distallata » et de son proche voisin qui n'a pas de nom de baptême mais que je définis comme « distallata + ». « Distallata » désigne des iris sur fond blanc (ou presque) s’agrémentant d’une couche centrale de couleur, qui peut être du jaune ou de l’orangé clair, à laquelle s’ajoutent de fines rayures sombres, partant de la barbe et s’étirant plus ou moins vers le bord. L'autre modèle a, d'origine, des pétales blancs finement ourlés de jaune primevère, et des sépales à fond blanc, légèrement poudré de grenat, bordés de jaune primevère, mais au fur et à mesure que le temps passe et que les croisements se multiplient, le jaune s'assombrit et la couleur vive du centre des sépales change et s'étale. Autrement dit la coloration de base est la même dans les deux cas mais ce qui n'est que fines rayures chez l'un devient beaucoup plus marqué et coloré chez l'autre. Au départ, c'est 'Prototype' (Ghio, 2000) qui a donné le coup d'envoi, suivi de 'Puccini' (Ghio, 1998) et de 'Quandary' (Keppel, 2001) avec la base 'Fancy Tales', tandis que 'Ring Around Rosie' (Ernst 2000) a lancé l'autre modèle en utilisant 'Wild Jasmine'. A partir de 2006, avec 'Wild Angel' (T. Johnson) le modèle distallata d'origine s'est rapproché du modèle distallata +, tandis que Roger Duncan, avec 'Arctic Burst' (2008) arrivait a un distallata + en partant de 'Puccini' ! Il ne restait plus qu'à mélanger le tout. C'est ce qui est arrivé avec 'Scatterbrain' (T. Johnson, 2008) qui est de Ring Around Rosie X Quandary.

 Désormais les deux origines risquent de se fondre dans un modèle intermédiaire, mais l'on ne sait pas si elles vont par ailleurs se maintenir. En tout cas 'Wild Jasmine' et 'Fancy Tales' auront bien mérité de figurer au Panthéon des iris.

Illustrations : 


 'Black Forest' 


'Fancy Tales' 


'Pinnacle' 


'Wild Jasmine'

17.7.15

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Moscou 2015

 Le concours d'iris de Moscou a abouti au podium ci-dessous :

1. Bratislavan Prince, Anton Mego, Slovaquie, 2010
2. Il Mare In Inverno, Lorena Montanari, Italie, 2010
3. Sumchanka, Svetlana Yakovchuk, Ukraine, 2011

Encore un beau succès pour Anton Mego, et Lorena Montanari, bien classés à Paris ce printemps.

HOMMAGE AUX SCHREINER'S

La firme Schreiner est la pépinière d'iris la plus importante au monde, et cela dure depuis 1925. C'est Carlos Ayento, le responsable du jardin « Brighton Park » à Chicago qui a eu l'idée de réunir, autant que cela soit possible, une photo de toutes les variétés enregistrées par l'illustre famille. Bien sûr il y a des trous dans sa collection, surtout concernant les variétés les plus anciennes, mais telle qu'elle est, c'est un magnifique hommage. Nous reprendrons ici quelques-uns de ces clichés (et quelques autres, pour exprimer aux Schreiner's toute notre reconnaissance.

 Onzième partie : Les années 1995/99 

 'Dreamsicle' (1995) (Cotton Club X Bright Fire) 


'Sheer Ecstasy' (1996) ((Enchanted World x Lorilee) X Mulled Wine) 


'Art Deco' (1997) (Momentum X semis) 


'Magical Encounter' (1999) (((Renaissance Faire x ((((Amethyst Flame x (Halolight x Savage)) x (Amethyst Flame x Silvertone)) x (Rippling Waters x (((((Chantilly x Midwest Gem) x Cherie) x (semis Lapham x (Chantilly x Midwest Gem))) x Pretty Carol) x semis Fay))) x Country Lilac)) x (Far Corners x Laurel Park)) X Dreamsicle)

N'OUBLIONS PAS LES FONDAMENTAUX !

Dans les sports d'équipe, football, rugby, les joueurs se laissent parfois aller, dans leur désir de bien faire, à compliquer leurs prestations jusqu'à perdre de vue les gestes de base et les règles du jeu. C'est alors que les entraîneurs, dans les vestiaires, les exhortent à revenir aux « fondamentaux ». C'est en effet en gardant à l'esprit les éléments essentiels que l'on obtient les meilleurs résultats. Dans le monde des iris il en est de même. Depuis les débuts de l'hybridation sont apparues certaines variétés qui se sont révélées être les bases du travail, ou être des étapes incontournables, des jalons qu'on ne peut pas négliger.

 Aujourd'hui nous allons en évoquer quelques unes, et dans un prochain article nous parlerons d'un certain nombre d'autres.

 'Snow Flurry' ou notre père à tous. 

Chacun a en mémoire l’histoire de Clara Rees qui a croisé 'Purissima' (Mohr-Mitchell, 1927), un tétraploïde blanc, avec le rose 'Thaïs' (F. Cayeux, 1926), et obtenu seulement deux graines. Il n’y a qu’une de ces deux graines qui a germé, mais le produit a dépassé toutes les espérances : Un iris blanc, tétraploïde, impeccablement coiffé, ondulé, bref une fleur parfaite. C'était en 1939. Le nom qui fut donné à cette merveille est 'Snow Flurry'. Ce n’est pas une plante très fertile, elle produit peu ou pas de pollen, mais heureusement elle se comporte en bonne génitrice et les enfants qu’elle a eus son tous formidables. Avec ce cultivar Madame Rees avait obtenu le plus fameux iris blanc des temps modernes. Tous les obtenteurs de l'époque ont voulu en disposer et l'on abondamment utilisé dans leurs croisements. Tous savaient que cette fleur parfaite, agrémentée de gracieuses ondulations, allait faire progresser les iris d'une façon considérable. Ils ne s'étaient pas trompés. 'Snow Flurry' est à l’origine d’une foule de descendants, dans un grand nombre de coloris. Parmi ceux-ci, au premier rang, on trouve de nombreuses variétés blanches de premier plan comme 'New Snow' (O. Fay, 1946), 'Tranquility' (O. Fay, 1950) ou 'Celestial Snow' (Reckamp, 1957), qui, toutes, reproduisent les qualités de 'Snow Flurry'. Mais le choix est aussi important parmi les fleurs bleues : 'Blue Sapphire' (Schreiner 53 – DM 58), bleu à barbes jaunes, 'Lord Baltimore' (Nearpass 69), néglecta bleu ou 'Champagne Music' (Fay 64), amoena bleu, qui a eu lui-même une abondante descendance. Parmi les autres coloris, le choix est aussi important. C'est ainsi que, de nos jours, il ne doit pas y avoir de nouvelle variété qui ne comporte dans ses gènes ceux de 'Snow Flurry'. Pour être fondamentale, cet variété l'a été de manière absolue.

 'Whole Cloth' ou l' origine des amoenas

Avec plus de 300 descendants au premier degré enregistrés, 'Whole Cloth' fait partie des variétés les plus utilisées en hybridation. La raison ? C'est à partir de celui-ci que l'on a découvert des iris amoenas fiables et faciles à obtenir. Auparavant, l'obtention de vrais iris amoenas (blanc/bleu) était un événement exceptionnel, comme ce fut le cas pour 'Wabash' (Williamson, 1936). Plusieurs spécialistes ont émis à ce sujet différentes hypothèses, mais cela n'a pas rendu le problème plus facile à résoudre. C'est seulement avec l'apparition de 'Whole Cloth' (Cook, 1956) qu'une solution pratique a été mise en œuvre.

 'Whole Cloth' fait partie de ce que j'ai appelé le tiercé gagnant de M. Cook. En recroisant un descendant direct de l'espèce I. reichenbachii, le petit 'Progenitor' avec le fameux 'Cahokia' (Faught, 1946), une des souches d'iris bleus, Paul Cook a obtenu un iris dont la couleur des pétales a été totalement inhibée, mais qui a conservé tout le bleu de ses sépales. 'Whole Cloth' est à l’origine d’un nombre incroyable d’iris de toutes sortes. On ne peut qu’en citer quelques-uns, en commençant par 'Miss Indiana' (Cook 61) qui reste l’un des plus brillants amoenas, avec une forme parfaite, et qui a eu lui-même une riche descendance. Les Français 'Cascadeur' (Cayeux 69) et 'Fantaisie' (Cayeux 68), les célèbres 'Latin Lover' (Shoop 69), 'Lilac Champagne' (Hamblen 65), 'Lord Baltimore' (Nearpass 69), 'Milestone' (Plough 65), 'Navajo Blanket' (Schreiner 78), et les exceptionnels 'Dialogue' (Ghio,  1973) et 'Mystique' (Ghio, 1975).

Whole Cloth est actuellement présent dans les gènes de pratiquement tous les iris amoenas.

 'Rippling Waters' ou l'ancêtre des iris modernes. 

 'Rippling Waters' (Orville Fay, 1961) a, plus encore que le précédent, marqué l'histoire des iris. On lui connaît aujourd'hui 367 descendants directs officiellement recensés. Autant dire que parmi les iris modernes il ne doit pas y en avoir beaucoup chez qui ses gènes ne sont pas présents. Il faut dire qu’il s’agit d’une plante proche de la perfection dans la forme, et riche d’un potentiel génétique qui n’a échappé à aucun des obtenteurs importants des années 60, 70, et même 80.Il faut dire qu’il s’agit d’une plante proche de la perfection dans la forme, et riche d’un potentiel génétique qui n’a échappé à aucun des obtenteurs importants. Du point de vue de la couleur, il s’agit d’un iris lilas, à barbes mandarine, ni spécialement original, ni spécialement spectaculaire, mais néanmoins un très belle fleur remarquée par tous les amateurs et couronnée de la Médaille de Dykes en 1966. Il descend de 'Native Dancer' (Fay, 1953), une variété issue elle-même du fameux 'Snow Flurry', et de 'May Hall' (Hall, 1952), un rose « flamant », avec des barbes mandarine, certes pas ondulé, mais portant les gènes pour cette particularité.

 Mis à toutes les sauces dans son pays d'origine, hors des Etats-Unis, 'Rippling Waters' a aussi été utilisé : par exemple en Grande Bretagne par Barry Dodsworth ('Bewick Swan', 1980) – BDM 85), et même dans le lointain Ouzbékistan par Adolf Volfovitch Moler qui en a obtenu plusieurs remarquables variétés comme 'Ikar', florin d’or à Florence en 1995. A noter que parmi ces descendants directs, si nombreux, il n'y a aucun iris français...


 'April Melody', ou la chanson des plicatas. 

Celui qui voudrait connaître les origines de ‘April Melody’ (J. Gibson, 1967) sera forcément déçu, et même Keith Keppel, qui est le détenteur des carnets de Jim Gibson, ne peut que très partiellement nous renseigner bien qu’il ait été l’un des plus ardents utilisateurs de cette variété dans son travail d’hybrideur. On sait que 'New Adventure’ y est associé à des semis où interviennent ‘Taholah’ (J. Gibson, 1956), ‘Ballerina’ (D. Hall , 1950) et ‘Happy Birthday’ (D. Hall, 1952). Le côté plicata est assuré par ‘Taholah’ et le côté rose à barbes mandarine par les variétés de David Hall. ‘April Melody’ est une des variétés les plus jolies qu’on puisse trouver dans les fraîches couleurs de rose bleuté. Les pétales sont d’un délicieux rose tendre, les sépales blancs sont cernés d’un plumetis de mauve améthyste, et les barbes mandarine réveillent l’ensemble. La fleur dans son ensemble est joliment formée, ondulée et frisée. Il a maintes fois été utilisé par Gibson lui même pour tout un pan de son travail sur les plicatas ; il a surtout fait partie du panel de base de Keppel. Il a eu pour compagnons dans l’aventure ‘Irma Melrose’ (DeForest, 1955), ‘Rococo’ (Schreiner, 1959), ‘Tea Apron’ (Sass, 1960) et ‘Osage Buff’ (Gibson, 1973). Dans tous les cas les pedigrees sont d’une évidente complexité.

 Le modèle plicata est propre aux iris. On le découvre dans les peintures de la Renaissance. C'est celui des tout premiers cultivars retenus par les pionniers de l'iridophilie, dès le deuxième tiers du XIXeme siècle. A côté des unicolores traditionnels il a représenté la fantaisie la plus répanduependant de nombreuses années. L'usage qui a été fait de ‘April Melody’ lui a donné un nouvel élan. A ce titre cette variété remarquable fait véritablement partie des pierres angulaires de l’hybridation des plicatas au même titre que les cultivars plus anciens comme ‘Sacramento’.

 'Condottiere' ou quand la France devance l'Amérique. 

Terminons ce premier tour d'horizon par le fabuleux 'Condottiere'. Fabuleux, parce qu’il fait partie de la vingtaine de variétés les plus utilisées en hybridation. Fabuleux aussi par la qualité de ses descendants et l’originalité de leurs coloris.

 'Condottiere' a été introduit par Jean Cayeux en 1978. C’est une grosse fleur en deux tons de bleu-mauve, avec une barbe rouge minium. Cette barbe, il la tient de sa « mère », 'Falbala' (Cayeux 78), qui la tient lui-même de ses grand-parents et arrière grands-parents. Quant à la teinte bleu-mauve, elle provient à la fois de 'Falbala' et de 'Triton' (Julander 62), une de ses « grands-mères ». Richard Cayeux, dans son livre « L’iris, une fleur royale » explique très bien comment, à partir d’iris amoena ('Whole Cloth') ou provenant de la même lignée ('Emma Cook'), on a obtenu ce néglecta aux capacités génétiques remarquables.

 L’une des aptitudes de 'Condottiere' est de transmettre à ses descendants ses deux caractéristiques essentielles, le modèle amoena (pétales blancs, sépales bleus) et la barbe rouge. A la Maison Cayeux elle fut mise à profit pour la nombreuse série des iris dits « tricolores » (bleu/blanc/rouge), mais aussi pour quelques autres, en particulier pour des néglectas ou bicolores à barbes rouges. Aux États-Unis 'Condottiere' a été utilisé fréquemment pour les barbes mandarines, notamment par le génial Monty Byers qui en a tiré ses plus énormes réussites ('Conjuration' (1988), 'Mezmerizer' (1990)...), mais aussi pour des variétés aussi diverses que 'Magic Kingdom' (1989), 'Starship' (1989) ou 'St Petersburg' ( 1990), et plusieurs autres. De très nombreux hybrideurs s'en sont servis pour bien autre chose, ce qui fait que l'on a là l’un des iris les plus importants du vingtième siècle.

Ce ne sont là que cinq variétés parmi celles dont il ne faut pas oublier le rôle dans l'histoire de l'hybridation. Un autre jour nous rappellerons l'importance d'un autre contingent de jalons essentiels.

 Illustrations : 


 'Snow Flurry' 


'Whole Cloth' 

'Rippling Waters' 


'April Melody' 


'Condottiere'

10.7.15

LA FLEUR DU MOIS

TASHKENT

C'est grâce à Sergueï Loktev, le fantasque hybrideur russe, que je suis entré en relation avec Adolf Vofovich-Moler. C'était en 1993 ou 94. Loktev lui-même m'avait fait parvenir selon des combines proprement soviétiques un certain nombre de variétés d'origine russe ou du voisinage, et j'étais très curieux d'accroître ma collection avec des variétés exotiques. Je suis donc entré en contact avec Adolf Volfovich-Moler, géophysicien russe en poste à Tashkent, en Ouzbékistan, et nous avons sympathisé. C'était un homme cordial mais qui considérait les Occidentaux comme des individus d'un moralité douteuse et uniquement préoccupés par leurs affaires ! J'en ai eu la démonstration quand il m'a parlé de ses glaïeuls. En effet, à côté des iris, il hybridait aussi les glaïeuls et, je dois dire, avec une surprenante réussite. Les variétés dont il m'a envoyé des photos étaient remarquables par l'originalité de leurs coloris et la richesse de leurs fleurs. Il m'a demandé si je voulais bien me faire son intermédiaire auprès des producteurs français de glaïeuls car il aurait bien aimé que ses variétés soit commercialisées à l'Ouest. Il m'a fait parvenir un lot de bulbes qui ont été mis en végétation chez Ernest Turc, la plus grande maison française de bulbes à fleurs. L'expérience, malheureusement, a tourné court car la Maison Turc s'est aperçue que les bulbes ouzbeks étaient atteint de virose, ce qui les rendaient impropres à la culture en France. Cette information transférée à Tashkent a eu pour effet de déclencher la colère de mon correspondant qui s'est imaginé que le refus qui lui était opposé n'était motivé que par de sombres intentions mercantiles...

Nous avons décidé d'échanger des rhizomes. Je lui ai fait envoyer par Lawrence Ransom un gros colis d'obtentions françaises. Il m'a fait parvenir, sans problèmes particuliers, toutes ses obtentions des années antérieures à 1995. Bien peu de chose, en vérité ! Il faut dire qu'au fin fond de l'Asie Centrale, fut-ce à l'heure de la perestroïka, se procurer des variétés d'iris relevait de l'aventure ! En fait, Volfovich ne disposait que de onze variétés différentes ! Et pas forcément de la première jeunesse ! Qu'on en juge :
'Babbling Brook' (Keppel, 1969), bleu ciel à barbes citron ;
'Broadway Star' (Schreiner, 1957), variegata miel/brun ;
'Buttercup Bower' (Tompkins, 1960), jaune à barbes blanches ;
'Dancer's Veil' (Hutchison, 1959), plicata à dessins mauve ;
'Mary Frances' (Gaulter, 1973), unicolore lavande :
'Pipes of Pan' (O. Brown, 1963), bicolore crème et pourpre ;
'Rippling Waters' (Fay, 1961), unicolore lilas, barbes mandarine ;
'Sable Night' (Cook, 1950), unicolore violet foncé
'Siva-Siva' (J. Gibson, 1962), plicata acajou ;
'Victoria Falls' (Schreiner, 1977), unicolore bleu ;
'Vitafire' (Schreiner, 1968), unicolore bordeaux.

Ce qu'il y a de plus extraordinaire, c'est qu'avec ce choix réduit de géniteurs, Volfovich ait obtenu des variétés, qui avouent leur âge, forcément, mais qui me paraissent dans l'ensemble parfaitement réussies, tant au point de vue horticole, qu'au point de vue botanique. Un bel exemple est ce 'Tashkent' dont on va parler maintenant.

Cette variété, obtenue en 1992, n'a pu être enregistrée qu'en 1995, en même temps que la première tournée des obtentions de leur hybrideur. Elle est issue du croisement (Rippling Rivers X Broadway Star) et se présente comme un variegata brillant, avec des pétales d'un beau jaune doré et des sépales brun-rouge très contrastés, qui en font une plante très spectaculaire au jardin. Elle reste encore aujourd'hui très appréciée en Russie ou en Ukraine et récemment encore deux variétés nouvelles en ont fait état dans leur pedigree.

 Le croisement (Rippling Rivers X Broadway Star) semble avoir été bien apprécié par Adolf Vofovich-Moler puisqu'on lui connaît un frère de semis, 'Aziyat' (1995), jolie fleur dans les tons de magenta, et un « cousin », issu du croisement inversé, 'Askiya' (1995), bicolore beige/bourgogne, sans doute moins intéressant.

Je conserve ces variétés religieusement en souvenir d'une époque où les obtenteurs russes n'avaient rien pour travailler, mais où ils s'efforçaient de ne pas perdre de vue leurs rivaux européens. Ce courage et cette opiniâtreté, qui sont des caractéristiques de la mentalité russe, font qu'aujourd'hui, à l'image de leur pays, ils se rapprochent du niveau mondial où l'on devra dans peu de temps compter sur eux dans les compétitions internationales.

Illustrations : 


'Tashkent' 

'Aziyat' 


'Broadway Star' 


 'Rippling Waters'

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Terre d'Iris 

Le parfumeur londonien Miller Harris a créé un nouveau parfum baptisé 'Terre d'Iris » : quelque chose de délicieux, doux et délicat, qui plaira aux personnes raffinées. La description qu'en fournit son créateur laisse rêveur :  « Sensualité de la Méditerranée dans une senteur. Bergamote calabraise, orange amère de Sicile laissent place par la suite aux herbes du sud, romarin de Dalmatie, sauge. La fleur d'oranger et la rose de Tunis et de Turquie s'expriment sur les notes de fond de patchouli, de mousse et d'orris(1) florentine, cette fleur de lys apposée sur les blasons des armes de la ville de Florence.” Si vous en avez l'occasion, essayez-le, c'est un délice.

Dans les grandes parfumeries et, à Londres : 21 Bruton Street, Mayfair, London, W1J 6QD.

 (1) Orris root est le nom donné à la poudre de rhizome d'iris.

Novelty Iris Society

La Novelty Iris Society, dédiée aux iris à éperons et autres « Space Age », dirigée actuellement par Bonnie Nichols, vient d'obtenir le statut de Section à part entière de l'AIS. Elle ne fait donc pas bande à part et concoure naturellement à l'expansion de l'AIS.

HOMMAGE AUX SCHREINER'S

La firme Schreiner est la pépinière d'iris la plus importante au monde, et cela dure depuis 1925. C'est Carlos Ayento, le responsable du jardin « Brighton Park » à Chicago qui a eu l'idée de réunir, autant que cela soit possible, une photo de toutes les variétés enregistrées par l'illustre famille. Bien sûr il y a des trous dans sa collection, surtout concernant les variétés les plus anciennes, mais telle qu'elle est, c'est un magnifique hommage. Nous reprendrons ici quelques-uns de ces clichés (et quelques autres, pour exprimer aux Schreiner's toute notre reconnaissance. 

Dixième partie : Les années 1990/94 

 'Harvest King' (1990) ((semis x (semis x semis Craig #37)) X (((Burnished Gold x Bayadere) x (Calypso Bay sib x ((Olympic Torch x Brass Accents sib) x ((Casa Morena sdlg. x Inca Chief) x Dutch Chocolate)))) x (Gold Trimmings x semis Craig #36))) 

'Rosa Nova' (1991) ((Princess x (Pink Taffeta x (Pink Horizon x (Valimar x (May Hall x Pink Enchantment))))) X Blushing Pink) 


'Hello Darkness' (1992) ((((((Allegiance x ((semis de Envoy x Black Castle) x ((Blue Glow x Black Belle) x Storm Warning))) x semis de Black Swan) x Navy Strut) x (((((Black Mischief x (Black Forest x Starless Night)) x semis) x Black Swan) x Matinata) x Navy Strut)) x Titan's Glory) X Midnight Dancer) 
 

'Gypsy Romance' (1994) ((Louisiana Lace x Entourage) X ((semis x Fabulous Frills) x Starcrest)

A L'OMBRE DU CRATAEGUS

En réalisant le croisement (Kir sib (1) X Iriade) j'avais dans l'idée de créer un amoena inversé, en comptant sur l'avancée fournie par 'Iriade' (Laporte, 2004). J'étais cependant loin d'imaginer ce que j'allais récolter !

Rien d'extraordinaire au plan des graines : seulement 23 ont germé et poussé. Au bout de trois ans, toutes avaient fleuri... C'est là que la surprise et l'émerveillement ont commencé. J'avais dans le petit coin où j'avais planté ces jeunes semis un véritable kaléidoscope : une sorte de résumé de ce que peut être une collection d'iris ! En dehors du rose, toutes les couleurs de la palette actuelle des iris était représentée. De loin, c'était très joli. En s'approchant, cela l'était beaucoup moins. En effet sur ces 23 jeunes iris combien pouvaient présenter un quelconque intérêt ? Vraiment très peu... Il y avait une majorité de néglecta bleu lavande, tous plus ou moins de couleur délavée, terne, à part un, dont les sépales centrés de bleu vif veiné plus sombre n'aurait pas été négligeable si ce n'était que ses fleurs semblaient être celles d'une variété centenaire : pétales en arche, certes, mais tellement mous qu'ils s'effondrait en quelques heures, sépales étroits retombant tristement le long de la hampe. Il y avait aussi plusieurs fleurs dans les tons de jaune, mais un jaune bourbeux, souvent infus de gris à la base des pétales. J'ai trouvé également un iris maigrichon, qui rappelait vaguement les couleurs de son ancêtre 'Moon Mistress' (Osborne, 1976), c'est a dire un orange abricot, mais toujours avec un arrière fond de gris qui gâchait tout. La couleur de l'autre ancêtre 'Wedding Vow' (Ghio, 1972) était présente chez deux variétés : l'une, bien blanche et d'une bonne tenue, mais avec une ou deux malheureuses fleurs sur chaque hampe, jamais plus ; l'autre blanche également mais teintée de bleu-gris à la base des pétales et sur les épaules des sépales, avec des fleurs assez nombreuses et bien faites, mais d'une apparence à la fois raide (pas une ondulation) et fragile (pas d'épaisseur). J'ai regretté cette faiblesse car le coloris était intéressant. J'ai gardé du pollen que j'ai déposé sur la fleur d'un iris blanc que j'aime bien, 'Gwennaden' (Madoré, 2001). Le résultat de cette deuxième génération a été très décevant car je n'ai plus retrouvé le coloris qui m'intéressait.

 J'ai cru un instant que j'avais obtenu ce que je cherchais en constatant qu'un de ces semis présentait tous les traits de 'Spécial Mozart' (P. Anfosso, 1991), parent de 'Iriade'. Mais je dus déchanter car, en dehors de coloris, somme toute plutôt présentable, il fallait bien admettre que la plante était malingre et chétive et que la hampe florale avait bien du mal à s'extraire d'une touffe de feuilles étroites et qui se pliaient à mi-hauteur...

Je désespérais de trouver quelque chose de valable dans tout ce lot. Le dernier iris à fleurir se trouvait planté trop près d'un Crataegus oxyacantha qui le dissimulait sous ses basses branches qui se développaient fâcheusement vite. Dans cette situation peu favorable, je craignais que mon iris retardataire ne fleurisse jamais. Il s'est cependant décidé sur le tard, en fin de mai de la troisième année. Sa hampe avait une bonne hauteur et ses boutons plutôt nombreux. Son feuillage ample et abondant s'étalait en un joli vert un peu bleuté. J'étais vraiment curieux de voir ce que cela allait donner. Le 24 mai, jour de mon anniversaire, la première fleur s'est épanouie. Je n'ai pas pu la voir dès le matin parce que j'étais absent ce jour-là, mais quand je suis revenu à la maison, en fin de journée, je suis bien vite monté (2) au jardin pour voir s'il y avait du nouveau. Et là, oh surprise, une jolie fleur exactement comme celle dont je rêvais : pétales d'un joli bleu tendre, un peu plus soutenu à la base, sépales bien blancs avec un soupçon de jaune en bordure des épaules, et barbes jaune vif égayant l'ensemble ; avec ça les ondulations donnaient de la tenue à la fleur, sans excès. Le tout était soutenu par une hampe qui, en un tout autre emplacement, plus ensoleillé et plus dégagé, ne pouvait que prendre plus de tonus. Bref une plante qui montrait tous les signes d'une réussite. Voici pourquoi cette variété plaisante a été conservée et baptisée. Son nom ? 'Zone d'Ombre' (2012), en souvenir de l'emplacement mal éclairé où elle a fleuri pour la première fois, au milieu des branches agressives d'un Crataegus oxyacantha.

(1) Le 'Kir sib' en question est un iris gris bleuté, d'un coloris intéressant, mais dont la fleur a conservé l'aspect vieillot de la mère, 'Beghina'. 

(2) Oui, chez moi, on « monte » au jardin car il se situe plus haut que la maison : on y accède par un sentier qui grimpe au milieu des lilas et des seringas. 

Illustrations : 



'Fumée sans Feu' (sibling de 'Kir' - non enregistré) 


'Moon Mistress' 


'Iriade' 


'Zone d'Ombre'

3.7.15

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Iris au Trescols ? 

Le site de « Iris au Trescols » qui devait reprendre vie avec l'arrivée de l'été est toujours désespérément muet. Espoir et inquiétude....

HOMMAGE AUX SCHREINER'S

La firme Schreiner est la pépinière d'iris la plus importante au monde, et cela dure depuis 1925. C'est Carlos Ayento, le responsable du jardin « Brighton Park » à Chicago qui a eu l'idée de réunir, autant que cela soit possible, une photo de toutes les variétés enregistrées par l'illustre famille. Bien sûr il y a des trous dans sa collection, surtout concernant les variétés les plus anciennes, mais telle qu'elle est, c'est un magnifique hommage. Nous reprendrons ici quelques-uns de ces clichés (et quelques autres, pour exprimer aux Schreiner's toute notre reconnaissance. 

Neuvième partie : Les années 1985/89


'Royal Crusader' (1985) (((Blue Chiffon sib x Music Maker) x Study in Black) X Pledge Allegiance)

'Loyalist' (1986) (Master Touch X (semis x Rondo)) 

'Cinnamon Girl' (1987) ((semis x Polka Party) X Smoke Rings) 

'Rosette Wine' (1989) (Lorilee X Raspberry Frills sib)

UNE SEMAINE A VINCENNES

Depuis 2011 il n'y avait plus eu de concours d'iris en France. Il faut dire que le dernier avait été à ce point catastrophique que l'on pouvait se demander si l'on était capable de mettre sur pied une compétition qui tienne la route. La nouvelle équipe de la SFIB a relevé le défi et, en trois ans, a trouvé le moyen de construire un concours avec tous les aspects d'un grand. La première difficulté était de trouver un endroit et une équipe capable de cultiver dans les meilleures conditions une centaine de plantes, de manière à les amener au top en deux ans seulement. L'endroit devait, en plus être géographiquement bien situé : pas loin de Paris, dans un parc accessible au meilleur prix et à tout moment. La disponibilité du Parc Floral de la Ville de Paris, au bois de Vincennes, et des animateurs prêts à s'investir dans la tâche ont fourni une opportunité remarquable, qui a été saisie sans attendre, et qui s'est révélée d'une fiabilité absolue. La seconde difficulté était de réaliser cette compétition en dépensant le moins d'argent possible, sachant que la trésorerie de la SFIB est des plus réduites ! Les coûts sont essentiellement liés à le réception et à l'hébergement des juges venus parfois de fort loin, à leurs frais, mais néanmoins logés et nourris par les organisateurs. L'astuce a consisté en un hébergement façon auberge de la jeunesse, dans un gîte certes fort éloigné de Paris, mais dont les prix étaient en adéquation avec une bourse peu remplie. Dans cet environnement rural et bon enfant les juges et tous ceux qui sont venus partager leur demeure ont passé une semaine rustique mais conviviale et chaleureuse. L'inconvénient majeure était seulement la durée du trajet jusqu'à Vincennes et les aléas constants de la circulation en banlieue parisienne, de jour comme de nuit. Théoriquement calculé pour durer une demi-heure environ, le voyage s'est révélé exiger le plus souvent plus d'une heure ! A part ce petit inconvénient, tout est allé pour le mieux de ce côté-là. Une troisième difficulté a été plus difficile à surmonter. Il s'agit de l'occupation des juges en dehors des séances de jugement. En la circonstance, comme dans la précédente, il fallait faire au mieux avec peu d'argent, et tenir compte du délai de transport pour rentrer au bercail le soir. C'est cette partie du programme qui m'a semblé la plus délicate. La faute en revient au fait que l'organisateur, domicilié près de Toulouse, n'a pas pu tester ou vérifier chaque point des réjouissances. Ainsi la visite de Paris en bus s'est effectuée dans un véhicule au confort spartiate, extérieurement non lavé au point qu'il fallait ouvrir les fenêtres pour pouvoir photographier les monuments et que le toit, en principe transparent, était en fait opaque de poussière ! L'attente du bateau-mouche où s'est déroulé le grand dîner a été plutôt pénible et la dispersion après le repas, totalement improvisée. Mais il s'agit là de menus incidents qui n'ont pas détérioré l'ambiance générale toute de sympathie et de bonne humeur. Une machine aussi complexe ne se met pas en place sans anicroches lesquelles sont en fait des expériences pour les organisations à venir.

Le concours proprement dit a été parfait sur tous les plans. Les lieux, tout d'abord, étaient parfaitement aménagés, les plantes délicatement soignées et à un bon niveau de floraison, même si celles placées au plus près des grands arbres entourant le terrain du concours ont souffert d'un défaut d'ensoleillement qui a retardé leur anthèse et compromis leur participation à la compétition. Néanmoins le nombre de variétés retenues pour concourir a été suffisant et équivalent à celui qu'on rencontre ailleurs dans ce type de manifestation. Si j'ajoute un petit bémol, c'est à propos du plan de plantation qui n'a pas été fourni aux juges, ce qui a obligé ceux-ci à des parcours compliqués pour retrouver telle ou telle plante à vérifier. Mais ce ne fut qu'un inconvénient absolument mineur.

Après une semaine passée à examiner, jauger, humer puis noter les iris soumis à leur appréciation, les cinq juges se sont retrouvés pour colliger leurs notes et établir le classement. Tout s'est admirablement passé jusqu'au moment où il a fallu reprendre touts les notes pour établir le classement « bis » destiné à désigner le meilleur iris de jardin. Petit moment de panique et de désarroi devant la difficulté qui se présentait, mais, après quelques discussions soutenues, et grâce à la compétence informatique d'un participant, une solution simple a été trouvée et le second classement a pu être réalisé en quelques dizaines de minutes. Quand les noms des lauréats ont été dévoilés, une énorme surprise s'est fait jour : pas une seule variété américaine ou australienne, qui triomphaient généralement dans les concours depuis de nombreuses années, ne s'est trouvée dans le « Top 10 » !. Mais est-ce vraiment une surprise ? Depuis déjà quelques temps bien des variétés européennes avaient trouvé le chemin des podiums. Cela fut, malgré tout, un choc pour certains et fut même évoquée l'idée d'un commentaire en forme d'excuse destiné aux compétiteurs malheureux. Mais les juges américaines elles-même ont déclaré que, le concours s'étant déroulé dans les meilleures conditions d'équité, ce commentaire était superflu.

Ce concours fut, pour moi, la dernière de mes participations officielles. J'en garde un souvenir qui fait partie des meilleurs que je puis avoir de mes nombreuses interventions en tant que juge. C'est très bien ainsi et, comme je l'ai dit en prenant congé des participants : « Aujourd'hui je suis comme ce vieux matelot qui, debout sur le quai, voit partir le vaisseau où il a si longtemps vécu et travaillé. Il regarde le bateau s'éloigner jusqu'à ce que le grand mât disparaisse sous l'horizon, puis il retourne à sa demeure, avec une pointe de nostalgie, certes, mais confiant dans l'avenir et dans ceux qui viennent de prendre la mer. ». Et pour reprendre ce qu'a dit, évoquant Federico Fellini, une personne avec qui je me suis lié de sympathie au cours de ces quelques jours : « E la nave va ... »

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Concours de Munich.




Sébastien Cancade me communique à l'instant les résultats du concours de Munich.

1) Semis Mego AM07/2825/2
 2) 'Color Strokes' (Schreiner, 2012)
 3) Semis Bianco 177-05
4) Semis Dalla Libera D08-1158 1/1
5) 'Tel Arlequin' (Cayeux, 2013)
6) 'Il Mare in Inverno' (Montanari, 2010)
7) 'Syrian Hills' (Schreiner, 2012)
8) 'Caprice de Star' (Cayeux, 2011)
9) Semis Dotto 06-09-TD
10) Semis Mego AM02/1302-6

Encore un beau succès européen, … et un panier plein pour les hybrideurs italiens. Bravo !