BORDELLO
Avec un nom pareil, il n’était pas facile de faire une carrière commerciale en France ! Pourtant cette variété a figuré pendant quelques années au catalogue de la Maison Anfosso. Elle en valait la peine, et ceux qui n’ont pas été rebutés par une dénomination difficile à assumer n’ont pas été fâchés de leur choix. Une personne de ma connaissance, qui m’a téléphoné récemment, se désolait même de l’avoir perdue et me demandait si je savais où elle pourrait se la procurer de nouveau. Répondre à cette amatrice n’était pas évident, et j’ai du donner ma langue au chat.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, BORDELLO est un iris noir « par les rouges », enregistré en 1976 par Sanford Roberts, un obtenteur californien. Disons que c’est une variété venue tardivement sur le marché, dans la tradition de STUDY IN BLACK (Plough 67), qui ressortit de la même ligne de recherche : approfondir le noir en y incorporant du rouge (ou de l’orange).
Les recherches généalogiques concernant BORDELLO aboutissent très vite à l’âge d’or de l’iridophilie, les années 40/50. Il est le fruit du croisement de ADAMSBLACK (Craig 67) et de HELL’S FIRE (S. Roberts 76). L’un et l’autre sont des noirs « par les rouges ». Tous les deux sont des cousins proches, descendants de ADAM (Craig 62), un violet raisin, LOIS CRAIG (Craig 56), un rouge carminé à spot violet, et EDENITE (Plough 58), déjà un noir de rouge. Aux générations antérieures on retrouve, évidemment les mêmes parents et l’on arrive très vite à SABLE NIGHT (Cook 50), violet très sombre qui fit sensation à son époque et a obtenu la DM en 55, MOLTEN (Craig 50), brun rosé, SAVAGE, rouge bronze, ROCKET (A. Whiting), orange bronzé et CORDOVAN (Kleinsorge) brun roux, à l’origine de la plupart des bruns.
Pour arriver à BORDELLO, on est parti, donc, d’une base d’iris bruns, peu à peu saturés jusqu’à devenir presque noirs, à laquelle on a ajouté l’éclat issu des iris rouge carmin. Comme, parallèlement, la présentation des fleurs progressait, avec des sépales de plus en plus larges et dressés horizontalement, on est arrivé un très joli iris sombre, sans marques aux épaules, avec une belle barbe violacée pointée de bronze.
STUDY IN BLACK
STUDY IN BLACK avait suivi un chemin presque identique, quelques temps auparavant. Dans ses proches parents, il n’y en a qu’un qui lui soit commun avec BORDELLO, il s’agit d’EDENITE. Mais la recherche ayant abouti à cette variété très prisée procède du même principe. Le côté noir provient du « père », CONGO SONG (Christensen 61), qui est un violet foncé de deux tons. Ce CONGO SONG est issu lui-même d’un violet vineux, STORM WARNING (Schreiner 52), fils du fameux noir BLACK FOREST, fondateur en quelque sorte de la dynastie des iris noirs, et du non moins fameux SABLE NIGHT dont il a déjà été question à propos de BORDELLO. EDENITE se situe dans la branche maternelle qui est plus orientée vers le rouge et l’orange, avec DUKE OF BURGUNDY (R. Nelson 56), qui est de couleur bourgogne, GENE WILD (Craig 52) qui est, étrangement, amoena vieux rose, GREAT DAY (Tompkins 53), de couleur orange comme son ancêtre ROCKET (voir plus haut l’arbre généalogique d’EDENITE).
STUDY IN BLACK, comme beaucoup des iris mis sur le marché par Gordon Plough, a eu une carrière commerciale exceptionnelle, partout dans le monde. Il n’est donc pas étonnant que ses descendants soient nombreux et de toutes nationalités. Parmi ceux-ci on note, au premier rang, BLACK MARKET (Plough 73), INTERPOL (Plough 73), MASTER TOUCH (Schreiner 80), ROYAL CRUSADER (Schreiner 85), tous dans des teintes foncées, et deux français : ATALA (Anfosso 90) et TRENCAVEL (Ségui 90), différents puisqu’il s’agit d’un variegata et d’un plicata. A la génération suivante, STUDY IN BLACK se trouve dans le pedigree de RAVEN’S ROOST (Plough 81), LOYALIST (Schreiner 86), BLENHEIM ROYAL (Schreiner 90), PROUD TRADITION (Schreiner 90), NORTHWEST PRIDE (Schreiner 93), NIGHTS OF GLADNESS (Ernst 95), OVERNIGHT SENSATION (Schreiner 95), DIABOLIQUE (Schreiner 86) ou RUBY MORN (Schreiner 2002). Tous sont dans les teintes sombres, du bleu au grenat, et tous ont profité de l’éclat qu’apporte le noir-rouge de STUDY IN BLACK.
BORDELLO, moins bien distribué, et sans doute aussi arrivé un peu tard, n’a pas eu le même succès près des hybrideurs. Je ne lui qu’un descendant indirect, issu, entre autres, d’un croisement BORDELLO X LADY FRIEND ; il s’agit de DO WA DIDDY (Burseen 97), un variegata moderne, aux sépales très foncés.
Quoi qu’il en soit, BORDELLO, tout comme STUDY IN BLACK ont été un aboutissement, celui des efforts pour obtenir des iris très sombres, enrichis de sous-teintes rouges, qui ajoutent une chaleur que les noirs « par les violets » ne peuvent pas atteindre. Par la suite cette chaleur a été transmise à des iris tendant vers le noir, provenant de semis violets ; le récent noir de Rick Ernst NIGHTS OF GLADNESS est là pour en apporter la preuve.
2 commentaires:
Study in Black croisé avec un bleu ciel moderne pourrait donc donner du "bleu marine" ?
A Lisa:
Pas sûr ! L'hybridation n'est pas une science tout à fait exacte.
Il n'est pas recommandé de croiser un iris ancien et un moderne car les "mauvais" côtés de l'iris anciens tendent à prendre le dessus sur les "bons" côtés des iris modernes.
Lire ce qui est dit la-dessus dans le forum du site de la SFIB
www.iris-bulbeuses.com
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