24.1.20

PETITS MAIS COSTAUD


Ils se situent très loin des grands iris de nos jardins, mais ils ont leurs amateurs convaincus et ils grandissent dans le cœur des amis des iris. Ce sont les MDB, Miniature Dwarf Beardeds, les plus petits des iris hybrides. Dans la hiérarchie que l'association américaine des iris (AIS) a mise en place, ils ont leur place au premier rang et disposent des mêmes récompenses que leurs frères plus grands. Le chapitre qui leur est consacré dans « The World of Irises » commence ainsi : « Si la vue du premier crocus peut signifier pour bien des gens le retour du printemps, c'est la vue du premier iris nain miniature qui a ce sens pour les irisariens. Premiers des iris barbus à fleurir, les nains miniature annoncent la saison attendue si avidement au cours du long hiver ; chaque amateur d'iris devrait en faire pousser au moins une ou deux touffes pour cette seule raison. Cependant, ils sont si charmants qu'une ou deux touffes peut par la suite devenir tout un massif ou toute une bordure. »Voilà qui résume bien tout l'intérêt qu'ils présentent.

Ce sont des plantes qui mesurent moins de 21cm de haut et ne portent qu'une seule tige par pied. Les fleurs doivent être en proportion de cette petite taille, mais comme ils ont naturellement tendance à se développer rapidement, cela compense leur faible hauteur et leur tige unique.

Ce sont des hybrides interspécifiques à base de l'espèce chamaeiris, et plus précisément des sous-espèces I. olbiensis et I. italica. Ils sont apparus d'abord en Allemagne et en France dans les années 1910/20 avant de se lancer à la conquête du monde et tout particulièrement de l'Amérique où ils ont fait peu à peu leur chemin au moment de la deuxième guerre mondiale, moment où leurs initiateurs avaient d'autres soucis que le développement d'une catégorie nouvelle de fleurs de jardin. D'autres espèces naines ont peu à peu été ajoutées aux deux espèces de bases : I flavissima, I. arenaria, I. mellita, ainsi que d'autres comme I. reichenbachii, I. balkana, I. bosniaca... Tous de la grand famille des I. pumila. Au plan de la génétique, certaines de ces espèces sont des iris tétraploïdes, d'autres sont simplement diploïdes. Mais c'est l'espèce I. pumila, tétraploïde, qui a pris le dessus et imposé sa tétraploïdie, en particulier pour son aptitude à transférer les traits des grands iris barbus aux variétés naines.

Les hybrideurs américains, à partir des années 1940, ont fait faire des progrès considérables à cette catégorie d'iris qui végétait depuis les travaux de Goos et Koenemann en Allemagne de Millet en France dans l'entre-deux-guerres.

Néanmoins de tous temps la catégorie des MDB est resté très minoritaire. Ainsi en l'année 2000, sur 902 variétés enregistrées, seules 9 étaient des MDB ! Et ils n'étaient que 13 en 2010 sur un total de 1342... C'est un peu plus riche depuis quelques temps mais cela reste une catégorie très confidentielle, ainsi ils ne sont encore que 13 en 2013. Néanmoins, elle a toujours intéressé les plus grands obtenteurs et, comme les autres, les MDB bénéficient d'une médaille catégorielle, la Caparne-Welsh Medal. Son attribution remonte à 1950 et elle est chaque année disputée par les hybrideurs les plus renommés. Ainsi Ben Hager l'a-t-il obtenue cinq fois, Melba Hamblen, quatre fois. Elle porte les noms de deux pionniers de la catégorie : John Caparne (1855/1940), un anglais à qui l'on attribue la création des premiers MDB, et Walter Welch (1887/1980), un américain qui leur a consacré sa vie d'hybrideur.

Ce qui fait le charme des MDB c'est évidemment leur petite taille, mais aussi leur précocité (ils fleurissent chez nous dès la mi-mars) et la grande variété de leurs coloris. De plus, quand on s'est décidé à les cultiver on s'aperçoit qu'ils sont absolument rustiques, qu'ils poussent vite et en abondance et qu'une fois installés ils ne requiert pour ainsi dire aucun soin. Avec de telles qualités on se demande pourquoi on ne les plante pas plus souvent. Mais ce qui fait leur intérêt est aussi leur faiblesse : ils sont bien discrets et on les oublie une fois leur floraison terminée puisqu'ils sont supplantés par des fleurs autrement spectaculaires !

Alors ? Les MDB ont-ils un avenir ? Au vu de leur maintien dans la hiérarchie des iris depuis des décennies, sans croître en nombre mais sans disparaître, on peut répondre par l'affirmative, même si leur côté confidentiel ne plaide pas en faveur de leur pérennisation. Par exemple, en 2019, il y a eu 3965 en faveur de grands iris pour l'attribution des Awards of Merit, 824 en faveur de SDB et seulement 144 en faveur de MDB. Quant aux votes pour les médailles catégorielles, il y a eu 951 voix pour un TB, et 135 pour un MDB, ce qui est remarquable. La Caparne-Welch Medal attribuée à 'Beetlejuice' (Paul Black, ) n'est donc pas usurpée. Il faut quand même reconnaître qu'en dehors des Etats-Unis, la catégorie des MDB est très peu représentée. Pendant les années 1990/2000, Lawrence Ransom et son ami Jean Peyrard ont proposé des MDB originaux, mais ils n'étaient ni l'un ni l'autre préoccupés par des questions économiques et ne travaillaient que par passion. A l'heure actuelle, il existe un groupe d'hybrideurs ukrainiens, sous la conduite de Galina Shevchenko, qui crée de nouvelles variétés à partir de I. pumila mais elles ne sont pas diffusées hors de leur pays d'origine de sorte que l'on ne peut se faire aucune idée de leur valeur. Aux Pays-Bas, Loïc Tasquier, amoureux des iris nains, a enregistré quelques amusantes variétés. En Pologne Robert Piatek a commis un petit iris jaune... Et c'est à peu près tout !

Inutile de préciser qu'il n'y a aucun marché pour cette catégorie d'iris nains. D'ailleurs, en France, lorsqu'il y en a au catalogue d'un pépiniériste, ils sont vendus sous l'appellation générique de « iris nains »... Leur commercialisation est donc pour ainsi dire inexistante de sorte que leur avenir problématique en dehors de l'intérêt que leur porte quelques fanatiques. Ils ont beau être petits, mais costauds, les MDB n'ont pas réussi à s'imposer.

Illustrations : 


'Arsenic' (L. Tasquier, 2018) 


'Beetlejuice' (P. Black, 2013) 


'Chubby Cherub' (T. Aitken, 1986) 


'Passion Bleue' (j. Peyrard, 1995) 


'Quota' (L. Ransom, 2007)

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ces petits iris ont bien du mérite... et sont plus nombreux que l'on croit: sur le site Cayeux, ils sont proposés en tant que "liliputs et sont au nombre de ... 80!
Pour plus de précisions, voir le site en question:
https://www.iris-cayeux.com/fr/lilliputs

Cheers,
AK

Anonyme a dit…

J'ajouterai au commentaire précédent, il y a un certain MDB français qui vient d'entrer dans la compétition pour la médaille de Dykes britannique . . .