26.6.16

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Annus horribilis (II) 

Choc dans le monde des iris ! Le Concours de Florence, institution de réputation mondiale, n'a pas pu se dérouler cette année, faute de fleurs ! Les organisateurs, désolés, ont du se résoudre à annuler la compétition. Décidément l'année 2016 s'est montrée catastrophique pour la plupart des amateurs d'iris...

PORTRAITS

N'est-ce pas la meilleure manière de rendre hommage à tous ceux qui, depuis cent cinquante ans maintenant, font des iris hybrides ce qu'ils sont aujourd'hui, que de publier quelques photos de leurs œuvres ? Irisenligne va désormais dresser un bref portrait de nombreux hybrideurs de tous pays et offrir à ses lecteurs les plus belles images de leurs iris. 

 IV – Richard Ernst 

 La famille Cooley a longtemps exploité l'une des plus grosses pépinières d'iris des États-Unis. Cette prospère entreprise a disparu brusquement avec la mort prématurée de son dernier représentant, Richard Ernst. Cet hybrideur de premier plan a créé un grand nombre d'iris, généralement de belle classe, mais n'a jamais reçu de récompense majeure ! Ce désamour fait partie des malchances qu'à rencontrées ce personnage au destin tragique. Il a englouti des sommes importantes dans la recherche scientifique de l'iris rouge, mais son investissement a été un échec. Il a, pour finir, été emporté à 45 ans par un cancer de l'intestin...

Quatre variétés qu'il a signées :

'Aubergine' (1987) 


'Desert Renegade' (1992) 


'Whispering Spirits' (2001) 


'Jester's Robe' (2011)

DÉCLARATION D'AMOUR

Quand il s'agit de donner un nom à une nouvelle variété d'iris, les obtenteurs déploient une imagination sans limites. Sauf lorsqu'ils veulent dédier la nouvelle plante à une personne en particulier, ils puisent en fait dans une série de thèmes qui, dans leur subconscient, s'harmonisent avec l'apparence de la fleur. C'est ainsi qu'une fleur dans les tons de rose est très souvent reliée à la notion de fraîcheur, de printemps, de féminité ou d'amour. Voilà pourquoi les déclarations d'amour abondent dans la nomenclature des noms d'iris.

C'est l'occasion de faire connaissance avec quatre variétés qui répondent à ces caractéristiques et concernent des iris d'une grande valeur esthétique tout autant qu' horticole.

Voici tout d'abord (c'est l'ordre chronologique qui prime) 'Words of Love' (Williamson, 1971). La description que Bryce Williamson en a donnée est suffisamment précise pour qu'on se fasse une idée de la fleur sans même l'avoir vue, mais c'est évidemment mieux quand on peut l'avoir sous les yeux. « Pétales abricot pastel, infus et mêlé de rose sur les côtes; Sépales blanc crème avec épaules et bordure rose-abricot, liseré dentelé jaune citron pastel ; barbe rouge corail tendre. » On est tout à fait dans les coloris délicats synonymes de féminité et d'amour. Le pedigree est (Dawn Crest X Rippling Waters) : les deux parents sont des géniteurs recherchés de leur époque, en particulier 'Rippling Waters', qui a une descendance innombrable. 'Words of Love' n'a eu que cinq descendants officiels, tous les cinq dans les tons de rose abricot : 'Lullaby of Love' (1978), 'Love and Desire' (1979), 'Love Poem' (1979), 'Time for Love' (1983) et 'Renoir' (1988), tous de la main de Bryce Williamson.

'Je t'Aime' (Lilly Gartman, 1990) vient ensuite, de la part d'une dame trop tôt disparue pour avoir pu donner toute la mesure de son talent d'hybrideuse. Cette variété-là s'éloigne un peu de la définition donnée plus haut en matière de coloris, puisqu'il est de couleur blanche, avec seulement des barbes rose corail tendre. C'est néanmoins un très bel iris, avec une fleur de forme parfaite. Critic's Choice X Status Seeker est son pedigree. Dans ce couple, 'Critic's Choice' (Gartman, 1988) est un iris blanc crémeux, petit-fils du fameux 'Soap Opera', et 'Status Seeker' (Gartman, 1988) est un superbe unicolore corail. La courte carrière de Mme Gartman ne lui a pas permis de poursuivre une lignée d'iris rose corail qui s'annonçait prometteuse...

En matière de déclaration d'amour, les européens ne sont pas en reste, comme en témoigne 'I Seek You' (Bianco, 1999), qui ressemble fortement à 'Words of Love' tel que décrit ci-dessus. Les mots utilisés par Augusto Bianco sont, certes, bien différents, mais le résultat est pourtant assez proche. Il vaut mieux faire confiance à son œil qu'aux mots utilisés pour les descriptions : Pétales bleu perle ; Sépales cannelle ambré, touché de lilas au centre ; barbes rouille à base moutarde. Et voici son pedigree : ((Beachgirl x (Borderline x Peaches n' Topping)) x (Olympiad x Peach Spot)) X Electrique. Sa descendance n'est pas encore bien importante, mais 'Impressioni di Settembre' (2010), un joli iris vieux-rose, en est l'expression.

 Richard Cayeux lui-même s'est laissé aller à des mots d'amour quand il a baptisé l'une de ses agréables créations roses : 'Je l'Adore' (2006). C'est un iris rose clair, avec un petit spot blanc sous les barbes orangées. Rien de bien original, mais beaucoup de grâce et de fraîcheur. Ce n'est pas étonnant de la part d'un enfant de 'Buisson de Roses' (1997), lui-même issu de 'Paradise' (1979) l'une des plus ravissantes créations roses de Joseph Gatty.

 Il ne serait pas difficile de prolonger la série des variétés au nom en forme de déclaration amoureuse. Les mots comme I Love You se rencontrent souvent. J'ai repéré des tas d'élans d'affection dont voici quelques exemples :
 'All my Love' (Saïa, 1981) ;
'Baby I Love You' (Black, 2011) ;
'Be my Love' (J. Meek, 1988) ;
'Love me Tender' (Terada, 1995) ;
'My Beloved' (Ghio, 2008) ;
'No Other Love' (Schreiner, 2004) ;
'Cherished' (Corlew, 1972)...
Amour et iris : une histoire d'amour !

 Illustrations : 


'Words of Love' 


'Je t'Aime' 


'I Seek You' 


 'Je l'Adore'

17.6.16

PORTRAITS

N'est-ce pas la meilleure manière de rendre hommage à tous ceux qui, depuis cent cinquante ans maintenant, font des iris hybrides ce qu'ils sont aujourd'hui, que de publier quelques photos de leurs œuvres ? Irisenligne va désormais dresser un bref portrait de nombreux hybrideurs de tous pays et offrir à ses lecteurs les plus belles images de leurs iris. 

III – Sergeï Loktev 

C'est l'homme qui personnifie le monde russe des iris. Sa passion est immense, son personnage étrange, son autorité surprenante. A lui seul il a lancé la culture et l'hybridation des iris dans l'empire russe et a provoqué un nombre incroyable de vocations. Il est parti de rien, il a atteint une renommée mondiale. Les variétés qu'il a enregistrées son incroyablement nombreuses, dans toutes les catégories d'iris barbus. N'en retenir que quatre est une gageure.


 'Letuchi Gollandets' (1999) 


'Amok' (2007) 


'Bolide' (2012) 


'Yerofey Khabarov' (2013)

LUMIÈRE ET POÉSIE

Avez-vous remarqué ce que disent ceux qui parlent de ce qui s'est passé en eux au moment où ils ont été attirés par les iris ? La plupart du temps ils s'expriment ainsi : « J'ai été accroché (ou, en anglais, I've been hooked) ». Ils ont ressenti quelque-chose de violent, qu'en d'autres circonstances ils auraient pu qualifier de coup de foudre. Tout ce qu'écrivent les fans d'iris à propos de leur passion est exprimé dans des termes pratiquement semblables : « J'ai été ensorcelé ». C'est un peu comme si les fleurs étaient là comme les amorces au crochet de l'hameçon, et le spectateur comme le poisson, tranquille au fil de l'eau, et soudain irrésistiblement attiré par l'appas. L'iris – mais pour d'autres ce sera la rose ou l'orchidée – exerce donc sa séduction d'une manière inexplicable mais définitive.

Cette attirance est bien le fait de la fleur. Car la plante elle-même n'est pas spécialement séduisante, et même si, quand on la connaît bien, on finit par lui trouver de l'intérêt, ce n'est jamais à cause d'elle que l'on se dit accroché. C'est la fleur qui vous piège. On la trouve élégante, charmante, gracieuse, voire somptueuse, et même sensuelle ou voluptueuse. Des qualificatifs qu'on destine en général à la femme, et qui confirment qu'on est dans une affaire de séduction.

 Mais cette séduction aurait du mal à s'exercer s'il n'y avait pas la lumière. Allez faire un tour au jardin un jour de grisaille, et vous ne serez pas touchés de la même manière que dans l'éclatante lumière d'un matin de printemps ou dans l'air doré d'un soir de mai. J'en ai souvent fait l'expérience au moment des concours d'iris auxquels j'ai pris part. L'enthousiasme vous saisit lorsque le matin on fait un premier tour parmi les plantes en fleur au moment où les dernières gouttes de rosée perlent encore à la pointe des feuilles ou s'attardent en grains d'argent à la surface des sépales. Les choses auront bien moins d'attrait le lendemain, dans la bruine et la bise.

 L'image qui nous est transmise par la lumière varie avec l'intensité de celle-ci et plus la lumière sera chaude, ou claire, plus la séduction s'exercera. Mais il ne faut pas que cette lumière agisse avec brutalité. Sous la brûlure de midi, dans la chaleur d'un soleil de plomb, la délicatesse des fleurs se trouvera altérée et l'admirateur les appréciera moins. C'est pourquoi à l'heure où le soleil décline et que les ombres s'allongent, le charme opère de nouveau, d'une manière différente, mais tout aussi addictive. Les fleurs, d'ailleurs, savent jouer de cette lumière pour tenir leur rôle. Car séduire des humains est le dernier de leurs soucis, elles sont là pour assurer, et garantir, la perpétuation de l'espèce. Elles usent d'artifices pour attirer les insectes fécondateurs, mais l'appas ou le leurre n'affectent pas seulement les bourdons, les êtres humains y succombent également. Elles profitent des variations de la lumière comme d'un fard destiné à accroître leur pouvoir. La lumière est leur allié et elles ont appris à en jouer. Pourquoi cet aspect velouté ? pourquoi ces reflets soyeux ? pourquoi ces couleurs infiniment variées, si ce n'est pour profiter au maximum de l'incidence de la lumière ?

 Les insectes se contentent des phénomènes naturels. Les êtres humains y ont ajouté une création de leur esprit : la poésie. Dans la vivacité des couleurs, les insectes ne perçoivent que l'existence d'un riche garde-manger, dans les barbes ils ne voient que la perspective d'une nourriture délicate. Dans le replat des sépales ils n'apprécient que la possibilité d'atterrir sans dommage. Les hommes ont imaginé autre chose. Ils associent ce qu'ils voient à des notions abstraites comme le charme, la délicatesse, l'élégance, la grâce... Une fleur n'est pas qu'un organe de reproduction, c'est tout ce que dans leur subconscient ils associent à la féminité. Ils sont proches même d'oublier le côté procréatif pour ne songer qu'à la beauté. Et souvent ils délirent. Une fleur d'iris c'est une coupe de nectar ; les couleurs, qui ne sont là que pour servir de balises, sont décrites en termes de comparaison avec ce qu'il y a de plus joli ; les ondulations destinées à rigidifier des pièces florales devenues lourdes et larges sont prises pour de la dentelle ; qu'ils soient ouverts comme des offrandes, ou refermés comme pour abriter des secrets, on ne voit plus dans les pétales les boucliers protégeant les fragiles organes sexuels, mais les dômes d'édifices religieux ou les bras ouverts de prêtresses en extase. Ce n'est plus de l'histoire naturelle, c'est de la pure poésie. Il n'est pour s'en convaincre que de lire les noms donnés à certaines variétés dont le caractère évocatif n'est pas seulement destiné à susciter un geste d'achat, mais, plus spontanément, à exprimer la fascination subie par l'obtenteur : 'Wings of Peace', 'Cardinal in Flight', 'Fille du Vent', 'Caresse d'un Soir', autant de noms, parmi des milliers d'autres, dont la qualité poétique est évidente.

Lumière et poésie s'allient pour enchaîner les admirateurs d'iris (mais aussi, et pour les mêmes raisons, les admirateurs d'autres fleurs) et en faire des adorateurs inconditionnels de la plante dont ils sont tombés amoureux.

Illustrations :

 'Wings of Peace' (G. Sutton, 1996)

 'Cardinal in Flight' (Schortman, 1978)

'Fille du Vent' (Jacob, 2015)

 'Caresse d'un Soir' (Chapelle, 2010)

11.6.16

PORTRAITS

N'est-ce pas la meilleure manière de rendre hommage à tous ceux qui, depuis cent cinquante ans maintenant, font des iris hybrides ce qu'ils sont aujourd'hui, que de publier quelques photos de leurs œuvres ? Irisenligne va désormais dresser un bref portrait de nombreux hybrideurs de tous pays et offrir à ses lecteurs les plus belles images de leurs iris. 

 II – Neva Sexton 

Le mode des iris a connu des personnages fort différents, mais des gens de la trempe de Neva Sexton, il n'y en a pas eu beaucoup ! Voilà une femme qui a connu la misère des petits blancs du Sud, l'exode vers la Californie, la rencontre avec les iris et le succès grâce à eux. Elle a surmonté les pires épreuves en raison d'une force exceptionnelle de caractère et d'un courage au travail hors du commun. Les deux Médailles de Dykes qui ont récompensé son travail ont été amplement méritées.


'Pacific Panorama' (1960 – DM 1965) 


'New Moon'(1968 – DM 1973) 


'Good Morning America' (1979) 


'Arkansas Girl' (1982)

BLEU 'MYSTIQUE'

Maintenant, tout le monde connaît 'Mystique' (Ghio, 1972), non seulement parce qu'il a obtenu la Médaille de Dykes en 1980 (la seule recueillie par un iris de chez Ghio) – et un beau succès commercial - , mais aussi, et surtout pour sa couleur. Quand 'Mystique' est apparu sur le marché, cela a fait l'effet d'une bombe : on n'avait jamais vu un bleu de cette teinte. Ce n'est pas la description qui en est donnée dans le formulaire d'enregistrement qui est spectaculaire : « Pétales bleu clair, bleu pourpré profond sur les côtes ; sépales bleu pourpré profond ; barbes bleues », mais la réalité l'est réellement. Je suppose que Joë Ghio a eu un choc au cœur quand il a vu éclore la première fleur. Il avait sous les yeux quelque-chose d'exceptionnel. Ce qu'il a considéré comme « bleu pourpré profond » est en effet un bleu encore jamais vu. Des iris bleus, il y en avait déjà des centaines, peut-être des milliers ; des iris bleu pourpré, il y en avait certainement encore plus, car c'est vraiment une teinte de base dans le monde des iris, mais le bleu pourpré de 'Mystique' atteignait l'exceptionnel. C'est une teinte qui a la noblesse un peu froide de tous les bleus, mais elle est réchauffée par une tonalité sombre et intrigante qui séduit dès le premier regard.

 Le pedigree de cette merveille est le suivant : ((((Frosted Starlight x (Spanish Peaks x Black Satin)) x ((Cahokia x Pierre Menard) x (Black Forest x Chivalry))) x Penthouse) x (Mahalo x Diplomacy)) X Veneration. Un mot de chacune des variétés en présence :
'Frosted Starlight' (Ghio, 1961) est un bleu pâle issu du blanc 'New Snow' et du fameux bleu vif 'Chivalry' ;
'Spanish Peaks' (Loomis, 1947) est ce qu'on pourrait appelé, par comparaison avec ce qui se dit d'un vin, un blanc de blanc ;
'Black Satin' (Nesmith, 1950), en bleu sombre, descend de 'Black Forest' dont on va parler un peu plus loin ;
 les deux frères 'Cahokia' (Faught, 1946) et 'Pierre Menard' (Faught, 1948) sont considérés comme étant à la base de tous les iris bleus modernes ;
'Black Forest' fait aussi partie des basiques ; quand on parle d'iris « noir », on ne peut pas échapper à ce 'Black Forest' (Schreiner, 1944) ;
Avec 'Chivalry' (Wills, 1943) : on reste dans les incontournables. Voici ce qu'en dit Melba Hamblen dans un texte publié au Bulletin de l'AIS d'avril 1961 :  « Introduit par Jesse Wills en 1944, il a décollé vers la renommée et l'immortalité, enlevant la Médaille de Dykes en 1947 et s'installant dans le Symposium dès 1945. En tant que précurseur de bonnes choses à venir, 'Chivalry' a accompli sa destinée, apportant dans les bleus substance, ondulations et forme éprouvée. Probablement aucun autre iris, sauf peut-être 'Snow Flurry', n'a été aussi souvent utilisé comme parent ; et indubitablement aucun autre croisement que (Snow Flurry X Chivalry) n'a été répété autant de fois et aussi avantageusement. »
'Penthouse' (Ghio, 1967), en amoena bleu, est le moins connu des géniteurs en cause ;
'Mahalo' (Ghio, 1964) doit être, avec 'Diplomacy', celui dont le coloris est le plus proche de celui de 'Mystique' ;
'Diplomacy' (Keppel, 1965), un néglecta issu de 'Whole Cloth' ;
'Veneration' (Ghio, 1969), autre néglecta, fils présumé de 'Diplomacy' qui vient d'être cité.

 Si les parents de 'Mystique' sont parmi les plus remarquables de leur époque, il n'est pas étonnant que 'Mystique' soit lui-même un des piliers de l'iridophilie moderne, car, comme on dit, les chiens ne font pas des chats. Cela se confirme quand on voit la liste de ses descendants.

On en trouve chez tous les bons faiseurs des années 1980/90, comme Aitken, Black, Blyth, Ghio, Innerst, Keppel, Kerr, les Dunn (Mary et Robert), les Schreiner ; en Grande Bretagne Nichol et Dodsworth, et en France Pierre Anfosso et Lawrence Ransom... Il n'est pas question de les citer tous, mais on peut néanmoins parler de :
'Claude-Louis Gayrard' (Ransom, 1996), excellent amoena inversé ;
'Congratulations' (Keppel, 1982, bitone bleu lumineux ;
'Divine' (M. Dunn, 1988), si proche de 'Mystique' ;
'Gyro' (Aitken, 1989), vjolet moyen ;
'Oklahoma Crude' (Black, 1989), deux tons de bleu profond ;
'Special Mozart' (P. Anfosso, 1991), tendrement mauve parme ;
'Success Story' (Ghio, 1987) amoena violet pourpré ;
'Trenwith' (Nichol, 1985) amoena indigo tendre.
 Mais il y en a plein d'autres dont beaucoup ont acquis une renommée internationale. Et, forcément, aux générations suivantes, les gènes de 'Mystique' se trouvent dans une multitude de variétés, dans les tons de bleu, en majorité, mais aussi dans toutes sortes de couleurs.

Il y a un certain nombre de variétés, comme ça, que l'on peut qualifier de pierres angulaires, incontournables. Mais tous les amateurs d'iris doivent connaître (et si possible cultiver) ce 'Mystique', d'un bleu délicieux et inoubliable.

Illustrations : 


 'Mystique' 

'Spanish Peaks' 


'Diplomacy' 

'Claude-Louis Gayrard' 


'Oklahoma Crude'

3.6.16

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Annus horribilis. 

2016 aura été une année horrible pour les iris dans de nombreuses régions de France. Gel tardif, grande fraîcheur, pluies diluviennes, inondations se sont succédés durant toute la saison de la floraison. Tournons-nous vers 2017 et commençons tout de suite à rêver...

Grande Mademoiselle. 

La petite commune de Champigny sur Veude, en Indre et Loire, qui ambitionne de devenir la Cité des Iris, a lancé une consultation originale parmi les hybrideurs français. Il s'agit de créer une variété nouvelle de grand iris, dans les tons de grenat ou brun-rouge, à laquelle serait donné le nom de 'Grande Mademoiselle' et ainsi dédiée à la cousine de Louis XIV, châtelaine de Champigny au XVIIeme siècle. Plusieurs hybrideurs ont dores et déjà répondu à la proposition.

L'école des iris. 

La commune de Beaumont en Véron, celle où j'habite, a hérité d'une partie de ma collection d'iris. Elle a débuté une démarche intéressante. Les iris ont été plantés à proximité de l'école du village, dans un espace en cours d'aménagement en jardin public. C'est le Conseil Municipal des Jeunes qui a pris en charge cette plantation et a imaginé d'en faire un jardin pédagogique, à la disposition des enfants de l'école.qui gardent les fleurs sous leurs yeux. Dès ce printemps, les iris, méticuleusement entretenus par l'équipe des jardiniers municipaux, ont bien poussé et fleuri. Ces jours-ci les enfants des cours CP, CE1 et CE2 ont suivi avec attention et enthousiasme un exercice de pollinisation. Même si il y a peu de chances que les croisements réalisés soient féconds (conditions météorologiques désastreuses) les écoliers ne regarderont plus les iris de la même façon après ce cours pratique qui les a visiblement intéressés.

LA FLEUR DU MOIS

‘MODERNAIRE' (W. Luihn, 1973) 
Lilac Mist X Royal Heritage 

Voilà un iris qui m'a séduit dès que je l'ai vu. C'est une variété qui est arrivée ici à l'occasion d'un échange (plus de la moitié de mes iris proviennent de ce mode d'acquisition), que je n'avais pas commandée, et que je ne connaissais même pas ! Mais dès qu'elle a fleuri, j'ai été enchanté.

La description qui en a été donnée pour son enregistrement correspond exactement à la réalité : Pétales violet campanule ; sépales campanule avec les épaules lavées d'acajou ; barbe violette teintée de bronze dans la gorge. C'est cette influence d'acajou qui fait toute l'originalité de la variété, en lui conférant une chaleur exceptionnelle chez un iris sombre. Il est bien possible que cette teinte rougeâtre ait été le but recherché par Walt Luihn lorsqu'il a réalisé le croisement de 'Lilac Mist' (Luihn, 1968) par 'Royal Heritage' (Luihn, 1967). Le premier est un mauve plutôt banal, de bonne famille, certes, (Pacific Panorama X Rippling Waters) mais sans trait particulier et, d'ailleurs sans parcours remarquable dans la carrière des honneurs, ni, semble-t-il, dans l'échelle des ventes. 'Royal Heritage' est plus original. Son coloris est un violet vif et ses barbes, assorties à la couleur des sépales, portent des poils couronnés de brun moutarde où l'on sent les prémices de la teinte rousse qui caractérise la variété. Son pedigree est également peu commun, dans son principe. Le voilà : (Mary McClellan x Allegiance) X self. Il est assez rare qu'un cultivar soit issu d'un self-croisement, car ce type d'alliance est rarement fertile. Au demeurant les deux géniteurs sont des variétés excellentes et fort connues. On a sans doute tout dit à propos de 'Allegiance' mais il n'en est pas de même à propos de Mary McClellan (Tom Craig, 1952). Cet iris a notamment la particularité de disposer de gènes d'oncoclyclus ce qui fait, d'ailleurs, qu'il n'a pas été classé dans la catégorie des TB mais dans celle des OB. Et quand on connaît le trait caractéristique des iris Arils, un signal sombre sur les sépales, on n'est plus étonné de cette lueur obscure au cœur de 'Modernaire'.

Nous avons donc là une variété qui sort de l'ordinaire. Elle a un frère de semis, qui s'appelle 'Style Trend' (Luihn, 1973), mais celui-ci n'a pas tout à fait les mêmes qualités : couleurs plus pâles et traces rouges beaucoup moins accentuées (elles ne subsistent guère que sur la barbe), mais remplacées par un coloris des sépales qui fait un peu penser à celui d'un amoena bleu inversé ou de la variété 'T-Rex' (Richardson, 2002).

La descendance de 'Modernaire' est squelettique. Seulement deux variétés, obtenues et enregistrées par un obtenteur peu connu du Nebraska, Connell Marsh.

Dans mon jardin, 'Modernaire' était situé (je dis « était » puisque toute la collection est partie à quelques kilomètres pour connaître une nouvelle destinée) dans une partie où dominaient les iris bleus et violets. Ses voisins immédiats, 'Mystique' ou 'City Light', ne faisaient certes pas mauvaise figure, mais son éclat faisait que c'était lui qu'on regardait en premier, avant de tourner le regard vers ses augustes compagnons. Des iris comme celui-là, on n'en voit pas tous les jours et l'on peut dire merci à Walter Luihn d'avoir produit une aussi jolie fleur. Mais cet hybrideur a connu bien d'autres succès : 'Blackout' (1985), 'Caliente' (1967), 'Navy Chant' (1981), 'Temple Gold' (1976)... Le summum de sa carrière étant atteint avec 'Song of Norway' (1977), Médaille de Dykes de 1986.

Illustrations : 


 'Modernaire' 


'Royal Heritage' 


'Mary McClellan' 


'Style Trend'

ECHOS DU MONDE DES IRIS

L'art de plier les serviettes.

PORTRAITS

N'est-ce pas la meilleure manière de rendre hommage à tous ceux qui, depuis cent cinquante ans maintenant, font des iris hybrides ce qu'ils sont aujourd'hui, que de publier quelques photos de leurs œuvres ? Irisenligne va désormais dresser un bref portrait de nombreux hybrideurs de tous pays et offrir à ses lecteurs les plus belles images de leurs iris.

 I – Ferdinand Cayeux (1864/1938) 

 Il est normal de commencer ces portraits par celui de Ferdinand Cayeux, le plus célèbre et le plus talentueux des obtenteurs des années de l'entre-deux-guerres. Si l'on ne parle que de son action d'hybrideur, on peut dire qu'il a tenu le première place mondiale entre 1923 et 1938, date de sa disparition. Tout ce que le royaume des iris comptait de personnages importants a défilé dans son exploitation du Petit Vitry, au sud de Paris, pour admirer ses nombreuses et remarquables réalisations dont les gènes sont toujours présents dans les iris d'aujourd'hui.

Il n'est pas facile de sélectionner seulement quatre variétés dans une production aussi nombreuse et importante, mais il faut bien le faire Voici :

 'Thaïs' (1926) 


'Francheville' (1927) 


'Pluie d'Or' (1928) 


'Tanagra' (1939)

MÉLANGE DES GENRES

On entend dire parfois que la découverte d'iris vraiment nouveaux devient problématique, que les obtenteurs reproduisent indéfiniment ce qui existe déjà, et qu'il n'y a plus rien à inventer. Il existe cependant quelqu'un qui n'est pas d'accord avec cette opinion pessimiste, c'est le « professeur » Keppel. Il donne depuis quelques semaines des cours d' « irisologie » sur Internet, dans le but de toucher le plus grand nombre. Cette diffusion au monde entier, c'est ce qu'on appelle de la vulgarisation : la science mise à la portée de tous. Et c'est passionnant. Il y a maintenant longtemps que j'ai compris le phénomène des plicatas grâce à ses explications. Plus récemment j'ai fait de même avec les luminatas, et voilà qu'il réunit les deux dans une lumineuse explication des « luminata-plicatas ».

Voici la traduction de ce qu'il raconte à ce sujet : « Luminata et plicata sont des traits récessifs, mais aucun n'est dominant par rapport à l'autre. Ainsi... si l'on obtient quelque chose qui porte à la fois les gènes luminatas et plicatas, on obtient les deux modèles. L'un se superpose à l'autre. Le centre sans dessins des sépales du plicata est couvert par les veines légèrement colorées du marquage luminata ; les bords clairs et la zone immaculée près des barbes du modèle luminata sont couverts par les lisières et les épaules colorées du modèle plicata. Voilà ! Apparaissent des sépales pratiquement totalement colorés. Malheureusement cela peut avoir l'air désordonné et en fouillis, mais en faisant une sélection particulière, et avec un peu de chance, des choses très intéressantes peuvent apparaître.

Les deux images ci-dessus proviennent du croisement n° 13-14 : High Desert (plicata plicata aux pétales jaunes) X un frère de semis de Volcanic Glow (luminata). »

Keppel donne ensuite quelques explications complémentaires : « Si vous voulez obtenir un modèle luminata « pur » (pas un luminata-plicata), le meilleur moyen est un croisement luminata X luminata. Vous obtiendrez une majorité de luminatas plus quelques glaciatas. (…), ou bien un croisement luminata X glaciata... vous aurez une majorité de glaciatas mais aussi quelques luminatas. Vous pouvez également réaliser un croisement luminata-plicata X luminata, ou luminata-plicata X glaciata, cela en donnera quelques-uns ; luminata-plicata X luminata-plicata devrait donner un petit pourcentage de luminatas. Si vous croisez un luminata avec quelque-chose d'autre, vous aurez besoin d'un croisement à la génération suivante pour récupérer le luminata récessif. »

Ce chapitre sur les luminata-plicatas n'est pas le dernier : il y aura une suite qui abordera la question délicate des glaciatas, et peut-être même encore autre chose.

Il est évident que tout ceci est fait pour donner des idées à tout amateur avide de curiosités. Avec un guide comme Keith Keppel on peut se lancer sans hésitation. Keppel lui-même est pris d'un certain vertige devant l'immensité des perspectives que ses découvertes (ou plutôt ses analyses) ouvrent devant lui. C'est comme si, au détour d'un chemin, il avait sous les yeux une étendue couverte de fleurs, si vaste qu'il n'en verrait pas la fin. Un monde miraculeux, dont il concevrait l'immensité, mais dont il ne maîtriserait qu'une étroite bordure. Un monde miraculeux dont il se rend compte que le temps qui lui reste pour l'explorer est bien trop limité pour qu'il parvienne à le connaître parfaitement. Il s'en désole, mais, en nous donnant ces parfaites explications, il nous prend par la main pour nous amener sur cette route dont il sait qu'elle est trop longue pour lui, mais où il nous entraîne pour que nous prenions sa suite.

Avec un guide aussi enthousiaste, il est certain que des hybrideurs de tous les pays lui emboîteront le pas et que le monde merveilleux des plicatas, luminatas, glaciatas et tous leurs dérivés connaîtra des développements que l'on devine à peine aujourd'hui. Cela veut dire que, rien qu'en ce domaine, la recherche en hybridation des iris a un avenir formidable.

Illustrations : 



un plicata ='High Desert' (Keppel, 2014) 


un luminata ='Volcanic Glow' (Keppel, 2011) 


un glaciata ='Sun Shine In' (Keppel, 2009) 

Texte original : 
Luminata and plicata are recessive traits, but neither is dominant over the other. So....if we get something which carries both luminata and plicata genes, we get BOTH patterns. One pattern superimposes on the other. The unmarked fall center of the plicata is covered with the paler-veined markings of the luminata; the pale edge and unmarked area near beard which is from luminata is covered by the border markings and haft banding of plicata. Voila! An almost all-over patterned fall appears. Unfortunately they can be messy and cluttered looking, but with proper selection...and luck....some very interesting things can appear. 
(These two pictures are of seedlings from cross 13-14: High Desert (plicata with yellow standards) X a sib to Volcanic Glow (luminata). 
If you want "pure" luminata pattern (not luminata-plicata), the best way is to cross luminata X luminata. Most will be luminata, plus a few glaciatas. (...) Or cross luminata X glaciata.... more glaciatas, but some luminatas also. Or luminata-plicata X luminata, or luminata-plicata X glaciata will give some; luminata-plicata X luminata-plicata should give a small percentage of luminatas. If you outcross a luminata to something else, you will need to cross a second generation to recapture the recessive luminata.