30.8.08







LE MIROIR ETAIT PRESQUE PARFAIT
Bluebeard’s Ghost

‘Bluebeard’s Ghost’ est la variété (SDB) qui a été déclarée « meilleur espoir » pour 2008 dans la grande course aux honneurs de l’AIS. Ce qui en fait l’attrait, c’est sa remarquable blancheur et l’intensité de ses barbes bleues.

Les barbes bleues sont plutôt fréquentes chez les iris nains standards, mais pas souvent avec ce degré d’intensité. La curiosité m’a poussée à analyser le pedigree de cet aimable iris, au moins jusqu’à la sixième génération, c’est à dire ce que l’on pourrait qualifier de premier tour dans un tournoi de tennis.

Du côté maternel, ‘Bluebeard’s Ghost’ provient d’un frère de semis de ‘Island Sun’, on ne peut donc pas savoir quel peut en être le coloris. Ce que l’on sait, c’est que ‘Island Sun’ (Black P. 2002) est un iris du modèle ‘Joyce Terry’ (pétales jaunes, sépales blancs liserés de jaune) avec des barbes bleutées. Ses parents allient le mauve lilas de ‘Shy Violet’ (B. Jones 88), le blanc de ‘Sigh’ (P. Black 88) et le « Joyce Terry » de ‘Spin Again’ (P. Black 95).

Du côté paternel on trouve ‘Experiment (P. Black 2005), jaune verdâtre avec des barbes indigo foncé. A partir de cette variété on constate que tout le pedigree est l’exact inverse de celui de ‘Island Sun’. D’où une économie de moyens qui fait qu’il n’y a que 30 semis ou variétés identifiées sur les 64 possibilités présentes en 6eme génération.

Dans chacune des ses branches ‘Bluebeard’s Ghost’ recèle tous les ingrédients qui le caractérisent. Ce genre de croisement est une façon de rechercher un approfondissement des formes et des couleurs : une forme élaborée d’ « inbreeding » - en français « endogamie ». Pour s’en tenir au seul coloris, le blanc des pièces florales vient de ‘Sigh’ et de son lointain ancêtre ‘Snow Flurry’, les barbes bleu vif de ‘Experiment’ et, plus loin, du célèbre ‘Stockholm’ (Warburton 71).

Le travail qui a abouti à une variété aussi valeureuse que ‘Bluebeard’s Ghost’ démontre le grand professionnalisme de Paul Black, son obtenteur. Les amateurs, qui hybrident gentiment dans leur jardin, peuvent s’en inspirer pour tenter de parvenir à un résultat aussi parfait. Il faut toujours suivre l’exemple des grands (du moins en matière d’hybridation) !



MAUVAISE NOTE

Je reçois régulièrement le catalogue VAD de Jacques Briant. Ce n’est pas le plus mauvais, et j’ai feuilleté la version « automne 08 » de sorte que mon attention a été attirée au chapitre des iris.

Trois offres : Trois iris du Japon (JI), six grands iris des jardins (TB) et trois iris de Louisiane (LA).

Les trois premiers sont :
‘August Emperor’ (Marx 61), un ancien mais encore bien présentable, avec ses coloris en pourpre et bleu – mais le nom est mal orthographié, ce qui reste secondaire ;
‘Freckled Geisha’ (Reid 81), un plicata très célèbre ;
‘Butterflies in Flight’ (Aitken 91), une originale association de veines mauves sur fond blanc et de violet pour les styles, avec un signal vert tendre.

Les « iris germanica » selon la dénomination choisie par les rédacteurs du catalogue, mélangent l’ancien et le moderne, sans aucun signalement sur l’origine et la date des variétés sélectionnées :
‘Sultan’s Palace’ (Schreiner 77), un iris de bonne valeur, brun-rouge à barbes assorties, sauf que j’ai des doutes sur la véracité de l’identification car la photo et la description parlent de barbes jaunes ;
‘Frost and Flame’ (Hall 56), une variété fameuse et toujours valable, blanche à barbes minium ;
‘Wine and Roses’ (Hall 63), bitone orchidée/pourpre, connu des tous les amateurs ;
‘Batik’ (Ensminger 80), l’archétype des iris à couleurs rubanées, autrement dit « broken color », qui a frôlé la Médaille de Dykes en 95 ;
‘Blue Eyed Blond’ (Ensminger 89), une variété très intéressante, jaune à barbes bleues, mais qui n’est pas un TB, mais un IB, plutôt tardif, sans que cela soit précisé (ce qui n’est pas non plus bien grave puisque ces plantes sont destinées à un public qui ne s’embarrasse pas de ces détails, mais cela n’est pas très sérieux) ;
enfin ‘Braithwaite’ (Randall 52), libellé Brainwaite (encore une erreur qui ne fait pas honneur au professionnalisme des auteurs du catalogue), un amoena glacier/violet qui est né en Grande Bretagne, ce qui est peu courant pour une plante de grande diffusion.

Le troisième groupe concerne des iris de Louisiane. A noter qu’en ce qui concerne ces hybrides, tout comme les JI dont il a été question plus haut, il est fort peu parlé des difficultés de culture sous notre climat : ce sont des plantes qui sont très gourmandes, et qui demandent des étés chauds et humides (ou considérablement arrosés) et des hivers doux et plutôt secs…
Là encore des variétés d’âge le plus divers :
‘Black Gamecock’ (Chowning 78), une très intéressante variété dans les tons sombres ;
‘Bold Pretender’ (Morgan 83), libellé abusivement « Bald Pretender », joli iris rouge ;
et pour finir un certain ‘Asazumafune’ qui m’a mis la puce à l’oreille. Manifestement la photo ne représente pas un LA, mais plutôt un JI. Et j’ai trouvé sur Internet qu’il s’agit effectivement d’un iris du Japon, qui est en vente à la pépinière Kamo, à Yokohama, mais qui ne semble pas avoir été enregistré en Occident. C’est un bel iris bleu, mais le proposer comme Louisiane est un peu osé !

Tout ceci sent l’à-peu-près et me paraît faire preuve d’un certain manque de respect du client. C’est dommage de la part d’une entreprise qui se voudrait sérieuse.

22.8.08











LE FACTEUR MANDARINE

Une des caractéristiques des iris rose orchidée apparus dans les années 30 était de présenter des barbes couleur mandarine. Cette vive couleur avait pour avantage de donner plus d’éclat aux fleurs qui l’arboraient et les hybrideurs de l’époque se sont efforcés de rendre ces barbes d’un orange plus vif, puis de les faire apparaître sur des fleurs d’une autre teinte que rose violacé.

Mais pour arriver au résultat recherché, il y a deux chemins : soit en modifiant la couleur des pièces florales tout en conservant les barbes d’origine, soit en transférant les barbes mandarines vers des fleurs d’une autre couleur. Ces deux chemins ont été utilisés.

Melba Hamblen fait partie de ceux qui ont essayé la première voie. Elle a croisé des roses et des bleus. Par ce moyen elle a obtenu ‘Enchanted Violet’ (57) qui n’est ni rose ni bleu, mais plutôt couleur bruyère, avec des barbes orangées. Mais il lui fallut pas mal d’obstination pour parvenir, quinze ans plus tard, à ‘Tipperary’ (72), qui peut être considéré comme le plus achevé, pour son époque, des iris bleus à barbes rouges.

Orville Fay, lui, a choisi la deuxième voie. Il a décidé de créer des blancs à barbes rouges. Il a croisé des iris blancs, notamment ‘New Snow’, avec des roses orchidée à barbes mandarines, mais le résultat, long à venir, fut plutôt un iris mauve, porteur des fameuses barbes, qui allait devenir l’un des plus utilisés en hybridation de tous les temps : ‘Rippling Waters’ (61). Dans le domaine des mauves – ou violets – à barbes mandarine, il a pour descendants des variétés aussi répandues que ‘San Leandro’ (Gaulter 68) ou ‘Lilac Treat’ (Niswonger 70), mais aussi ‘Raspberry Ripples’ (Niswonger 69), ‘Space Blazer’ (Gibson 76), ou ‘Mulled Wine’ (Keppel 82). Il y a beaucoup d’autres variétés, dans un vaste choix de coloris ou de nuances, qui ont hérité des barbes mandarines de ‘Rippling Waters’, comme par exemple ‘Country Lilac’ (Hamblen 71).

Des blancs à barbes rouges, il y en a eu très vite, et les travaux d’Orville Fay ont payé : à commencer par ‘Lipstick’ (54) et surtout son descendant ‘Arctic Flame (57). ‘Christmas Time’ (Schreiner 65) fait partie de la descendance d’ ‘Arctic Flame’, et on lui doit de très nombreux blancs à barbes minium, comme ‘Startler’ (Schreiner 78), Filoli (Corlew 82) ou les français ‘As de Cœur’ et ‘Neige de Mai’ (Cayeux 78).

Dans l’association bleu + barbes rouges, on est arrivé aujourd’hui à d’excellents résultats, mais le chemin a été long et plein d’embûches. L’une des pierres angulaires de ce coloris fut ‘Marquesan Skies’ (Blocher 67), dérivé d’un frère de semis de ‘Arctic Flame’. Keppel l’a utilisé avec succès pour son ‘Actress’ (76), très apprécié, et ‘Fire Water’ (77) moins connu. ‘Skyblaze’ (Keppel 87 –FO 90) est issu à la fois de l’un et de l’autre, tout comme le très joli ‘Douce France’ (Anfosso P. 88). Parmi ses propres descendants se trouvent les deux frères de semis de Richard Cayeux ‘Eau Vive’ et ‘Princesse Caroline de Monaco’ (97). Celui-ci, en plus de porter l’un des noms les plus longs du catalogue, arbore une barbe rouge minium qui fait son succès.

Le facteur mandarine, qui intriguait tant les hybrideurs des années 30/40 c’est ainsi répandu dans toutes les couleurs. Après les rose orchidée, les blancs et les bleus, on pourrait parler des jaunes, et même des noirs.

Pour les jaunes, on peut même dire que ce n’est pas la barbe mandarine qui leur a été adjointe, mais au contraire que c’est la barbe mandarine qui leur a apporté une amélioration remarquable. En apportent la preuve ‘Techny Chime’ (Reckamp 55), Rainbow Gold’ (Plough 59), puis ‘Temple Gold’ (Luihn 77), ou ‘Flaming Victory’ (Weiler 83). Ce dernier a donné naissance à un tas de jaunes très riches avec des barbes allant du vieil or au mandarine et au rouge vif, comme ‘Throb’ (Weiler 91), ‘Amarillo Frills (Hager 2002) et ‘Lunar Flame’ (Shockey 92).

Les barbes minium ont aussi fait leur apparition sur les fleurs noires. Cela ne date que des dernières années, et ce n’est pas encore parfait, mais c’est une nouvelle avancée. C’est d’Australie que le mouvement est parti avec ‘Witch’s Wand’ (Blyth B. 88). Keith Keppel, le compère de Barry Blyth, lui a emboîté le pas avec ‘Night Game’ (96) puis, cette année, ‘Midnight Passion’ issu de ‘Night Game’.

Ces quelques exemples ne font évidemment pas le tour complet de l’influence du facteur mandarine et de sa charge de lycopène, mais ils ouvrent une vue sur un autre aspect de l’extraordinaire monde des iris.
ECHOS DU MONDE DES IRIS

A la Convention américaine (Austin – Texas) 2008

President’s Cup
( Meilleur iris en provenance de la Région organisatrice) = ‘Jean Queen’ (Burseen 2005)
Franklin-Cook Cup
(Meilleur iris en provenance d’une autre Région) = ‘Gypsy Lord’ (Keppel 2006)
Hager Cup
(Meilleur iris autre que TB) = BB ‘Crow’s Feet’ (Black P. 2006)

15.8.08


Un iris « à rayure »

‘Crow’s Feet (Black 2006) est un BB qui a obtenu la Ben Hager Cup (qui récompense le meilleur iris autre que TB présenté à la Convention Annuelle de l’AIS ) lors de la Convention 07 à Austin –Texas-.

ECHOS DU MONDE DES IRIS

A chacun son « distalata »

C’est à croire que quand quelqu’un produit quelque chose de nouveau, ses pairs veulent absolument démontrer qu’ils sont capables d’en faire autant !

La photo ci-dessus, parue dans le dernier bulletin de l’AIS, en est une démonstration : Tom Burseen, un obtenteur qui donne souvent des noms qui nous paraissent ridicules à nous européens, a enregistré ce ‘Serious Sighs’ en 2007. Hommage ou imitation du travail de Keith Keppel et de Joë Ghio ?






OH ! HAPPY DAYS !
ou les tribulations de I. variegata


Comment, à partir d’un petit iris diploïde à pétales jaunes et sépales veinés de violet, obtenir des fleurs entièrement jaunes, orange ou roses ?

C’est l’un des défis que se sont lancés les hybrideurs pionniers. Et sans tourner autour du pot, on peut dire qu’ils ont réussi, et même au-delà de toutes les espérances. Mais les difficultés ont été nombreuses, les échecs répétés et les déceptions fréquentes. Il a fallu tout l’enthousiasme et toute la détermination de quelques-uns pour que le chemin ne soit pas abandonné et pour que, finalement, le résultat soit au rendez-vous.

Le fait que I. variegata possède des pétales jaunes, ce qui n’est pas courant chez les grands iris, a laissé à penser aux hybrideurs des origines que l’on pouvait partir de cette espèce pour parvenir à des fleurs uniformément colorées comme les fameux I. pseudacorus. Bien que les renseignements que l’on possède sur la question ne donnent aucune certitude, on pense néanmoins que la couleur jaune a été atteinte par l’union d’I. variegata et du classique I. germanica. On peut l’affirmer parce que les premiers jaunes présentaient sur les sépales des veines violacées que des années et des années de sélection ont réussi peu à peu à faire disparaître.

La route semée d’embûches qu’ont eue à parcourir ceux qui s’acharnaient sur la couleur jaune a commencé dès les années « diploïdes », mais avec bien peu succès. Et au moment du passage de la diploïdie à la tétraploïdie, le jaune n’est apparu que tardivement. Une première tentative a eu lieu dans les années 20 et a donné naissance à cette fleur fripée et marbrée de brun qui se nomme ‘W.R. Dykes’ (1926), du nom de célèbre obtenteur et exégète des iris. Quels que soient ses défauts, ‘W.R. Dykes’ est l’ancêtre des plus intéressants iris jaunes qui ont constitué la panel de base des jaunes modernes. Ainsi en est-il de ‘Yellow Jewel’ (K. Smith) et de ‘Golden Majesty’ (Salbach), mais aussi de ‘Golden Treasure’ (Schreiner) et de ‘Ming Yellow’ (Glutzbeck). Nous sommes alors dans les années 30. C’est Sydney Mitchell, toujours dans les années 30, qui a eu la bonne idée d’améliorer la pureté de cette couleur et alliant une variété d’un ton de bronze et une variété blanche ou vice-versa. Il a essayé et après une grande quantité de semis plus ou moins intéressants il a obtenu ce qu’il cherchait : du jaune vraiment jaune. C’est le cas de ‘California Gold’ (1933) et surtout de ‘Happy Days’ (38), qui est véritablement l’origine du jaune tel que nous le connaissons actuellement.

A partir du jaune, on a pu obtenir deux nouveaux coloris : le rose puis l’orange. Le phénomène de l’apparition du rose, subite et en différents endroits, a été maintes fois expliqué et analysé. Je n’y reviendrai pas aujourd’hui. Mais que l’on sache bien que le rose dont nous parlons ici est ce rose crémeux que la langue anglaise distingue sous le vocable « rose » du rose violacé que est appelé « pink ». Son origine jaune est évidente quand on regarde les premières variétés à avoir été qualifiées de roses : on est plutôt entre le crème et le chamois. Pour obtenir du rose aussi pur que possible, il a fallu éliminer tout ce qui pouvait en brouiller l’éclat, et notamment la couleur jaune, sous-jacente. Les hybrideurs ont donc concentré leurs efforts sur cette élimination. Peu à peu le rose est devenu cette couleur si délicate que l’on rencontre chez les variétés des grands maîtres qui ont pour nom Joseph Gatty, Glen Corlew ou Vernon Wood, et qui a obtenu des amateurs un accueil enthousiaste qui ne se démentit pas.

A ce niveau, on est bien loin de l’ancêtre I. variegata, néanmoins ses gènes sont toujours là. Notamment dans les iris orange qui ont hérité de lui un assez faible développement et une taille râblée caractéristiques.

Au début l’orange n’a pas été une couleur recherchée. Au contraire, puisque c’est cette teinte qu’il fallait éliminer pour obtenir du jaune, puis du rose. Les hybrideurs ne sont revenus vers les tons de pêche, d’abricot et d’orange que lorsqu’ils sont parvenus par ailleurs à un rose parfait. Ce n’est que dans les années 50 que l’on a obtenu des iris abricot valables, et il a fallu attendre les années 60 pour voir des oranges dignes des récompenses annuelles de l’AIS.

Pour les iris franchement oranges, ce n’est qu’au début des années 60 que cette couleur a pris son essor. L’un des tout premiers a être apprécié a été ‘Celestial Glory’ (Reckamp 61), même si son coloris n’était pas d’une grande pureté. Très vite, après celui-ci les oranges se sont améliorés et enrichis. Des variétés comme ‘Supersimmon’ (Parker 77) et ‘Fresno Calypso’ (Weiler 78) se sont révélés comme de grands succès. ‘Hindenburg’ (Maryott 83), ‘Montevideo’ (Ghio 87), ‘Orange Celebrity’ (Niswonger 84) ont pris la suite, jusqu’à ‘Craklin’ Caldera’ (Aitken 2003).
Parmi les plus beaux oranges que l’on peut qualifier d’anciens, citons 'Spanish Gift'.
Le petit I. variegata était devenu un fantôme, mais les amateurs ne peuvent pas l’oublier. Ils doivent même lui rendre les honneurs car en plus des jaunes, des roses et des oranges, ils lui sont redevables, évidemment, de ces iris qui sont toujours désignés comme « variegata » mais qui sont en réalité des bicolores dont seuls les pétales, dans les tons de jaune, rappellent la lointaine origine.

8.8.08


MISS PLICATA

Un nouveau nom a fait son apparition dans le monde des iris. Celui de Margie Valenzuela. Cette dame était déjà connue comme une photographe d’iris de premier plan – au double sens de la phrase. Elle a intégré la famille des hybrideurs et propose cette année quelques plicatas intéressants. En voici un échantillonnage qui donne une idée de son autre talent.



CEDRIC MORRIS
PEINTRE ET AMATEUR D’IRIS


Le petit monde des iris comporte décidément des personnages hors du commun. Prenez le cas de Sir Cedric Morris et vous aurez un bel exemple d’originalité.

Voilà un citoyen britannique, originaire de la côte sud du Pays de Galles, qui a acquis une célébrité considérable dans le monde de l’art, et qui est aussi une personnalité du mode des iris dans son pays, mais pas seulement, et s’est fait un nom dans la botanique et l’horticulture.

Ses études de peinture, il les a faites à Paris, peu avant la première guerre mondiale. Il a eu la chance d’échapper au massacre de 1914/18. A peine démobilisé, il a repris ses études parisiennes et très vite il s’est fait un nom dans le milieu artistique, aussi bien en Grande Bretagne que dans le reste du monde. Ses œuvres, des fleurs, des animaux, des scènes de genre, d’un style simple, gracieux et un peu lisse, expriment bien le caractère plutôt bucolique de leur auteur. Curieux de bien des choses, il s’est très vite intéressé aux plantes et a été séduit, en particulier, par les iris. Quand il a acheté, en 1940, le domaine de Benton End, dans le Suffolk, ce n’est pas seulement pour y ouvrir une école de peinture, l’East Anglian School of Painting and Drawing, qui fut fréquentée par des élèves qui acquirent par la suite une véritable célébrité, mais aussi pour disposer d’un vaste espace où cultiver ses iris et effectuer ses multiples croisements. Dans le dernier numéro de la Revue « Country Living », la journaliste Stéphanie Donaldson fait le portrait de ce personnage extraordinaire. Elle écrit : « Pour Cedric Morris, le jardin était aussi important que la maison. Il y cultivait des fleurs qui plaisaient à son regard d’artiste, et en particulier sa propre lignée d’iris barbus. Il les admirait pour « leur élégance, leur fierté et leur délicatesse ». Voilà une analyse qui va effectivement comme un gant aux iris !

C’est donc l’amateur et l’obtenteur d’iris qui nous intéresse ici. Un obtenteur qui a eu l’exceptionnel mérite d’hybrider et de sélectionner un des tout premiers iris roses, sans doute même le premier iris rose d’Europe. Dans « The World of Irises » on peut lire : « En Angleterre, Sir Cedric Morris a utilisé ‘Sacramento’ (1) ‘Golden Hind’ et ‘Mary Geddes’ dans son programme de recherche sur les iris roses. Il en a résulté une série de plicatas jaunes. En croisant et recroisant ses semis, il obtint ‘Edward of Windsor’ (1945). …avec de grandes fleurs, une couleur vive, et des veines de texture violettes sur les sépales. » Dans les mêmes moments et jusqu’à la fin des années 50 , Cedric Morris enregistra toute une série de nouvelles variétés, dans un grand nombre de coloris, auxquelles il donna un nom commençant toujours par ‘Benton’ pour rappeler la propriété où ils avaient été obtenus.

Parallèlement « The World of Irises » qui n’en est pas avare, raconte une de ces anecdotes qui font le charme de l’univers des iris. Le fameux hybrideur David Hall, qui avait bon cœur, donna un jour de 1946 à son collègue anglais Harry Randall du pollen en provenance d’un de ses nouveaux semis roses. Ce pollen fut, dès son retour en Grande Bretagne, partagé avec Cedric Morris (devenu depuis 1942 Sir Cedric Morris) qui l’utilisa sur ‘Edward of Windsor’ et en obtint une variété fort belle qu’il exposa en 1948 au British Iris Society Show, où il fut remarqué par la Reine-Mère, laquelle proposa le nom de ‘Strathmore’, celui de sa propriété familiale. C’est ainsi que le second iris rose européen fut donc enregistré.

Une autre journée de gloire attendait Sir Cedric quand, en 1955, la BIS attribua à son ‘Benton Cordelia’, de 1953, la Médaille de Dykes Britannique.


Sir Cedric continua à se passionner pour les iris jusqu’à l’âge avancé de 90 ans, auquel il mourut en 1982, connu en tant que peintre dans le monde entier, mais également en tant que personnalité de l’horticulture (on a donné son nom à plusieurs fleurs, dont un narcisse et surtout un remarquable rosier blanc, toujours cultivé et proposé par André Eve). Sans oublier la place de précurseur qu’il occupa dans le microcosme des iris ! Un microcosme qui n’arrête pas de nous étonner.

(1) Plicata à base jaune célèbre pour avoir été aussi la variété de base du programme exceptionnel élaboré par Jim Gibson, le maître des plicatas.

1.8.08











DANS UN JARDIN DE CURÉ

La vieille maison est accolée à l’église. On dirait qu’elle en recherche la protection. Les pierres qui la constituent sont les mêmes que celles de sa voisine trapue, de sorte qu’on a l’impression qu’elle ne font qu’un. Ce sont les pierres brunes dont sont bâties les maisons auvergnates, ces maisons massives, épaisses, prêtes à affronter les rigueurs des hivers et les affronts des ans. Elles ont l’air sévère, comme cela, mais un détail, un perron surélevé, un porche monumental, leur donne une grâce, un cachet qui fait qu’on a envie d’y pénétrer.

Celle-là est d’une extrême simplicité, certain la trouvent austère, mais elle se fait discrète, en fait, pour ne pas porter ombrage à la rustique église romane, sa voisine. C’est l’église qu’il faut voir, pas la maison. Elle, elle n’est là que pour loger le curé. Enfin, elle était là pour ça, mais aujourd’hui c’est une maison de vacances pour le plaisir de quelque citadin amateur de vieilles pierres et de jardin clos.

Un simple portail de ferronnerie s’ouvre sur une allée empierrée, toute droite, qui mène au seuil de la maison. Pour atteindre le jardin, il faut contourner la bâtisse, ou la traverser. Sur l’autre face, la maison domine quelque peu son jardin, puisqu’il faut descendre cinq marches pour y accéder. C’est bien un jardin de curé, avec d’étroites allées, rectilignes, se coupant à angle droit, de rigoureuses bordures de buis, taillés court, et des plates-bandes destinées à l’origine à accueillir les plantes potagères cultivées pour nourrir le pasteur du village. Sur la côté néanmoins, le long du flan de l’église, une étroite bordure, qui court sur toute la longueur du jardin, était affectée aux fleurs. Des fleurs utiles, évidemment. Des fleurs pour décorer l’autel. Le propriétaire actuel a respecté cette destination et les fleurs qui s’y trouvent doivent être celles que le dernier curé avait plantées. Pour le printemps, ce sont des pivoines et des iris, des campanules, pour l’été, des lis, des fuchsias, des valérianes, pour l’automne des asters… Et plein de rosiers, touffus, un peu échevelés, qui se couvrent de fleurs charmantes dès la fin de mai.

Le curé devait être un homme méticuleux, peut-être un véritable amateur. En tout cas les touffes d’iris sont repérées par de petites plaques d’aluminium où, malgré les temps, l’oxydation et les lichens on peut encore lire le nom des variétés. Ce sont des iris français, de la grande période 1920/1930, qui feraient le bonheur de bien des collectionneurs. Les couleurs sont essentiellement du blanc, du rose, du bleu et du mauve : des teintes mariales propres à constituer des bouquets innocents pour les fêtes de l’Ascension ou de la Pentecôte. Comme on se voit bien, enfants, dans l’odeur sucrée des iris, chantant en chœur « Beau mois de mai, mois de Marie … » !

Des iris blancs, il y en a au moins trois : ‘Candeur’ (Nonin 33), ‘Iceberg’ (Cayeux 30) et ’La Neige’ (Verdier 12) ; en un peu plus coloré, ‘Marquita’ (Cayeux 31) exhibe ses pétales blancs et ses sépales finement rayés de pourpre ; ‘Yves Lassailly’ (Cayeux 28) s’orne de stries jaunes et pourpres sur les épaules ; ‘Arlette’ (Cayeux ?) est là aussi, en blanc crémeux, pour faire la transition avec les « roses » -ou du moins ceux que l’on disait de cette couleur avant l’apparition des vrais roses, et qui se placent entre le rose et le mauve. ‘Distinction’ (Cayeux 25) est de ceux-là, de même que ‘Charmeur’ (Cayeux 31), et même le superbe ‘Evolution’ (Cayeux 29), de deux tons pastels. ‘Béotie’ (Cayeux 32), franchement gris, doit être là pour les dimanches de Carême, ou pour les cérémonies d’obsèques, peut-être en compagnie d’ ‘Archevêque’ (Vilmorin 11), lui aussi bien sombre. En jaune, il n’y a qu’ ‘Eclador’ (Cayeux 32). L’ancien curé ne devait guère apprécier cette couleur. En revanche, des bleus ou violet, on en compte au moins cinq ! Le délicieux ‘Docteur Chobaut’ (Millet 31), bleu de lin, l’indigo ‘Germaine Perthuis’ (Millet 24), et puis aussi ‘Melle Schwartz’ (Denis 16), entièrement habillée de lilas clair, suivie de ‘Souvenir de Laetitia Michaud’ (Millet 23), bleu d’azur et ‘Mady Carrière’ (Millet 05), bleu pâle, la plus vieille variété de cette collection. Enfin, entre rose et mauve, l’inoubliable ‘Thaïs’ (Cayeux 26) est là, à proximité d’une énorme touffe de simple pallida, au délicieux parfum. Depuis combien de temps ces iris sont-ils là ? Sûrement plusieurs dizaines d’années, sans avoir jamais été transplantés. Ils arrivent à se bousculer un peu les uns les autres, de sorte que les séparer pour refaire la bordure serait des plus délicat, mais tels quels, ils forment une longue ligne où la confusion donne charme et fantaisie à un jardin qui se caractérise par ailleurs par sa rigueur géométrique.

Le soleil couchant, qui dore les vieilles pierres, et l’unique cloche qui sonne l’angélus, font de ce décor tranquille, une scène bucolique : on s’attend à voir une vieille femme, en longue robe noire et coiffe de dentelle, traverser lentement le jardin, clopinant dans ses sabots, pour se rendre à la prière du soir. Les iris anciens, couverts de fleurs, ne font que donner plus de force à cette image. Où est l’illusion ? Où est la réalité ?






ECHOS DU MONDE DES IRIS

Récompenses Est-Européennes

La compétition de la MEIS a donné le résultat suivant :
1. AM 02-0990-2 Mego Slovakia Cup
2. Princess Bride G.Sutton 00
3. Square Dance Skirt Cadd´s 02 Carpathian Medal
Andrus Wozniak 03 Carpathian Medal (ea)

Les amoenas ont été à l’honneur :

La photo ci-jointe donne une idée de ce qu’est le vainqueur de cette compétition. Anton Mego (Tono pour ses amis) est un excellent hybrideur.
Square Dance Skirt’ n’est pas mal non plus. Les Cadd sont des habitués des compétitions slaves.
‘Princess Bride’ est catalogué comme BB, mais avec 65cm de moyenne, il dépasse souvent le seuil des TB (70cm).