24.2.12

ECHOS DU MONDE DES IRIS

La grande braderie

Cooley’s Gardens, l’entreprise gérée par Richard Ernst, a été liquidée. Vers la fin de la saison dernière une grande braderie a permis d’écouler une grande partie du stock. Le reste a été acquis par Schreiner, ainsi que les terres (Schreiner est décidément la plus gigantesque entreprise d’iris au monde). Les semis ont échu à Willy Plotner (Wilwood Gardens, à Molalla).

Voici comment disparaît une des plus florissantes et des plus anciennes pépinières…

ORANGES DE BRETAGNE





Il paraît qu’un oranger sous le ciel irlandais, on ne le verra jamais. On ne le verra certainement pas davantage sous le ciel breton. Mais ce n’est pas d’agrume dont nous allons parler, mais d’iris. Évidemment !

Les bons iris orange ne sont pas légion, surtout parmi les variétés antérieures aux années 90. Le fameux ‘Son of Star’ (Plough 69) ainsi que ‘Orange Empire’ (Hamner, 1974) font partie de ceux qui sont au-dessus du lot, parce qu’ils présentent un coloris franc et bien uniforme, sur une fleur agréable à l’œil. ‘Fireside Glow’ (Schreiner, 1988) et surtout ‘Supersimmon’ (Parker, 1978) sont les meilleurs descendants oranges de ‘Son of Star’ tandis que ‘Hindenburg’ (Maryott, 1983) et ‘Oktoberfest’ (Maryott, 1987) se situent au même niveau parmi les descendants de ‘Orange Empire’. Il existe cependant d’autres souches et ce sont celles que Ben Hager a mises en œuvre lorsqu’il a conçu ‘Good Show’ (1988), une variété magistrale, au pedigree pas facile à déchiffrer, (Cindirella's Coach X ((Hayride x ((((Norah x Thisbe) x Glittering Amber) x (semis x Glittering Amber)) x Picture Perfect)) x Fresno Calypso)), mais qui a été largement utilisée un peu partout pour obtenir de beaux iris oranges. Avec ‘Feu du Ciel’ (1993), Richard Cayeux a ajouté sa pierre à l’ouvrage. Le pedigree de cet iris, ((Sky Fire x China Dragon) X Marcel Turbat), fait aussi appel à un panel de bons oranges. Pas étonnant donc que le croisement (Good Show X Feu du Ciel), qui continue la série d’inbreeding amorcée à la génération d’avant, ait donné d’excellents résultats.

Ce sont ceux que Gérard Madoré, hybrideur breton, a obtenus. Et nous voilà revenus aux oranges de Bretagne !

Entre 2001 et 2007, Gérard Madoré a mis sur le marché au moins seize iris oranges (ou abricot), tous issus de ‘Good Show’ (voir photo), et dont dix proviennent du croisement (Good Show X Feu du Ciel) ! En voici la liste :
· ‘Arzano’ (2007) – voir photo -
· ‘Callac’ (2001)
· ‘Corlay’ (2005)
· ‘Crozon’ (2001)
· ‘Huelgoat’ (2001)
· ‘Languidic’ (2001) – voir photo -
· ‘Plemet’ (2001)
· ‘Plouaret’ (2001) – voir photo -
· ‘Plouescat’ (2001)
· ‘Plouhinec’ (2001).
Tous les coins de Bretagne sont représentés ! Tous les tons d’orange aussi. Depuis l’orange abricot de ‘Callac’ jusqu’à l’orange ocré de ‘Plouaret’, en passant par l’orange mandarine de ‘Arzano’ ou le capucine de ‘Languidic’. Tous ont une belle barbe minium, ce qui est normal puisque c’est aussi l’ornement des deux parents.

Cependant beaucoup de cette nombreuse fratrie se ressemblent énormément et je ne suis pas certain que la sélection de tous ait été une bonne solution. Tous les grands hybrideurs le disent : il faut être très sévère dans ses choix et ne retenir que le meilleur. Au demeurant tous ne font pas ce qu’ils recommandent ! Témoin : Barry Blyth, qui enregistre souvent toute une petite famille… Pardonnons-lui néanmoins parce que tous sont jolis. Et nous ferons de même pour Gérard Madoré, qui a, en plus, l’excuse d’être un amateur.

17.2.12

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Twiki

A côté de la base de données Irisregister qui recopie les check-lists depuis l’origine, mais est payante, l’AIS a mis en chantier un très gros travail : créer une bibliothèque électronique de toutes les variétés, accessible à tous sur Internet, avec descriptions et photos. Cela avance, essentiellement par les efforts complètement bénévoles d’amateurs de tous pays. Au 15 janvier 2012 il y avait déjà plus de 41000 entrées. Mais ce qui manque, ce sont les photos. On en compte seulement 30000, ce qui serait intéressant si à chaque photo correspondait une entrée, mais ce n’est pas le cas, certaines entrées regroupant plusieurs images. Il y a donc beaucoup d’entrées qui n’ont pas d’illustration. Ces images pourraient être apportées par les obtenteurs eux-mêmes qui, du moins pour ceux qui sont encore de ce monde, doivent les posséder. Mais il semble qu’il n’y ait pas beaucoup d’enthousiasme de la part de ces personnes pour apporter leur soutien matériel au projet… C’est un constat que l’AIS elle-même a pu faire et c’est pourquoi elle exige maintenant que les hybrideurs fournissent des photos.


Symposium 2012

Le dernier bulletin de l’AIS, « Irises 93 n°1», donne le résultat du concours 2012 de popularité des grands iris. C’est toujours le triomphe de la stabilité, avec ‘Dusky Challenger’ (Schreiner, 1986) qui tient la tête pour la 19eme fois en vingt ans ! Les mouvements sont faibles et peu nombreux, avec un retour dans les 20 premiers de ‘Celebration Song’ (Schreiner, 1993), ‘Lady Friend’ (Ghio, 1981) et ‘Hello Darkness’ (Schreiner, 1992), et l’apparition dans le Top 100 de ‘Montmartre’ (Keppel, 2007), ‘Chief John Jolly’ (Parkhill, 2002), ‘Black Magic Woman’ (Tasco, 2008), ‘Absolute Treasure’ (Tasco, 2006), ‘Miah Jane’ (Parkhill, 1999), ‘Duncan’s Smiling Eyes’ (Lauer, 2003), ‘Celestial Explosion’ (Tasco, 2003), ‘Juke Box Hero’ (Lauer, 2003) et ‘Peggy Sue’ (Lauer, 2006), des variétés récentes mais qui sont peu connues en France.


Iconographie :
· Miah Jane (Parkhill, 1999)( Breakers X Tide's In)
· Chief John Jolly (Parkhill, 2002)( Instructor X Momentum)

L’ANNÉE DES ORANGES







En 2011 j’ai été frappé par la qualité des iris oranges que j’ai vus dans les différents jardins que j’ai eu le plaisir de visiter. Tous flamboyants et tous solides et bien portants – même si les iris oranges ont toujours l’air un peu fragile. Il apparaît que ces jolies choses se rattachent à deux origines très distinctes.

Le premier contingent, obtenu par l’hybrideuse italo-argentine Lorena Montanari (une nouvelle venue dans le petit monde des iris, mais qui ne devrait pas tarder à s’y distinguer), est le résultat d’un seul croisement. Il s’agit de trois variétés qui se remarquent de loin tant elles arborent des couleurs vives :
· ‘Ferragosto’ (Montanari, 2008)
· ‘Fratello Sole’ (Montanari, 2009)
· ‘Valeria Romoli’ (Montanari, 2010)
Le croisement d’origine est (Crackling Caldera X Rustle of Spring).

‘Crackling Caldera’ (Aitken, 2003) est un iris orange, très apprécié partout dans le monde, et qui était présent, ici en France, lors du concours Franciris 2007, mais où il n’a pas été primé. C’est un orange vif, un peu plus clair sous les barbes, avec une belle barbe rouge, qui résulte d’un croisement un peu compliqué : (((Sunshine Express x Brown Lasso) x (Peach Float x Irene Nelson)) x (Winterbourne x Blazing Light)) X Color Fusion. Le coloris orange remonte à ‘Peach Float’ (Opal Brown, 1973) chez qui il n’est pas très saturé. C’est le jaune ‘Sunshine Express’ (Kenneth Mohr, 1978) qui apporte un peu plus de concentration, laquelle est accrue par les gênes des inversés que sont ‘Blazing Light’ et ‘Color Fusion’.

‘Rustle of Spring’ (Grosvenor, 1998), issu d’un mariage entre un iris brun-ocre et un iris orange, apporte toute la brillance de son coloris ocre-rose.

En croisant ces deux variétés, Mme Montanari a eu une idée géniale. Elle a été justement récompensée et si ces iris avaient pu concourir dans les compétitions américaines, je suis certain qu’ils y auraient fait des étincelles.

Les autres beaux oranges de cette année proviennent de chez Richard Cayeux. Il s’agit de :
· ‘Coup de Soleil’ (Cayeux, 2006)
· ‘Rose de la Vallée’ (Cayeux, 2009)
· ‘Poil de Carotte’ (Cayeux, 2009).

Les deux premiers sont des descendants de ‘Good Show’ (Hager, 1988), qui est une variété très recherchée par ceux qui ont pour but d’obtenir des iris oranges. Ce ‘Good Show’ possède un pedigree plutôt savant : Cindirella's Coach X ((Hayride x ((((Norah x Thisbe) x Glittering Amber) x (semis x Glittering Amber)) x Picture Perfect)) x Fresno Calypso) qui présente l’originalité de ne comporter que des variétés oranges ou rose pêche. Aux Etats-Unis, Hager, Niswonger, Schreiner et Ben Johnson font partie de ceux qui l’ont utilisé, en France R. Cayeux et G. Madoré ont suivi le même chemin, le dernier en ayant fait un usage abondant, avec d’incontestables réussites dont on parlera, ici, la semaine prochaine.

Enfin ‘Poil de Carotte’, dont la hauteur un peu faible le range parmi les BB, descend de trois oranges célèbres : ‘Oktoberfest’ (Maryott, 1987), ‘Avalon Sunset’ (Schreiner, 1994) et ‘Feu du Ciel’ (Cayeux, 1993). C’est un bon exemple d’endogamie, avec un approfondissement manifeste de la couleur.

Dans un cas comme dans l’autre, le résultat est excellent, et avec ces six variétés on a atteint un sommet dans la recherche des iris oranges.

10.2.12

HONNEUR AUX ANCIENS

Dixième semaine : les années de guerre.

La guerre 39/45 a marqué la fin de la suprématie française sur le monde des iris. Pendant que la maison Cayeux produisait des pommes de terre sur les terrains jadis voués aux iris, les Américains amassaient les variétés qui allaient asseoir leur leadership dès qu’une vie normale allait recommencer.

Contemplation (Cayeux, 1939)
Dreamcastle (Cook, 1943)
Melodist (DeForest, 1944)
Donatello (Cayeux, 1947)



ECHOS DU MONDE DES IRIS

Acte de naissance

La SFIB réalise actuellement un travail considérable : l’inventaire de toutes les variétés d’iris présentes en France. Mais j’ai été étonné de lire que la date retenue pour l’identification des variétés était celle de l’introduction sur le marché. A ma connaissance cette date ne concerne que le marché américain et constitue seulement le point de départ de la course aux récompenses officielles. Ailleurs qu’aux USA elle ne fait qu’indiquer l’apparition de la variété dans un catalogue. C’est un point de repère, mais pas un élément fondamental. Ce qui compte c’est la date d’enregistrement qui est, en quelque sorte, l’acte de naissance d’une variété.

Un dossier complet sur cette question sera publié ici dans quelques semaines.

REMONTÉES OU EXTENSIONS ?






Depuis que je m’intéresse aux iris et que j’en ai infesté mon jardin, je me suis penché sur tout ce qui pouvait prolonger la saison de cette fleur que j’admire mais dont je déplore la brièveté de la floraison.

J’ai commencé par me dire que tout le mal que je m’étais donné pour constituer un jardin plaisant méritait que l’agrément recherché soit prolongé au maximum. Mais comment faire pour que la ronde organisée autour de mon jardin, dans un labyrinthe complexe, puisse se poursuivre au devant ou au delà du mois de mai ? J’ai d’abord pensé aux grands iris remontants. J’ai donc planté une série de ces variétés réputées capables de refleurir aussitôt leur première floraison terminée. Ma déception a été à la mesure de mon investissement. Une remontée, oui, mais capricieuse et d’une qualité souvent médiocre. Capricieuse, en partie – j’en suis convaincu – due à ma négligence dans la conduite de la culture. Le climat de la Touraine présente la particularité d’être très sec et presque torride au cours des mois d’été. Il faudrait donc, je le sais, pour favoriser la remontée, que mes fleurs soient copieusement arrosées entre juin et septembre quand la nature ne se charge pas de cette humidification. Mais je me pose des questions éthiques : ai-je le droit, quand l’agriculture manque d’eau, quand l’arrosage est officiellement restreint, de détremper mes iris qui, reconnaissons-le, ne sont là que pour faire joli ? Je choisis donc de ne pas arroser… Et mes iris remontants ne refleurissent pas, ou si peu ! Et l’effet recherché n’est évidemment pas là : une ou deux hampes en fleur sur un espace de 200 m2, cela n’a rien d’attrayant ! Même les étés où la pluie tombe en quantité suffisante, d’ailleurs, la présence d’une quinzaine de variétés en fleur en même temps, pendant quelques jours étalés sur plusieurs mois, cela n’incite pas à musarder parmi des iris qui, en majorité, sont en train de perdre leurs rares feuilles déjà jaunies… J’ai donc choisi de supprimer les remontants, dans la mesure où, sur un autre plan, ils ne présentaient pas un intérêt particulier. Bye-bye ‘Autumn Echo’, ‘Hallowed Thought’, ‘Sign of Leo’ ou ‘Violet Miracle’…

Je me suis alors tourné vers les variétés hâtives ou tardives, imaginant que mon jardin allait être agréable plus longtemps. Autre déception : en avant-saison je suis encore victime du climat tourangeau ! Il n’est pas rare en effet que des matinées de gel se produisent jusqu’à la fin de la troisième semaine d’avril. Un dicton local affirme d’ailleurs que la St Georges (23 avril) est une date fatale pour les plantes gélives. Or c’est à ce moment que les iris hâtifs montrent le bout de leurs fleurs, et que les boutons floraux sont particulièrement sensibles au gel ! Bien souvent donc, au lieu des fleurs attendues, je ne trouve que des boutons noircis et pourrissants. Adieu les espoirs de ‘Earl of Essex’, ‘Juicy Fruit’, ‘Soft Jazz’, ‘Thundercloud’ ou ‘Yes’, trop souvent victimes des frimas d’avril. Du moins n’ai-je pas ces incidents à redouter avec les iris tardifs ! Peine perdue : d’une part, après l’euphorie de la pleine saison, l’apparition des tardifs se produit quand on a déjà l’esprit ailleurs, d’autre part, bien souvent ces variétés qui fleurissent quand les autres cessent de le faire vont avoir du mal à se reconstituer avant les gelées de l’automne tourangeau (elles commencent le plus souvent aux alentours du 10 octobre) et ne vont refleurir qu’après un an ou plus de latence. Fini le rêve suscité par ‘Belle Embellie’, ‘Jud Paynter’, ‘Last Call’, ‘Last Hurrah’, ‘Snehulienka’ ou ‘Tangerine Sky’ !
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J’ai aussi essayé les variétés naines ou médianes.

Les SDB m’intéressent pour leur vigueur, leur floribondité et l’extraordinaire variété de leurs coloris. Mais ils ont à mes yeux deux défauts majeurs : ils sont nains et, si l’on veut les voir comme il faut, il ne faut pas les placer au milieu des grands iris car ceux-ci, qui poussent à toute vitesse en avril, vont les masquer, et ce n’est qu’en arrivant dessus qu’on va les apercevoir ; ils sont d’autre part en fleur à un moment où le ciel est souvent maussade et l’air frisquet, ce qui n’incite pas à s’attarder au jardin. J’ai donc fini par planter mes iris nains pas trop loin de la maison et dans un parterre qui leur est exclusivement dédié. Dans ces conditions je profite pleinement de s petites merveilles signées de Lawrence Ransom, ainsi que de ‘Cameo Queen’, ‘Pumpin’ Iron’ ou ‘Sangue di Drago’.

Restent les iris intermédiaires. Ceux-là ne pâtissent pas de se trouver mêler aux grands en approche de floraison. Ils ont suffisamment d’attrait pour supporter la comparaison avec les premiers TB à fleurir. Ils peuvent donc jouer le rôle que je voulais leur voir jouer. Alors ce sont eux que je privilégie maintenant pour prolonger le plaisir de me promener dans mon labyrinthe. Merci à ‘Fioletovy Nizkorozly’, ‘Mezza Cartuccia’, ‘Voilà’ et leurs semblables et cousins plus modernes. Ces jolis IB modernes, élégants, florifères et devenus fertiles sont les nouveaux ornements de mon jardin d’iris, au pays des vignes.

Iconographie :
  • 'Earl of Essex' (Zurbrigg, 1979) (de Crinckled Ivory, Grand Baroque, Violet Classic)
  • 'Hallowed Thought' (Zurbrigg, 1977) (Grand Baroque X Halloween Party)
  • 'Snehulienka' (Muska, 1997) (((Laced Cotton x Monte Albano) x (Mary Frances x Tide's In)) X Carrara Lace
  • 'Fioletovy Nizkorosly' (Driagina, 1978) (Sable X Chernomorets)
  • 'Cameo Queen' (B. Jones, 2001) (((Live Jazz x Pink Caper) x Orange Tiger) X Vintage Rose)

3.2.12

HONNEUR AUX ANCIENS



Neuvième semaine : les incontournables.
Parmi les anciens iris, il y en a qu’on ne se lasse pas de voir et de revoir. En voici quatre, parmi les plus célèbres.

Jean Cayeux (Cayeux, 1931)
Thaïs (Cayeux, 1926)
Sacramento (Mohr-Mitchell, 1928)
Madame Louis Aureau (Cayeux, 1934)



LA FLEUR DU MOIS





‘HASH MARKS’

Dans toutes ces chroniques rangées sous le vocable de « Fleur du Mois », les variétés dont il est question ont toujours un lien personnel avec moi. Soit que je les trouve dans mon jardin, soit qu’elles m’aient impressionné d’une façon ou d’une autre. C’est le cas pour cet ‘Hash Marks’ (Schreiner, 1975).

Il n’a jamais figuré dans ma collection, il n’a jamais été commercialisé en France, il n’a pas eu une carrière commerciale sensationnelle aux Etats-Unis, mais il se trouve (ou se trouvait) au Parc Floral d’Orléans La Source, parmi les malheureux iris végétant sur les tiges du « mikado » géant réalisé par un décorateur ignorant des besoins des plantes dont il a voulu se servir. C’est là que je l’ai vu, et je l’ai trouvé intéressant, parce qu’extrêmement original dans son coloris.

Il n’y a pas beaucoup d’iris qui lui ressemblent. Du moins n’en existait-il pas d’autre au moment où il a été sélectionné par la maison Schreiner. Notons que ce choix est plutôt surprenant de la part d’une entreprise habituellement très conservatrice. Depuis, quelques variétés voisines sont apparues, en général tout aussi surprenantes ou tout au moins hors du commun.

La photo ci-jointe montre un iris d’apparence bien de son époque, mais d’une couleur particulière, avec son fond mordoré, et ses grosses empreintes brunes de part et d’autre des barbes. Cela a du déconcerter les clients de Schreiner, plus habitués aux coloris traditionnels. Et c’est sûrement la cause de l’échec commercial. Faire plaisir aux collectionneurs n’est pas forcément une bonne idée quand on vise de vendre une fleur à quelques millions d’exemplaires !

Cet ‘Hash Marks’ est de fort bonnes origines (il y a parfois des originaux dans les meilleures familles). Voici son pedigree : (Olympic Torch x Hindu Wand) X (Wenatchee Kid x semis). Un petit mot à propos de chacune de ces variétés identifiées :
· ‘Wenatchee Kid’ (L. Noyd, 1957) est un iris brun, mêlé d’ocre et de vert, avec barbe orange, enfant du variegata-plicata ‘Firecracker’ (D. Hall, 1943) ;
· ‘Hindu Wand’ (Plough, 1957) fait partie de ces variétés aux couleurs étranges que Gordon Plough sélectionnait de temps en temps ; c’est un iris chamois, mêlé de chartreuse, avec des épaules marquées de brun, issu de deux grands noms des débuts de l’hybridation : ‘Tobacco Road’ et ‘Casa Morena’ ;
· ‘Olympic Torch’ (Schreiner, 1958), quant à lui, se présente en orange brûlé, éclairé de jaune sur les sépales ; c’est un enfant du célèbre ‘Inca Chief’ (Mistch, 1952), lui-même provenant de ‘Tobacco Road’. Son rejeton ‘Hash Marks’ lui ressemble beaucoup, en plus contrasté.

Une variété aussi typée que ‘Hash Marks’ ne pouvait pas avoir une nombreuse descendance. Je lui connais cependant deux « petits », tout à fait remarquables :
· ‘Hot Line’ (Schreiner, 1981), très proche physiquement de sa « maman », avec une jolie forme moderne ;
· ‘Tobacco Land’ (Loletta Powell, 1987), aux fleurs brunes amples et majestueuses.

Handicapé par son apparence peu commune, ‘Hash Marks’ n’en demeure pas moins une variété remarquable que j’aurais aimé mettre dans ma collection.

ECHOS DU MONDE DES IRIS

La saison des défilés

Comme dans celui de la mode, le monde des iris connaît sa saison des défilés : chacun présente sa collection. Première impression : les classiques restent bien classiques, les géniaux sont toujours géniaux.

J’ai bien apprécié les modèles (pour rester dans la métaphore de la haute couture) de Frederick Kerr. En particulier son ‘Jeanne Clay Plank’ dédié à l’ancienne présidente de l’AIS. Connaissant personnellement la dame, je trouve que son iris lui ressemble : à la fois simple, aimable et distingué ; avec beaucoup de personnalité.
‘Jeanne Clay Plank’ : (Kisses Like Wine X Decadence)

Pauvre Europe !

Combien y a-t-il de juges d’iris en Europe ? Une demi-douzaine au maximum. Combien y en a-t-il dans la Région n° 6 des Etats-Unis, qui regroupe les Etats de Ohio, Indiana et Michigan, dans le Nord-Est ? Trente-trois !!

Cela explique pourquoi les Etats-Unis écrasent complètement le monde des iris…

ENFANTS DE ‘GALILEE’





En cette période de Noël le mot de Galilée est particulièrement évocateur dans un monde marqué par les influences judéo-chrétiennes. Dans le monde des iris, c’est également un mot qui a du sens car il est celui d’une variété qui a marqué son époque et qui a donné naissance à un grand nombre de cultivars, dont certains sont spécialement célèbres, de sorte que les gènes de ‘Galilee’ (O. Fay, 1955) sont aujourd’hui présents dans bon nombre d’iris, essentiellement dans les bleus et les blancs.

Galilee dont le pedigree est (Butterfly Blue X Bluebird Blue), est un iris bleu qui fait la liaison entre trois des grandes lignées de bleus qui sont apparues au cours des années 30 et 40 : par ‘Bluebird Blue’ (Fay 52) il descend de celle de ‘Helen Mc Gregor’ (Graves, 1943) et par ‘Butterfly Blue’ (Fay 52) de celle de ‘Great Lakes’ (Cousins, 1938) et de celle de ‘Cahokia’ (Faught, 1946). Avec cette variété nous sommes donc au cœur de la grande famille des iris bleus. Une plante d’aussi bonnes origines ne pouvait qu’avoir une nombreuse descendance, et l’on va voir que parmi tous ces descendants il y en a plusieurs qui font partie des pierres angulaires de l’iridophilie.

Commençons par ceux qui n’ont pas laissé de trace – ou de trace notable – dans l’histoire des iris, sans pour autant avoir été des variétés négligeables :
· ‘Crystal Blue’ (Schreiner, 1964) = Galilee X ((Pierre Menard x (Blue Rhythm x Chivalry)) x Harbor Blue) ;
· ‘Distant Hills’ (Marsh, 1964) = (Galilee x Celestial Blue) X Allegiance ;
· ‘North Pacific’ (Schreiner, 1966) = Galilee X (semis de Azure Skies) ;
· ‘Skyview’ (O. Brown, 1967) = Winter Olympics X Galilee ;
· ‘Prairie Skies’ (Marsh, 1968) = semis de Galilee X Ellen Manor
· ‘Sea Captain’ (Schreiner, 1968) = (((Bluebird Blue x (Jane Phillips x Cahokia) x (Distance x Sylvia Murray))) X Galilee ;
· ‘Blue Charmer’ (Rudolph, 1972) = Ellen Manor X semis de Galilee ;
· ‘Grand Finale’ (R. Brown, 1973) = Pacific Panorama X ((Eleanor's Pride x Lovilia) x Galilee) ;
et quelques autres encore…
‘Grand Finale’ est sans doute celui qui a le mieux réussi, peut-être parce que son bleu pâle, allié au fait qu’il soit tardif et prolonge la saison des iris, lui ont donné un petit plus.

Continuons par les variétés qui ont eu des descendants peu nombreux mais intéressants :
· ‘Tidelands’ (Buttrick, 1961) – qui a engendré ‘Maestro Puccini’ (Benson, 1972) et ‘Tide’s In (Schreiner, 1983) ;
· ‘Sound of Music’ (O. Brown, 1967), parent de ‘Western Hostess’ (Babson, 1978) ;
· ‘Seaside’ (O. Brown, 1967), frère de semis du précédent, à qui l’on doit ‘Azure Luster’ (Weiler, 1982, et surtout ‘Navajo Jewel’ (Weiler, 1984).

Enfin arrêtons-nous sur les deux dont la descendance est plus riche et particulièrement remarquable :
· ‘Babbling Brook’ (Keppel, 1969), qui, croisé avec ‘Skywatch’ (Benson 64) , en a donné à K. Keppel ‘Waterscape’ (71), une variété qui n’a pas eu un gros succès commercial, et par d’autres croisements, ‘Actress’ (76), ‘Fire Water’ (77) ou ‘Skyblaze’ (87), tous avec des barbes orange ou rouges. Parmi les autres descendants, venant d’autres hybrideurs, il faut citer ‘Avalon Bay’ (Hamner 74), ‘Enduring Love’ (Boushay 74), ‘Full Tide’ (O. Brown 72), ‘Regent’s’ Row’ (Denney 79), ‘Sea of Galilee’ (N. Sexton 74)(*), ‘Touch of Sky’ (Schreiner 80)… Plus récemment, ‘Massalia’ (Anfosso 95) et ‘Starfleet’ (Keppel 93) font aussi partie de ses enfants ou petits enfants.
· ‘Sapphire Hills’ (Schreiner, 1971), avec une brochette de descendants hors du commun, voire exceptionnels, comme ‘Blue Aristocrat’ (Schreiner, 1987), ‘Rapture in Blue’ (Schreiner, 1990), ‘Yaquina Blue’ (Schreiner, 1992), ‘Mariah’ (Schreiner, 1995) ; chez d’autres hybrideurs on trouve aussi ‘Horizon Bleu’ (J. Cayeux, 1982), ‘Frison-Roche’ (R. Cayeux, 1994), ‘Ouragan’ (R. Cayeux, 1996), ‘Grand Amiral’ (R. Cayeux, 1999), ‘La part des Anges’ (Bersillon, 2008) ou ‘Ecume de Mer’ (Bersillon, 2009). Beaucoup de beau monde, là-dedans !

Les enfants de ‘Galilee’ forment une imposante famille. Parmi les innombrables iris bleus, ils ont une place prépondérante, qui, par-dessus le marché, se prolonge encore aujourd’hui, ce qui lui confère une incroyable longévité.

(*) ‘Sea of Galilee’ a lui-même une fort jolie suite, dans laquelle on découvre :
· ‘Dutch Girl’ (K. Mohr, 1981)
· ‘Nordic Seas’ ( id. , 1982)
· ‘Kentucky Skies’ ( id. , 1990)
· ‘Good Morning America’ (N. Sexton, 1979).