29.5.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

A suivre…

Essayez de compléter les trois listes suivantes :

· KILT LILT, DREAM LOVER, BRIDE’S HALO, MARY FRANCES, . . . . .
· ENTOURAGE, BEVERLY SILLS, GOLD GALORE, WOODCRAFT, . . . . .
· AURELIE, CERF-VOLANT, FABULEUX, POESIE, . . . . .

RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

CALIFORNIE

Ben HAGER était installé à STOCKTON.

VISITE A JOUY

A Jouy en Josas pour être précis, et, plus exactement à la plantation d’iris réalisée dans le parc de l’école professionnelle TECOMAH en vue du concours international FRANCIRIS 2005 prévu pour l’année prochaine.

L’école TECOMAH dispose d’un parc qu’elle partage avec HEC. C’est l’ancienne propriété des descendants d’Oberkampf, le créateur de la fameuse toile de Jouy. Le cadre est magnifique. Il s’étend sur les deux rives d’un petit ruisseau qui s’apprête à rejoindre la Bièvre. Pour atteindre l’exposition d’iris, il faut faire un long parcours sous les grands arbres et descendre vers le ruisseau. A pied le chemin est long, mais il reste agréable. L’endroit de l’exposition l’est moins. Il s’étend sur la rive même du ruisseau, sur une bordure d’environ deux mètres de large sur une cinquantaine de mètres de long. On ne passe que sur l’un des côtés de la bordure, de l’autre, c’est le ruisseau. L’emplacement est ensoleillé, ce qui n’est pas pour déplaire aux iris, mais les environs manquent de charme, avec des serres vieillissantes et des espaces en friche. Par ailleurs, visiblement les iris sont à l’étroit. Il faut dire que les organisateurs n’attendaient qu’une cinquantaine de variétés au plus et qu’ils en ont reçu plus de 130 ! D’où un visible entassement qui risque d’être encore plus flagrant au printemps prochain avec des touffes encore plus développées.

Ce petit terrain a été particulièrement soigneusement préparé et cultivé par les élèves de TECOMAH. Les plantes sont magnifiques, vigoureuses et prolifiques. Presque tous les rhizomes plantés ont pris et se sont vigoureusement multipliés. Il y a donc très peu de trous dans la plantation, même si, inévitablement certains iris sont plus chétifs que leurs voisins. S’ils se trouvent côté ruisseau, ces iris plus discrets passent forcément quasi inaperçus car les défauts majeurs de l’exposition sont la largeur excessive de la bordure et son accessibilité réduite.

En ce 25 mai presque toutes les variétés exposées sont en fleur, seules quelques tardives ne montrent encore que leurs boutons. Elles constituent un véritable panorama de l’iridophilie mondiale puisqu’il y a 22 exposants venant de 7 pays : France, Italie, Allemagne, Slovaquie, Grande Bretagne, Australie et USA. Ne manquent que les obtenteurs de l’Europe de l’Est. Il y en a pour tous les goûts, pour toutes les modes. Certains ont des petits airs d’iris des années 60, d’autres affichent haut leur modernité. Toutes les couleurs sont représentées, toutes les catégories aussi, même si les « broken colors » n’ont qu’un spécimen, et les iris « rostrata » (ou à éperons, si vous préférez) sont particulièrement nombreux, de même que les « dark tops ».

Pour me prêter au jeu du Critérium organisé cette année en avant-goût du concours, j’ai du faire le choix de mes cinq variétés préférées. Pas facile car les fleurs superbes ne manquent pas ! Dès l’entrée j’ai remarqué un iris bleu sombre, bitone, avec de grosses barbes bronze. Puis un amoena clair, à barbes noires, suivi d’un grand blanc pur et d’un robuste jaune vif. Un peu plus loin, c’est un iris rose saumon, très plaisant qui voisine avec un rose vif. En fond de bordure un iris pourpre à éperons bleus, très haut, attire l’attention, de même qu’un bleu moyen, très lumineux et parfaitement ondulé. Toujours en bordure du ruisseau pousse un cultivar jaune tilleul, original. Je remarque également un beau bleu à barbes noires, un gros plicata pourpre, façon FOOTLOOSE, puis un autre plicata du modèle EMMA COOK, très beau, un rose un peu fumé avec une flamme blanche sous les barbes, un indigo clair très bien disposé, un amoena bleu, classique mais moderne par la forme de ses fleurs, un abricot, un peu râblé mais d’une teinte ravissante, tandis qu’au fond, encore, un orange bitone attire l’œil par sa rutilance. N’oublions pas les blancs : il y en a un, au bord du sentier, dont on peut tout à loisir admirer la pureté du coloris et la perfection de la forme amplement ondulée, avec de très nombreuses fleurs sur chaque tiges. J’ai parlé des dark tops. Il y en a dans les tons de rose, d’orange et surtout de bleu. Certains, du modèle ALDO RATTI, m’ont paru très réussis. Enfin parlons des plicatas du modèle QUEEN IN CALICO ; on en trouve plusieurs, avec de très grosses fleurs, dans les tons de pourpre ou d’amarante. J’aurais pu aussi m’attarder sur quelque jaune délicieusement frisé ou sur ce bicolore chamois et amarante, aux grosses fleurs incroyablement bouillonnées, mais par ailleurs plein de défauts. Je me suis finalement rallié au cinq iris suivants : le bleu moyen très ondulé, un dark top bleu bien contrasté, le rose saumon, suivi du rose fumé à flamme blanche puis du bleu bitone à barbes bronze. Je connaîtrai l’année prochaine leur origine et peut-être leur nom, mais pour l’instant ce ne sont que des numéros. Mais de sacrés numéros !

Passons sur les imperfections signalées au début pour terminer en ne repensant qu’au plaisir que l’exposition m’a procuré, et en félicitant les initiateurs du projet et les élèves de TECOMAH qui ont fait un travail formidable et dont ils peuvent être fiers.


20.5.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

CALIFORNIE

Dans laquelle de ces villes de Californie vivait l’obtenteur bien connu Ben HAGER ?

· FRESNO
· PORTERVILLE
· SANTA CRUZ
· STOCKTON
· WASCO

RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

Iridial Pursuit (II)

1. Anton Mego est Slovaque
2. LUNAR RAINBOW (Blyth B. 76)
3. BABBLING BROOK (Keppel 69)

Adolf VOLFOVITCH-MOLER

Une énorme surprise est survenue en 1995 lorsque le jury de Florence a accordé sa plus haute récompense à un iris baptisé IKAR, dont l’obtenteur était un certain Adolf Volfovitch-Moler, habitant à Tachkent, en Ouzbékistan. En plus, la même année, c’est aussi un iris signé Volfovitch-Moler qui a été déclaré meilleure variété tardive : SYMFONIYA. Ainsi il y avait des créateurs d’iris ailleurs qu’en Amérique, Europe et Australie ? Et ils étaient capables de rafler des récompenses parmi les plus convoitées du monde ?

Jusqu’à la chute de l’empire soviétique, aucune information ne circulait sur les amateurs d’iris de ce monde isolé. Le rideau de fer enfermait aussi ceux dont la paisible passion ne concernait qu’une simple fleur ! Pourtant une certaine activité iridistique existait là-bas. Les enragés de l’iris se débrouillaient comme ils pouvaient pour assouvir leur passion. Ils se procuraient, le plus souvent en cachette, quelques variétés anglaises ou américaines et, avec ce faible potentiel génétique, s’essayaient à l’hybridation. Dès 1990 ils se sont fait connaître du petit monde des iris et ont commencé à s’offrir quelques iris plus récents que leurs antiques variétés des années 50 ou 60. C’est dans le recueil des enregistrements de 1995 qu’apparaissent les premières variétés originaires de l’ancien bloc de l’Est. Le Slovaque Ladislav Muska, l’Allemand (de l’Est) Manfred Beer, les Russes Irina Driagina, Vitali et Nadeghda Gordodelov, Piotr Hattenberger, Viktor Koroliov, Seguei Loktev, Galina Shevchenko, Viktor Sheviakov, le Kazakh Leonard Venivitin et l’Ouzbek Adolf Volfovitch-Moler se sont ainsi fait connaître. Le Slovène Izidor Golob s’est joint à l’équipe en 1996, puis ce furent les Tchèques et les Polonais en 1997. Ensemble ils occupent maintenant la seconde place dans le livre des enregistrements derrière les Etats-Unis, avec 173 nouveaux iris en 2003 !

Jusqu’à présent le seul de ces hybrideurs qui ait atteint la célébrité est Adolf Volfovitch-Moler. Venu de Russie, son activité professionnelle de géologue l’a amené en Ouzbékistan où il s’est définitivement installé. Il a pu bénéficier d’un petit espace au sein du Jardin Botanique de l’Académie de Sciences d’Ouzbékistan, à Tachkent, sur lequel il a développé autant que faire ce pouvait son travail d’hybridation commencé une dizaine d’année plus tôt. Il a continué d’hybrider jusqu’à sa mort en 2001, se désolant de manquer de place et de moyens. A ce sujet, je suis heureux d’avoir contribué à l’enrichissement de sa palette génétique en lui offrant un certain nombre de variétés françaises qu’il n’aurait pas pu se procurer en raison de ses faibles moyens financiers.

IKAR (92) et SYMFONIYA (92) n’étaient pas, d’après leur obtenteur, ses variétés préférées. Il avait curieusement une affection particulière pour un coloris qui, chez nous, n’est pas recherché, à savoir une teinte située entre le pourpre et le gris ou gris rosé. On la trouve chez CHIMGAN (92), VDOKNOVENIE (92) ou VECHERNYAIA SKAZDA (97). Ces variétés proviennent d’un croisement – dans un sens ou dans l’autre – de l’Anglais DANCER’S VEIL (Hutchison 59) et de RIPPLING WATERS (Fay 61), des cultivars largement obsolètes aujourd’hui, même si ce sont des plantes de grande valeur. Cependant son favori était le grand TASHKENT (92), il est vrai superbe variegata-plicata richement coloré. Pour ma part je préfère des variétés plus récentes comme CARNIVAL NIGHT (97), en violet pourpré somptueux, RAH RAH BOY (97) bicolore lilas / ocre avec des épaules caramel, très original, de même que ZOLOTAYA KORONA (98), vieil or de haute taille et d’une teinte rare et lumineuse.

Adolf Volfovitch-Moler aurait aimé utiliser les possibilités de la biotechnologie pour obtenir des iris franchement nouveaux, mais il n’a jamais disposé des moyens lui permettant cette recherche à laquelle le prédisposait sa formation scientifique.

Il est à noter que, dans les correspondances que j’ai eues avec lui, ce personnage hors du commun parlait davantage de ses glaïeuls que de ses iris. Il est vrai qu’il avait réussi, grâce à l’utilisation chimique du manganèse, à obtenir des variétés de glaïeuls tout à fait originales et même franchement révolutionnaires, avec des fleurs ouvertes en même temps sur toute la longueur de la tige et dans des coloris jusqu’à présent inconnus. Jamais il n’a pu trouver de distributeur en Europe de l’Ouest pour ces fleurs étranges, les contacts qu’il a pris avec le principal producteur français de bulbes n’ont pas pu aboutir, du fait, semble-t-il, de son incapacité à fournir des bulbes non virosés, et de son peu de confiance dans les industriels occidentaux ! On ne se refait pas, après toute une existence idéologiquement remplie de suspicions envers les gens de l’Ouest !

Quel que soit son caractère ombrageux, Adolf Volfovitch-Moser reste une personnalité à part dans le monde des iris et un nom dans le petit cercle des obtenteurs majeurs.

14.5.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

Iridial Pursuit (II)

1. De quelle nationalité est l’obtenteur Anton Mego ?

2. Quelle variété australienne (Blyth 76) se cache derrière les iris tricolores de Richard Cayeux (REBECCA PERRET, BAL MASQUÉ etc.) ?

3. Quel est le nom du seul iris de Keith Keppel qui a, jusqu’à présent, obtenu la Dykes Medal ?

RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

Iridial Pursuit (I)

1. SUGAR MAGNOLIA (Schreiner 98)
2. Iris de Thau
3. la Walther Cup

Gordon W. PLOUGH
Sur la route du Paradis


Eden Road, la route du Paradis, c’est là que Gordon W. Plough a ouvert en 1954, son propre jardin d’iris. On est à WENATCHEE, au bord de la rivière Columbia, dans le nord-ouest des Etats-Unis, à 150 Km à l’Est de SEATTLE, la capitale de l’état de Washington, de l’autre côté de la chaîne des Cascades. Le lieu n’a pas usurpé son nom d'Eden : c’est une région somptueuse, fraîche mais protégée des pluies excessives venues du Pacifique.

Gordon Plough est né en 1909 à Wilbur, environ 100 Km plus à I’ouest. Après des études d’architecture, il n’a trouvé de travail (on est dans les années de la grande crise) que chez son père, pépiniériste à Wenatchee. Il y restera, s’intéressera aux iris, et vers la quarantaine, se lancera dans l’hybridation.

Son premier iris, un arilbred, s'appellera LAUREL HILL. Par la suite il produira plusieurs autres arilbreds, avant de s’intéresser aux grands iris de jardin. Dans cette catégorie sa première introduction se nommera SAFARI (1955). Ce sera le début d’une très importante production qui durera jusqu’en 1989.

Les iris obtenus par Gordon W. Plough, pour œ qui est de leur aspect, sont des plantes caractéristiques, pas très grosses, pas trop frisées (sauf BEAUX ARTS), simples comme leur créateur, sans vraiment de fantaisie, mais aussi sans excès. Sans doute de ce fait n’ont-ils pas rencontré un succès considérable auprès des juges dans les concours de l’AIS, malgré cela ils ont connu un formidable succès commercial à travers le monde. L’espèce d’ostracisme de juges n’a pas découragé Gordon Plough qui va continuer, dans son ravissant jardin d’Eden Road, son petit bonhomme de chemin, un peu à l’écart des autres, créant chaque année quelques-uns uns des iris qui vont être parmi les plus vendus, mais qui, néanmoins, retiendront l’attention de ses collègues qui les utiliseront abondamment dans leurs travaux d’hybridation. On peut être ignoré des uns et apprécié des autres…

En France ses obtentions ont été bien accueillies par les amateurs et les collectionneurs. Encore aujourd’hui on en compte beaucoup dans nos jardins. Essentiellement des grands iris. Depuis celui qui a été l’un des plus recherchés, STUDY IN BLACK (68), ce « noir » (par le grenat) si souvent rencontré, jusqu’à LA ZANZARA (82), joli amoena, ou TRADER’S GOLD (82), jaune pamplemousse à barbe d’ or.

Dès ses débuts, Gordon Plough s’est beaucoup intéressé aux iris « noirs ». En 58 il a introduit EDENITE, un « must » dans ce coloris, qui est le géniteur de SWAHILI (65) et de STUDY IN BLACK (68). SWAHILI a donné CHARCOAL (Plough 69), et de ces trois variétés découle un tas de beaux iris sombres parmi lesquels on peut citer BLACK FLAG (Stahly 84), ROYAL KINGDOM (Hamner 82), BLACK MARKET (Plough 73), DARK ALLURE (Plough 73), INTERPOL (Plough 73), MASTER TOUCH (Schreiner 80), ROYAL CRUSADER (Schreiner 85), SATIN SATAN (Weiler 86), ainsi que les descendants, innombrables, de ces variétés.

Il s’est également essayé à bien d’autres sortes d’iris, en coloris comme en catégories. Son jaune d’or RAINBOW GOLD (59) est à l’origine de BRIDE’S HALO (Mohr 73 – DM 78) ; son orange SON OF STAR (69), toujours l’un des oranges les plus purs, se trouve derrière un autre orange, SUPERSIMMON (Parker 78) et des fameux bicolores comme SWEET MUSETTE (Schreiner 86) et GOODBYE HEART (Schreiner 89) ; son variegata BON VIVANT (63) a donné SOSTENIQUE (Blyth 75) et par conséquent les très nombreux et superbes descendants de ce dernier, tandis qu’un autre variegata, FREEDOM ROAD (77) précède EDITH WOLFORD (Hager 86 – DM 93).

Toutes ces fleurs, nées au jardin d’Eden, le paradis de cet homme tranquille, qui, sans faire grand bruit, s’est hissé dans le Gotha des hybrideurs, dans lequel il figure toujours comme l’un des plus doués et dont nous parlerons encore longtemps.

Cette biographie est la reprise –modifiée - d’un article publié dans le numéro 121 d’Iris & Bulbeuses.

7.5.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

Iridial Pursuit (I)

1. Quel qualificatif est associé au mot MAGNOLIA dans le nom d’une variété récente de Schreiner :
· Sweet ?
· Soft ?
· Sugar ?

2. Quel est le producteur français d’iris qui n’a pas encore de site Internet ?

3. Comment s’appelle la médaille accordée chaque année à la variété qui a recueilli le plus grand nombre de vote pour un HM ?

RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

SALEM

Il s’agit de Sterling INNERST qui habite à DOVER (Pennsylvania).

Neva SEXTON

Le petit monde des iris n’est pas différent du monde tout court : on y trouve des gens très dissemblables, comme, par exemple, l’ingénieur mormon Donald Nearpass, ou le facteur James Gibson ; comme Neva Sexton, aussi.

Celle qui devait devenir la seule femme à avoir remporté deux fois la Médaille de Dykes est née en 1906 dans une pauvre ferme près d’Arkadelphia, une petite ville de l’Arkansas située à 150 km au sud-ouest de la capitale Little Rock. En fait d’éducation elle n’a guère reçu que celle du terrain. Observatrice attentive et travailleuse acharnée, elle s’est très tôt intéressée aux choses de la terre, aux plantes et aux animaux. Mariée à seize ans, elle s’est retrouvée peu après abandonnée avec trois enfants à élever. Elle a alors pris possession de la ferme de ses grands-parents, mais la vie était particulièrement dure, en ces années de crise, dans le plus pauvre des Etats américains, aussi, à la recherche d’une vie meilleure, Neva Jones – puisque tel est son nom de jeune fille – a décidé en 1938 d’émigrer vers la Californie où elle était sûre de trouver du travail dans les champs. C’est ainsi qu’elle s’est retrouvée, avec sa nichée, au fin fond de la célèbre et fertile vallée de San Joaquin, au sud de la Californie, à Wasco, à 200 km environ au nord de Los Angeles. C’est là qu’elle a rencontré un texan, exilé comme elle en terre californienne, Harvey Sexton, et qu’elle l’a épousé.

Neva Sexton a toujours aimé les fleurs, mais elle n’a commencé à s’intéresser aux iris qu’en 1952, après une visite à la collection d’un amateur, ami de Tell Muhlestein, qui lui envoyait chaque année les nouveaux semis dont il craignait qu’ils ne gèlent sur ses terres de l’Utah. La décision de cultiver les iris n’allait pas toute seule : il fallait acheter les plantes. Pour réaliser son projet, Neva Sexton a du travailler dur à sarcler les champs de coton pour un dollar de l’heure ! Il lui fallait en moyenne travailler vingt heures pour s’acheter un iris …

Accoutumée à une vie difficile, Neva Sexton a mis tout son courage, mais aussi toute son intelligence, à cultiver ses iris. Quand on lui demandait comment elle faisait pour avoir une telle réussite, elle répondait que ce n’était sûrement pas en restant sur la terrasse à se balancer dans un fauteuil à bascule ! Elle avait une certaine rudesse et un franc parler acquis à la dure vie des champs. Heureusement la riche terre de Wasco, largement irriguée et fumée, donnait naissance à des plantes splendides. Là encore Neva travaillait. Elle allait aux moulins à coton ramasser les graines rejetées et les feuilles broyées. Dans les élevages de moutons, elle récupérait le fumier qu’elle rapportait à plein « pick-up ».

En plus des iris, Neva Sexton cultivait plein d’autres fleurs, des amaryllis, notamment, des narcisses et des glaïeuls. Mais ce sont les iris qui ont fait sa célébrité. Sa première obtention enregistrée a été MIXED EMOTIONS (1959), une curiosité, blanc nacré, marqué de chartreuse et touché de crème. Le suivant devait avoir une destinée exceptionnelle puisqu’il s’agit du grand bleu PACIFIC PANORAMA (1960) couronnée de la Médaille de Dykes en 1965.

Sa grande période est celle des années 60 et 70. MOON RIVER, vieil or, date de 62, NEW MOON, autre jaune, unanimement salué comme un chef d’œuvre doté d’un extraordinaire avenir génétique, est de 68 et obtiendra la DM en 73. TRAVEL ON, jaune d’or, descendant de RAINBOW GOLD, date de 69. Puis viennent toute une série de grands iris, comme GEORGIA GIRL (pêche) (71), HAPPY BRIDE, (blanc) (73), JACK R. DEE, (bleu ciel) (74), SEA OF GALILEE (bleu bitone) (74), SKYLAB, (bleu bitone) (74), WORLD NEWS, (variegata jaune et rouille) (77), HOMECOMING QUEEN, (rose cuivré, unique) (78), TACO BELLE, (autre variegata) (78), et l’original GOOD MORNING AMERICA (blanc bleuté à barbes bleues) (79) et bien d’autres. Ses dernières réalisations se situent au début des années 80, avec ARKANSAS GIRL (jaune à reflets verts) (82) et AMERICAN SWEETHEART (variegata sombre, bronze et acajou foncé) (83).

Le poids de l’âge commençait à se faire sentir, de même que celui du dur travail des années de galère. La fin de sa vie, endeuillée par la disparition de son mari après un accident de tracteur, s’est écoulée à l’hôpital, d’abord, puis en maison de retraite, où elle est morte en juillet 1985.

L’héritage de Neva Sexton est incroyablement riche. Peut-être une centaine de descendants directs de NEW MOON peuplent nos jardins, plusieurs dizaines proviennent de PACIFIC PANORAMA, de HOMECOMING QUEEN, JACK R. DEE, GOOD MORNING AMERICA, SEA OF GALILEE et autres. Et si l’on ajoute les descendants des descendants, on atteint vite des quantités astronomiques d’enfants et petits enfants dus au travail exemplaire de Neva Sexton, une des plus grandes dames des iris, le type même de la « self made woman » caractéristique de la société américaine.

(Source : Bulletin de l’AIS 85/4)