27.4.18

OEILLETS D'INDE

Pendant quarante ans Jim Gibson a obtenu des iris plicatas sur base orange, avec des dessins anthocyaniques qui, par illusion d'optique, varient du beige au brun parfois un peu rouge. C'était sa composition préférée et l'on trouve dans ses enregistrements plus de soixante variétés de ce type. Avec leurs couleurs qui font penser aux oeillets d'inde ou à la toge des lamas, elles ravissent les amateurs d'iris rutilants. Nous en retiendrons une trentaine qui seront publiées ici pendant quelques semaines.

 III- de 1970 à 1979

 – C'est le début de la grande époque. Les variétés s'enrichissent et les couleurs se diversifient.

 'Anon' (1974) : ( Apricot Blaze x semis 40-4A) X Smoke Rings sib 


'Beyond' (1978) : Anon sib X Anon 


'Burgundy Brown' (1978) : (Blueberry Trim x Smoke Rings) X (Co Co Mocha x Summer Sunshine sib) 


 'Highland Chief' (1972) : Seedling# 5-5B X seedling # 142-4A. 


 'Osage Buff' (1972) : Inconnu X Apricot Blaze

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Iris en Provence 

Le catalogue de Iris en Provence est en ligne. C'est un renouveau complet, avec une multitude d'iris nains et intermédiaires pour la plupart provenant de chez Loïc Tasquier, et des variétés françaises de grands iris : obtentions maison signées Marin Le May ou Laure Anfosso, obtentions autres de Jean-Claude Jacob, Sébastien Cancade ou Alain Chapelle, et des variétés d'Europe de l'Est. Tout ce qu'il faut pour constituer un catalogue innovant et attrayant.

SOUVENIRS DE FLORENCE

Ce titre, qui fait allusion à une composition de Tchaïkowsky, n'annonce pas un traditionnel compte rendu de voyage. A l'instar de ce qu'a fait le compositeur russe, ce sera plutôt la relation d'images, de sentiments éprouvés lors d'une semaine de printemps vécue dans une ville exceptionnelle et dans un jardin de rêve. C'était il y a dix ans, c'était hier.

L'un des meilleurs endroits pour avoir une vue d'ensemble de la ville de Florence, c'est le piazzale Michelangelo, cette esplanade où se situe l'entrée de l'oliveraie qui abrite le jardin d'iris et, par conséquent le concours annuel de renommée mondiale. Mais le piazzale en question est à lui seul une récompense. La montée est longue si elle s'effectue en voiture car elle contourne le coteau abrupt, elle est pénible si le visiteur choisit d'y aller à pied. La pente est rude : c'est un long escalier de pierre au milieu d'un espace paysager. Mais quand on débouche sur l'esplanade, l'impression de plénitude, le ravissement devant un paysage unique, récompensent de l'effort fourni. Au fond, la basilique de San Miniato est là, toute vêtue de marbre vert, tournée vers la vallée où s'étale la ville dominée par ses tours, ses clochers, son dôme. On n'éprouve pas à cet endroit la même sensation d'étouffement qui nous étreint dans les rues étroites, et au pied des énormes murailles des palais de la Renaissance. Dans la ville de Florence on palpe l'insécurité qui devait régner là au temps des Medicis et qui justifiait les nœuds de fer qui enserrent les sévères demeures et barrent toutes les fenêtres. Sur les hauteurs l'atmosphère est toute différente. C'est bien pour cela que s'y sont multipliées les villas patriciennes et les palais d'été, au milieu des jardins dont on n'aperçoit le plus souvent que le toupier des grands arbres, mais dont il faut franchir les hauts murs pour bénéficier de la fraîcheur paisible et soignée.

Le jardin où poussent les iris s'ouvre sur la droite quand on regarde vers la ville. En France on ne pourrait pas planter des iris dans un verger. A Florence on l'a fait dans une oliveraie, mais il est vrai que les oliviers ont un feuillage léger et que celui-ci protège les iris d'un soleil qui peut être excessif. A peine le passionné d'iris a-t-il pénétré dans ce parc qu'il a oublié la touffeur de la ville et la majesté austère de ses bâtiments. Ce sont les pépiements d'oiseaux et les parfums de fleurs qui accompagnent la progression le long des allées empierrées, parmi les milliers d'iris. Et quand on s'arrête sur l'un des bancs qui sont disposés ça et là, on est frappé par le faux silence qui baigne le jardin. Un silence ponctué par de lointains bruits de la ville, légère rumeur de la circulation qui s'élève vers San Miniato, sirène des ambulances et des pompiers... Bruits atténués mais qui maintiennent un lien avec la vie quotidienne d'une grande ville. Une grande ville dont, au jardin d'iris, on ne voyait que le beau côté.

Au cours des années 1980/90, la SIDI (Società Italiana dell'Iris) était l'affaire de la bonne société florentine. Un club pour dames de qualité ! Des dames qui pratiquaient une hospitalité un peu surannée, mais tellement agréable ! En France, au même moment, l'atmosphère était un peu la même, avec un peu plus de dilettantisme, peut-être, un peu moins de professionnalisme aussi. Car les florentines maitrisaient parfaitement l'organisation d'une grande compétition internationale, avec des hôtes étrangers pris en charge avec attention mais sans lourdeur, et des manifestations réglées au millimètre, selon un protocole minutieux et immuable. A l'exemple du dîner de gala, où les participants étaient accueillis au son de trompes princières, et les tables rigoureusement constituées, mêlant invités étrangers et personnalités de la haute bourgeoisie locale.

Cet aspect des choses ne troublait pas le déroulement du concours proprement dit. Tout le monde, dès le matin, s'adonnait consciencieusement à sa tâche, au milieu d'iris soignés avec un rien de négligé, très naturel, mais clairement numérotés pour faciliter le travail des juges. Et la discussion finale, sérieuse, rigoureuse même, fut par moment proche de l'emballement ! Les récompenses n'ont pas été distribuées à la légère.

Les notes attribuées mettaient en évidence la supériorité d'un petit nombre de variétés qui, dès le début, avaient toutes les chances de se disputer les premières places. Il y avait dans cette apparente suprématie non seulement les signes d'une qualité évidente, mais aussi la conséquence d'un développement en partie dû aux circonstances, mais également à une part non négligeable de chance et de hasard. Les discussions furent vives, non pas pour désigner les variétés constituant le top de la compétition, mais pour établir le classement final. Celui-ci a été arrêté ainsi pour les dix premiers :
1 - 'Morning Sunrise' (T. Johnson, 2005)
2 - 'Power Point' (T. Johnson, 2005)
3 - 'Designer's Art' (Kerr, 2004)
4 - 'Corona Star' (Grosvenor, 2000)
5 - 'City Of Gold' (P. Black, 2005)
6 - 'Celtic Glory' (Stahly, 2000)
7 - 'Florentine Silk' (Keppel, 2004)
8 - 'Must Unite' (Grosvenor, 1998)
9 - 'Lord Of The Night' (G. Sutton,2005 )
10 - 'Jealous Halo' (J. Painter, 2004)
Le commentaire qu'on peut en faire, c'est que l'on constate une hégémonie évidente des concurrents américains (6/10). Leur succès met en valeur le métier des hybrideurs US et en particulier celui de ceux qui, à l'heure actuelle, dominent l'irisdom. Leur domination n'est pas imaginaire !

Ce concours fut donc absolument traditionnel, dans son organisation, dans son déroulement, dans ses résultats. La relation qu'on peut en faire ne peut donc pas s'appuyer sur une quelconque originalité, mais pour celui qui a vécu cette semaine, les souvenirs de Florence seront toujours inoubliables.

Iconographie : 


'Morning Sunrise' 


'Power Point' 


'Designer's Art' 


'Corona Star'

20.4.18

OEILLETS D'INDE

Pendant quarante ans Jim Gibson a obtenu des iris plicatas sur base orange, avec des dessins anthocyaniques qui, par illusion d'optique, varient du beige au brun parfois un peu rouge. C'était sa composition préférée et l'on trouve dans ses enregistrements plus de soixante variétés de ce type. Avec leurs couleurs qui font penser aux oeillets d'inde ou à la toge des lamas, ils ravissent les amateurs d'iris rutilants. Nous en retiendrons une trentaine qui seront publiées ici pendant quelques semaines. 

II - les années 1960

 – comme beaucoup d'obtenteurs, Gibson a eu un croisement fétiche, dans les débuts de sa carrière. C'est Henna Stitches X Wild Ginger. Plein de beaux iris en sont issus.


 'Heather Hawk' (1965) : Henna Stitches X Wild Ginger 


'Island Holiday' (1969) : Golden Filigree X Wild Ginger 


 'Kilt Lilt' (1969) : Semis # 1-2 PLD X Golden Filigree 


 'Native Chief' (1965) : Henna Stitches X Wild Ginger 


 'Radiant Apogee' (1965) : Henna Stitches X Wild Ginger

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Catalogue Cayeux 

Le catalogue Cayeux est arrivé : toujours aussi riche et agréable. A noter que, pour la première fois, le nom des obtenteurs et l'année d'enregistrement ont été indiqués à la suite de la description des variétés. C'est une juste reconnaissance du travail des hybrideurs.

A noter aussi l'apparition d'une variété signée Anton Mego. Une ouverture vers l'Est, dans une collection de plus en plus centrée sur les obtentions maison ?

UN PEU, BEAUCOUP ET TROP

Un record vient d'être battu : celui du nombre de variétés mis sur le marché par une pépinière ; Mid-America Iris Garden en propose cette année 121 ! Si l'on fait le décompte par obtenteur, comme s'il s'agissait d'entreprises séparées, on arrive aux chiffre suivants :
Paul Black = 49
Thomas Johnson = 47
Barry Blyth (1) = 14
Lynda Miller = 8
Lorena Montanari = 3

Pour me rendre compte j'ai recherché combien de nouvelles variétés étaient proposées cette année par les principaux producteurs américains. Voici le résultat de cette compilation :
 Sutton = 34
Stout = 25
Schreiner = 21
Spoon = 18
Burseen = 15
Keppel = 15
Hedgecock = 15 (dont 6 spurias)
Painter = 9

Ailleurs dans le monde, dans la mesure où chacun a publié la liste de ses introductions, j'ai noté Grosvenor (Australie) = 16
Cayeux (France) = 15
Pour 304 variétés et 15 entreprises, la moyenne se situe donc à 20 nouveaux iris par hybrideur.

Ce nombre me paraît énorme. Mais il y a déjà quelques années que se situe le début de cette inflation. Il fut un temps où les plus prolifiques proposaient une quinzaine de variétés nouvelles, et où la moyenne devait se situer autour de 8 ou 10.

Pourquoi cette augmentation ? J'ai posé cette question à certains connaisseurs avisés du microcosme américain des iris, qui sont d'accord pour dire qu'une cause majeure est dans une plus grande réussite parmi les semis, certains de ceux-ci pouvant donner naissance à un grand nombre de cultivars de haute qualité dont il serait dommage d'éliminer certains pour la seule raison de rester modeste dans le nombre de mises sur le marché. C'est la raison pour laquelle les frères de semis sont de plus en plus nombreux. Y compris chez des obtenteurs que l'on ne peut pas taxer de laxisme.

Prenons acte. Mais notons aussi que cela pose plusieurs problèmes. Le premier étant que, forcément, des variétés très voisines apparaissent, parfois on pourrait presque parler de doublons. Le second se situe au niveau de la course aux honneurs et à l'action des juges.Le troisième, à propos de la durée d'existence de chaque variété dans les différents catalogues.

 En triant et rangeant les photos d'iris que j'ai trouvées sur le net, j'ai été frappé par la quantité de variétés aux coloris très proches les uns des autres. Cela n'est pas nouveau pour les fleurs bleues ou pour les plicatas violets, mais cela ne concerne pas seulement quelques cas bien connus, mais une multitude de modèles ou coloris moins classiques. Les rose pâles, les gris-bleu pastel, les bicolores rose/grenat, les tricolores (bleu, blanc, rouge) sont de ceux-là. J'ai fait un tour parmi les variétés récentes dans ce qu'on appelle le modèle distallata. Je me suis arrêté sur neuf cultivars (dont cinq français!) qui sont vraiment très semblables :
'Ailleurs' (Jacob, 2017)
'Amaze' (M. Sutton, 2018)
'Barbouille' (Jacob, 2017)
'Carousel of Dreams' (Richardson, 2013)
'Gloriafied Glenn' (Burseen, 2010)
'Having a Party' (T. Johnson, 2014)
'Martingale' (Cancade, 2014)
'Quizzical' (Filardi, 2008)
'Rayonnement' (Jacob, 2017)
'Renouveau' (Jacob, 2017)
Cela n'est qu'une partie de ce qui a été enregistré pendant ces dix dernières années !
Qu'on puisse trouver autant d'exemplaires d'un modèle aussi récent – 'Prototype' (Ghio) date de 2000 – est déjà surprenant, qu'autant de variétés soient si proches les unes des autres l'est encore plus. En dehors d'un effet de mode, où chacun veut avoir à son tableau d'obtention au moins un iris de chaque nouveau modèle, il y a un problème de masse. Et cela débouche sur la deuxième question ; comment vont faire les juges ?

 C'est une difficulté qui ne concerne que les iris américains puisqu'il n'y a qu'en ce pays qu'existe une course aux honneurs arbitrée par un grand panel de juges. Mais pourquoi est-ce une difficulté ? Parce qu'une trop grande quantité de variétés en compétition fait obligatoirement qu'un nombre moins élevé d'exemplaires de chacune pourra être vu et apprécié. Les voix vont se trouver dispersées sur un grand nombre de sujets et de ce fait l'attribution des médailles deviendra plus aléatoire (avec sûrement de nombreux ex-aequo) et donc moins convaincant.

Enfin, dernier problème qui me vient à l'esprit, combien de temps chacune de ces variétés trop nombreuses va-t-elle rester commercialisée ? Poussées par l'apparition de nouvelles choses, tous ces iris ne vont faire qu'une brève apparition dans les catalogues : ils seront aussi vite disparus qu'ils se seront renouvelés. Lesquels auront eu le temps de se faire connaître et de démontrer leurs qualités vegetatives ? On trouve encore en vente des quantités de variétés qui ont plus de dix ans, et le Symposium américain présente encore des iris plus que quadragénaires. Qu'en sera-t-il dans dix ans ? Il existe aujourd'hui des variétés qui ont acquis une célébrité méritée affirmée par un véritable succès horticole et commercial. Qu'en sera-t-il des variétés-éclairs qui n'auront fait que passer ? Tiendront-elles au moins pendant les dix ans de leur possible participation à la compétition ? L'attrait pour la nouveauté ne va-t-il pas supplanter l'intérêt pour des plantes solides, généreuses et indémodables ?

Tout ceci fera partie des défis à relever au cours de la prochaine décennie.

 Iconographie :

 'Ailleurs' 'Expect Wonders' X 'Carnival Of Colors'. 


'Carousel of Dreams' ( 'Circus Top' x 'Bubble Up') x 'Goldkist') X 'Wild Jasmine' 

'Gloriafied Glenn' 'Tropical Cooler' X 'Paul Clute'. 

'Quizzical' 'Quandary' X 'Goldkist'

13.4.18

1000 !

La chronique de la semaine dernière, qui vous envoyait un « signal fort », était la millième depuis la création d'Irisenligne ! Lorsque l'aventure a commencé en août 2001, j'étais loin d'imaginer que 18 ans plus tard on arriverait à cette somme. Reste à savoir combien de temps cela va continuer, mais ça...

COUCOU !

Coucou! Irisenligne est de retour. Il se trouve que cette semaine l'article de fond évoque l'ex Allemagne de l'Est, région où je me trouvais la semaine dernière ! Il était hélas bien trop tôt pour y voir des iris...

OEILLETS D'INDE

Pendant quarante ans Jim Gibson a obtenu des iris plicatas sur base orange, avec des dessins anthocyaniques qui, par illusion d'optique, varient du beige au brun parfois un peu rouge. C'était sa composition préférée et l'on trouve dans ses enregistrements plus de soixante variétés de ce type. Avec leurs couleurs qui font penser aux oeillets d'inde ou à la toge des lamas, ils ravissent les amateurs d'iris rutilants. Nous en retiendrons une trentaine qui seront publiées ici pendant quelques semaines. 

I. - avant 1960 – 

les renseignements sur les origines ne sont pas précis. Il faut s'appeler Keppel et disposer des carnets de Gibson pour en savoir un peu plus.


'Cayenne Capers' (1959) : parents non précisés 


'Chinquapin' (1959) : Taholah X semis # 26-9A 


'Floradora Flounce' (1959) : semis 29-3A X semis # 26-3 


'My Honeycomb' (1958) : semis # 26-9A (de Taholah) 


'Wild Ginger' (1960) : Taholah X Floradora Flounce

LA FLEUR DU MOIS

'Legerdemain' (Keith Keppel, R. 2007) 
(Magharee x Overjoyed) X ((Witch’s Wand x Witches’ Sabbath) x Romantic Evening) 

Pourquoi choisir comme « Fleur du mois » cet iris peu connu en France et qui n'a jamais figuré dans ma collection personnelle ? Tout simplement parce que j'ai été séduit par le joli nom que son obtenteur, Keith Keppel, lui a donné. Legerdemain ? Je n'avais jamais entendu ce mot, et il m'a fallu rechercher sur Internet pour en trouver le sens car même mon dictionnaire n'en parlait pas ! Legerdemain, c'est donc « tour de passe-passe », ou « prestidigitation » et c'est un mot effectivement, tout de grâce et d'agilité, agréable à l'oreille et étonnant comme ce qu'il désigne. Exactement comme la fleur qui porte ce nom.

 Par quel tour de passe-passe en effet un parent mâle de couleur sombre a-t-il engendré une fleur pastel, où les pétales d'un bleu tendre sont associés à des sépales couleur de vieux parchemin ? En fait, si l'on procède comme pour identifier un enfant, dont on dira qu'il ressemble à tel ou tel de ses ascendants, on rapprochera 'Legerdemain' de sa « grand-mère » 'Magharee', où l'on retrouve un peu le bleuté des pétales et le beige des sépales. Avec son langage imagé, Keppel décrit cette variété comme « La meilleure description peut en être un bleu mélangé. Les pétales bleu pâle, juste un petit peu plus sombres que les sépales, tirant sur le bleu verveine et chicorée. La teinte parcheminée des sépales sur les épaules et sur les bords est plus apparente quand la fleur vieillit alors que le bleu devient plus clair. Les barbes sont orange vermillon, pointées de blanc. Malheureusement l'âge et les variations du temps modifient l'aspect général. »

 L'originalité de ce coloris est assez surprenante car 'Legerdemain' a un frère de semis, 'Naughty Night' (2006), qui se présente de façon beaucoup plus traditionnelle, et dont la description est : « Sépales allant d'un riche rouge sombre vers un pourore bourgogne, pétales soyeux dans les tons de mûre plus clairs. Brillantes barbes dorées. »

 Le côté peu commun de 'Legerdemain' provient aussi de ce qu'il peut être classé parmi les coloris inversés. En effet il existe plusieurs variétés dont les pétales ont une teinte beige alors que les sépales tirent sur le bleu. Témoin, chez Ben Hager, le posthume 'Passing Clouds' (2001) et chez Keppel, justement, ce 'Casbah' de 1979 dont voici la description de la main de son obtenteur : « Variegata fantaisie, avec des pétales d'un ocre doré léger, veinés de sombre. Le fond blanc des sépales est presque entièrement couvert de violet clair, avec un liseré d'1/2 pouce de violet rosé. Barbes blanches teintées de lavande, jaune pâle dans la gorge. »

Des trois semis qui sont à l'origine de 'Legerdemain', deux sont issus de croisements dont on ne connaît rien du résultat. Du premier, (Magharee x Overjoyed), on sait qu'il est aussi dans le pedigree de 'Tour de France', superbe amoena jaune qui s'est élevé dans l'échelle des honneurs jusqu'à la première place parmi les TB (Wister Medal, 2011). Quant au second, (Witch’s Wand x Witches’ Sabbath), associé encore une fois à 'Romantic Evening', il a donné naissance au BB 'Snazzy' (2006), une variété violet archevêque avec barbe jaune. 'Romantic Evening' (Ghio, 1994) est un must de ces derniers temps, avec près de 200 variétés enregistrées qui portent ses gènes. Cette sombre beauté a inspiré des obtenteurs de tous pays et, pour ce qui est du nôtre, Michelle Bersillon(1) , Richard Cayeux (2), Jean Claude Jacob (3) et Loïc Tasquier pour les médians. Mais ses plus fameux descendants sont sans doute 'Black Magic Woman' (Tasco, 1998), 'Foreign Legion' (Keppel, 2000), 'Gypsy Lord' (Keppel, 2005), 'Snowed In' (Ghio, 1998), 'Starring' (Ghio, 1999) ou 'Wild Wings' (Keppel, 1998).
 
'Legerdemain' fait partie des variétés aux coloris originaux. Il mérite d'être plus répandu qu'il ne l'est pour l'instant.

  1. voir 'Avant Première' (2008) et son frère de semis 'Endimanché' (2008)
  2. voir 'Dietmar Brixy' (2011), 'Eclipse de Mai' (2009) ou 'Mystérieux' (2003)
  3. voir 'Miz Du' (2013)

Iconographie :


  • 'Legerdemain'

  • 'Casbah'

  • 'Romantic Evening'

  • 'Miz Du'

ENTRE L'ELBE ET L'ODER

C'était la partie slave de l'Allemagne. Ce n'est qu'assez tardivement que ces populations orientales ont été absorbées par celles qui venaient de l'Ouest et intégrées à ce qui allait un jour devenir l'Allemagne. Après le cataclysme de la seconde guerre mondiale et la libération de la partie Est de l'Allemagne par les troupes russes, la région située entre l'Elbe et l'Oder a été soviétisée, isolée du reste du monde et vouée à prendre un retard de développement qu'on ressent encore un peu plus de vingt ans après la réunification. Pour ce qui nous concerne, la culture des iris, il s'est produit dans cette région le même phénomène que celui qui a marqué les autres parties européennes de l'ancien empire soviétique : une véritable explosion. C'est un peu comme ce qui se passe dans les régions montagneuses. Après un long hiver glacé et enneigé, la nature se réveille brusquement et tout se dépêche de pousser et de fleurir. Là-bas, à peine le rideau de fer écroulé, les fans d'iris se sont précipités pour acquérir des variétés occidentales et se lancer dans l'hybridation. Alors que la partie ouest de l'Allemagne n'a connu qu'une évolution tranquille, la partie est a vu naître une quantité d'hybrideurs actifs, inventifs et conquérants. C'est avec ces gens-là qu'on va passer un petit moment.

Ils font généralement preuve de beaucoup de talent et leur travail est maintenant reconnu au delà des frontières germaniques du fait de leur succès dans les compétitions auxquelles ils prennent part. Leur renommée a atteint les États-Unis où plusieurs ont pu intéresser des pépiniéristes cherchant à se distinguer des grandes maisons internationalement connues. Ils y sont maintenant distribués, ce qui n'est pas un succès mineur ! Les obtenteurs français, sauf exception, n'ont pas eu la même réussite.

Commençons par évoquer Manfred Beer. C'est de loin le plus connu des hybrideurs allemands. Après une carrière d'ingénieur dans les ligne électriques à haute tension, au temps de la RDA, il a commencé dès les années 1990 une nouvelle vie dans le domaine de l'hybridation. Il y a obtenu ( et obtient toujours) de remarquables succès un peu partout dans le monde. Ce n'est pas toujours l'originalité qui caractérise ses iris, mais ses nombreuses variétés sont des plantes sérieuses et qui poussent généralement bien. Trait particulier, il leur donne des noms qui sont le plus souvent des prénoms de dames... 'Susanna Innerhofer-Hirshmann' (2012), très classique, est en vente chez Bruce Filardi, aux USA.

Günter Diedrich, de Halberstadt en Saxe-Anhalt, ville martyre de la seconde guerre mondiale, s'est fait rapidement un nom dans l'hybridation et l'on constate chaque année des progrès dans la qualité et l'originalité de ses obtentions. Le joli jaune 'Halbstäter Dom' (2002) donne la mesure de son talent.

Wolfgang Landgraf était cheminot à la Deutsche Bahn. Son intérêt pour les Iris est vieux déjà d'environ 30 ans, mais il est encore très vivace. Les terrains où il effectue son travail d'obtenteur sont situés à Neustadt an der Orla, à 350 m de hauteur en Thuringe. Là, il cultive des variétés modernes, plaisantes et robustes maintes fois primées dans les compétitions allemandes. Son iris le plus connu est 'Ladgräfin Elizabeth' (2007), que l'on trouve un peu partout.

Bernhard Lesche, originaire de Jena, en Thuringe (encore!), a longtemps travaillé dans la fabrication de microscope, l'optique est une spécialité de cette partie de l'Allemagne. Quand il s'est lancé dans l'hybridation, les premiers succès n'ont pas tardé à venir. Depuis le début des années 2000 il enregistre régulièrement des variétés intéressantes qui ont une « touche » caractéristique, signature d'une personnalité remarquable (voyez 'Mondenschimmer' (2002)). C'est sûrement l'un des meilleurs espoirs parmi les hybrideurs allemands.

Margitta Herrn, de Leipzig, a appris le métier d'hybrideur avec Manfred Beer. Elle a enregistré son premier iris en 2010 et s'est aussitôt fait remarquer par l'originalité de ses choix dans ses croisements. Son 'Miltitzer Tanzparty' (2011) a été primé à Munich en 2012.

Pia Altenhofer, de Halle, se signale par une démarche originale pour ce qui est de l'attribution d'un nom à ses obtentions : elle choisit un vocable qui n'a pas de signification particulière mais se contente de bien sonner à l'oreille ! C'est un moyen infaillible de ne pas risquer une homonymie nécessairement rejetée par le registrar ! Elle a déjà à son compteur plus de cinquante variétés nouvelles dans toutes les catégories d'iris, mais leur distribution est restée confidentielle.

Domicilié à Gerbstedt, un village situé entre Halle et Magdeburg, Klaus Burkhardt en sans doute le dernier né des hybrideurs allemands ainsi qu'un actif pépiniériste. Dès sa première participation à un concours, il s'est fait remarquer à Munich. J'aime particulièrement son jaune 'Sina at Home' (2014).

C'est ainsi qu'on fait connaissance avec un pan rarement observé de l'iridophilie internationale. Nos compatriotes n'ont pas l'occasion de voir et d'apprécier les variétés allemandes. C'est dommage. Espérons que nos jeunes fanatiques se tourneront bientôt vers ces iris si peu distribués.

Iconographie : 


'Susanna Innerhofer-Hirshmann' 


'Halbstäter Dom'


'Ladgräfin Elizabeth' 


'Mondenschimmer' 


'Sina at Home'