31.12.04

VOEUX

Dans un moment où notre monde connaît l'horreur et la désolation, je n'ai pas le courage de proposer un jeu... Mais je tiens malgré tout à offrir à ceux qui lisent ce blog, et qui me font souvent le plaisir d'en dire du bien, mes voeux de bonheur et de joies pour l'année qui va commencer. Bien sûr, elle aura, comme la précédente, ses heures de réjouissance et ses moments de deuil, mais on peut espérer que les premiers seront les plus nombreux et que les amateurs d'iris éprouveront plus de plaisir que de douleur. Alors, bonne année à tous, au milieu de nos fleurs favorites.
L’AMATEUR D’IRIS
OU LE TRIOMPHE DE L’IMAGINAIRE

L’amateur d’iris (l’irisarien comme disent les Américains) n’est pas seulement un jardinier, ni même un botaniste. Certes, il est un peu cela, mais on le qualifierait mieux en disant de lui qu’il est un champion de l’imaginaire. En effet la passion qui le possède se prolonge bien au-delà de la période de floraison de sa plante préférée. Il est évident que l’amour d’une fleur aussi fugitive ne se nourrit pas seulement de la contemplation d’une iriseraie épanouie dans la fraîcheur humide et ensoleillée d’un matin de mai ; la part du rêve y est au moins aussi importante et précieuse que celle du réel, et elle anime notre homme tout au long du cycle annuel. En fait la période de végétation active, de l’apparition des premières feuilles au dessèchement de la dernière corolle, n’est qu’un moment où le rêve cède quelque peu la place à la réalité, mais si la passion de notre amateur passe là par un paroxysme, il y a, dans la surveillance des bourgeons, les soins divers de printemps, l’attente des premières éclosions, une part non négligeable d’imaginaire, et les inévitables déceptions causées par les caprices de la nature n’en sont que plus vives.

Au vrai, l’amateur d’iris peut être comparé à l’un de ces fanatiques, amant exclusif d’une vedette de la scène ou de l’écran. Comme lui il collectionne tout ce qui touche à sa favorite, il recherche tout ce qui peut, de près ou de loin, le mettre en contact avec celle qu’il aime et dont il ne peut s’approcher que si brièvement chaque printemps. Il en arrive ainsi à se créer un monde à lui, peuplé de revues, de catalogues et de photographies, dans lequel il vit onze mois par an. Et même lorsqu’il s’en extrait pour des tâches bien concrètes, voire ingrates, comme épandre de l’engrais, arracher des mauvaises herbes ou encore retirer des feuilles mortes, il a toujours dans l’œil la vision de ce jardin idéal où ses plantes bien-aimées croissent, splendides et pures, comme dans l’enclos du paradis que décrit Zola dans “La faute de l’abbé Mouret”. On peut dire que notre amateur d’iris n’éprouvera guère moins de jouissance devant la photo parfaitement réussie de telle ou telle variété, que s’il avait réellement la fleur dans la main. Peut-être même son bonheur sera-t-il encore plus profond, car son rêve est forcément sans défauts et ainsi lui sont épargnés les malices de la végétation ou les injures de la météo printanière...

Texte initialement publié dans « Iris & Bulbeuses » N° 110

23.12.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

Premio Firenze III

Le « Premio Firenze » a quelque fois été attribué à des variétés non américaines. C’est le cas pour les cinq suivantes. Quelle est celle de nationalité Tchèque ?

DANCER’S VEIL
LIBON
IKAR
HELEN DAWN
SETTIMO CIELO


RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

Premio Firenze II

HAUT LES VOILES est la bonne réponse.

PANORAMA DES IRIS ROSES

Les iris roses sont les favoris du grand public. Pourtant il a fallu attendre la révolution tétraploïde pour voir, en même temps, apparaître les premiers. Cela se passait en 1925 et, en quelques années, ce qui était resté impossible jusqu’alors est soudain devenu une réalité. Dès lors les hybrideurs ont sélectionné et enregistré des quantités d’iris roses, non seulement parce que ces iris étaient génétiquement intéressants, mais aussi parce que les amateurs en redemandaient. La consécration est venue lorsqu’en 1951 CHERIE (Hall 48) a obtenu la Médaille de Dykes. Mais avant d’en arriver là bien des cultivars roses avaient démontré des qualités exceptionnelles pour leur époque. Il en est ainsi de MELITZA (E. Nesmith 40), FLORA ZENOR (Jacob Sass 41), PINK CAMEO (Fay 44), qui resta longtemps l’iris rose le plus pur et le plus soutenu, avantagé, qui plus est, par des formes parfaites.

Avec CHERIE, David Hall obtint un triomphe bien mérité. Il a continué, jusqu’à la fin de sa vie, à hybrider des iris roses dont un grand nombre a acquis une véritable célébrité. BALLERINA (50), MAY HALL (52), LYNN HALL (56), JUDY MARSONNETTE (62), HEARTBREAKER (64) et FASHION FLING (65) en sont la preuve.

D’autres hybrideurs de l’époque se sont mis sur les rangs avec un succès certain. Témoin Craig Lapham avec BARBARA LUDDY (46), PARADISE PINK (49), LOTTE LEMBRICH (50) ; Orville Fay avec NEW HORIZON (46), MARY RANDALL (50 – DM 54), NATIVE DANCER (53), jusqu’à ESTHER FAY (61) ; Fred DeForest avec CLOUD CAP (47), réputé pour être le plus grand rose de son temps, FRANCES KENT (52) et son « fils » DAWN CREST (57) ; enfin Tell Muhlestein avec une série de belles réussites : PINK FORMAL (47), PARTY DRESS (50), puis PINK FULFILLMENT (51) et JUNE MEREDITH (53).

Une nouvelle ère s’est ouverte quand est apparu ONE DESIRE (Shoop 60), un rose vif qui a fait sensation et est resté de longues années dans les catalogues. Nathan Rudolph, un autre grand des roses, a suivi le mouvement avec PINK FRINGE (67) et surtout PINK TAFFETA (68), qui a obtenu la Médaille de Dykes en 75. William Newhard, avec PINK PIROUETTE (69) nous a offert un délicieux iris rose tendre. Le travail de Glen Corlew s’est soldé, dès le début de sa production, par CHERUB CHOIR (68), « fils » de ONE DESIRE. Quant à Chet Tompkins, il a réussi, avec OVATION (69) celui qui fut longtemps le rose le plus foncé.

Les années 70 ont vu venir sur le devant de la scène l’excellent travail de Joseph Gatty qui fut un maître des roses pendant une vingtaine d’années. LIZ (72) et PRINCESS (72) ont inauguré la série, BONBON (77) et surtout PLAYGIRL (77) ont pris la suite. Nate Rudolph était toujours là et PINK SLEIGH (70), PINK ANGEL (73) et CARVED PINK (75) contribuent à sa renommée. De même que Glen Corlew avec CHERISHED (73) et INFATUATION (77). Il ne faut pas oublier Elvan Roderick et son ERLEEN RICHESON (79). Ben Hager fait aussi son apparition, et de quelle façon ! VANITY (75 – DM 82) et BEVERLY SILLS (79 – DM 85) resteront longtemps encore au firmament des iris roses.

Au cours des années 80 on ne compte plus les roses splendides. L’hybridation dans ce coloris a atteint la perfection comme en attestent LOVELY KAY (M. Hamblen 80), PARADISE (Gatty 80), STORYBOOK (Corlew 80), CHERUB SMILE (Schreiner 82), INFINITE GRACE (Hamblen 82), EDEN (Gatty 83),SUE ELLEN (D. Meek 83), PINK BELLE (Wood 83), CON AMORE (Hager 84), MING ROSE (O. Brown 84), AMOUR (Corlew 85), ANNA BELLE BABSON (Hager 85), ELSIEMAE NICHOLSON (Corlew 86), EARLY WISH (Gibson 86), PRESENCE (Gatty 87), VISION IN PINK (Wood 87), COTTON CLUB (Schreiner 88), DOLCE VITA (Hager 88), BUBBLE UP (Ghio 88), PINK GALA (Wood 89)…Des nouveautés apparaissent comme DREAM A LITTLE (Osborne 85) et ses petits éperons blancs, ou MAGIC (Hager 87) avec sa barbe bleutée. Le rose est la couleur de la décennie.

Jusque là le rose était une exclusivité américaine. Les Français n’étaient pas disponibles, dans les années 40, pour cause de conflit mondial au moment de l’expansion rose. Ils ne viendront dans le coup qu’ à la fin des années 70, avec PREMIER BAL (Cayeux 78), puis LA BELLE AUDE (Ségui 82) et PERLE ROSE (Cayeux 87). Les Australiens ne font pas encore partie du club.

La moisson continue au cours des années 90 : les iris roses sont de plus en plus vifs ou purs, ondulés et frisés. Schreiner, qui ne s’était pas vraiment distingué dans ce coloris jusque là, propose BEAUTIFUL VISION (90), puis DREAMSICLE (95). Vernon Wood s’affirme comme devenant le digne successeur de Joë Gatty. Ses APRIL IN PARIS (92), PINK STARLET (93), PINK QUARTZ (96) sont de délicieuses variétés. Les anciens tiennent toujours leur rang, comme Keppel avec SOCIAL EVENT (91), Gatty avec COMING UP ROSES (92), son chant du cygne, Ghio avec BUBBLING ALONG (93), Gibson avec FUNNY GIRL (94), Corlew avec DESCANSO (95), Hager avec CORPS DE BALLET (95) et ses petits éperons. Des nouveaux font leur apparition : Richard Ernst et FEMININE FIRE (91) ou JUST FOR SOPHIE (98) ; George Sutton et FRENCH ROSE (97). Les roses ne sont plus l’apanage des Américains. Des obtenteurs de tous pays en enregistrent, et de grande valeur. A preuve, les variétés de Graeme Grosvenor, en Australie, comme FIRST MOVEMENT (90) et RIBANDS (93) ; celles de Richard Cayeux qui ont nom STARLETTE ROSE (96), BUISSON DE ROSES (97) et LA VIE EN ROSE (99). D’Australie encore vient KATIE PIE (Blyth B. 98) qui est d’une adorable fraîcheur. D’Allemagne CARMEN KNEPPER (Beer 91) ou WATERLOOSAULE (Moos 93) démontrent le savoir-faire de leur obtenteur. De Slovaquie arrive XOCHIPILI (Muska 95), très original. La Grande-Bretagne envoie SHERWOOD DAWN (Dodsworth 99) remarqué en 2000 à Florence. Enfin n’oublions pas notre compatriote Lawrence Ransom et son remarquable DESIRIS (94).

Dès maintenant on peut affirmer que les années 2000 ne seront pas moins riches et marquées par l’ouverture au monde. Il y a déjà des iris roses superbes et l’on peut s’attendre à beaucoup d’autres toujours plus enthousiasmants.

18.12.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

Premio Firenze II

A Florence, une seule variété française à obtenu un prix parmi les trois premiers. De laquelle s’agit-il ?
FALBALA
DOCTOR GOLD
SABLES D’ARGENT
MER DU SUD
HAUT LES VOILES


RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

Premio Firenze

RUFFLED BALLET n’a pas obtenu le « Premio Firenze ».

GALONS DORÉS

Qu’est-ce qui se cache derrière ces iris blancs, dont le haut des sépales est coloré de jaune ? Je ne connais pas grand chose de la génétique des iris et, pour ma gouverne, je me contente d’essayer d’analyser les pedigrees des variétés qui m’intéressent. Alors, précisément, pour ces iris là, j’ai choisi une vingtaine de variétés et j’ai tenté de découvrir ce qui peut leur donner ce coloris que je trouve fort agréable. Mais mes efforts n’ont pas abouti à une certitude ! Il y a beaucoup de choses derrière tout cela ! En fait je crois pouvoir dire qu’il s’agit soit d’iris amoenas jaunes, soit d’iris blancs à barbes jaunes, issus de variétés jaunes, roses, à barbes mandarine, voire d’iris bleus, dont la coloration des sépales est partiellement inhibée.

Pour cette fois, n’étant pas sûr de moi à propos des origines, je vais me contenter d’une description des variétés qui me paraissent les plus réussies.

Il y a cinquante ans, il y a eu le bien joli QUEEN’S LACE (Muhlestein 53) qui peut être également une préfiguration de BRIDE’S HALO. Muhlestein a recommencé en 58 avec une variété qui a été très populaire, CREAM CREST. Au même moment Neva Sexton proposait MIXED EMOTIONS qui a la même « mère » que QUEEN’S LACE et dont le « père » est le bleu AZURE SKIES. Il faut dire que la coloration de MIXED EMOTIONS n’est pas tout à fait celle dont nous parlons aujourd’hui, puisque les épaules ne sont pas jaunes mais plutôt chartreuse, ce qui résulte de la présence d’un peu de chlorophylle ou d’anthocyanine. Vint ensuite CHRISTMAS ANGEL (DeForest 59) qui est issu de variétés roses à barbes mandarine. On peut parler ensuite du bien nommé GOLDEN SHOULDERS (Bledsoe 63), lui aussi provenant de roses. Le plus connu du genre, au cours des années 60, est sans conteste TINSEL TOWN (Tompkins 67), des origines duquel on ne sait rien. Mais il faut aussi tenir compte de MARSHMALLOW (Olson 63) qui accrédite la thèse de l’origine amoena, puisque ce dernier descend de WHOLE CLOTH. RADIANT BEAM (Olson 68), fils de MARSHMALLOW, présente à la fois des épaules jaunes et un liseré des sépales de la même couleur. Enfin GOOD HOPE (Moldovan 69) marque, pour ce coloris, la fin des années 60, en compagnie d’ALENETTE (DeForest 69) qui a CHRISTMAS ANGEL et WHOLE CLOTH parmi ses ancêtres.

La seule variété des années 70 de ce coloris, vraiment digne d’intérêt, s’appelle CINDY ELLEN (Opal Brown 72) ; elle figure encore parmi les plus réussies, avec notamment des parties florales richement dentelées et des couleurs bien nettes soulignées par de grosses barbes jaune d’or.

GOLD BURST (D. Palmer 80) se distingue par l’or de ses sépales et la netteté du dessin. C’est une référence dans ce modèle d’iris. Lui aussi provient de WHOLE CLOTH, associé au fameux DENVER MINT. L’obtenteur du Colorado Tom Magee a enregistré en 82 MOUNTAIN SUNBEAMS, tout à fait typique, mais dont les fleurs manquent un peu de souplesse. L’inlassable Lloyd Zurbrigg a obtenu en 83, de son côté, une variété très similaire, mais d’un jaune plutôt mimosa, baptisée ANEW parce qu’elle s’adjoint la particularité de remonter.

Passons aux années 90, et jetons un œil sur DAFFODIL CLOUD (Weiler 90) dont les vives taches jaunes descendent assez loin sur les sépales, et qui mérite bien un coup de chapeau. La même année Ben Hager a proposé SUNNY SHOULDERS, très voisin du précédent, avec un peu plus de frisettes sur les sépales ; c’est un descendant de GOLD BURST et de DREAM AFFAIR, lequel, bien que jaune clair, présente des épaules nettement plus riches en couleur. Ce DREAM AFFAIR (Gatty 78) est une superbe variété qui se trouve aussi a l’origine de SATIN KNIGHT (Williamson 91) de teinte très claire. Du même acabit, signalons HAWAIIAN MOONLIGHT (Pinegar 95), très dentelé. BE A DREAM (Niswonger 92) est sans doute l’un des plus beaux de ce type ; il descend de la lignée des amoenas corail de Niswonger. Superbe également, GILDED CREAM (Wilkerson 95) qui est une amélioration de son « père » GOLD BURST. Ne terminons pas le siècle sans un mot des variétés européennes, une fois n’est pas coutume ! Il s’agit d’abord du travail de Brian Dodsworth en grande Bretagne et de ses BEWICK SWAN ( 80 – BDM 85), EDALE (89) et DARLEYDALE (98 – BDM 2001), ainsi que de BÖRDESSCHNEE (Fischer 99), avec ses épaules jaune d’or et sa barbe claire.

Le début des années 2000 a apporté déjà trois belles réalisations dans ce modèle. Commençons par les deux frères de semis que sont BRIDAL ICING et COUNTRY DAWN, tous deux enregistrés en 2002 et dus au prometteur Tom Johnson. Le premier est peut-être le plus réussi car doté de fines dentelures que son frère, plus coloré, n’a pas. Et terminons par SEASON OF MISTS (Zurbrigg 2002) qui retrouve les couleurs de son « père » SUNNY SHOULDERS, et qui offre l’avantage, comme la plupart des iris de Lloyd Zurbrigg, d’être remontant.

Voilà effectué le tour de cinquante ans d’épaulettes à galons dorés. Comme avec tous les autres modèles de fleurs, on a assisté à une amélioration constante de la netteté des contrastes et de l’élégance des fleurs. Là comme ailleurs, l’iris ne tourne pas en rond, il progresse.
UN AIR DE FAMILLE

Dans l’article baptisé « Galons dorés » je fais allusion à trois variétés britanniques blanches avec épaules jaunes. Il s’agissait de trois iris obtenus par Brian Dodsworth, l’hybrideur anglais le plus fameux des vingt-cinq dernières années, dont les iris ont remporté par douze fois la British Dykes Medal entre 1977 et 2001 ! Ces trois variétés ayant apparemment un air de famille, j’ai recherché si un lien génétique les unissait. Ce travail de chartiste n’a pas été totalement couronné de succès mais ce que je pressentais n’était pas non plus tout à fait inexact.

Les trois iris considérés se nomment BEWICK SWAN (80 – BDM 85), EDALE (89), et DARLEYDALE (98 BDM 2000). Le premier est une plante de haute taille avec des fleurs gracieuses, un peu fragiles, largement ondulées ; le haut des sépales présente un dégradé de jaune un peu orangé, qui s’accorde bien avec les barbes rouge minium. Il résulte du croisement CRYSTAL BLAZE X RIPPLING WATERS. On ne présente plus ce dernier dont le nom se rencontre à la première génération dans le pedigree de plus de cent variétés ! L’autre est beaucoup moins connu : c’est un iris blanc légèrement lilacé agrémenté de barbes minium, qu’il a transmises à son « fils ». Ses origines restent obscures puisque la description de CRYSTAL BLAZE (Rudolph 64) ne fait état d’aucune variété précise, mais se résume à une énumération de numéros de semis. Le mystère est bien épais autour de cette variété et l’amateur de racines en est pour ses frais. EDALE et DARLEYDALE, en revanche sont de proches parents. EDALE provient de (CUP RACE x CRAFTSMAN) X JILL ROSALIND. Il est nettement influencé par la couleur jaune puisque la dominante est chez lui un blanc crème, tandis que les hauts de sépales s’ornent de jaune plus vif, le même que celui des barbes. CUP RACE (Buttrick 63) et JILL ROSALIND (Dodsworth 76) ont eu la faveur des juges ; en témoigne la BDM obtenue par JILL ROSALIND en 81. Ce sont deux iris blanc pur, y compris les barbes, issus de deux lignées différentes. CRAFTSMAN (Knopf 64) fait partie de la famille fort nombreuse du type JOYCE TERRY, c’est à dire avec des pétales jaunes et des sépales blancs liserés du jaune des pétales. DARLEYDALE, le plus récent, est venu du croisement EARLY LIGHT X JILL ROSALIND. EARLY LIGHT (Scopes 83) est un autre vainqueur de la BDM, qu’il a conquise en 89. Il s’apparente un peu au type JOYCE TERRY, mais en plus jaune pastel. Ainsi EDALE et DARLEYDALE ont-ils le même géniteur ; quant à leurs parents maternels, leur coloris est fort proche. Le constat est simple : EDALE et DARLEYDALE sont des demi-frères. A noter qu’à ma connaissance deux autres iris signés Dodsworth se présentent dans des teintes voisines : BUCKDEN PIKE (85 – BDM 87) est blanc crémeux à barbes jaunes, SHERWOOD PRIMROSE (96) est jaune primevère clair, à barbes jaunes également.

La conclusion que l’on peut tirer de cette courte étude est, comme on pouvait s’y attendre, que, comme l’on dit, les chiens ne font pas des chats ! Avec des ingrédients analogues, on a de grandes chances d’obtenir des produits semblables.

10.12.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

Premio Firenze

Avant d’obtenir la Médaille de Dykes, certaines variétés ont été couronnées à Florence. Ce n’est pas le cas de l’un des iris ci-dessous, lequel ?
WHOLE CLOTH
BEVERLY SILLS
RUFFLED BALLET
TITAN’S GLORY
DUSKY CHALLENGER


RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

A la Felinière

La bonne rédaction est celle qui se trouve ci-dessous :

« L’accès au château de la Félinière se fait par un chemin à flan de colline au début duquel un grande flèche constituée d’iris en fleur vous indique la direction à prendre. La comtesse de Courcy, maîtresse des lieux, explique que cette flèche est composée de six variétés d’iris, tous dans les tons de bleu sombre. Les trois de la première colonne, les plus hauts, se nomment DUSKY CHALLENGER, BLACK MADONNA et NIGHTS OF GLADNESS. En se dirigeant vers la pointe, les deux suivantes, un peu plus basses, sont NUIT DE CHINE et BLACK TIE AFFAIR. Celle de l’extrémité, beaucoup plus petite, s’appelle HELEN PROCTOR. C’est la première à fleurir. Après cette sombre entrée en matière, les yeux se portent naturellement sur la collection d’iris qui, un peu plus loin, fait la fierté de la Félinière et attire tant de visiteurs. »


V COMME VARIEGATA

Dans « The World of Irises », à la différence de ce qui est fait pour les amoenas, il n’y a pas à proprement parler de développement concernant les iris variegatas tels que nous en parlons, c’est à dire ces iris aux pétales dans les tons de jaune, au-dessus de sépales dans les tons de brun, de bleu ou de violet. Leur problématique est traitée au chapitre des bicolores, tout simplement. Richard Cayeux quant à lui, dans « L’Iris, une fleur royale », leur accorde cependant deux pages, mais sans s’attarder sur les origines du modèle ni sur son évolution. C’est ce qui va être abordé maintenant.

Dans le langage botanique, lorsqu’on parle de Iris variegata, c’est pour évoquer une petite plante diploïde, originaire d’Europe sud-orientale, d’à peine 40 cm de haut, dont la fleur est constituée de trois pétales jaunes et de trois sépales blancs veinés de grenat. On est évidemment loin des variegatas de nos jardins actuels qui, s’ils tiennent tout de même beaucoup de cet ancêtre, ont incorporé beaucoup d’autres gènes et sont aussi devenus tétraploïdes.

Il est intéressant de suivre l’évolution des variegatas au cours des années. Prenons, par exemple les variegatas diploïdes obtenus en Allemagne par Goos et Koenemann, et en particulier LORELEY (1901). Nous sommes devant un iris à peine évolué : pétales jaune pâle, sépales blancs où s’étalent des stries intenses d’un rouge pourpré. En 1920 les mêmes obtenteurs présentent FLAMMENSCHWERT. La couleur des pétales s’est intensifiée, le fond des sépales est également jaune, et le réseau pourpré est devenu si dense que le fond disparaît presque totalement, pour ne réapparaître qu’en un fin liseré, tout au bord. La plante s’est aussi renforcée et a grandi : FLAMMENSCHWERT atteint les 80 cm. En 1932, CROWN PRINCE, de Kleinsorge est encore plus contrasté : les pétales sont d’un vieil ivoire, sur les sépales les traces de veinage n’apparaissent que sous les barbes, le reste est d’un grenat uniforme. A noter aussi que l’on constate un soupçon d’ondulation tout au bord des sépales. Une photo de ACCENT (Buss 52) montre un variegata devenu presque trop grand (115 cm), très voisin du précédent en matière de coloris mais avec une remarquable flamboyance. La barbe d’or est superbe sur les sépales brun chaud.

Au cours des cinquante ans qui ont suivi, les variegatas se sont multipliés, évoluant dans quatre directions : vers des sépales très foncés ; vers des teintes plus brunes aux pétales ; vers des sépales où le violet s’affirme à côté du brun-rouge ; mais aussi vers des tons pastel, où le jaune devient primevère et le violet mauve tendre. Exemple de la première évolution, PEKING SUMMER (Schreiner 83) dont les sépales sombres s’accordent si bien avec l’or des pétales. Du côté de l’ambre ou du miel aux pétales il faut parler de SYNCOPATION (Gatty 84), SPANISH BOLD (Blyth B. 86), sombre mais somptueux, et même du petit Français CORBIÈRES (Ségui 82). Pour illustrer la troisième évolution, choisissons GALA MADRID (Peterson 68), père du précédent et formidable iris cuivre et pourpre, puis EDITH WOLFORD (Hager 86 – DM 93), jaune citron et indigo, ainsi que le récent JURASSIC PARK (Lauer 95) qui est issu d’EDITH WOLFORD. Enfin pour la quatrième variante arrêtons-nous au ravissant SWEDISH MODERN (Babson 76), jaune paille et bleu tendre, bien ondulé, ou à son égal BETTY SIMON (Hamblen 76), à peine plus mauve aux sépales.

Aujourd’hui les variegatas n’ont pas fini d’évoluer, soit qu’ils continuent d’accroître l’effet de contraste, comme chez ANDALOU (Cayeux 95), soit qu’ils s’ornent de pétaloïdes, comme le petit tchèque PEGAS (Smid 80), soit même qu’ils inversent les couleurs ! Depuis peu, en effet, il existe des variegatas inversés. L’une des premières apparitions de ce nouveau modèle a été CUP OF COCOA (Plough 82), où le jaune chamois des pétales est fortement infus de lavande, les sépales conservant la couleur initiale ; puis vint SILICON PRAIRIE (Stanek 91), où les couleurs sont bien inversées mais les teintes encore très pâles. En 2000 deux nouveautés ont nettement enfoncé le clou : SADDLE UP (Christopherson) – pétales lavande, sépales chamois et barbes mandarine – et surtout WONDERFUL TO SEE (Kerr) – pétales mauve parme, sépales jaune safrané, barbes or. La série continue en 2003 et 2004. APPOLLO’S ROBE (Carter 2003) offre du jaune tilleul aux sépales, du mauve aux pétales avec des côtes où grimpe le tilleul des sépales. FARE THEE WELL (Christopherson 2004) renouvelle l’expérience de SADDLE UP, avec le même « père » (HULA DANCER*), mais une autre « mère » (STORYBOOK au lieu de NANCY GLAZIER). Toutes ces améliorations et transformations laissent présager un bel avenir au modèle variegata.

* HULA DANCER (Shoop 85), comme quelques autres iris de George Shoop, est un bicolore inversé avec des pétales rose bruyère et des sépales abricot, où le jaune, donc, est déjà présent.

3.12.04

L’ENIGME DE LA SEMAINE

A la Felinière

Pour rédiger l’article ci-dessous, le journaliste, se fiant à sa mémoire, n’a pas relu ses notes ! Résultat : il a commis cinq erreurs sur les six noms qu’il cite !

« L’accès au château de la Félinière se fait par un chemin à flan de colline au début duquel un grande flèche constituée d’iris en fleur vous indique la direction à prendre. La comtesse de Courcy, maîtresse des lieux, explique que cette flèche est composée de six variétés d’iris, tous dans les tons de bleu sombre. Les trois de la première colonne, les plus hauts, se nomment DUSTY CHALLENGER, LADY MADONNA et NIGHTS OF DARKNESS. En se dirigeant vers la pointe, les deux suivantes, un peu plus basses, sont NUIT DE CHINE et BLACK PIE AFFAIR. Celle de l’extrémité, beaucoup plus petite, s’appelle IRENE PROCTOR. C’est la première à fleurir. Après cette sombre entrée en matière, les yeux se portent naturellement sur la collection d’iris qui, un peu plus loin, fait la fierté de la Félinière et attire tant de visiteurs. »

A vous de rétablir les noms exacts.


RÉPONSE À L’ÉNIGME DE LA SEMAINE DERNIÈRE

Podium

L’ affiche de 1980 est :
MYSTIQUE - BROWN LASSO - QUEEN OF HEARTS.


SANS PAREILS

Au cours du temps, sont apparus certains iris qui sont restés uniques en leur genre. Soit que les obtenteurs n’aient jamais réussi à reproduire leur modèle, soit que leur coloris reste exceptionnel, soit qu’ils présentent une forme, ou une disposition spécifique. C’est le cas des deux variétés dont il va être question, qui font partie de ces exceptions. L’un et l’autre se présentent avec une disposition des couleurs que personne n’a retrouvée par la suite.

I. COLOR CARNIVAL

Celui-ci commence déjà à dater ! Il a été enregistré par Fred DeForest en 1948. Malgré son âge certain il a continué de figurer jusque dans les années 80 dans certains catalogues comme celui de la maison Cayeux, en France. C’est là que je me le suis procuré, au tout début de ma collection. Il est toujours dans mon jardin, au rayon « antiquités », et il n’a rien perdu de son originalité.

COLOR CARNIVAL affiche son âge, avec des pièces florales très peu ondulées, des sépales un peu pendants, avec cette petite échancrure à l’extrémité de la ligne médiane propre aux iris anciens, et ces pétales qui, avec le temps, s’effondrent un peu vers le cœur de la fleur… Qu’importe. Son affaire c’est le coloris. Les pétales affichent un rose corail tendre, les sépales, plus ivoire que rose, sont finement veinés de violet améthyste, alors que les bords retrouvent la couleur du fond. La barbe, mandarine, anime joliment l’ensemble.

Bien des obtenteurs, intrigués et séduits par cette disposition des couleurs, ont tenté de la retrouver. Mais, à ma connaissance, COLOR CARNIVAL reste à peu près le seul de son acabit. La variété qui en est la plus proche pourrait être CROWD PLEASER (B. Hamner 83) qui, dans une forme moderne, offre un coloris de base rose corail vif, avec de fines veinules violacées sur toute la surface des sépales. La base rose est bien présente, très agréable même, mais la richesse de la coloration des sépales n’y est pas. C’est le même problème pour DIAMOND BLUSH (Spoon 97) et pour POM POM GIRL (Linda Miller 98), mais ce dernier est sans doute la variété qui se rapproche le plus de notre sujet d’aujourd’hui. Au demeurant COLOR CARNIVAL, pour la qualité du contraste, n’a toujours pas été égalé !

II. HASH MARKS

Pour voir HASH MARKS (Schreiner 72) on peut aller au Parc de la Source, à Orléans, où il essaie de pousser au pied d’un des bâtons de mikado, dans cette exposition étrange et absurde où l’on tente de faire pousser des iris dans des corbeilles de fil de fer, au-dessus de la tête des visiteurs… Pourquoi parler de celui-ci ? Très simplement en raison de son modèle et de son coloris. Parce qu’il me semble être le seul ainsi coloré, dans un monde où les doublons sont innombrables.

Il se présente comme un iris de couleur caramel, avec sur les sépales des rayures brun-rouge, plus denses aux épaules et plus sombres sous les barbes, jaunes. Ce n’est ni un plicata (du moins, semble-t-il), ni un variegata, ni à proprement parler un « broken-color », mais quelque chose qui tient un peu de tout cela, bref un modèle d’exception. Par ailleurs la fleur affiche bien son âge. C’est un exemple de ce que les Américains appellent un iris historique. D’autant plus que, bien qu’enregistré par Schreiner en 72, son ascendance remonte très vite aux années 50, puis aux meilleurs des iris bruns, du temps où ces derniers n’avaient encore pas -ou peu- d’ondulations.

Ses grands parents du côté féminin s’appellent OLYMPIC TORCH (Schreiner 56) et HINDU WAND (Plough 57). Le premier présente des fleurs dans les tons d’orange brûlé. Il descend d’INCA CHIEF (Mitsch 52), lui-même issu du fameux TOBACCO ROAD (Kleinsorge 41), dont proviennent presque tous les bruns d’aujourd’hui. HINDU WAND, dans les tons de chamois mêlés de brun, descend lui aussi de TOBACCO ROAD, et de plusieurs autres bruns dont l’abricot cuivré CASCADE SPLENDOR (Kleinsorge 44) et l’ancien brun de Sass RAINBOW ROOM. Du côté paternel, HASH MARKS provient d’une autre lignée de bruns, via WENATCHEE KID (Noyd 57) et FIRECRACKER (Hall 43). On aurait du obtenir, avec ce pedigree, un iris brun comme bien d’autres. Ses cousins se nomment en effet HONEY CHIFFON, VITAFIRE, POST TIME, ALLAGLOW, ROYAL TRUMPETER, BRASILIA ou SPARTAN. Les balafres sang de bœuf qui veinent les sépales en font un iris inhabituel, vivement coloré. D’où viennent-elles ? Peut-être, mais cela n’est qu’une supposition, du côté paternel, puisque c’est le pollen d’un semis non dénommé et pas précisément désigné qui a fertilisé WENATCHEE KID. Pourquoi n’y aurait-il pas derrière cet ancêtre mystérieux quelque plicata ou variegata ?

Quoiqu’il en soit HASH MARKS, dont le nom bien peu poétique évoque ces pommes de terre sautées que l’on sert parfois au breakfast aux Etats-Unis, est une variété à forte personnalité, toujours unique, mais plus originale cependant que séduisante.