23.4.09

FATUITÉ…

Le texte ci-dessous est de Terry Johnson, iridophile et blogueur néo-zélandais.
J’ai dit du bien de son blog, HERITAGE IRISES, il me retourne la politesse et j’ai la fatuité d’être fier.

« Once or twice a week for the last seven years, Sylvain Ruaud has posted an article about irises, on his blog "IRISENLIGNE" which is an amazing knowledge resource for iris lovers who are interested in the plants history and Iris nomenclature. Articles featured are extremely well-researched and the blog archive is bursting with information..
Sylvain's writing style reflects his strong opinion on Iris and he is fearless in expressing his thoughts.(an admirable trait in my world).
Whilst the blog is in French and the Google translation probably sometimes misses the mark, the blog is thought provoking and well worth a visit.
La connaissance se développe une fois partagée ».










ÉVOLUTION DU MODÈLE DISTALLATA

La paternité du modèle « distallata » appartient à la fine équipe Ghio/Keppel. Ces deux vieux briscards, souvent complices, ont élaboré une savante salade génétique dont est issu ce nouveau modèle de fleur où le blanc pur des pétales, souvent bordé de jaune d’or, s’allie à des sépales également blancs mais lavés de rose ou de bleu et griffés de grenat ou de pourpre. La variété de base pourrait être ‘Prototype’ (Ghio 2000), à moins que ce ne soit ‘Quandary’ (Keppel 2001), même si ‘Puccini’ (Ghio 98) est apparu avant les autres bien qu’il soit un descendant du premier nommé.

Evitons de sombrer dans l’obscurité des pedigrees à rallonge et contentons-nous de citer les variétés maîtresses de la fameuse salade : ‘Fancy Tales’ (Shoop 80) et ‘Strawberry Sundae’ (Schmelzer 77). Ces deux variétés ont été décrites ici en fin 2006. Ajoutons un autre élément majeur, ‘Cinnamon Sun’ (Hamner 93) qui a eu pour effet de renforcer les couleurs présentes aux sépales.

A partir de ça, Ghio et Keppel ont sélectionné des iris très originaux, qui constituent un nouveau modèle de fleur, qui n’est ni du plicata ni du bicolore. Chez Ghio la progression s’écrit comme suit : ‘Prototype’ -> ‘Puccini’ -> ‘Exposé’ -> ‘Magic Happens’. Keppel n’a pas poursuivi dans la voie de ‘Quandary’, du moins jusqu’à présent. Mais d’autres ont pris le relais. Notamment l’équipe Black & Johnson. Cette année elle propose deux distallatas remarquables : ‘Carnival of Color’ (Black P. 2009) et ‘Painter’s Touch’ (Johnson T. 2009).

‘Carnival of Color’ se présente avec des pétales blanc rosé ourlés d’abricot, et des sépales blanc rosé, largement bordés d’abricot et veinés de violet, avec de belles barbes orange vif. Son pedigree est très simple : City of Gold X Conjuring Cat. Cette simplicité dissimule des origines qui ne trompent pas. City of Gold (Black P. 2005) est jaune mais s’orne de griffures pourpres sur les sépales et ‘Cinnamon Sun’ est son parent masculin. ‘Conjuring Cat’ est un vrai distallata qu’on peut qualifier de classique, descendant de ‘Fancy Tales’. ‘Painter’s Touch’ est plus coloré : pétales blancs finement liserés d’or, sépales blancs également, marqués d’orange aux épaules et largement lavés et veinés d’indigo, barbes oranges. Son pedigree peut paraître surprenant : Blanket of Snow X Starring. Mais derrière ‘Starring’ (et son frère de semis ‘Snowed In’) il y a ‘Notorious’ qui est aussi l’ancêtre de ‘Conjuring Cat’ ! Les chiens ne font pas des chats !

L’offre de Tom Johnson comprend aussi, cette année, un certain ‘Spring Madness’ qui a un air de famille avec les précédents. Même traces jaunes sur les pétales blancs, même blancheur des sépales (mais ceux-ci sont tachés de jaune) et veines grenat sombre. Peut-on le qualifier de distallata ? En fait il se situe à la jonction entre deux modèles : le modèle distallata, certes, mais aussi le modèle qui n’a pas encore de nom mais qui se rattache à ‘Ring Around Rosie’ (Ernst 2000). D’ailleurs le « père » de ‘Spring Madness’ est un fils de ‘Ring Around Rosie’, ‘Whispering Spirits’. Du côté femelle, ce ‘Spring Madness’ provient d’un des souches des distallatas, ‘Impulsive’ rattaché à ‘Cinnamon Sun’. Le modèle distallata et le modèle ‘Ring Around Rosie’ ont des traits communs qui sautent aux yeux, comme les pétales bien blancs mais légèrement infus de jaune sur les côtes et les sépales poudrés de pourpre. Mais ils diffèrent par les barbes et surtout la densité des dessins qui agrémentent les sépales. En les unissant, Tom Johnson établit un rapprochement qui présente l’avantage de donner plus de tonus aux distallatas, mais qui risque de faire disparaître ce modèle en tant que modèle original. La question que se posait Keith Keppel quand il a enregistré ‘Quandary’(1) était de savoir d’où venaient ces fines rayures disposées sur les sépales. Il supposait, après une fine analyse des pedigrees, qu’elles étaient une résurgence minimaliste du modèle variegata d’origine, quelques 25 générations antérieurement(2). Mais quel était l ‘avenir de cette réapparition ? Les distallatas n’auront peut-être vécu qu’un bref moment, sans doute parce qu’il leur a manqué cet effet de contraste qui caractérise leur rival « ernstien » …qui est aussi leur cousin !

(1) A noter que si le croisement Impulsive X Whispering Spirits a abouti à une jonction des modèles distallata et ‘Ring Around Rosie’, le croisement inverse Whispering Spirits X Impulsive, a donné naissance à un pur modèle ‘Ring Around Rosie’ qui a pris le nom de ‘Sordid Lives’.
(2) In Bulletin de l’AIS, n° 333, avril 2004 : « in a quandary ».

17.4.09


LES PLUS BELLES PHOTOS D’IRIS

‘Share the Spirit’ provient d’Australie, de chez Graeme Grosvenor. Ma photographe préférée, Greenorchid, en a mis en évidence tout le charme et les tendres couleurs.










DES VACANCES CONTRASTÉES

Est-ce à cause des grands contrastes, géographiques, ethniques et sociaux qui caractérisent le Brésil, que la maison Schreiner a donné le nom de ‘Brazilian Holiday’ à l’un de ses iris fétiches ? Ou s’agit-il, tout simplement de ce que la couleur de la fleur, par sa richesse, évoque les simples vacances d’un Américain au pays des cariocas ?

Toujours est-il que ‘Brazilian Holiday’ (Schreiner 97) est une variété qui commence à faire parler d’elle. Elle a pour pedigree (((Gay Parasol x Bold Hour sib) x Bristo Magic) x Sweeter than Wine) X Mulberry Punch (1). Son parent masculin est donc ce ‘Mulberry Punch’ (Schreiner 92), un iris amarante tout à fait dans la tradition Schreiner, mais dont on ne saura rien des origines puisque son propre pedigree est muet là-dessus. En revanche, du côté maternel on découvre trois noms qui désignent des variétés contrastées, en rose pâle aux pétales et pourpre, plus ou moins foncé, aux sépales : ‘Bristo Magic’ (Schreiner 82), ‘Sweeter than Wine’ (Schreiner 88) et, ‘Bold Hour’ (Schreiner 75). Avec cette particularité supplémentaire que ‘Sweeter than Wine’ est un fils de ‘Bristo Magic’ On est donc dans une lignée d’amélioration par endogamie (inbreeding) qui a atteint sa perfection avec ‘Brazilian Holiday’.

Cette perfection, alliée à une forte fertilité, fait de ‘Brazilian Holiday’ un parent potentiel intéressant, que les grands hybrideurs ont rapidement remarquée et mise à profit pour l’obtention d’iris très contrastés, rose clair ou blanc aux pétales et grenat aux sépales (au passage certains croisements pouvant donner des coloris différents en fonction de l’influence de l’autre partenaire).

Dans cet ordre d’idée, on trouve, par exemple ‘Cranberry Swirl’ (Schreiner 2006), ‘Passion and Purity’ (Schreiner 2006) et ‘Dawn to Dusk’ (Schreiner 2009). Dans une déclinaison plus proche de l’ancêtre commun qui se nomme ‘Latin Lover’, mais toujours dans les bicolores, il y a ‘I’m Back’ (Johnson T. 2006), ‘Made of Magic’ (Schreiner 2004) et ‘Medici Prince’ (Schreiner 2007), et on peut encore citer, avec un aspect plus proche du variegata que du bicolore, ‘Cat Call’ (Black P. 2007) qui dispose de sépales violet pourprés manifestement issus de ‘Brazilian Holiday’.

‘Cranberry Swirl’ est un petit-fils clair de Bristo Magic’, avec son liseré rose sur les sépales.

‘Passion and Purity’ a lui aussi des sépales où apparaît un mince liseré clair, et ‘Dawn to Dusk’ également : ni l’un ni l’autre n’ont le franc contraste de ‘Brazilian Holiday’ et la bordure claire et moins nette que sur ‘Sweeter than Wine’, par exemple. Ce n’est pas en ce domaine que les deux nouveaux apportent une amélioration de leur parent de référence. La pureté et le velouté des sépales de ‘Brazilian Holiday’, il faut aller les chercher sur les descendants aux pétales roses ou magenta que sont ‘I’m Back’ ou ‘Made of Magic’ et, dans une moindre mesure, ‘Medici Prince’.

Parmi les variétés chez lesquelles on ne retrouve pas les couleurs caractéristiques décrites ci-dessus, on peut citer le bleu ‘Evening Tidings’ (Schreiner 2009) ou le très original ‘Smoke and Thunder’ (Blyth B. 2005), aux pétales couleur sable et aux sépales où l’on découvre du gris, du mauve et du violet.

‘Brazilian Holiday’ n’a que douze ans cette année. C’est encore une jeune variété et il y a sûrement quelque part des ses descendants qui n’ont pas encore été enregistrés. Les années à venir devraient nous en fournir un certain nombre, aussi bien chez Schreiner, l’initiateur de la lignée, que chez ses concurrents.

La recherche de fleurs vivement contrastées est un domaine en plein développement aujourd’hui. Dans un coloris proche de celui de ‘Brazilian Holiday’, Joë Ghio a proposé son ‘Starring’ qui découle d’une variétés remarquable, ‘Romantic Evening’, amarante et grenat comme certains de ceux qui viennent d’être cités. Un autre chemin a abouti à un résultat similaire. C’est un chemin qui fera l’objet, ici, d’une autre chronique.

(1) Une autre variété, d’un coloris voisin, ‘So Fine’ (Schreiner 96), dispose d’un pedigree très proche : (Latin Lady x Bristo Magic) X Sweeter than Wine.

10.4.09


ECHOS DU MONDE DES IRIS

Les iris les plus regardés

Le site de photos de plantes Dave’s Garden (http://davesgarden.com/) a décompté le nombre de visites par variété ou type d’iris. Voici son « Top 10 » :
1. ‘Batik’ (Ensminger 81)
2. ‘Immortality’ (Zurbrigg 82)
3. ‘Superstition’ (Schreiner 77)
4. ‘Black Gamelock’ (LA) (Chowning 78)
5. ‘Caesar’s Brother’ (SIB) (Morgan 32)
6. Iris de Hollande – en général
7. iris reticulata – en général
8. ‘Stepping Out’ (Schreiner 64)
9. ‘Edith Wolford’ (Hager 86)
10. ‘Jesse’s Song’ (Williamson 83)

DE PLUS EN PLUS ROSE

Eramosa Blushing Bride X Dreamsicle

Dans le monde restreint des hybrideurs, le Canadien Chuck Chapman fait figure de sommité en matière de génétique des plantes en général et des iris en particulier. Il a récemment publié sur le forum « Iris-photos » un montage de clichés concernant un croisement (Eramosa Blushing Bride X Dreamsicle) et représentant les parents et leurs enfants.

Eramosa Blushing Bride (1) est un rose pâle avec une légère trace de pigment anthocyanique (violacé). Dreamsicle (2) est également un rose qui semble disposer de ces pigments violacés provenant des ancêtres de son parent maternel ‘Cotton Club’.

Certains des descendants du couple sont franchement violets ce qui fait penser que le gène supprimant les pigments anthocyaniques y est absent. Le premier semis, à gauche sur le montage de photos, n’a pas de pigments caroténoïdes (jaune) dans les pétales, c’est pourquoi il est parfaitement violet. Les autres possèdent à la fois des pigments jaune et violet, ce qui donne un dégradé allant du mauve au rose.

La présence de pigments caroténoïdes (carotène, lycopène) serait, selon Chapman transmis par la « mère » « pod parent » en anglais. Elle peut, selon les semis, donner de coloris allant du rose pur au rose pêche, voire au rose orangé ou abricot. Quand on y ajoute des pigments anthocyaniques, en plus ou moins grande quantité, on obtient toutes les nuances constatées. Ce dosage a pour cause la présence d’un élément qui modifie les gènes producteurs des pigments anthocyaniques, et qui peuvent aller jusqu’à les paralyser au point d’obtenir du rose pur, issu des pigments caroténoïdes.

L’argumentation de Chuck Chapman est plus détaillée, plus savante aussi, mais le résumé ci-dessus explique bien comment à partir d’un semis d’iris apparemment roses, on peut obtenir des fleurs violettes aussi bien que des fleurs jaune abricot ! Les hybrideurs amateurs comme l’auteur de ces lignes se contentent de constater les résultats de leurs croisements réalisés au mieux dans le sens d’un projet, au pire « au feeling », et d’être surpris par les résultats qu’ils obtiennent !

(1)Eramosa Blushing Bride (Chapman 2005) = ((Colortart x Gigolo) X Autumn Years)

(2)Dreamsicle (Schreiner 95) = (Cotton Club x Bright Fire)

3.4.09

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Superstition Iris Garden 2009
Petite offre, cette année chez Duncan et Tasco. Seulement trois TB, un IB, un SDB et deux AB.
Les TB sont :
‘Fantasy Ride’ (Duncan 2009), issu de ‘Quandary’ et de ‘Arctic Burst’, c’est un pur distalata ;
‘Camera Ready’ (Tasco 2009), descendant de ‘Tanzanian Tangerine’, une sorte de plicata brun sur fond jaune ;
‘Highland Lord’ (Tasco 2009), un iris indigo, très bouillonné, façon ‘Sea Power’.

L’IB, ‘Micro Burst’ (Tasco 2009) descend de ‘Mind Reader’ et en a l’aspect.
Le SDB, ‘Inner Space (Tasco 2009) est un iris gris à barbes bleu ciel, plutôt original.
Les deux AB, l’un en brun, l’autre en bleu, sont superbes à voir en photo.










LA FLEUR DU MOIS

A partir de ce premier vendredi d’avril, il y aura ici, chaque premier vendredi, le portrait d’une variété peu connue mais remarquable. Aujourd’hui, la série débute par :

‘ROMAN CARNIVAL’
(Nearpass 96)

Donald Nearpass était un perfectionniste. Il n’a enregistré qu’un très petit nombre de variétés parce qu’il n’était jamais satisfait de ce qu’il obtenait et qu’il visait la perfection. ‘Roman Carnival’ est l’une des dernières variétés enregistrées de son vivant. Il est décrit comme : « Pétales violet pâle, sépales au fond blanc, entièrement piqueté et marqué de pourpre moyen, barbes rouille. » La description de son parent ‘Purple Pepper’ (Nearpass 86) est assez voisine : « pétales bleu lavande doux, poudré plus clair au centre, sépales à fond blanc entièrement poivré de bleu violacé, barbes jaune clair ». On est donc dans une politique d’amélioration par inbreeding, ce qui est le comportement caractéristique de Nearpass. Dans tout le pedigree de ‘Roman Carnival’ et de ses antécédents on retrouve à peu près les mêmes ingrédients, et en particulier un élément récurrent : (New Adventure x (Captured Heart x Melodrama) qui est déjà dans ‘Rose Tattoo’ en 73 et qu’on trouve également dans ‘Spinning Wheel’ de 74, l’autre variété essentielle de la production de Donald Nearpass, qui ne diffère d’ailleurs de ‘Purple Pepper’ que par le « père », ‘Charmed Circle’ d’un côté, ‘Easy Street’ de l’autre.
‘Spinning Wheel’ = (Dancer's Veil x ((New Adventure x (Captured Heart x Melodrama)) x Ribbon Round) X Charmed Circle ;
‘Purple Pepper’ = (Dancer's Veil x ((New Adventure x (Captured Heart x Melodrama)) x Ribbon Round) X Easy Street.

Ce ‘Purple Pepper’, qui représente quelque chose de nouveau dans le domaine des plicatas, a été fréquemment utilisé en hybridation, par Nearpass, bien sûr, mais par plusieurs autres et notamment Walter Moores, pour ‘Violet Shimmer’ (95) et Rick Tasco pour son désormais fameux ‘Splashacata’ (97 – DM 2005).

‘Roman Carnival’ est un aboutissement dans la lignée de ‘Purple Pepper’. Il n’a pas, ou très peu, été utilisé pour des croisements ultérieurs. Ce n’est pas le cas de ‘Splashacata’ qui a bénéficié de son succès rapide auprès du public et a donné naissance, entre autres, au très joli ‘Celestial Explosion’ (Tasco 2003).










DU PREMIER AU DERNIER

Jusqu’à il y a peu, je croyais que l’inventeur des iris « maculosas » ou « broken color » était Allan Ensminger et que sa première découverte d’un maculosa datait de 1967. Et puis j’ai découvert ‘Corsage’ (Watkins 56).

Edward Watkins ? aurait-on parlé de lui sans ‘Eleanor’s Pride’ et la D.M. qui lui a échu en 1961 ? Cet hybrideur discret a du pourtant passer pour un révolutionnaire quand il a enregistré ‘Corsage’. Pensez ! Un iris blanc, mais avec des marbrures aléatoires d’un beau jaune d’or ! Dans les années cinquante, cela n’a pas pu passer inaperçu, à moins que les juges de l’époque n’aient délibérément décidé qu’il n’y avait rien à voir dans cette étrange fleur. D’ailleurs ils ne lui ont attribué aucune récompense : pas le moindre petit HM, rien.

Aujourd’hui, où l’on est habitué aux excentricités onomastiques de Brad Kasperek et à ses ‘Kickapoo Kangaroo’ ou ‘Serengeti Spaghetti’, tout comme aux bizarreries de ‘Autumn Years’, totalement bariolé, on se dit que ce ‘Corsage’ était bien timide dans ses audaces.

Etait-il vraiment le premier ? Sans doute pas, et les frères Sass avaient remarqué des iris bariolés dans leurs semis, mais ils les avaient rejetés sans ménagement car ils considéraient ces iris comme des monstres qu’il fallait absolument éliminer. ‘Corsage’ n’est pas le premier iris « maculosa » obtenu, mais peut-être le premier à avoir été enregistré.

Son pedigree est plutôt original, lui aussi : un double croisement réciproque ((Katharine Larmon x Ola Kala) x sib) X ((Katharine Larmon x Ola Kala) x sib), formule qui ne donne pas souvent des rejetons présentables. Tout le mode connaît ‘Ola Kala’ (Sass J. 42 – DM 48), un iris d’or parmi les plus célèbres et les plus répandus. On n’a pas beaucoup d’informations sur ‘Katharine Larmon’ (Graves 41), un iris blanc, enfant de notre ‘Jean Cayeux’ souvent utilisé aux Etats-Unis à cette époque, qui s’est montré bien discret. Son seul titre de gloire, jusqu’à preuve du contraire, pourrait être ce ‘Corsage’ qui réunit, dans un apparent désordre les couleurs de ses deux parents principaux. Un fond blanc comme ‘Katharine Larmon’, des éclaboussures dorées, comme ‘Ola Kala’. Le mystère est dans cette répartition anormale des couleurs. Les BC actuels résultent de plicatas qui auraient un gène de plus ou de moins c’est selon. Mais dans le cas de ‘Corsage’ il n’y a pas de plicata à l’horizon. On peut peut-être alors parler, comme certains l’ont fait pour un autre iris un peu particulier, ‘Ming Dynasty’ (Moldovan 70), de l’action d’un virus qui viendrait perturber la répartition normale des couleurs. La génétique des iris en est encore plus aux supputations qu’aux certitudes scientifiques.

De ‘Corsage’ au semis de Loïc Tasquier dont il va être question maintenant, il s’est écoulé un peu plus de cinquante ans. Pendant ce temps les BC ont cessé d’être considérés comme des brebis galeuses, et si aucun n’a encore remporté la distinction suprême d’une DM, ‘Millenium Falcon’ (Kasperek 98) a tout de même été déclaré en 2008 « Meilleur Grand Iris » (Wister Medal), et ‘Baboon Bottom’ (Kasperek 93) en 2002, puis ‘Anaconda Love’ (Kasperek 98) en 2006 ont enlevé la Knowlton Medal des iris de bordure (BB).

Le semis de Loïc Tasquier est issu de deux SDB : ‘Ruby Eruption’ (Chapman 97) est un très classique plicata pourpre sur fond crème, ‘Double Byte’ (Sutton G. 96) relève plutôt de la catégorie variegata avec un fond jaune pâle orné sous les barbes blanches d’une empreinte brun-grenat. Dans le croisement de ces deux variétés il y a effectivement les éléments nécessaires à l’obtention de semis aux couleurs brisées, mais aussi de simples plicatas richement colorés. En l’occurrence on est devant un BC dont on n’est pas obligé d’apprécier la couleur, mais qui apporte du nouveau dans son genre et qui confirme l’influence grandissante des maculosas dans le monde des iris.

Désormais le modèle BC – je préfère dire maculosa – se présente dans toutes les tailles d’iris sauf peut-être les tout petits MDB. Le plus grand nombre se trouve chez les BB, mais les IB sont bien représentés - voir ‘Aardvark Antickz’ (Kasperek 98) - et les SDB commencent de l’être comme en fait preuve le semis aujourd’hui présenté, mais qui a des semblables chez d’autres hybrideurs, y compris Kasperek.






ECHOS DU MODE DES IRIS






Bennett Jones
C’était un vétéran de l’hybridation. Il s’est éteint cette semaine à Salem, dans l’Oregon.

C’était une personnalité du monde des iris. Il a eu une très longue carrière, qui s’est étalée sur plus de cinquante ans, et qui n’a pas concerné les seuls grands iris, au contraire. Il fait partie de ces hybrideurs sérieux et inventifs, qui n’ont pas remporté de grande compétition mais qui ont toujours obtenu la reconnaissance de leurs collègues.

On lui doit, entre beaucoup d’autres, ‘Sea Venture’ (71), une des variétés à l’origine des « dark tops » ou amoenas inversés si à la mode aujourd’hui. ‘Elizabeth Stuart’ (70) et ’Trevi Fountain’ (77) font aussi partie de ses plus belles réussites.