30.7.21

LES SEVENTIES (1977)

'Beauty Crown'


'Entourage'


'Flamenco'


'Gentle Rain'


'Playgirl'

'Silent Majesty'


'Sun King'


'Superstition'


'Victoria Falls'


 

LA PASSOIRE

Est-ce que cela se dit encore ? Il y a un demi-siècle, d'un enfant dont le visage était marqué de taches de rousseur on disait qu'il avait regardé le soleil au travers d'une passoire. En déformant à peine cette expression on pourrait maintenant dire de certains iris tout poudrés de brun, de grenat ou de violet qu'ils ont de cette manière reçu les rayons du soleil. C'est un certain 'Sneezy' (K. Keppel, 1996) qui semble avoir été l'un des premiers à arborer ces dessins.
 
 'Sneezy' fait partie de la longue lignée des plicatas de Keith Keppel. Il est décrit de la façon suivante : « Pétales abricot chamoisé, bras des styles plus orangés, sépales abricot-jaune clair complétement couverts de pointillés rose violacé, plus densément sur les épaules ; barbes entièrement rouge orangé ». Parmi ses ancêtres il y a toute une série de variegata-plicatas de chez Keppel : 'Light Show', 'Broadway', 'Flamenco', soit par eux-mêmes ; soit par un de leurs frères de semis. Mais aucun n'affiche cet intense pointillé grenat. On peut donc dire que ce 'Sneezy', bien nommé, est à l'origine d'une lignée. Car ses traits se retrouvent chez certains de ses descendants, comme chez Bruce Filardi et l'enfant du couple 'Sneezy' X 'Brash', un SDB 'X-Files' (2013), ou le TB 'Ferris Wheel' (2012) issu du croisement 'Tanzanian Tangerine' X 'Sneezy'. En France le Limousin Gabriel Lecomte a croisé 'Sordid Lives' X 'Sneezy', ce qui lui a donné 'Barbazouzou' (2019) qui présente presque le même dessin. La souche 'Sneezy' est donc une des origines de ce qu'on peut appeler les plicatas poudrés ; mais ce n'est pas la seule, ni même la plus importante.
 
 Dès 'Purple Pepper' (D. C. Nearpass, 1986) nous avions les prémices de ce modèle. Comme pour plusieurs autres de ses rares obtentions, Nearpass s'est montré novateur. Son 'Purple Pepper' est décrit ainsi : « Pétales lavande clair légèrement piqueté au centre ; le fond des sépales est blanc, tout poudré de bleu-violet, doucement ondulé, barbe jaune clair ». Déjà, en 1973, son 'Rose Tattoo' laissait paraître un avant-goût de ce que 'Purple Pepper' allait confirmer. Dans ce cas il semble que le « cluster » d'origine soit le croisement (('New Adventure' x ('Captured Heart' x 'Melodrama')) qui figure au pedigree de ces deus variétés. Alors, en les croisant l'une avec l'autre il était imparable que l'on retrouve ce nouveau modèle chez 'Roman Carnival' (1996) puis chez 'Three Octaves' (2004), variété posthume sélectionnée par Donald Spoon. 

 Richard Tasco a eu le flair de reconnaître dans 'Purple Pepper' l'existence de quelque chose qui méritait d'être approfondi. Son travail en ce sens a été récompensé par une magnifique variété aux fleurs majestueuses et réjouissantes, 'Splashacata' (1997), qui lui a valu la consécration suprême en 2005. 'Splashacata' est décrit très précisément de la manière suivante : «Pétales violet pâle ; bras des styles identiques, côtes plus foncées ; fond des sépales blanc, entièrement recouvert d'un plumetis violet plus intense vers les bords ; barbes blanches, teintées de violet à l'extrémité et pointées de jaune doré. » Cette variété allait donner le signal du départ d'une lignée nouvelle et passionnante. 

 A l'heure actuelle ce sont six variétés (au moins), descendantes directes ou indirectes de 'Splashacata' qui reproduisent le modèle : 
'Celestial Explosion' (2003) : un fort bel iris, dans les tons de violet, mais avec tous les éléments de la modernité ; 
'Magic Quest' (2007) : classé iris de bordure parce qu'il n'atteint pas les 70cm fatidiques, il présente cependant, sur fond jaune, les milliers de petits points caractéristiques du modèle ; 
'Temporal Anomaly' (2007) : le plus complexe, avec ses pétales jaunes et ses sépales blancs poudrés de rouge bourgogne, c'est aussi, en compagnie de 'Autumn Explosion', le plus titré avec la Wister Medal en 2015 ; 
'Camera Ready' (2009) : comme le précédent, c'est le modèle décalqué sue fond jaune ; 
'Starfield' (2012) : c'est le version IB du modèle, même s'il se trouve un peu amoindri ; 
'Autumn Explosion' (2013) : c'est à mon goût le plus typique et le plus réussi, en violet pensée avec un pointillé très dense, Wister Medal en 201 ; 
'Dark Storm' (2017) : descendant à la fois de 'Splashacata' et de 'Celestial Explosion, c'est un superbe iris dont le fond blanc est élégamment poivré de violet foncé, où les grains sont sagement rangés le long des veines des sépales. 

 Rick Tasco n'est pas le seul à avoir utilisé 'Splashacata' en vue d'obtenir ce nouveau modèle de fleur, mais la réussite n'a pas encore été franchement au rendez-vous, sauf peut-être chez Martin Balland et 'Valle Rojo' qui est plutôt un plicata « hyper-chargé ». Mais certains se sont bien rendu compte que 'Tanzanian Tangerine' (Kasperek, 1994) présentait lui aussi des sépales tout poudrés. Ils ont tenté le croisement (Splashacata X Tanzanian Tangerine) mais il apparaît que les résultats de sont pas à la hauteur des espérances. Quoi qu'il en soit il est à peu près certain que dans un avenir sans doute très proche d'autres nouveautés perpétueront ce modèle qui témoigne de la vitalité de la recherche en iridophilie. 

 Illustration : 


'Sneezy' 


'Splashacata' 


'Celestial Explosion' 


'Temporal Anomaly'

23.7.21

LES SEVENTIES (1976)


'Betty Simon' 


'Chartreuse Ruffles' 


'English Cottage' 


'Piroska' 


'Roger Renard' 


'Swedish Modern' 


'Tangerine Sky'

LA NUIT

La nuit. Voilà quelque chose qui éveille en nous des images qui peuvent être voluptueuses aussi bien que cauchemardesques. Alors, quand ils doivent trouver un nom pour une nouvelle variété d'iris, les obtenteurs se laissent emporter par leurs sentiments ou leurs fantasmes. Et la nuit fait partie des thèmes qui leurs viennent à l'esprit. Surtout si l'iris qu'ils doivent baptiser évoque, par sa couleur ou par quelque autre trait quelque chose qui leur rappelle la nuit ou une situation que l'on associe généralement à la nuit. 

 Les hybrideurs d'expression française ne font pas exception à la règle définie ci-dessus. On peut même dire qu'ils y adhèrent pleinement. Les check-lists de l'AIS ne contiennent pas moins de 25 variétés, toutes catégories confondues, qui comportent le mot « nuit » dans leur nom ! Curieusement, ces allusions nocturnes ne sont apparues que depuis 1980 ! Allez savoir pourquoi les anciens hybrideurs n'ont jamais utilisé ce mot ! Autre curiosité, les variétés en cause, ne sont pas toutes de couleur sombre... Pour les hybrideurs français la nuit n'est donc pas forcément synonyme d’obscurité. C'est d'autant plus amusant d'essayer de découvrir ce qui a pu les pousser à choisir un nom comportant le mot « nuit », quand la nuit elle-même, avec son caractère bien particulier et qui vient tout de suite à l'esprit, n'a pas été le motif déterminant. Nous allons maintenant faire la connaissance de ces 25 iris et de leurs caractéristique singulières. Par ordre chronologique d'enregistrement. 

'Nuit Blanche' (P. Anfosso, 1980). La nuit blanche c'est celle pendant laquelle on ne dort pas. Quelle que soit la raison de cette absence de sommeil, c'est un moment où le noir est remplacé par le blanc, et cela tombe bien puisque 'Nuit Blanche' est une variété d'un blanc pur. Une des premières et des plus belles fleurs de son obtenteur. 

'Bar de Nuit' (P. Anfosso, 1986). Ce nom évoque deux choses : la nuit proprement dite, avec l'obscurité, ainsi que le monde de la nuit, avec ce qu'il a de louche ou d'inquiétant, en même temps que de lié à la fête. C'est le premier iris noir de Pierre Anfosso, une fleur qui a fait sensation quand elle est apparue et qui reste un modèle du genre. 

'Ciel de Nuit' (J. Peyrard, 1990). C'est le premier enregistrement de cet obtenteur éclectique et passionné. Une variété qui est sans doute en grand danger d'être perdue parce qu'elle n'a été commercialisée que par « Iris au Trescols », et l'on sait combien confidentielle était la clientèle de son animateur, Lawrence Ransom. C'est un petit SDB bleu à barbes blanches. 

'Belle de Nuit' (R. Cayeux, 1999) .Pour cet amoena superbe et justement apprécié dans toutes les compétitions où il a été inscrit, c'est certainement le côté sombre de ses couleurs qui a été à l'origine de son nom. Les barbes teintées de mandarine rappellent son géniteur mâle, 'In Town' (B. Blyth, 1985) auquel il ressemble vivement. 

'Nuit Magique' (L. Ransom, 2000). Fait partie comme le précédent de ceux dont le nom est inspiré par le coloris. Son obtenteur a décrit ce petit SDB très classique comme « pétales violet cobalt moyen ; sépales violet cobalt sombre et velouté, plus clairs sur les bords ; barbes violettes. » Une de ces obtentions délicates comme savait en faire Lawrence Ransom. 

'Nuit d'Encre' (Surand, 2002) et 'Nuit Mauve' (Surand, 2002) sont deux frères de semis enregistrés par Claude Surand, amateur domicilié près d'Orléans, qui s'est manifesté en 2002 avec cinq variétés mais qui n'a pas renouvelé l'expérience. Autant dire que ces deux fleurs, très classiques, n'ont pas du beaucoup quitter le jardin de leur naissance. Le premier est un bitone violet à barbes mandarine, le second un bicolore beige et violet foncé agrémenté de barbes jaune d'or. 

'Nuit de Noce' (R. Cayeux, 2008). Jolie fleur rose lilacée vif ; le nom de cet iris n'évoque pas le côté sombre de la nuit mais plutôt son côté festif. C'est un des autres sens que l'on peut donner à la nuit. Est-ce tout à fait approprié ? On peut en douter car la couleur rose vif et bleuté paraît plus synonyme d'intimité que de bamboche ! Ce n'est cependant qu'une opinion personnelle. 

'Nuit Vénitienne' (J. Peyrard, 2010). Jean Peyrard n'a enregistré qu'une douzaine de Grands Iris. 'Nuit Vénitienne' en fait partie. A quel thème rattacher ce nom ? Ce n'est pas celui de la nuit en tant que telle, ce n'est pas vraiment celui de la fête. Alors ? Dans son joli costume rose orangé, cette vénitienne est prête pour le carnaval ! 

'Nuit Tzigane' (L. Tasquier, 2010). Enregistré en 2010, mais commercialisé seulement en 2014, cet iris de bordure fait partie des premiers produits de son obtenteur. Où se situe le côté tzigane ? Où se trouve le côté nuit ? On imagine un feu de camp, autour duquel on chante et on danse... Mais la fleur est d'un modèle bien courant et, en deux tons de pourpre, la danse autour du feu semble bien éloignée... 

'Nuit d'Orient' (A. Chapelle, 2011). Un peu plus haut nous avons découvert 'Belle de Nuit'. Ici nous voyons un de ses descendants qui possède tous les traits de son « pod parent » comme on dit en anglais (qu'on peut traduire par « parent-capsule ». Le violet profond des sépales, élégamment ourlé de bleu lavande, mérite bien l'allusion à la nuit et, pourquoi pas, à la nuit sous le ciel de Perse ? 

'Nuit de Chine' (P. Anfosso, 2012) et 'Nuit Fauve' (P. Anfosso, 2012) n'ont reçu le sacrement du baptême que bien après leur mise sur le marché et postérieurement à la disparition de leur obtenteur. Si l'on veut respecter strictement l'ordre chronologique, il aurait fallu en parler pour 1993 et 1994. Mais qu'importe ! Ce sont deux frères de semis qu'on peut qualifier de « noir par les noirs » puisqu'ils résulte d'un pur croisement endogamique entre deux iris noirs. Du coup l'allusion à la nuit est tout à fait justifiée. 

'Nuit Câline' (L. Tasquier, 2012). Dans le cas présent l'allusion nocturne vient encore du coloris de la fleur. Au plan horticole, nous sommes en face d'une incursion dans un nouveau modèle, celui des fleurs possédant des sépales longs et étroits, amorce de ce qui pourrait être une fleur « spider ». Avec un « père » illustre et couvert de lauriers, 'Bedford Lilac' (B. Jones, 1990), en bleu glacier et barbes bleues. 

'Nuit Satinée' (R. Cayeux, 2012), issu de deux excellents « noirs », cet iris mérite parfaitement son nom. Il n'est pas tout à fait noir, mais le violet très sombre qu'il arbore en fait un fort bel ornement pour le jardin. Un soir de nouvelle lune... 

'Nuit Argentée' (JC. Jacob, 2013). A la recherche d'un contraste blanc/noir, J.C. Jacob est parvenu à une variété originale qui, s'il ne s'agit pas à proprement parlé d'un amoena, allie les qualités de ses deux parents : le slovaque 'Slovak Prince' (A. Mego, 2002), amoena remarquable pour le fin liseré doré qui entoure ses pétales, et le californien 'Starring (J. Ghio, 1999) admiré pour la réussite de son contraste et pour sa rare barbe rousse. Le liseré est là, plus argenté que doré (d'où le nom) et le contraste n'est pas loin. 

Un paquet de trois variétés aux noms évoquant la nuit a été enregistré en 2017. Un SDB, 'Vol de Nuit' (L. Tasquier, 2017), mais il n'a sans doute pas survécu et le nom a été réutilisé. On verra plus loin comment. Un iris intermédiaire (IB) qui est aussi une variété de Loïc Tasquier ; il s'appelle 'A la Nuit Tombée'. C'est un iris violet assez classique dont on remarque les grands pétales étalés comme des ailes. Un Grand iris de jardin (TB), 'Nuit Noire' (B. Laporte, 2017). Difficile de faire plus noir que celui-là. Avec ça il est très abondamment ondulé, et d'une taille qui rassure dans un jardin venté. Son nom dit tout à son sujet ! 

En 2019, Loïc Tasquier a enregistré trente-neuf variétés ! En six catégories différentes ! C'est beaucoup pour un seul homme, mais ce boulimique de l'hybridation, comme tous ceux qui aiment, ne compte pas. 'Au cœur de la Nuit' ; ce SDB d'un bleu nuit qui justifie son appellation, s'agrémente d'un barbe bleu lavande originale et d'abondantes ondulations. 'Retiens la Nuit' est un IB en deux tons de bleu foncé, donc bel et bien évocateur des heures nocturnes qui s'éloignent comme une chanson dans le petit jour. Ses deux parents, noirs, lui ont assuré une coloration traditionnelle, tout comme la forme de sa fleur. 

'Bientôt la Nuit' (R. Cayeux, 2019). Traditionnellement obtenu à partir d'un SDB et d'un TB, cet iris intermédiaire est de couleur violet vif (un peu éclairci sous les barbes), de quoi expliquer son nom, la nuit n'est pas encore complète ! Depuis 1993 la Maison Cayeux propose régulièrement des IB, tout aussi réussis que ses grands iris de réputation mondiale. 

'Il Fait Nuit' (R. Cayeux, 2019). Autre production Cayeux, intéressante pour ses fortes ondulations, rares chez les IB, tout comme chez les iris sombres. Un iris violet foncé qui n'a pas volé son nom, obtenu avec un TB signé Michèle Bersillon et un SDB violet de Paul Black. 

Notre inventaire va se terminer après un coup d’œil à 'Vol de Nuit' (B. Habert, 2018). C'est la variété qui a pris la succession du 'Vol de Nuit' de L. Tasquier. En deux tons de bleu foncé, cet iris se distingue par la richesse de ses ondulations. Mme Habert fait preuve d'un sérieux et d'un goût très sûr dans ses sélections qui font un petit chef-d’œuvre de chacune de ses obtentions. 

 En général, donc, quand un iris porte le mot « nuit » dans son nom, c'est bien parce que, d'une façon ou d'une autre, ce que l'on associe à la nuit se trouve quelque part dans les traits de la fleur. En l'occurrence chacun de ces iris, en plus de ses couleurs, se révèle être une très jolie plante, bien représentative de ce que les hybrideurs français savent maintenant si bien faire. 

Pour terminer sur une note un peu légère, disons que nous avons déjà une 'Nuit de Chine', et une 'Nuit Câline'. Il ne nous manque plus qu'une 'Nuit d'Amour' !  

 Illustrations : 

 'Nuit Magique' 

 'Nuit Noire' 

 'Il Fait Nuit' 

 'Vol de Nuit'

16.7.21

LES SEVENTIES (1975)

'Autumn Echo'


 

'Caramba'

'Gold Trimmings'

'Leisure Day'

'Ruffled Ballet'

'Showcase'

'Sostenique'






NOIR PROGRÈS

Une persuasion volontaire, autrement dit la méthode Coué, a fait longtemps dire des iris les plus sombres qu'ils étaient noirs. C'est le grand désir qu'en avaient les amateurs et les obtenteurs. Mais si l'on regarde les choses avec objectivité, il faut bien avouer que ce noir supposé n'est qu'un violet très foncé. Pourtant, de toutes les couleurs dont se parent les iris, le noir est celle qui a connu au fil des années le progrès le plus remarquable. 

Il y a eu plusieurs cheminements pour parvenir aux iris noirs actuels. Cependant celui qui est considéré comme l'ancêtre des iris de cette couleur s'appelle 'Black Forest' (Schreiner, 1945). Auparavant il y avait bien eu des approches, comme avec 'Ethiop Queen' (Schreiner, 1936) ou 'Sable' (P. Cook, 1936) mais on restait dans une teinte violet sombre qu'il fallait un peu d'imagination pour appeler « noir ». Avec 'Black Forest' un grand pas a été franchi dans la poursuite du vrai noir. D'ailleurs les hybrideurs ne s'y sont pas trompés et les descendants de 'Black Forest' sont plus deux cent, la plupart dans les tons de noir (ou de violet foncé tirant sur le noir). Un autre pas a été franchi avec 'Sable' qui est à l'origine d'une grande famille d'iris sombres (près de deux cent descendants lui aussi) ainsi que son descendant 'Sable Night' (Cook, 1950) qui en est une visible amélioration. Très vite les différentes lignées se sont mêlées, de sorte que les descendants des uns sont aussi les descendants des autres ! Il semble bien néanmoins que ce soit la souche 'Black Forest' qui ait pris le dessus et ce n'est pas sans raison que la famille de ‘Black Forest’ s'est développée à tel point que l’on ne peut plus parler aujourd'hui d’iris noir sans faire y faire référence. 

L'amélioration de l'intensité du coloris a été essentiellement obtenue par la technique de l'endogamie, un procédé bien connu et qui a fait ses preuves, même s'il a pour corrélat un affaiblissement des autres caractéristiques de la plante (consanguinité), ce qui oblige à introduire dans la lignée les gènes de variétés différentes mais qui ont pour rôle d'apporter plus de vigueur et plus de résistance aux iris qui vont résulter de l'apport de ces qualités « extérieures ». 

Pour se rendre compte des améliorations qui sont apparues au cours du temps, on ne peut pas se contenter d'un tableau généalogique : en plus il faut des photos. Mais commençons par représenter la lignée d'un iris remarquable par la proximité à laquelle il parvient en matière de couleur noire. 

 ‘Raven Girl’ (2008)

‘Ghost Train’ (2000)

‘Hello Darkness’ (92)

‘Midnight Dancer’ (91)

                                                     3                         4                          2

‘Matinata’ (68) ‘Black Swan’ (60) ‘Tuxedo’ sib

                                               2                               2                                  2

‘Storm Warning’ (52) ‘Black Hills ‘ (50) ‘Storm Warning’ (52)

 ‘Black Forest’ (45) 

Le cheminement s'étale sur 12 générations, ce qui prouve combien le métier d'hybrideur exige de patience et de persévérance. On pourrait suivre de la même façon le cheminement qui aboutit aux jumeaux d'Iris en Provence, 'Nuit Fauve' et 'Nuit de Chine' (P. Anfosso, 2012). Dans la généalogie de ces deux-là, il y a au moins cinq descendants de 'Black Forest' ('Storm Warning' (Schreiner, 1952), 'Licorice Stick' (Schreiner, 1960), 'Black Swan' (O. Fay, 1960)', 'Swahili' (G. Plough, 1964) et 'Dusky Dancer' (W. Luihn, 1966)), ce qui confirme le cousinage entre nos variétés françaises et leurs contemporaines américaines. Et comme on pouvait s'y attendre on trouve bien des traits communs entre les deux familles. Examinons ensuite les photos. Il faut apporter à ce moment un certain aveu de faiblesse. Il est difficile voire impossible de disposer de photos des différentes variétés prises par le même opérateur, avec le même appareil (ou un appareil équivalent), dans les mêmes conditions (météorologiques, horaires...)... Cela entraîne des différences qui peuvent être sensibles et qui perturbent la perception que l'on peut avoir de la teinte de la fleur, mais cette teinte elle-même peut être influencée par la nature du sol, le climat etc. Autant dire que le résultat du rapprochement des différents clichés peut nuire à la démonstration ! Néanmoins, aussi imparfaite soit-elle, la comparaison parvient à se faire. Entre 'Black Forest' et 'Raven Girl' ou 'Nuit Fauve', en 6o et quelques années, la couleur noire s'est approfondie. Et cet approfondissement n'a pas son égal dans les autres couleurs. Cela tient certainement au fait que chez ces autres couleurs la saturation a été obtenue bien plus tôt et que celle du noir était encore imparfaite. Peut-on dire d'ailleurs affirmer qu'elle a atteint la perfection ? On devine toujours le violet derrière le noir et la profondeur de celui-ci se situe surtout dans le velouté de la fleur. Il peut donc y avoir encore du progrès, mais tel qu'il est ce dernier a fait faire au cours des cinquante dernières années un grand bond en avant dans la qualité des iris noirs. 

Illustrations : 


'Black Forest'

 


'Storm Warning' 


'Black Swan' 


'Hello Darkness' 


'Raven Girl'


'Nuit de Chine'.

9.7.21

LA FLEUR DU MOIS

'Belle Fille' (Marky Smith, 2015) 

('Queen Eleanor Of Aquitaine' x (('Bruneau Jasper' x 'Flights Of Fancy') x 'High Master')) X ('High Master' x ((('Handshake' x ('Cross Current' x (('Snowbrook' x 'Blackout') x ('Snowbrook' sibling x ( 'Rain Flurry' sibling x 'Charmed Life'))))) x ('Spirit World' x 'Answered Prayers')) x ('Spirit World' x ('Fancy Woman' x (('Goddess' x semis 77-137F : ( 'Mistress' sibling x (('Joy Ride' x 'Roundup') x ('April Melody' x ((('Irma Melrose' x 'Tea Apron') x (('Full Circle' x 'Rococo') x 'Tea Apron')) x 'April Melody'))))) x ('Goddess' x semis 77-137F)))))). 

 'Belle Fille' a remporté le Fiorino d'Oro au concours de Florence 2021. C'est une récompense méritée car il s'agit d'un iris exceptionnel autant par les qualités de la plante que par la beauté de la fleur. Beaucoup de collectionneurs en ont fait l'acquisition et cette récompense va susciter des envies chez ceux qui ne le possèdent pas encore. C'est une belle consécration pour une hybrideuse exigeante et assez rare pour qui les TB ne sont pas le domaine de prédilection, mais qui a œuvré dans plusieurs autres catégories, en particulier les SDB qui lui ont valu déjà trois Cook-Douglas Medal (plus haute récompense pour cette catégorie) (1). Chez les TB plusieurs de ses réalisations ont retenu l'attention de tous ; c'est le cas de 'Vintner' (1994), en noir aubergine, 'Obsidian' (2001), en noir de jais, 'Snow Lion' (2005), luminata blanc crémeux... 

Pour 'Belle Fille' elle a fait preuve d'un professionnalisme confirmé. Le pedigree de cet iris, qui a l'air particulièrement complexe, fait essentiellement appel à trois modèles de fleur : le modèle luminata, qui constitue la base du mélange, le modèle plicata et le modèle glaciata. On constate aussi l'utilisation de la technique du « cluster » initiée par Jim Gibson dans les années 1970. Il a été démontré que le modèle plicata consiste en une base blanche ou légèrement colorée par des pigments caroténoïdes (qui se trouvent à l'intérieur même des cellules) sur laquelle on a ajouté une couche de pigments anthocyaniques (présents dans le liquide intercellulaire) étalée de façon très inégale et très variable mais avec une concentration plus marquée vers les bords de la fleur. Le modèle luminata serait, en quelque sorte, l'inverse du plicata, la couleur anthocyanique s'effaçant vers les bords et au cœur de la fleur. Cependant si, avec un logiciel de retouche, on inverse les couleurs d'un plicata on n'obtient pas vraiment un luminata. Il faut y ajouter ce qui est le propre des iris glaciata, c'est à dire une absence totale de pigments anthocyaniques ici limitée à la zone autour et sous les barbes. Dans le pedigree de 'Belle Fille', tous ces éléments sont réunis. Disons que l'obtentrice a mis ensemble tous les éléments conduisant à une réussite. L'élément plicata est apporté par les « anciens » comme 'Roundup', 'April Melody', 'Rococo' ; l'élément luminata provient entre autre de 'High Master', 'Spirit World' ou 'Fancy Woman' ; l'élément glaciata vient de 'Goddess' et 'Mistress'. 

Il est encore un peu tôt pour savoir si 'Belle Fille' aura une longue descendance. Pour l'instant on ne lui compte que trois rejetons, dont deux TB, et pas des moindres ! C'est Keith Keppel qui en est l'auteur. Il s'agit de 'Boston Cream' (2013), qui a profité du côté glaciata de son parent pour un superbe blanc crémeux à barbes mandarine, et de 'Dark Universe' (2018), luminata bleu bien classique mais avec les qualités que l'on connait aux obtentions de Keith Keppel. 

'Belle Fille' est sans doute la plus belle œuvre signée de Marky Smith dans le domaine des TB. Un domaine où elle excelle même si ce n'est pas la quantité qui fait sa force. Elle se distingue entre autres par ses iris noirs, comme 'Obsidian' (2001), 'Pinot Noir' (2005), 'Vintner' (1996) ou 'Visigoth' (2012). A noter son iris blanc/noir baptisé 'Underworld' (2010), descendant du célêbre 'Starring' (Ghio, 1999), et un autre luminata, 'Wise Woman' (2009), descendant de 'Flights of Fancy' (Keppel, 1992). 

Madame Smith est une personne discrète, mais elle fait partie des meilleurs obtenteurs américains du moment. 

Illustrations : 


 

'Belle Fille' 


 

'Wise Woman' 


 

'Dark Universe' 


 

'Underworld' 

 (1) 'Starbaby' (1992) en 2001 ; 'Minidragon' (1996) en 2004 et 'Marksman' (1997) en 2005.

LES SEVENTIES (1974)

'Autumn Leaves'
 
'Carnaby'

'Pistachio'

'Queen of Heart'

'Roundup'

'White Lightning'





LES ADVENTICES

(ou comment s'en débarrasser) 

Comme pour toutes les plantes qui restent longtemps en place, il faut penser à désherber les iris. C'est sûrement le seul côté un peu désagréable de la culture de cette plante, par ailleurs peu exigeante en soins. Mais on va voir que ce qui peut être vécu comme une corvée peut aussi présenter quelque agrément. 

La première chose dont on va parler concerne ce qui se passe avant l'implantation des nouveaux iris ou le transfert d'une plantation ancienne vers un nouvel emplacement, ce qui revient au même. Il s'agit de la préparation des sols car celles que l'on appelle les plantes adventices sont déjà là avant que n'apparaissent les iris. Il faut donc d'abord nettoyer le terrain où va avoir lieu la plantation. Jusqu'à une période récente la plupart des jardiniers faisaient pour cela usage d'un désherbant systémique qui, répandu sur les plantes en place, pénètre dans leurs cellules et les tue. L'espace prenait ainsi une couleur roussâtre caractéristique jusqu'à l'heure où toutes ces plantes mortes allaient être enlevées. L'utilisation des ces produits chimiques est maintenant prohibée ou tout au moins vivement déconseillée. Il faut se débrouiller autrement, avec des moyens mécaniques ou, tout simplement avec la main ! Les plus méticuleux (qui sont aussi les mieux équipés) pourront alors, pour fignoler leur travail, détruire tous les germes au moyen d'un appareil thermique, mais il est inutile de préciser que ces moyens ne sont pas à la portée du jardinier moyen ! Une autre procédure, radicale, consiste à mettre le feu à la zone à désherber. Mais outre le fait que cela soit généralement interdit par arrêté préfectoral, c'est la mort garantie pour tous les insectes et tous les petits organismes présents sur le sol, ce qui n'est pas bon pour la nature. La majorité se contentera donc de répandre un couche généreuse de fertilisant avant de bêcher traditionnellement ou de griffer en profondeur la future bordure pour incorporer l'engrais ou la fumure. Cette opération, hélas, n'aura guère d'effet sur ce que l'on appelle les « mauvaises herbes », lesquelles profiteront comme les « bonnes » de l'apport de nutriments. Néanmoins le désherbage préventif et les remaniements des surfaces auront-ils atténué leur ardeur, tout au moins pour la première année. Par la suite il faudra trouver d'autres moyens de lutte. 

Et l'on peut, dès le moment de la plantation, disposer sur la future plate-bande un film plastique noir. C'est un système qui a ses adeptes mais aussi ses détracteurs. Les premiers y voient une quasi disparition de la corvée de désherbage puisque le sol ne sera apparent qu'aux emplacements des rhizomes d'iris. Les second déplorent d'une part l'aspect industriel des plates-bandes, bien peu compatible avec un jardin d'agrément, d'autre part la gêne au développement des touffes et, enfin, la durée de vie limitée des bandes plastiques qui ne pourront jamais être remplacées du fait de la pousse des iris. On peut aussi imaginer une protection efficace mais renouvelable. Le paillage. Efficace, ça l'est, du moins en grande partie. Mais tous les paillages ne se valent pas et il faut tenir compte des inconvénients. En particulier de ce que le vent et les oiseaux gratteurs dispersent une partie non négligeable des matériaux répandus autour des touffes, que l'on retrouvera ici et là dans le jardin, ce qui astreindra le jardinier à un ratissage régulier des allées et des autres bordures. Dans la plupart des jardins de particuliers il n'y aura donc qu'une solution : le désherbage manuel ! Dans les jardins de taille petite ou moyenne c'est bien la meilleure méthode, c'est à dire la plus efficace, la plus écologique et la moins dangereuse. C'est par ailleurs la seule qui convienne lorsque les iris se trouvent parmi d'autres fleurs. En mars, quand les plantes sont encore courtes et peu fragiles, puis en juillet, après la fin de la floraison, et encore une fois en octobre, il faut retirer ces fameuses adventices en prenant bien soin de ne pas mettre à nu les racines des iris, qui s'étalent vers l'avant des bouquets de feuilles. C'est un travail fastidieux mais on pardonne à nos plantes favorites cette petite contrainte qu'elles nous imposent en échange de leur rayonnante floraison. D'autant plus qu'avec le temps, et le développement des touffes, il y aura de moins en moins d'herbe à arracher. Et puis nous pouvons trouver un certain plaisir à ce travail. A 20cm du sol, c'est fou les détails que l'on distingue. Agenouillé près des précieux rhizomes, on voit une multitude de choses minuscules qu'une inspection à hauteur d'homme ne permet pas ; on peut de la sorte se rendre compte de tout un tas de petites choses intéressantes, tout comme de détecter précocement des attaques des ennemis des iris, d'enrayer un début de pourriture du rhizome, d'éliminer quelques insectes ravageurs. Le désherbage manuel présente ainsi l'avantage de jouir du contact intime avec la nature. C'est un avantage que l'horticulteur professionnel d'iris ne peut pas connaître depuis son tracteur ! 

Mais il y a peut-être plus astucieux ! Pourquoi pas faire en sorte qu'il n'y ait plus d'herbe parmi les iris, en leur adjoignant un compagnon qui empêche le développement des adventices ? Par exemple Scleranthus annuus, une espèce tapissante de plante à fleurs de la famille des Caryophyllacées connue sous le noms commun de renouée allemande, qui se présente comme une espèce de mousse d'un vert bleuté, d'environ 5cm de haut, avec des fleurs insignifiantes verdâtres, sans corolle, qui produisent de petites graines noires qui se resèment facilement et forment vite un tapis au milieu duquel les iris se multiplient sans difficulté. Les racines, superficielles, ne concurrencent pas celles des iris, et rendent la plante facilement déterrable si l'en est besoin. Plus de place pour les envahisseurs habituels ! Avantage supplémentaire, ces petites feuilles étroites retiennent parfaitement la rosée, ce qui, l'été, est un apport d'eau bienvenu pour les rhizomes et les autres saison évite la stagnation de l'eau de pluie. Enfin la scléranthe est facile à tailler de manière à mettre en valeur les iris au moment de la floraison. Quelques hybrideurs américains, comme Donald Spoon, utilisent cette plante comme « couvre-bordure » et s'en montrent très satisfaits. Cela semble donc fort intéressant pour éviter du travail aux pauvres jardiniers que nous sommes. Le problème c'est qu'il n'est pas évident de se procurer des graines en France ! 

La corvée de désherbage risque donc de durer encore longtemps !

2.7.21

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Nouveau catalogue

 Laimonis Zakis, hybrideur lituanien, propose son propre catalogue d'iris. On y trouve un grand nombre de variétés « internationales » (U.S.A./France/ etc.) mais aussi ses propres obtentions. Ce sont essentiellement des grands iris qui, à en croire les photos, semblent des iris modernes et de bon aloi. Cultivés dans un pays dont le climat, frais et humide, n'est pas le plus favorable pour les iris, on peut penser qu'ils ont une bonne résistance au gel. Pour le reste, il faudrait pouvoir juger sur pièce, en passant une commande à cette nouvelle pépinière puisque les exportation sont possibles au sein de l'Union Européenne. Ce qui est certain c'est qu'elles ont un gros défaut : elles ne sont pas enregistrées et leur distribution hors de leur jardin d'origine ne peut que rendre plus incertains les pedigrees des iris du futur... 

htpps://failiem.lv/u/5y2cqgr9v

LES SEVENTIES (1973)

Bride's Halo
 
Brook Flower

Interpol


 

Limerick

Meteor


 

Peach Spot

Secret Society


 

Thundercloud