4.10.02

BENJAMIN ROSS HAGER

De tous ceux qui, depuis l’origine, pratiquent ou ont pratiqué l’hybridation d’iris, il n’y en a pas un qui arrive à la cheville de Ben Hager pour ce qui est de la qualité et de la diversité de la production. Il s’est intéressé à tous les types d’iris sauf les bulbeux. Il a obtenu des succès formidables dans toutes les compétitions. Ses iris sont répandus en quantité dans le monde entier et il avait laissé un héritage si important que trois ans après sa mort, ses successeurs, et en particulier Richard Ernst, peuvent encore enregistrer des variétés qu’il avait hybridées.

Après une jeunesse, bien américaine, faite d’activités diverses et de métiers variés, c’est en 1951 qu’il a commencé à s’intéresser aux iris. Il avait 36 ans. Il a alors travaillé avec le réputé Tom Craig, puis chez un autre hybrideur, Carl Milliken. A quarante ans, en 1955, avec celui qui restera jusqu’au bout son alter ego, Sidney DuBose, il s’installe sur une petite plantation à Modesto, en Californie centrale, qui devient le nouveau Melrose Gardens, et se lance dans le commerce. C’est en 1959 qu’il déménage pour s’installer sur un terrain plus vaste, à Stockton, où il restera jusqu’à la fin de ses jours.

C’était un personnage attachant, d’une vive intelligence, d’une curiosité exceptionnelle et d’un immense courage au travail. Bien secondé par son ami Sid DuBose, il a mené de front une activité d’hybrideur multidirectionnelle. Et, à l’inverse de ce qui se produit habituellement lorsque l’on touche à tout, il a réussi dans toutes ses entreprises.

Il a commencé par s’occuper d’iris nains. C’est lui qui, en utilisant l’Iris aphylla dans la généalogie des grands iris miniatures, est à l’origine des iris « de table » (MTB). Ses succès dans ce type de plantes sont nombreux, depuis ses premières introductions en 1966. Pour n’en citer qu’un, parlons d’ABRIDGED VERSION (83), un rose fumé à barbes mandarine.

Iris aphylla, utilisé pour ses pouvoirs de miniaturisation, a donné naissance à de nouveaux nains miniatures (MDB), comme PRODIGY (73), un petit bleu clair de 15cm, qui est la « mère » de GIZMO (76), violet foncé, et l’un des ancêtres de BUGSY (92), variegata jaune et acajou, ou de IN TOUCH (99), rose à barbes crème, l’une de ses dernières introductions dans ce type.

Iris aphylla encore, pour rendre les iris intermédiaires un peu plus râblés. Ben Hager n’a pas négligé cette voie. Il a obtenu de la sorte des IB comme le jaune LOOKIN’GOOD (78). Ila aussi poursuivi ses recherches par d’autres voies et présenté plein de jolis variétés comme SWIZZLE (71), célèbre variegata-plicata, ou HOT FUDGE (82), plicata brun sur fond jaune ou l’orange JOY BOAT (92).

De 1963 à nos jours il n’a pas cessé de produire des SDB (plus de 70 variétés enregistrées) et, comme dans les autres domaines, il y a obtenu des iris remarquables. Tous les amateurs de ce type connaissent REGARDS (66), bicolore orchidée et acajou, DEMON (71), de couleur aubergine, HOCUS POCUS (74), curieuse fleur bleu lavande et brun verdâtre, BRIGHT MOMENT (82), aux pétales blancs et aux sépales indigo ourlés de blanc, PIGEON (87) bleu lavande profond, MY SHEBA (87) rose pêche, et son descendant LOVE TOKEN (97), rose clair à barbes blanches.

Une autre des directions qu’il a prises est celle des spurias. Il s’y est lancé dès 1955 et n’a pas cessé de proposer, pratiquement chaque année, de nouveaux iris comme le bleu lavande DIMINUENDO (85) ou le violet foncé veiné d’or DUERME (92). Cependant sa plus belle réussite en ce domaine doit être COUNTESS ZEPPELIN (87) surprenant variegata, qui a obtenu la Nies Medal en 97.

Si l’on parle d’iris du Japon, on est encore dans un domaine exploré par Ben Hager. Son STRANGER IN PARADISE (70) a obtenu la plus haute distinction, la Payne Award, en 1976, et l’année de son décès, il enregistrait encore POOH BAH (99), violet voilé de blanc.

La même passion l’a conduit à s’intéresser aux iris de Louisiane (MARY DUNN –74-, mauve rosé), aux iris de Sibérie (JAYBIRD –82-, deux tons de bleu), aux Pacific Coast (AROMAS –79-, du nom de sa petite ville natale), ou aux arilbreds (SHEIK –76).



Ce sont cependant les grands iris qui ont fait sa grande popularité, et aussi les iris de bordure (BB) grâce auxquels il a obtenu une de ses nombreuses médailles. PINK BUBBLES (79), frère de semis de BEVERLY SILLS, a obtenu la Knowlton Medal en 86.

Mais revenons aux grands iris. Au fil des années il a conçu (ou plutôt sélectionné) des fleurs amples, majestueuses tout en restant bien proportionnées, qui sont sa signature et que les spécialistes reconnaissent facilement. Ses premiers enregistrements concernent d’ailleurs des TB, FORAY (60), un iris dans les tons bordeaux, et SAVAGE QUEEN (60), un rose magenta. Cependant, dans ce type, la consécration a tardé à venir. Il a fallu attendre une dizaine d’années pour que des variétés de grande classe apparaissent. DECOLLETAGE est de 1970, BASIC BLACK de 1971, ICE SCULPTURE est de 1973… Mais une fois la machine lancée, elle a continué à plein régime ! La fête a commencé avec VANITY (75), la première des trois variétés Hager à avoir obtenu la DM. Mais les vingt ans qui séparent VANITY d’EDITH WOLFORD, DM numéro 3, ont été marqués par une foule d’iris tous plus réussis les uns que les autres, comme le plicata GRAPHIC ARTS (77), le blanc LEDA’S LOVER (79), l’orange PUNKIN (81), le rose, fils de BEVERLY SILLS, ANNA BELLE BABSON (84), tout comme AFFLUENCE (85). Les treize années suivantes sont encore plus prolifiques, avec, par exemple, BLYTH DEAN (87), DOLCE VITA(88), TIMESCAPE (89), AUTUMN CIRCUS (90), HORATIO (91), KATHLEEN KAY NELSON (92), HIGH TECH (93), LARK ASCENDING (94), CHASING RAINBOWS (95), PROSPEROUS VOYAGE (96), I’M PRETTY (97), DUO DANDY (98), MAKING WAVES (99)… Il s’est intéressé à presque tous les sujets concernant les TB, que soit les remontants (FEED BACK –83-, MOTHER EARTH –87-, CHRISTOPHER COLOMBUS –92-), les iris space age (HORNY LORRI –73-, JESTER –88-, TRIPLE WHAMMY –89-), les iris tardifs (LINGERING SPRING –91-, AFTER THE BALL –91- ou SURPRISE ENDING –92-).

Cette activité débordante, et cet art consommé ont valu à Ben Hager les récompenses les plus élevées. Trois Dykes Medal : VANITY (82), BEVERLY SILLS (85), EDITH WOLFORD (93) ; une Knowlton Medal pour PINK BUBBLES (86) ; trois Sass Medal pour ses iris intermédiaires SWIZZLE en 79, BUTTER PECAN en 91 et HOT FIDGE en 92 ; deux Cook-Douglas Medal pour ses SDB REGARDS en 73 et HOCUS POCUS en 81 ; deux Carpane-Welsh Medal pour ses petits GIZMO en 87 et DITTO en 88 ; une White Medal pour l’AB KALIFA’S ROBE en 98 et une Nies Medal pour le spuria COUNTESS ZEPPELIN en 97 ! Et il ne faut pas oublier le Florin d’Or que BEVERLY SILLS a remporté à Florence en 1981.

Benjamin Ross Hager, sous son large chapeau, s’était fait une place prééminente dans le monde terrestre des iris. Il est certain qu’il l’a gardée dans l’autre, où il a rejoint les frères Sass, Orville Fay, Ferdinand Cayeux, et tous ceux qui l’attendaient au paradis des iridophiles.

NDLR : Cette étude est basée sur les chroniques obituaires publiées dans le numéro 315 du Bulletin de l’A.I.S.

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