13.2.05

Lloyd ZURBRIGG

En perdant Lloyd Zurbrigg, le monde des iris voit disparaître un des maîtres incontesté des iris remontants. Dans un long article paru dans le numéro de janvier 2001 du Bulletin de l’AIS, il a raconté lui-même son cheminement parmi les plantes dont il s’est amouraché très jeune et auxquelles il a apporté une qualité particulière appréciée par de très nombreux amateurs.

C’est dans la province canadienne d’Ontario qu’il a vu le jour et qu’il a grandi. Dès 1938 il dit s’être intéressé au jardinage, mais c’est seulement alors qu’il était étudiant à l’Université de Toronto qu’il s’est tourné vers les iris. Cependant les variétés capables de supporter le climat plutôt rigoureux de l’Ontario étaient rares dans les années 40, et les déceptions n’ont pas manqué au jeune Lloyd tant qu’il est resté au Canada. Il était cependant décidé à poursuivre ses expériences d’hybridation et il s’était fixé trois buts : les amoenas, les remontants et les arilbreds. Parti poursuivre ses études musicales aux Etats-Unis, à l’Université d’Indiana, il reçut les encouragements de Raymond Smith et de Earl Roberts deux hybrideurs « hoosier * » bien connus.

Comme c’est bien souvent le cas, ses premières hybridations tant chez les amoenas que chez les arilbreds ne l’ont pas totalement satisfait. Mais Paul Cook l’a encouragé à persévérer. C’est ce qu’il a fait, surtout après son installation en Virginie où il a été professeur de musique pendant vingt-neuf ans. Il considérait que son premier iris vraiment valable était GRAND BAROQUE (69). Il s’agit d’un amoena jaune pâle, avec des traces de mauve sur les sépales ; pas une variété qui attire l’œil, mais un iris à fort potentiel génétique. D’ailleurs Lloyd Zurbrigg l’a utilisé largement à cette fin. Des variétés aussi connues que BAROQUE PRELUDE (74) et son frère de semis I DO (79), ainsi que EARL OF ESSEX (80), ENGLISH COTTAGE (76), LATEST STYLE (79) SPIRIT OF MEMPHIS (77) ou YOUTH DEW (76) en sont des descendants. Ces variétés elles-même, unies entre elles ou à d’autres, sont à l’origine de très grands noms des iris, tous remarquables par leur capacité à remonter largement : prenez IMMORTALITY (82) qui a frisé la D. M. et qui a donné naissance à de très belles variétés comme SUNNY DISPOSITION (91) ou des produits de Monty Byers comme ZURICH (90) ou WINTERLAND (90). DA CAPO (68) est une variété fétiche de Lloyd Zurbrigg, elle aussi riche en descendants comme CROSS STITCH (73) ou LIGHTLY SEASONED (79). Monty Byers et Lloyd Zurbrigg ont eu beaucoup d’attachement l’un pour l’autre, notamment parce qu’ils poursuivaient des buts similaires. Ils ont souvent échangé leurs obtentions et Byers a largement utilisé les obtentions de son aîné. Citons par exemple SPIRIT OF MEMPHIS pour BUCKWEAT (89), ANEW pour CAROLINE GIBBS (90), I DO pour HIGH HO SILVER (89), EARL OF ESSEX pour FLOORSHOW (89) et LICHEN (89), et surtout ART OF RAPHAEL (79) pour THORNBIRD (89 – DM 97). En sens inverse notons que ROCKSTAR (91) est à l’origine de GLADIATRIX (2003), qu’ICELAND (90) a donné TWILIGHT FANCIES (2001), que MESMERIZER (91 – DM 2002) a engendré MASTERWORK (2000) et que MOONLIT(86) est derrière le premier « rostrata » de Zurbrigg : DURHAM DREAM (99).

DURHAM, c’est le nom de la ville de Caroline du Nord où Lloyd Zurbrigg s’était retiré et où il vient de mourir. Il a dit lui-même que l’hybridation n’était pas chez lui une vocation, mais qu’il l’a pratiquée parce qu’elle lui apportait du plaisir, et qu’il était heureux de faire partager ce plaisir par tous les amateurs d’iris, non seulement ceux qui se passionnent pour les remontants, mais tous ceux qui apprécient les belles fleurs, comme ce CLARENCE (91) qui est sans doute sa plus intéressante obtention, comme le démontre le fait que cette variété ait tutoyé deux fois la Médaille de Dykes. Le nom de Zurbrigg restera longtemps dans la mémoire du petit monde des iris, à une place qu’il a amplement méritée.

* Hoosier est le surnom donné aux habitants de l’Indiana.

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