FAMILLES NOMBREUSES
L’imagination des obtenteurs lorsqu’il s’agit de choisir les deux partenaires de leurs croisements est pratiquement sans limite. C’est pourquoi, sur les milliers d’iris enregistrés, il n’y en a qu’une poignée dont les noms reviennent régulièrement dans les pedigrees. Sans remonter aux origines de l’hybridation, puisque évidemment le choix était alors plus réduit, et pour rester dans les cinquante dernières années, les variétés favorites des obtenteurs ne sont en fait qu’une centaine !
Connaissez-vous la plus cotée ? SKY HOOKS. Cette variété surpasse toutes les autres, et de très loin ! Dans l’inventaire que j’en ai fait, j’ai relevé 142 fois le nom de SKY HOOKS, alors que le fameux RIPPLING WATERS n’est cité que 93 fois. Ces chiffres sont a prendre pour ce qu’ils sont, une valeur approximative, car je n’ai pas poussé l’analyse jusqu’à vérifier le pedigree de toutes les variétés enregistrées. Néanmoins cette statistique porte sur plus de 6500 variétés, ce qui n’est pas mince et lui confère une certaine crédibilité.
Voici le palmarès des trente premières :
1. SKY HOOKS (Osborne 80)
2. RIPPLING WATERS (Fay 61 – DM 66)
3. PONDEROSA (Ghio 70)
4. PINK SLEIGH (Rudolph 70)
5. NEW MOON (Sexton 68 – DM 73)
6. VANITY (Hager 75 – DM 82)
7. STEPPING OUT (Schreiner 64 – DM 68)
8. QUEEN IN CALICO (Gibson 80)
9. EDITH WOLFORD (Hager 86 – DM 93)
10. TITAN’S GLORY (Schreiner 81 – DM 88)
11. SILVERADO (Schreiner 87 – DM 94)
12. HONKY TONK BLUES (Schreiner 88 – DM 95)
13. NAVY STRUT (Schreiner 74)
14. RINGO (Shoop 79)
15. PINK TAFFETA (Rudolph 38 – DM 75)
16. CONDOTTIERE (Cayeux 78)
17. GIGOLO (Keppel 84)
18. AFTERNOON DELIGHT (Ernst 85)
19. SONG OF NORWAY (Luihn 79 – DM 86)
20. MYSTIQUE (Ghio 75 – DM 80)
21. ALLEGIANCE (Cook 57 – DM 64)
22. WHOLE CLOTH (Cook 57 – DM 62)
23. CLAUDIA RENE (Gaulter 63)
24. CHRISTMAS TIME (Schreiner 65)
25. ENTOURAGE (Ghio 77 – FO 80)
26. MELODRAMA (Cook 56)
27. WINTERSCAPE (McWhirter 84)
28. EDNA’S WISH (Gibson 83)
29. VICTORIA FALLS (Schreiner 77 – DM 84)
30. LACED COTTON (Schreiner 80)…
Au-delà les ex aequo sont multiples et le choix devient vite infini. J’ai compté plus de 70 variétés citées au moins 20 fois ! Quant aux variétés françaises, en dehors de CONDOTTIERE, champion national, il y en a vingt-sept qui sont citées au moins une fois, la plupart du temps pour des obtentions françaises, mais aussi, pour quelques obtentions américaines.
Quels enseignements tirer de ces résultats ?
Lorsqu’ils choisissent d’utiliser une variété, les hybrideurs tiennent évidemment compte de son potentiel génétique. Les couleurs de la fleur ne sont pas l’élément essentiel de leur choix, ils s’intéressent à la plante en général et, surtout, à ce qu’ils attendent du croisement qu’ils veulent réaliser. C’est ainsi que des variétés de peu d’intérêt commercial peuvent avoir parallèlement une carrière importante en tant que géniteurs. Dans la liste ci-dessus c’est le cas pour PONDEROSA, tout comme pour CLAUDIA RENE ou MELODRAMA, mais c’est aussi le cas de DENVER MINT (Knopf 62), COMMENTARY (Babson 63) ou GLITTERING AMBER (Hamblen 55), que l’on trouve en bonne place par ailleurs. Les hybrideurs n’attendent pas la consécration d’une variété par une haute récompense pour lui accorder, ou non, leur attention. Les médaillent interviennent alors que leurs bénéficiaires ont déjà pu être appréciés. Cependant qui dit médaillé dit aussi variété intéressante à plusieurs points de vue et douze noms de la liste ci-dessus sont ceux de lauréats des grandes compétitions (Dykes Medal et Florin d’Or). En revanche obtenir une Médaille de Dykes ne garantit pas un avenir génétique. Des variétés comme ELEANOR’S PRIDE (Watkins 52 – DM 61), JESSE’S SONG (Williamson 83 – DM 90), EVERYTHING PLUS (Niswonger 84 – DM 91) ou THORNBIRD (Byers 89 – DM 97), qui constituent en elles-même l’aboutissement d’une lignée génétique, n’ont pour ainsi dire pas été utilisées en hybridation. Cela signifierait-il que la plupart des variétés primées à Florence ne présentent aucun intérêt génétique ? En effet bien peu sont celles qui ont engendré une famille nombreuse. Ni MIDNIGHT WALTZ (Burbridge 59), ni CHRISTIE ANNE (Gaulter 63), ni SUNSET SKY (Roe 69), ni MISSY YORKTOWNE (Innerst 84), ni STEADFAST LOVE (Carr 94), ni bien d’autres, n’ont eu une notable descendance. En fait il faut ajouter au relatif manque d’intérêt que ces variétés peuvent avoir, le fait qu’elles n’ont pas eu une véritable diffusion dans le commerce.
Le choix est tellement immense qu’il faut à une variété un pouvoir ou une renommée exceptionnels pour s’imposer auprès des hybrideurs. Le cas de SKY HOOKS est tout à fait remarquable. Si cet iris a écrasé tous les autres en matière de famille nombreuse, c’est avant tout parce qu’il est le premier iris à éperons vraiment réussi et susceptible de produire des descendants de valeur, avec ou sans appendices. D’ailleurs trois de ses descendants directs ont eu droit à la plus haute récompense : THORNBIRD (Byers 89 – DM 97), CONJURATION (Byers 89 – DM 98) et MESMERIZER (Byers 91 – DM 2002). Quant à MESCALERO CHIEF (Hedgecock 93) il a décroché le Plateau d’Argent à Florence en 95. Deux obtenteurs en ont fait un usage abondant : Monty Byers, aux Etats-Unis, et Ladislaw Muska, en Slovaquie. Mais au total au moins vingt-deux obtenteurs différents l’ont utilisé. En France, ce fut le cas de la famille Anfosso qui en a tiré, entre autres, FLUTE ENCHANTÉE (Anfosso 91), dont provient IRIADE (Laporte 2003).
Les grands géniteurs ne voient pas leurs mérites reconnus par une récompense. C’est une lacune qu’il faudrait combler car leurs obtenteurs devraient avoir droit, à ce titre, à une considération particulière. A quand un prix Cognacq-Jay pour les iris ? Le jour où cette récompense existera son premier titulaire devrait être SKY HOOKS, mais SNOW FLURRY, chez les plus anciens, DENVER MINT, PONDEROSA et bien d’autres devraient aussi la décrocher.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire