17.6.05

BÊTES À CONCOURS

On trouve de tout parmi les compétiteurs d’un concours comme Franciris 2005. C’est au point que je me demande ce qui peut bien pousser un obtenteur à envoyer pour une compétition une variété qui ne présente aucune des qualités que l’on recherche chez les iris d’aujourd’hui. Un iris avec des hampes fragiles, deux branches collées le long de la tige, des fleurs peu nombreuses et molles, avec des sépales en oreilles de cocker, c’était peut-être valable en compétition dans les années 30 ou 40, mais en 2005 ? Quand on prétend concourir en vue d’une distinction importante, il faut présenter des plantes qui soient en rapport avec ce qui se fait de mieux. Il n’est pas nécessaire de se situer à la pointe de la mode, mais il y a certains critères qu’il convient de respecter et il est bon de savoir quels sont ceux qui sont pris en compte dans les concours actuels. Ils se situent sur quatre plans : celui de la plante elle-même, celui de la hampe florale, celui de la fleur en particulier, et celui, plus subjectif, de la personnalité et de l’originalité de l’iris.

La plante :
Trois critères sont pris en considération : le feuillage, le développement général, la floribondité. La qualité et l’aspect du feuillage comptent pour dix points. Il faut que les feuilles soient saines, vigoureuses, bien développées. Le développement général concerne le nombre de pousses, leur densité, la masse de la touffe ; il est noté sur quinze. La floribondité, c’est l’aptitude à fournir une grande quantité de fleurs, pour une durée de floraison maximale ou un effet de masse, la note donne au maximum cinq points.

La hampe florale :
Quatre critères : les proportions, la robustesse de la hampe, le branchement et le nombre de boutons. IL faut s’assurer que la hauteur de la hampe place les fleurs au-dessus du feuillage sans les percher à l’extrémité d’une canne qui n’en finit pas, et que les fleurs elle-mêmes ne sont ni trop grosses ni trop petites, en fonction de la taille générale de la plante ; Cela donne cinq points au maximum. Cette hampe doit pouvoir porter sans faiblir les fleurs qui apparaissent, et résister au mieux aux intempéries, sans verser au moindre souffle de vent ; dix points. De chaque coté de la tige principale, les branches doivent se situer harmonieusement, à la fois pour l’élégance de l’ensemble et pour le bon épanouissement des fleurs ; c’est noté sur cinq. Ces fleurs doivent être en nombre aussi important que possible, pour une longue période de floraison ; elles ne doivent pas s’ouvrir toutes en même temps, mais plusieurs peuvent être ouvertes sur une même hampe ; C’est important et cela compte pour quinze points.

La fleur :
Encore quatre critères, qui sont la couleur, la forme, la substance et le parfum. La couleur n’est pas un critère essentiel, cela n’est noté que sur cinq points ; la forme a plus d’importance puisqu’on la juge sur dix points. Il n’y a pas de définition de la forme parfaite. Une fleur peut être belle sans être ondulée ou frisée, mais dans tous les cas les pétales doivent former un dôme ou un cône qui ne s’affaisse ni ne s’écarte, et les sépales doivent donner de la solidité et de la fraîcheur à la fleur : des sépales trop étroits à la base vont s’effondrer et donner un aspect flasque à l’ensemble, trop horizontaux, ils vont donner un air raide, peu flatteur. Pétales et sépales doivent avoir les mêmes dimensions. Si la matière constituant la fleur est mince ou fragile, celle-ci va très vite se faner et, s’il pleut, elle va fondre au lieu de garder un aspect pimpant. C’est noté sur dix également. Le parfum confère un plus indéniable à un iris. Il peut être fort ou discret, mais il doit aussi être agréable, ce qui n’est pas toujours le cas. Ce critère compte pour cinq points.

La personnalité et l’originalité :
Il y a beaucoup d’iris qui, lorsqu’on les voit, n’attire pas l’œil. Soit que la plante paraisse banale, soit qu’on ne la remarque pas, ou peu. Une bête à concours se doit de ne pas ressembler à tous les autres iris ; il doit se distinguer par des traits particuliers qui concerne le coloris ou la disposition des couleurs, la perfection dans la forme, un charme indéfinissable ou un parfum délicieux. Cela étant, il peut obtenir jusqu’à cinq points supplémentaires.

A lire l’énumération ci-dessus on est frappé par l’importance donnée à la plante elle-même et, donc au rôle relativement subalterne qui est réservé à la fleur. C’est important de le savoir et, surtout de s’en souvenir, quand on veut faire de l’hybridation et, par conséquent devoir établir une hiérarchie entre les semis. Les meilleurs sont ceux qui sont de belles plantes ; mais il faut aussi que cela soit de jolies fleurs ! L’un ne va pas sans l’autre, mais si l’on veut participer à un concours avec quelques chances de l’emporter, il vaut mieux présenter des iris costauds et bien balancés. Cela ne veut pas dire que la fleur n’a qu’une importance secondaire mais cela signifie à coup sûr qu’à tout choisir, entre deux plantes dont l’une a des fleurs magnifiques mais provient d’une touffe médiocre, et l’autre des fleurs d’un coloris moins exceptionnel mais venant d’un iris sain et prolifique, il faut préférer la seconde. La première doit être conservée pour tenter de reproduire sa fleur enthousiasmante en la croisant avec une variété qui peut lui donner la force qui lui manque (d’où l’intérêt d’avoir de bonnes notions de génétique et une connaissance précise des pedigrees de chaque plantes croisées). Il ne faut pas s’étonner de ce choix : il sera vraisemblablement possible de retrouver le coloris ou le modèle que l’on admire, en revanche si l’on abâtardit la plante elle-même, c’est à terme un affaiblissement général désastreux. Il y a de l’eugénisme là-dessous, mais il faut s’en réjouir plutôt que de le regretter.

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