DIVISION OU MULTIPLICATION
De toute façon c’est une question de calcul. La question est : comment obtenir la multiplication des rhizomes, pour pouvoir, sans trop attendre, quand on fait le commerce des iris, mettre un maximum de plantes sur le marché ? Il ne faut pas oublier qu’en Europe les variétés américaines arrivent alors qu’elles ont été déjà multipliées en abondance par les producteurs qui les proposent. Le défi pour les producteurs français est de perdre le moins de temps possible pour les commercialiser à leur tour.
Pour commencer, il y a ceux qui pensent que plus on divise les touffes, plus on obtient de nouvelles pousses. Ceux-là, par conséquent, vont, dès l’année A+1, diviser leurs plantations de l’année A. Ils partent de l’idée que chaque rhizome doit, en principe, donner naissance à trois pousses. Mais lorsque les touffes commencent à être un peu denses, il y a des pousses qui vont avorter, faute de place pour se développer, donc des rhizomes potentiels qui vont manquer. En divisant très vite on contourne le problème. Cependant, en un an, surtout sous les conditions météorologiques de l’Europe du Nord-Ouest, les jeunes pousses n’auront pas atteint un développement optimal, de sorte que, leur infligeant très tôt l’obligation de se réinstaller, on les fragilise sérieusement, avec le risque de voir certaines dépérir, et s’éteindre le bénéfice escompté d’une division précoce. Le bon sens exige donc de ne pratiquer ce traitement sévère que dans les régions plutôt clémentes, là où les pousses de l’année A auront pu atteindre une vigueur suffisante avant la transplantation. Autre inconvénient possible de cette technique : elle nécessite beaucoup d’espace et, par conséquent, une pépinière où les mètres carrés ne manquent pas. Enfin les rhizomes issus d’une multiplication rapide peuvent être petits et donc moins flatteurs, pour le client qui les reçoit, que les gros rejetons qui ont eu plus de temps pour prendre de la force. Pour compenser, il va falloir utiliser beaucoup d’eau et de l’engrais…
Deuxième technique : n’entreprendre la division que lorsque les touffes sont bien installées et les pousses nombreuses et solides. C’est sage, mais est-ce aussi efficace ? Les avis sont évidemment partagés, et ceux qui pratiquent ainsi sont convaincus d’utiliser la bonne méthode. Dans un climat un peu ingrat, c’est sûrement ce qu’il faut faire. Mais au bout de combien de temps pratiquer cette forme de division ? Là aussi les avis sont partagés. Deux années ? Trois années ? Plus ? C’est uniquement la rapidité de la multiplication qui va décider de la périodicité. Chaque producteur, qui connaît la progression des iris dans son exploitation, choisit ce qu’il considère comme le meilleur. Il choisit également l’espacement optimum à réserver entre les touffes. Car c’est un élément important : des touffes qui vont prendre de l’ampleur doivent avoir la place de se développer. Les rhizomes qui proviennent de cette méthode de culture sont en général plutôt costauds, sans se montrer exigeants en soins et en fortifiants.
Il existe une troisième technique. Elle est pratiquée par celui qui n’est pas particulièrement pressé d’obtenir des rhizomes en état d’être vendu, mais qui privilégie le naturel. Elle consiste à planter large, et à laisser les plantes se développer à leur rythme, aussi longtemps qu’elles pourront rester à la même place. Elles ne seront pas transplantées systématiquement mais seulement quand le besoin s’en fera sentir, parce que toutes les variétés ne poussent pas à la même vitesse. Pour la vente, au fur à mesure des commandes, le producteur vient retirer les rhizomes dont il a besoin, les détachant de la touffe mère, sans déterrer celle-ci. C’est une culture « bio » de l’iris, loin de la productivité recherchée par les adeptes des techniques précédentes. Ce mode de culture va de pair avec une quasi-absencee d’engrais et d’arrosage, et à un désherbage sans produit chimique. Mais autant dire que celui qui pratique ainsi ne fait pas du chiffre d’affaire sa première préoccupation ! La qualité est là, ainsi que la robustesse.
Enfin il y a des personnes qui ne recherchent pas la multiplication de leurs iris, mais au contraire essaient de la limiter pour s’éviter une transplantation pénible ou impossible. Ce sont des amateurs, aux jardins de taille modeste, qui tiennent à ce que leurs iris, généralement plantés serrés, ne viennent pas à se chevaucher et restent longuement en place. Pour cela ils retirent chaque été les poussent les plus extérieures, nettoient le centre de la touffe, y ajoutent du terreau et des amendements à diffusion lente, et replantent à cet endroit les rhizomes issus de la couronne. Cette méthode a été mise au point en Belgique par Koen Engelen, et elle est efficace dans les petits jardins.
Je vous disais que c’est une question de calcul ! Voulez-vous aller vite, ou prendre votre temps, voire freiner la prolifération ? Les quatre méthodes évoquées répondent en fait à des besoins différents.
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