11.7.08











L’ÉLÉGANCE DES ÉPERONS





Cinquante ans d’iris « space age »

On peut dire que c’est à Lloyd Austin, obtenteur installé dès 1925 en Californie, que l’on doit le démarrage de l’intérêt pour les iris à éperons. Quand il a vu pour la première fois des iris présentant des extensions étranges à l’extrémité des barbes, il s’est dit qu’il y avait là quelque chose qui méritait d’être profondément étudié. Il a dès lors entrepris un énorme travail de recherche et de croisement afin d’exploiter ce qui n’était alors qu’une anomalie, et d’apporter à ces nouveautés toutes les améliorations qui étaient possibles, de manière à ce que les éperons et autres pétaloïdes, confèrent aux fleurs une personnalité excitante mais aussi esthétique, et il semble qu’il ait tout inventé : les petites pointes recourbées vers le haut, les minces filaments arqués, les larges spatules ou les extrémités touffues. C’est lui qui a inventé l’expression « Space Age » pour désigner ces nouveaux iris, leur attribuant du même coup une identité synonyme de modernité. A partir de 1959 il n’a plus produit que des SA, dont les noms font presque toujours allusion aux appendices qui les décorent. C’est le cas de ‘Lemon Spoon’ (60), ‘Horned Flare’ (63), ou ‘Spooned Blaze’ (64)…

Dès lors le goût pour les iris à éperons s’est installé aux Etats-Unis et bien d’autres hybrideurs se sont lancés dans l’aventure, utilisant les cultivars de Lloyd Austin comme base de leur recherches. Manley Osborne, Henry Rowlan ont été parmi les premiers à reprendre le flambeau. Tout le monde connaît ‘Hula Moon’ (Rowlan 78), chamois marqué de violet, ‘Moon Mistress’ (Osborne 76), iris de couleur pêche, ‘Battle Star’ (Osborne 78), bicolore chamois et fuchsia, ou les incontournables que sont ‘Twice Thrilling’ (Osborne 84), et surtout ‘Sky Hooks’ (Osborne 80).

Celui qui a le mieux saisi l’intérêt des iris « space age » fut Monty Byers. Cet hybrideur dont la carrière fut aussi brève que brillante, et qui a profondément marqué son époque, c’est essentiellement intéressé aux remontants et aux iris à éperons. C’est à ces derniers qu’il doit d’avoir pris place dans le cercle très fermé des obtenteurs dont trois cultivars ont reçu la Médaille de Dykes. Avec ‘Conjuration’, ‘Thornbird’ puis ‘Mesmerizer’ il est le seul jusqu’à présent à avoir hissé au sommet des iris à ornements.

Dans son sillage, peu à peu, de très nombreux hybrideurs ont pris conscience que les appendices pétaloïdes présents à l’extrémité des barbes n’étaient pas simplement des extravagances de la nature, mais qu’ils apportaient quelque chose à l’histoire des iris hybrides. Ceux qui se sont particulièrement investis dans ce domaine se nomment George et Michaël Sutton, Tom Burseen, Jim Hedgecock, Larry Lauer, Paul Black, et Richard Tasco, aux USA. En Australie, Graeme Grosvenor n’a pas dédaigné ‘Conjuration’ ; en France, Gérard Madoré et Richard Cayeux ont fait de même ; en Slovaquie, Ladislaw Muska en a fait son principal thème de recherche. Ce sont tous des obtenteurs dont on ne peut pas dire que la notoriété n’attendait que cela pour s’affirmer : ils avaient acquis la célébrité bien avant de jouer les prolongations de barbes !

Au fil des années, les iris à ornements ont fait comme les autres : ils ont évolué, ils ont acquis les mêmes qualité que les autres, tant en élégance de la fleur qu’en robustesse de la plante. Il y a autant de différence entre un « space age » de Lloyd Austin et un « space age » de Richard Tasco qu’entre un iris traditionnel de Tell Muhlestein et un autre de Paul Black. Ils ont même fait mieux puisqu’ils ont vaincu leurs défauts structurels. En plus, peu à peu, leurs caractéristiques spécifiques se sont améliorées : les ornements sont devenus plus gracieux, ils ont acquis en raffinement, en importance, et tendent de plus en plus souvent vers l’apparence de fleur double qui est une des voies de leur perfectionnement et un des buts à atteindre de la part des hybrideurs qui s’y consacrent.

Parallèlement ils se sont fait adopter par le grand public. Désormais rares sont ceux qui ont encore des réticences à leur égard. Même si les juges US, que certains considèrent comme des irisariens de la vieille garde, ont encore un peu de mal à reconnaître leur intérêt. Certes, ils ont consenti à couronner les trois lauréats de Monty Byers, mais depuis ils se sont repliés sur des positions plus traditionnelles. Ainsi, en 2007, ils n’ont décerné un AM qu’à un seul iris à éperons, ‘Solar Fire’ (Tasco 2002).

L’élégance des éperons serait-elle encore discutable ? Il ne reste sans doute plus grand monde pour soutenir cela. Même ceux qui furent longtemps dans la résistance ont fini par reconnaître que les appendices floraux pouvaient apporter quelque chose aux iris. Témoin, Richard Cayeux qui après avoir écrit à leur sujet : « …de là à parler de beauté supérieure, il y a un pas que nous ne franchirons pas », utilise sans hésiter ‘Conjuration’ et obtient des fleurs aussi belles que ‘Grenade’ (2007). Il n’y a pas de honte à changer d’opinion.

2 commentaires:

Jean a dit…

A partir de Planete Iris que m'avait envoyé Jim O Mahoney croisé avec iris pumila, j'ai obtenu un SDB plicata mauve clair à éperon qui a servi de point de départ à Lawrence Ransom pour plusieurs de ces SDBs

Jean-Luc a dit…

j'en ai peu dans ma collection, mais je vais tres vite faire de nouvelles acquisitions, j'aime beaucoup ce genre, Grenade est magnifique ...