17.7.09
















LES ROSES DE GATTY

Il fut un temps où l’on parlait des iris roses de Gatty comme on pouvait parler du pain de Poilane ou des tailleurs de Chanel. Un must. Quelque chose de parfait. Ils sont un peu oubliés aujourd’hui, parce que le monde des iris, à l’instar de notre univers, est en constante expansion. Sauf rares exceptions, il n’y a jamais loin des marches des podiums à la déchéance des tas de compost ! Cependant les vrais amoureux des iris conservent un peu de tendresse pour ces fleurs pour lesquelles ils ont parfois dépensé de fortes sommes et qu’ils ont aussi vivement aimées.

Alors passons un instant par la case « nostalgie » et rendons visite à ces roses qui ont fait l’admiration des amateurs pendant plus de vingt ans.

Originaire de la côte Est, Joë Gatty prit, un jour de 1967, la décision de faire le grand saut et de traverser les Etats-Unis de part an part pour trouver une terre où ses projets d’hybridation auraient les meilleures conditions pour se réaliser. Il y transporta ses graines et ses meilleurs jeunes plants, et la nouvelle vie commença, avec, tout de suite, des iris roses de grande classe venus de l’Est. ‘Princess’ (72) et ‘Liz’ (72). Le ton était donné, Joe Gatty allait sélectionner de préférence des iris dans les couleurs tendres et surtout des roses. Il est probable que cette couleur correspondait à sa sensibilité et à la délicatesse de son caractère.

Les fameux roses de Gatty, couvrent toute la gamme de cette couleur, depuis le rose pur de ‘Princess’ (72) jusqu’au rose pourpré de ‘Presence’ (87), en passant par toutes les nuances : rose chair – ‘Liz’ (72), rose tendre – ‘Bonbon’ (77), rose dragée – ‘Playgirl’ (77), rose pêche – ‘Femme Fatale’ (83), rose layette – ‘Paradise’ (80), rose accompagné de blanc – ‘Delicate Balance’ (89), rose pâle – ‘Soft Caress’ (91), rose corail – ‘Satin Siren (87), rose vif – ‘Coming Up Roses’ (92). Et n’oublions pas les iris intermédiaires et lilliputs parmi lesquels on peut citer ‘Voilà’ (72), en rose orchidée ou ‘Tchin-Tchin’ (88), en rose tendre. Près de 40% des enregistrements de Gatty concernent des iris roses.

L’apparition de chacun de ces iris était un événement attendu. On se demandait quelle teinte allait avoir le prochain. Certains, les plus nombreux, ont immédiatement rencontré un succès commercial, assuré par le soutien du catalogue de Keith Keppel avec qui Gatty a toujours partagé une amitié sans faille, d’autres, inexplicablement, sont restés pratiquement inconnus malgré des qualités identiques. Qui a entendu parler de ‘Pleasure Faire’ (73), ‘Movie Queen’, (82) ‘Heatheridge’ (85) ou ‘Floral Chiffon’ (90) ?

Tout ce beau monde résulte d’un très petit nombre d’ancêtres, le travail de Gatty a été une parfaite illustration de ce que l’on peut obtenir par le procédé de l’inbreeding. Tout est parti d’un croisement banal : (Ruffled Valentine X Rippling Waters). Le premier, ‘Ruffled Valentine’ (Brizendine 61) est un iris blanc issu de roses, dont le célèbre ‘May Hall’ (Hall 52) ; le second, Rippling Waters (Fay 61 – DM 66), mauve lilas, est une des bases de l’iridophilie moderne. ‘Princess’ (72) et son frère de semis ‘Liz’ (72) proviennent de ce croisement. Une autre base est le fameux ‘Pink Sleigh’ (Rudolph 70). A partir de cela, la mécanique lancée a donné naissance à toute la série : ‘Bonbon’ est de (Princess X Pink Sleigh), ‘Playgirl’ est de (Liz X Pink Sleigh) et ‘Satin Gown’ de (Pink Sleigh X Liz). Continuons : le pedigree de ‘Paradise’ est (Playgirl X May Dancer x Princess)), celui de ‘Femme Fatale’ est (Paradise X Pretty Lady), etc.

Les successeurs de Joë Gatty ont continué le mouvement, rajoutant ici et là une pincée de modernité mais conservant scrupuleusement la souche Gatty. Exemples : ‘Perfect Gift’ (Keppel 96), rose dragée, = (Social Event X Femme Fatale) ; ‘Happenstance’ et ‘Vienna Waltz’ (Keppel 2000), frères de semis, = ((Femme Fatale x ((Nefertiti x Playgirl)x Presence)) X Social Event)… C’est une preuve que la cuisine était bonne puisque les grands chefs comme Keppel l’ont largement utilisée.

Les roses de Gatty ont marqué leur époque. Ils ont fait rêver toute une génération d’amateurs d’iris, et si on leur préfère maintenant des variétés plus modernes, ils restent dans la mémoire des anciens, autant qu’ils se trouvent indirectement dans les croisements que les jeunes hybrideurs réalisent de nos jours. Ainsi va la vie des iris, comme va la vie tout court…

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