1.8.09
















A QUAND LE ROUGE POMPIER ?

Depuis l’ouverture de ce blog, trois textes ont été publiés à propos de l’iris rouge.

Le 19/11/2004, la chronique est intitulée sobrement « L’Iris Rouge ». Elle fait le point sur les travaux lancés par Richard Ernst, l’hybrideur maison de la firme Cooley, qui annonce dans un article publié dans le bulletin de juillet 2004 de l’AIS une prochaine avancée significative dans le domaine de l’iris rouge.

Le 04/03/2005, c’est le tour de « Un Autre Chemin vers le Rouge », à propos de l’article de Don Spoon, dans le numéro d’octobre 2004 du Bulletin de l’AIS, qui décrit son approche personnelle du problème et annonce pour bientôt un iris qui serait fort proche du rouge.

« Une autre façon d’obtenir du rouge » est le titre de la troisième chronique, publiée le 03/03/2006. Elle évoque une communication, sous le titre de « Another Approach to Red Irises », publiée dans le bulletin de l’AIS de janvier 2006, par Neil Mogensen, de Arden, en Caroline de Nord, lequel démontre qu’il peut exister une troisième voie pour obtenir du rouge.

A l’heure qu’il est, où en est-on dans ces recherches ? Ont-elles abouti ? Y a-t-il d’autres pistes qui ont été explorées ?

Car, comme ce fut le cas pour la tulipe noire ou la rose bleue, atteindre à l’inaccessible a toujours été un défi, pour les amateurs de plantes comme pour l’humanité tout entière.

La recherche entreprise par Richard Ernst, avec le concours de l’Université de l’Etat d’Oregon, a commencé par l’analyse complète de l’ADN d’un iris. La pigmentation de douzaines de variétés a été analysée et des cultures de tissu « in vitro » ont été réalisées. Il a fallu douze années de recherche pour découvrir et sélectionner les bons gènes rouges avant que ne commence le processus de transformation, processus qui a été couvert par un brevet et devait déboucher sur une plante nouvelle dont la première floraison était attendue pour le printemps 2005. C’était il y a cinq ans, et, depuis, silence absolu sur les résultats ! On peut supposer que le résultat n’a pas été probant parce que si le nouvel iris avait été d’un beau rouge pompier, la Maison Cooley aurait sûrement communiqué sur son succès !

Don Spoon a axé sa recherche sur une voie traditionnelle. Il est parti de la constatation que certains iris, dont deux de ceux qu’il a obtenus, ‘My Ginny’ (2002) et ‘Special Red’ (2004), présentaient des barbes absolument rouges. Un rouge coquelicot provenant d’une forte concentration de lycopène, le pigment qui fait que les tomates sont rouges. Il en a déduit que ce pigment, lorsqu’il est présent dans une fleur d’iris, peut se trouver concentré à l’extrême dans les barbes, mais ne peut pas se développer de la même façon dans les pétales et sépales parce qu’il est bloqué par un gène particulier qu’il suffirait d’identifier et d’éliminer. Mais tout cela résulte d’une extrapolation de données qui n’est pas vérifiée scientifiquement. On reste dans le domaine du possible, voire du probable, mais pas du certain. Il n’empêche que Don Spoon est convaincu qu’en utilisant des parents dont les fleurs ont une forte concentration de lycopène, il était, en 2004, sur le point de parvenir à ce rêve plus que centenaire de l’iris parfaitement rouge. Il semble qu’il en soit toujours au même point.

Neil Mogensen explique que la couleur rouge pure, qui est produite par la pélargonidine (pigment présent dans les géraniums) fait partie de la même série que la delphinidine (pigment qui colore en bleu les delphiniums …et les iris). Ces deux pigments, ainsi que beaucoup d’autres, sont des éléments de la grande famille des pigments anthocyaniques comportant plus ou moins de radicaux OH. Mogensen en déduit que pour obtenir de la pélargonidine au lieu de la delphinidine, il suffirait de réussir à retirer deux des radicaux OH de cette dernière. Mais il ne dit pas comment faire ! Ni comment retirer les autres pigments qui pourraient venir perturber son mécanisme.

Neil Mogensen est décédé l’année dernière. Don Spoon n’a pas enregistré d’iris absolument rouge et Richard Ernst est désespérément silencieux… La recherche de l’iris rouge est-elle donc vouée à l’échec ?

L’admettre serait perdre de vue le travail discret mais patient et pertinent entrepris par Joseph Ghio depuis de nombreuses années. Cet obtenteur génial, maître incontesté de la génétique des iris, a produit dans les dernières années toute une série d’iris d’aspect splendide, qui ont pour caractéristique commune d’être d’un rouge sombre rutilant, parfois touché d’un peu de violet. Ils ont évidemment un air de famille et, de fait, on retrouve dans le pedigree de chacun des séquences identiques. Mais, surtout, d’année en année, au fur et à mesure d’une approche lente et méticuleuse, le rouge s’affine et se purifie. La base de ce travail, c’est le « vieux » ‘Lady Friend’ (Ghio 81), déjà très rouge au moment de son apparition. Pour renforcer le coloris, lui donner plus de profondeur, Ghio a ajouté une foule d’ingrédients en utilisant un panel de fleurs considérable puisqu’il n’y a pas moins de soixante noms de variétés cités dans les pedigrees de sa série rouge ! Il y a dans cet ensemble essentiellement des variétés où le rouge est en fait du grenat, de l’amarante ou du magenta, mais on trouve aussi des iris roses, oranges, ou nettement bruns. Et au final le rouge pur n’est pas loin de faire son apparition. Mais les iris de Ghio, de notoriété publique, sont fragiles et poussent souvent mal. Il reste donc un travail essentiel : que la couleur rouge issue des iris de Ghio passe dans des plantes solides et sans problèmes.

Au travail, donc, Messieurs les obtenteurs ! Certains ont déjà relevé le défi. Ainsi Bruce Filardi qui, conscient de problème posé par les rouges de Ghio, a réalisé des croisements de ces variétés avec d’autres « rouges » de bonne qualité végétative, comme ‘Code Red’ (Aitken 2003), un enfant de ‘Lady Friend’, ou ‘Eyes Right’ (Burseen 91). On ne devrait pas tarder à constater les résultats.

Toute cette approche est essentiellement pragmatique, mais c’est peut-être elle qui aboutira à ce mythique iris rouge que l’on espère, que l’on guette, mais aussi que l’on craint, de peur qu’à cause de lui l’iris naturel soit à jamais perdu.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ça sera peut-être intéressant de parler aussi d'un livre écrit par Dan H. Meckenstock intitulé "Breeding Red Irises: The Caretenoids" (ISBN 1-59872-130-5.

Sylvain Ruaud a dit…

Je ne l'ai pas lu et ne pus donc pas en parler..