16.10.09
















UN TEINT DE PÊCHE

Il faut savoir ce que l’on veut. Richard Cayeux explique très bien pourquoi les iris abricot, ou pêche, ont eu du mal à s’imposer. « Les tons pêche et abricot apparurent en même temps que les roses à barbes mandarine. Malgré ce, ils ne rencontrèrent pas chez les hybrideurs beaucoup de passion, ceux-ci étant plus préoccupés par l’amélioration des roses, ce qui correspond d’ailleurs à l’élimination de la nuance abricot. » (L’Iris, une fleur royale, p. 101). Il ajoute que pour intensifier les oranges, les hybrideurs ont également rejeté les fleurs les moins colorées. Voilà pourquoi les iris au teint de pêche ont eu bien du mal à s’imposer. Mais quand, dans un semis, un iris pêche présentait des fleurs particulièrement réussies, sur une plante généreuse, il était quand même sélectionné. Ce qui nous vaut, dans les années 60/70, quelques iris pêche particulièrement bien venus et toujours valables. C’est le cas, par exemple de ‘Peach Frost’ (Schreiner 72), de ‘Pretty Please’ (Tompkins 72) ou de ‘Beauty Crown’ (Hamner 77).

Ce n’est qu’au cours des années 80 que, à côté d’iris roses ou orange de plus en plus saturés, les hybrideurs ont pris la peine de retenir des iris pêche spécialement savoureux. Le spécialiste des roses, Joë Gatty a enregistré ‘Paradise’ en 1980, ainsi que l’excellent ‘Delicate Balance’ en 89.

Il a entamé la décennie suivante avec ‘Soft Caress’ (91). Une décennie où le rose pêche s’est étendu à d’autres dispositions de couleurs que le traditionnel unicolore. On voit le modèle amoena conquis par cette couleur. Prenez, par exemple, ‘Champagne Elegance’ (Niswonger 87) et surtout l’adorable ‘Champagne Frost’ (Keppel 96). En même temps sont apparus des fleurs pêche dans le modèle « Joyce Terry », c'est-à-dire avec les pétales entièrement colorés et les sépales blancs bordés de la couleur des pétales. Un bel échantillon de ce modèle se nomme ‘Cutting Edge’ (Ghio 94). Celui-ci sera suivi par ‘Lasting Romance’ (Aitken 99). Quant à ‘Natural Blond’ (Ghio 2002) il introduit la couleur pêche dans le cercle très étroit des amoenas inversés, ce qui en fait une rareté que les collectionneurs devraient s’arracher.

‘Santa’ (Shoop 97), l’une des dernières obtentions de cet hybrideur discret mais passionnant, est considéré comme un aboutissement dans son travail tout en ouvrant des possibilités nouvelles avec ses marques saumonées sur le haut des sépales, mais ‘Tropical Magic’ (Shoop 95), parent femelle de ‘Santa’ avait ouvert la voie, dans un ton plus rose pêche, tout à fait dans le domaine de la chronique d’aujourd’hui. En utilisant ‘Santa’ comme parent, Tom Johnson a obtenu ‘Attractive Lady’ (2007), et ce faisant il a perfectionné ce qui fait l’originalité de ‘Tropical Magic’ car les couleurs sont plus douces mais aussi plus nettement dessinées sur les sépales.

Ces intéressantes variations ne font pas perdre de vue l’amélioration du rose pêche dans sa présentation traditionnelle. Jim Hedgecock a apporté sa contribution avec ‘Pretty Perfect’, dans une teinte claire et lumineuse, tandis que Keith Keppel, au contraire, a cherché une teinte plus sombre, plus proche du rose saumon peut-être, avec ‘Birthday Girl’ (2005), une fleur aux tépales bouillonnés, avec l’originalité supplémentaire d’une répartition irrégulière de la couleur. Enfin ‘Roper’s Revenge’ (Burseen 2007) a ajouté à un rose pêche à peine chamoisé la touche de fantaisie d’éperons bleu lavande.

A lire ce qui précède, on peut se dire que la couleur pêche est une exclusivité américaine. C’est tout à fait faux ! En Australie, dès 1994, Barry Blyth nous avait offert ‘Hostess Royale’, une fleur parfaitement réussie, dans un ton doux très agréable. Et au fin fond de l’Asie Centrale, Adolf Volfovitch-Moler a obtenu peu avant sa mort une variété plaisante que j’ai pu voir à Florence l’an dernier : ‘Vanilnoye Nebo’, enregistrée en 2007.

En Europe, on n’est pas en reste. Dès 1996 Valeria Romoli proposait ‘Buongiorno Aprile’, dans une forme bien classique, et en 2000 Lawrence Ransom dédiait à la fondatrice de la SFIB la variété ‘Gladys Clarke’, qui est un hommage gracieux et plein de tendresse. Mais les amateurs peuvent aussi maintenant se permettre de sélectionner des iris au teint de pêche. C’est ce qu’a fait Daniel Tauzin avec son ‘Eventail’, présent au concours FRANCIRIS 2007, mais qui n’est toujours pas enregistré, ce qui est dommage. Enfin ne mettons pas le point final sans parler de ‘Douce Rêverie’ (Cayeux 2006), qui donne la version française, toute en finesse, de l’amoena rose pêche.

Quand on est submergé par les bons iris roses, au point qu’on ne sait plus lequel choisir, la présence de ces iris pêche est une délicate différenciation qui ne peut qu’intéresser l’amateur à la recherche de fraîcheur et de nouveauté.

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