3.9.10





































ZONE BLEUE

Un trait qu’on rencontre très souvent sur les iris nains standards (SDB), c’est une tache colorée sombre située sur les sépales, autour des barbes. Les Américains l’appellent « spot » et les Français le nomment « signal ». Mais qu’il s’agisse de « spot » ou de « signal », on est en présence de quelque chose de caractéristique des SDB. Cela mérite bien qu’on s’y attarde un moment.

Que ce soit dans « The World of Irises » de Bee Warburton ou dans « L’Iris, une Fleur Royale » de R. Cayeux, l’explication est la même, au mot près. Cette tache, ou plutôt ce « signal », est un héritage direct de l’espèce Iris pumila qui est à la base des croisements ayant abouti aux premiers SDB. C’est un trait tenace avec lequel les hybrideurs ont joué pour obtenir soit des fleurs absolument unicolores (donc en éliminant totalement le signal), soit un signal nettement délimité, avec un bon contraste par rapport à la couleur du reste de la fleur.

Dans le genre, les hybrideurs s’en sont donné à cœur-joie en matière d’associations de couleurs. On trouve réellement de tout, du ton sur ton comme des associations clair/foncé dans toutes les teintes possibles. On en restera cette fois au mariage du blanc, pour la couleur de base, et du bleu (ou du violet) pour celle du signal.

Voici ce qui est écrit dans « The World of Irises » à ce propos :
« Le blanc avec une tache bleue donne, au jardin, un effet différent et charmant. C’est le cas avec ‘Blue Pools’ (1), blanc et bleu moyen ; ‘Boo’ (2), blanc et bleu foncé ; et ‘Twinkle Toes’ (3), blanc et violet. »

Il faut aussi parler de deux dispositions voisines, le halo et les rayures. Dans le halo, la zone colorée se limite à un anneau plus sombre ou contrastant autour des barbes, tandis que dans les rayures des veines plus ou moins longues divergent à partir du cœur et s’éteignent avant d’atteindre les bords.

L’un des meilleurs obtenteurs américains de SDB est Paul Black. Dans le genre qui nous occupe aujourd’hui il n’est pas en reste et son ‘Tu Tu Turquoise’, de 1989, est particulièrement agréable à regarder. Il descend de ‘Blue Pools’ cité précédemment. Black a récidivé dans le genre en obtenant le splendide ‘Puddy Tat’ (2002) où le signal, très large, est d’une parfaite netteté, avec un fort contraste. Puis, dans cette lignée, il faut citer ‘Big Blue Eyes’ (2005) qu’on peut classer dans les iris « à rayures », mais qui descend directement de ‘Puddy Tat’, et le brillant ‘Riveting’ (2009), fils de ‘Big Blue Eyes’. Voilà une bien belle famille !

Un autre spécialiste des SDB, qui fait partie de ceux qui ne dédaignent pas le modèle « blanc, signal bleu » façon ‘Boo’, est Donald Spoon. Plusieurs de ses obtentions méritent qu’on en dise deux mots, et en particulier ‘My Kayla’ (2000) et ‘Earth and Sky’ (2006). Même si elles ne sont pas directement parentes, ces deux variétés présentent beaucoup de similitudes dans leur aspect. Pour obtenir ‘My Kayla’ Donald Spoon a fait appel à deux vieux guerriers : ‘U-Turn’ (Boswell, 1989), qui comporte le fameux signal, et ‘Pippi Longstockings’ (Innerst, 1984), jaune unicolore. Pour ‘Earth and Sky’ il s’est servi uniquement de ‘Rainbow Rim’ (Spoon, 2000) dans un très rare auto-croisement (rare car n’étant fécond qu’exceptionnellement). Cet iris est jaune avec un signal bleu, il est lui-même issu de ‘Being Busy’ (Hager, 1992) qui porte un gros signal acajou sur fond jaune, et de ‘Little Showoff (Earl Hall, 1989), blanc glacier à barbes bleues.

Donald Spoon a pensé à marier sa lignée avec celle de Paul Black. ‘Tu Tu Turquoise’ associé à ‘Snow Tree’ (Sobek, 1990) est à l’origine de ‘Tropical Blue’ (Spoon,2002), lequel, croisé avec ‘Tropical Shoals’ (Spoon, 2002) a donné ‘Karen Jones’ (Spoon, 2008) qui est lui-même à l’origine de ‘Teagan’ (Spoon, 2009) et de ‘Blue Hues’ (Spoon, 2010) : tout ce monde là fait partie de la famille des blanc avec signal bleu. Et on peut s’attendre à ce que la série ne s’arrête pas là.

Comme on peut le constater, les chemins pour parvenir au modèle ‘Boo’ sont très différents. Cela signifie que ce signal, si difficile à faire partir pour obtenir des iris unicolores, ne tarde pas à réapparaître dès qu’on lui en donne la possibilité. Ne dit-on pas que quand on chasse le naturel, celui-ci revient au galop ?



(1) B. Jones, 1972
(2) L. Markham, 1971
(3) B. Blyth, 1973

Aucun commentaire: