14.1.11

LA MUSIQUE DE ‘PUCCINI’






Dans ces chroniques il a déjà été deux fois questions de ce nouveau modèle d’iris que ses créateurs ont baptisé « distallata ». C’est un modèle qui rencontre un succès considérable auprès des hybrideurs (auprès de ceux qui achètent des iris, je ne sais pas), si bien que maintenant chacun veut avoir à son catalogue son ou ses distallatas. Rappelons en quoi consiste ce modèle. Les pétales sont blancs (ou tout au moins très clairs), de même que les sépales, mais ceux-ci s’agrémentent d’une couche centrale de couleur, qui peut être du jaune ou de l’orangé clair, à laquelle s’ajoutent de fines rayures sombres, partant de la barbe et s’étirant plus ou moins vers le bord. Les inventeurs de ce modèle (on parle d’inventeurs comme s’il s’agissait d’un trésor mis au jour par quelque Indiana Jones du monde des iris) sont deux briscards de l’hybridation et amis de longue date, Joë Ghio, de Californie, et Keith Keppel, de l’Oregon. L’initiateur restant Ghio et son ‘Prototype’ enregistré seulement en 2000, mais apparu quelques années auparavant et immédiatement utilisé en hybridation, de sorte que son descendant ‘Puccini’ a été enregistré avant lui, en 1998.

‘Prototype’ descend lui-même, via un semis numéroté 88-180P qui est issu de ‘Fancy Tales’ (Shoop, 1980) et ‘Strawberry Sundae’ (Schmelzer, 1977). ‘Fancy Tales’ se présente avec des pétales blancs et des sépales en dégradé de mauve violacé avec des épaules pêche ; ‘Strawberry Sundae’ est un amoena orange clair. L’un et l’autre viennent de ‘Wine and Roses’ (Hall, 1963) via des semis amoenas rose ou orange.

‘Prototype’ est donc le premier iris nommé à proposer le modèle distallata, mais la production en série a vraiment commencé avec ‘Puccini’ dont le pedigree n’est pas quelque chose de simple et facile puisque pas moins de 34 variétés différentes y interviennent, souvent à plusieurs reprises. Ensuite est apparu ‘Expose’ (2003). Pour celui-là, Ghio a pris l’élément maternel de ‘Puccini’ auquel il a ajouté ‘Romantic Evening’ (Ghio, 1996), une des variétés les plus recherchées du moment pour ce qu’elle apporte en brillant des couleurs, en grâce de la fleur et en vigueur de la plante, et un élément nouveau, ‘Impulsive’ (Ghio 2001). Et cela c’est une idée de génie car cet ‘Impulsive’ descend de ‘Cinnamon Sun’ (Hamner, 1993), une des premières variétés à présenter les fameuses griffures violacées, tenues elle-même de ‘Peach Sundae’ (Hamner, 1975) par qui l’on remonte à ‘Wine and Roses’. La boucle est bouclée !

‘Expose’ enrichit la panoplie, notamment grâce à une fleur plus ondulée et à la teinte abricot des épaules qui a gagné du terrain sur les sépales. En 2005, Ghio a proposé une étape supplémentaire sous le nom de ‘Magic Happens’ où les griffures violettes sont accentuées, les couleurs plus vives et la fleur encore mieux formée et ondulée.

De son côté Keith Keppel a commencé par ‘Quandary’ (2001) qui utilise la base Ghio associée à ‘Cinnamon Sun’. On se situe donc au même niveau que ‘Expose’. La question que se posait Keith Keppel quand il a enregistré ‘Quandary’ était de savoir d’où venaient ces fines rayures disposées sur les sépales. Il supposait, après une fine analyse des pedigrees, qu’elles étaient une résurgence minimaliste du modèle variegata d’origine, quelques 25 générations antérieurement. Il se demandait aussi si le modèle allait se perpétuer. La suite de l’histoire a donné une réponse positive à la question.

Les premiers à avoir adhéré au mouvement ont été les voisins de Keppel, Black et Johnson. ‘Conjuring Cat’ (Black, 2005) est un vrai distallata qu’on peut qualifier de classique, descendant de ‘Fancy Tales’. Puis est venu ‘Carnival of Color’ (Black P. 2009), qui fut suivi de ‘Bargain Hunter’ (Black 2010). Tous ceux-ci sont de véritables distallatas, mais une évolution (comme on dirait dans le jeu des Pokémon) s’est manifestée chez Tom Johnson, tout d’abord, en la personne de ‘Wild Angel’ (2006) puis de ‘Painter’s Touch’. Ils descendent tous les deux de ‘Notorious (Ghio, 1991), qui est aussi derrière ‘Conjuring Cat’, mais la différence se trouve dans la répartition des couleurs : plus de veines sombres mais une zone colorée de bleu qui gagne le bord des sépales. ‘Painter’s Touch’ (Johnson, 2009) est plus coloré que son prédécesseur : pétales blancs finement liserés d’or, sépales blancs également, marqués d’orange aux épaules et largement lavés et veinés d’indigo, barbes oranges. C’est la même disposition qu’on retrouve chez ‘Stir It Up’ (Black, 2010), et c’est sur cette piste que s’est engagé Roger Duncan avec ‘Arctic Burst’ (2008) qui, lui, est un fils de ‘Puccini’. Les deux aspects sont donc parents et même très proches parents. Ce qu’on ne sait pas encore c’est si la musique de ‘Puccini’ restera majoritairement dans la note des distallatas désormais classique ou si elle va muter vers celle de ‘Wild Angel’ et ‘Arctic Burst’. Elle peut aussi se fondre avec une autre musique, voisine, qui est celle de ‘Ring Around Rosie’ et de ses brillants descendants. Mais les trois modèles peuvent survivre côte à côte, ce qui serait une bonne chose pour la bio-diversité façon iris !

1 commentaire:

gerard a dit…

Le terme distallatas se limite-t-il à définir des iris du type Puccini, exposé et autres, ou bien peut il décrire des iris à sépales présentant de fortes veinures ?