3.6.11

UN AIR DE ‘ROMANCE’





Il y a une règle absolue en matière de variétés horticoles, c’est qu’un même nom ne peut pas être attribué à deux cultivars différents. D’où l’intérêt d’enregistrer officiellement tout nouveau cultivar, pour lui conférer une identité indiscutable. Pour ce qui est des iris, c’est l’American Iris Society qui est désignée pour attribuer les noms. Elle détient toutes les listes d’enregistrement depuis le début du système et décide si tel ou tel nom, choisi par l’obtenteur, peut être ou nom attribué. Plus le temps passe, plus les nouveautés sont enregistrées, et plus il devient difficile de trouver un nom simple qui n’ait pas encore été attribué. D’où l’apparition de dénominations de plus en plus longues (on en est à des nom pouvant comporter quatre mots). A noter, malgré l’interdiction qui en est faite que le même nom est maintenant souvent exprimé dans toutes les langues du monde, ce qui, pour être une facilité, donne tout de même une infinité de possibilités pour un même concept. On trouve comme cela un ‘Golden Crown’ et un ‘Zolotaya Korona’ qui sont l’un et l’autre une ‘Couronne d’Or’ !

Si l’on ne respecte pas la règle de l’attributeur unique, on s’achemine vite vers la confusion, et cela peut être préjudiciable à tout le monde. Prenons l’exemple du mot « Romance ». Ila été utilisé dans un nombre assez important de noms différents : rien que pour de grands iris il y en a une vingtaine. Tant que ce mot est accolé à un autre, le plus souvent un adjectif qualificatif, il n’y a pas de problème. On ne confondra pas ‘Gypsy Romance’ et ‘Moonlight Romance’ ou ‘Valentine Romance’. Mais ce mot « romance » est aussi utilisé tout seul. Le premier à l’avoir fait est Olive Murrell, en Grande Bretagne, en 1928. Ce ‘Romance’ est un bel iris rose bruyère infus de jaune, encore présent dans de nombreux jardins et en particulier chez les collectionneurs d’iris historiques. Ignorant sans doute cette appropriation du nom, Ferdinand Cayeux, en 1933, l’a donné à une variété de couleur améthyste qui, elle, a sans doute disparu et de toute manière n’a pas été officiellement enregistrée. Mais voilà-t-il pas que son arrière-petit-fils, Richard Cayeux, a récupéré le nom pour une de ses dernières obtentions ! Voilà pourquoi dans le catalogue actuel, celui de 2011, on trouve un ‘Romance’, blanc et rosé, cerné de bleu, avec une barbe rouge.

Cet iris a été mis au catalogue sous cette dénomination avant d’être officiellement enregistré. A la réception de la demande, le « registrar » de l’AIS a évidemment refusé de l’enregistrer tel quel. Il a fallu trouver un solution. Dans les R&I de 2006, l’iris en question se trouve sous le nom de ‘Douce Romance’, Mais il était trop tard pour changer quoi que ce soit dans le catalogue en cours, et, forcément, dans les suivants, sauf à semer la confusion dans l’esprit des clients.

Il existe donc, potentiellement, trois iris qui s’appellent ‘Romance’. C’est nettement dommage. Le ‘Romance’ de 1928 est le seul a pouvoir se prévaloir du nom. Les deux autres sont sinon des usurpateurs, tout au moins des perturbateurs. Celui de 1933, non enregistré et probablement disparu, n’est pas –ou plus – dans la course, mais le dernier, celui de 2006, est bien là. C’est une variété charmante, dans la série des bleu-blanc-rouge chère à Richard Cayeux, dont on peut penser qu’elle a un succès mérité dans le public. C’est d’autant plus dommage qu’elle puisse être sinon confondue, du moins en conflit avec son valeureux antécédent. A mon sens il serait juste que ce nom de ‘Romance’ laisse la place au vrai nom de ‘Douce Romance’. Bien sûr l’écrasante majorité des acheteurs de ‘Romance’ n° 2 ne se soucie pas de cette homonymie, mais le amateurs apprécieraient qu’une courte note, dans le catalogue, explique le changement. De plus cela serait une courtoisie à l’égard de feu Olive Murrell, dont les obtentions ne sont pas passées inaperçues et qui a même enlevé une Dykes Medal britannique, en 1940, avec son ‘White City’ (1939).

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