6.4.12

LA FLEUR DU MOIS : 'JUNGLE SHADOWS'










Pour une fois il va être question d’un iris que je n’ai jamais vu qu’en photo ! Peut-on se faire une idée valable d’une fleur quand on n’a d’elle qu’un portrait, fut-il en couleurs ? Sans doute n’est-ce pas toujours le cas, notamment pour ce qui est des fleurs bleues ou violettes, tant le rendu des couleurs est changeant, en fonction de l’heure de la photo, de la lumière ambiante, de l’art du photographe, de la qualité de son appareil et de son traitement des images ! Pour ‘Jungle Shadows’, il y a moins de risque : les pigments bleus n’y dominent pas. D’ailleurs j’ai vu plusieurs photos de cette variété et je n’y ai pas rencontré de différences notables, si ce n’est une plus ou moins grande luminosité : rien qui puisse faire douter.

‘Jungle Shadows’ n’est pas une fleur récente, puisqu’elle a été enregistrée par Hans Sass en 1959. Elle a d’ailleurs les traits d’un iris des sixties. Cela n’est pas, pour moi, un handicap. C’en serait un si elle datait de ces dernières années et que son obtenteur, fier de son travail, venait de l’enregistrer. Mais elle ne joue pas à la jeune et montre sans vergogne ses soixante ans. Je trouve même que son apparence générale est plutôt flatteuse ; au moment de sa mise sur le marché elle devait faire largement jeu égal avec ses contemporaines.

Ce qui est surprenant chez cet iris, c’est sa couleur : un gris brunâtre, à peine ombré de roux de chaque côtés de la barbe, avec des pétales plus clairs, s’assombrissant à la base, et des barbes moutarde, plus jaunes à la pointe. Les iris gris ne sont pas nombreux, et le plus souvent leur teinte est plus un mauve fumé qu’un vrai gris. Les meilleurs que je connaisse sont encore récents puisqu’il s’agit de ‘Obi-Wan Kenobi’ (Mahan, 2003), influencé de vert olive, et surtout ‘Ozone Alert’ (Burseen, 1997), franchement gris et, au demeurant, très proche en coloris du héros du jour.

Hans Sass, comme son frère Jacob, a tout connu dans son travail d’hybrideur. Il a souvent éliminé des semis qui, à l’époque, lui semblaient invendables et, surtout, peu porteur d’améliorations. Mais cette fois il a osé ! ‘Jungle Shadows’ n’a pas du rencontrer un succès commercial faramineux et n’est pas à l’origine d’une nombreuse descendance. Mais l’expression qui le qualifie le mieux est « hors du commun ». Il provient d’un croisement de ‘Black Delight’ (Sass H., 1957) et d’un semis non dénommé ; ce ‘Black Delight’ étant lui-même un enfant de l’incontournable ‘Black Forest’ (Schreiner, 1945) et d’un descendant d’un autre ancien « noir », ‘Ebony Queen’ (Sass, 1947), ce qui constituait un mariage de raison entre les deux plus intéressantes lignées de noirs des années 40.

‘Jungle Shadows’ n’était pas prédestiné à être à l’origine d’une longue lignée. As-t-on vu une variété sans éclat être utilisée à tour de bras par les hybrideurs ? Je lui connais cependant un descendant, ‘Rain Forest’ (Plough, 1966), qui est un autre gris, dans le ton de gris souris, avec du mauve sous les barbes. Comme les précédents, ce gris-là est resté un cas particulier, une sorte de fantaisie que l’obtenteur s’est décidé à garder uniquement pour son originalité.

‘Jungle Shadows’ reste, de tous les gris, celui qui atteint la teinte la plus sombre. On l’aime ou on ne l’aime pas, c’est évident, mais en ce qui me concerne je serais ravi de le voir fleurir dans mon jardin.

1 commentaire:

gerard a dit…

Il est vrai que les iris sont aussi victimes de mauvaises photographies. Je jetais un œil sur le site de l'AIS pour regarder les photos des Dyke's Medals américaines. Quand on voit certaines photos, on se demande comment de tels iris auraient pu obtenir une médaille. Quant aux bleus ! La photo d'Eleanor's Pride (DM 1961) au lieu de présenter un "Self, powder blue" (Twiki) nous montre un iris blanc !
Il y auarait intérêt à constituer une photothèque de qualité, notamment des iris historiques photographiés et tirées dans des conditions parfois médiocres