18.8.12

HISTOIRE DE LA SFIB


Je m’intéresse aux iris depuis 1980 et je suis membre de la SFIB depuis 1981. Un vieux de la vieille (même s’il y a des adhérents encore plus anciens que moi, certains même étant de la première génération) ! J’ai fait partie de son état-major dès 1985 et je puis donc regarder d'une certaine manière l’histoire de cette association qui vient de fêter ses cinquante trois ans.

Ce ne sera pas d’un simple point de vue chronologique, ni pour rendre hommage aux personnes qui se sont impliquées dans l’animation de l’association, mais pour analyser les directions que celle-ci a prises sous l’influence de ces personnes et de celles qui les ont entourées.

Celle qui a eu l’initiative de créer la SFIB, mais qui n’y a jamais tenu de fonction exécutive, c’est Gladys Clarke, une dame d’origine britannique, née et élevée en Chine, qui a pensé que les iridophiles français devaient s’organiser à l’image de ce que les Américains et les Anglais avaient fait auparavant. Il est en effet étonnant qu’en France, pays de l’iris par excellence dans les années 1920/1930, il n’existât aucune organisation rassemblant les amateurs. Gladys Clarke a réparé cette anomalie, et son entreprise a été couronnée de succès puisque six mois après sa fondation la SFIB comptait déjà une centaine de membres. Gladys Clarke a laissé le devant de la scène à un aristocrate russe, le Prince Pierre Wolkonsky, passionné de botanique, créateur du célèbre jardin de Kerdalo, en Bretagne, qui a exercé cette fonction jusqu’en 1961. Dès son origine, la SFIB a été une assemblée élitiste, plus bourgeoise qu’aristocratique néanmoins, mais composée essentiellement de notables et de retraités de la bonne société. Un grand nombre de ses membres vivaient sur la Côte d’Azur, dans une aisance de bon aloi. Le siège social de l’association, d’abord situé à Grasse, est transféré peu après à La Valette du Var, chez son Secrétaire Général Roger Renard, personnalité bien connue du monde des iris. L’association est avant tout une coterie de gens distingués qui se retrouvent avec plaisir dans les voyages et excursions qui constituent son activité principale.

Quand Maurice Boussard, sommité mondiale en matière d’iridacées, prend la succession du Prince Wolkonsky, l’atmosphère générale ne change guère. Et c’est la même chose quand la présidence échoit au Docteur Flon, un médecin de Melun. C’est à peine si le centre de gravité de l’association se déplace et s’installe en région parisienne. De toute façon la présidence du docteur Flon est de courte durée puisqu’il se retire en 1975. Les gens de la côte reprennent les commandes, avec une sorte de triumvirat constitué de Roger Renard et Igor Fédoroff, installés à La Valette, et Odette Perrier à Fayence. Cette dernière prend la succession du docteur Flon et la charge de coordonner le Congrès International de l’Iris qui se tiendra à Orléans La Source du 24 au 29 mai 1978.

Cette manifestation a été le point d’orgue de l’action de la SFIB au cours de ses vingt premières années. Le retentissement en a été mondial et une foule de plus de 6000 visiteurs a parcouru le parc de la Source à cette occasion.

Ce qui précède tend à démontrer qu’une association comme la SFIB est fortement sujette à l’influence de la personnalité qui y exerce les plus importantes responsabilités. Avec Odette Perrier l’association a repris son orientation méridionale et ses activités amicales et mondaines ; mais peu à peu le Docteur Jean Ségui, gynécologue languedocien, obtenteur d’iris appréciés, prend de l’importance au sein de l’association et, forcément, le centre nodal prend la direction de Sète et de Carcassonne où il habite. La présidence de Robert Pocreau, à partir de 1984, ne change pas cette inflexion, bien que cet ancien officier de marine soit lui-même retiré sur la Côte d’Azur. Dans les faits, en compagnie de Jean Ségui, ce sont des personnes habitant le Sud-Ouest qui vont faire marcher la SFIB et lui faire franchir une nouvelle étape de notoriété. Claude-Louis Gayrard, Claudette Dorchain, Anny Brunel font des miracles pour qu’elle se développe. Les activités se diversifient, portées par des gens énergiques et dévoués et par un nombre d’adhérent important (jusqu’à plus de 300), ce qui assure une trésorerie flatteuse. La SFIB est toujours une assemblée de notables, même si, peu à peu elle accueille des adhérents plus modestes. Quand le Président Robert Pocreau s’éloigne, à l’assemblée générale de 1993, les dirigeants et dirigeantes historiques ont déjà commencé à se retirer et une nouvelle génération a fait son apparition dans l’organigramme, tandis que Maurice Boussard, de nouveau plus largement disponible, récupère la présidence. Il assure une sorte de transition entre les anciens et les nouveaux. En même temps un début de désaffection commence à frapper le tissu des adhérents : par exemple, dans les années 80, une trentaine d’entre eux se déplaçait pour participer aux assemblées générales, en 1993 on n’en compte plus guère qu’une douzaine… Un autre phénomène se manifeste : les professionnels de l’iris, qui participaient au travail de l’association depuis sa création s’en éloignent les uns après les autres… C’est une attitude propre à la France qui surprend tous les animateurs des sociétés iridophiles étrangères.

Ces signaux d’alarme n’empêchent pas la SFIB de maintenir son rythme et, en particulier, de proposer à ses adhérents une revue qui est devenue une référence en la matière, avec une mise en page soignée, une impression et des illustrations de qualité et un contenu à la fois récréatif et savant. C’est Jean Ségui qui est à l’origine de cette métamorphose et de ce succès.

C’est fréquent qu’entre deux règnes prolongés intervienne une période d’instabilité. Pour la SFIB, celle-ci commence avec le successeur de Maurice Boussard, en 1997. Un invité-surprise, Charles-Guy Bouquet s’installe dans un fauteuil où il ne réussit pas à s’imposer et qu’il abandonne brusquement en 1999. Pendant un an, Jean Ségui, celui qui fut le rédacteur de la revue, de laquelle il a fait une des plus belles du genre, assure une sorte d’intérim, mais il se dit trop âgé pour continuer et laisse dès le printemps 2000 la présidence à Anne-Marie Chesnais. Une nouvelle ère commence pour la SFIB : celle des « dames de Jouy ».

Anne-Marie Chesnais est une forte personnalité, connue dans sa petite ville de Jouy en Josas, et entourée d’amies qui lui font une petite cour provinciale. À la tête de cette assemblée restreinte mais dévouée, elle va vivre une longue présidence qui sera marquée par un grand nombre d’événements importants pour le petit monde des iris. Dans une petite société comme la SFIB, la personnalité des dirigeants à une importance primordiale. Rien de majeur ne peut se produire sans quelqu’un de volontaire, tenace et charismatique. Madame Chesnais va montrer ces qualités en les mettant au service de la cause qu’elle a choisie. Elle rassemble et convainc les autorités de la vallée de la Bièvre autour d’un projet d’animation où l’iris devient le fil conducteur. Le concours FRANCIRIS va s’installer à Jouy à partir de 2005 et acquérir dès le début une renommée mondiale. La vallée de la Bièvre devient la vallée des iris, avec de nombreuses manifestations organisées par les communes voisines de la rivière. La SFIB n’a jamais été aussi connue de par le monde, mais cela n’empêche pas ses effectifs de s’amenuiser d’année en année et sa gestion de devenir de plus en plus difficile et confidentielle (pas plus d’une dizaine de membres participent aux assemblées générales qui prennent l’apparence de pique-niques entre amis). C’est bien là le problème de cette SFIB focalisée sur un sujet et sur un lieu mais sans ressources pour continuer sérieusement ses autres entreprises.

En dépit d’un court intermède (2007/2009) où elle a laissé le titre présidentiel à Jean-Michel Cagnard, le règne d’A-M Chesnais ne s’achèvera qu’au printemps 2011, après un concours FRANCIRIS calamiteux, et par la volonté d’un groupe de jeunes amateurs d’iris qui veut redynamiser l’association et lui rendre un caractère plus national. En effet, curieusement, alors que les adhérents à la SFIB ne sont plus qu’une centaine, un grand nombre de jeunes iridophiles se manifestent et prennent de l’assurance, grâce notamment aux dialogues que permet le site Internet de l’association. On assiste à un renouvellement considérable : les notables de province (ou de banlieue) cèdent la place à une nébuleuse socialement très différente, très dispersée géographiquement, mais fédérée par Internet. Les anciens ne se reconnaissent plus dans cette SFIB informatisée, mais beaucoup de fans d’iris apprécient, car aux mondanités des fêtes des plantes ils préfèrent les « chats » au sujet des iris et les échanges de rhizomes.

Cependant le nouvel élan que veut donner l’équipe qui succède aux dames de Jouy, sous la houlette de Jérôme Boulon, va-t-il durer et résister au temps, à la dispersion des ses animateurs et à leur disponibilité réduite ?

Illustrations :
Bulletin SFAI n° 1 – 1969, première façon ;
Bulletin SFIB n° 95, deuxième façon ;
Bulletin SFIB n° 117, façon Dr Ségui ;
Bulletin SFIB n° 157bis, façon S. Ruaud

1 commentaire:

JEAN PEYRARD a dit…

Historique intéressant d'une longue période que j'ai suivi de loin , j'ai apprécié l'hommage rendu à Claudette Dorchain, qui avait été profondémént affecté par un conflit à propose de graines, résultat d'une opposition entre "dames" !Je pense que dans cet historique vous pouviez mentionner le role " de registrar" que joue la SFIB;
Bien cordialement

jean peyrard