26.10.12

M. LEMON PAR LUI-MÊME


En septembre 1840, le « Journal de Flore et de Pomone », dont l’équivalent aujourd’hui serait « Jardins de France », la Revue de la SNHF, a publié une assez long article de Jean-Nicolas Lémon, le plus célèbre des hybrideurs du 19e siècle.  Cet article est tout simplement intitulé : « Nouvelles variétés d’iris. » En voici un large extrait.

« Iris germanica. LINN. C’est une des iris les plus communément connues et cultivées. Elle est très rustique et réussit à toutes expositions et dans toutes sortes de terrains quelle que soit leur nature. On peut la placer partout, dans des pierres, dans des fentes de rocher, au bord des eaux et même sur le toit des chaumières. Ses tubercules sont gros, charnus, articulés, ses feuilles distiques et ensiformes, d’un vert glauque, longues de 30 à 35cm , larges de 25mm. De leur centre s’élève en mai une hampe portant plusieurs grandes fleurs qui se succèdent  pendant une quinzaine de jours. Cette iris a déjà donné plusieurs variétés, parmi lesquelles il s’en trouve de fort belles. J’ai fait de nombreux semis de cette espèce, et j’ai également obtenu une grande quantité de variétés fort intéressantes que je vais faire connaître succinctement, car il y en a beaucoup dignes de l’attention des amateurs, et capables de produire un effet très pittoresque, en les plantant convenablement. Elles se conservent toutes en les multipliant comme leur type par la séparation de leur souches tuberculeuses ». L’auteur commence alors à énumérer ses nouvelles variétés qu’il classe en trois séries, en fonction de la hauteur de la plante adulte : moins de 50cm ; de 50 à 70cm ; au-delà de 70cm. Il y a en tout 104 variétés répertoriées !

Dans la première série on trouve quelques noms qui figurent encore dans les collections spécialisées, comme :
·        ‘Florentina’, blanc pur ;
·        ‘Roméo’ (1), fond sépia clair lavé de pourpre, sépales d’un pourpre noir au sommet ;
·         ‘Victorine’, unicolore blanc, sépales veinés de pourpre et de violet.

La seconde série est composée, notamment, de :
·        ‘Edina’, fond bleu cendré, sépales blancs striés à la base, bleu foncés au sommet, bordés de bleu pâle avec une ligne longitudinale bleu clair sur le milieu de chaque sépale ;
·        ‘Fries-Morel’, fond jaune chamoisé, sépales jaunes striés à la base, d’un marron clair velouté au sommet ;
·        ‘Honorabile’, fond jaune d’or, sépales jaunes striés à la base, rouges au sommet et bordés de jaune.

Les grands comprennent, entre autres :
·        ‘Aurea’, unicolore d’un beau jaune ;
·        ‘Buriensis’, unicolore blanc, bords des pétales striés de bleu ;
·        ‘Jacquesania’, fond bronze saumoné, sépales pourpre brun velouté ;
·        ‘Virgile’ (1), fond bleu azuré, sépales blancs à la base, bleu pourpré au sommet, réticulé de brun.

L’article s’achève brusquement après cette énumération.

Ce qui est frappant, c’est que Lémon n’hésite pas à ranger parmi ses obtentions des iris émanant d’autres pépiniéristes, comme de Bure (‘Buriensis’), ou des hybrides naturels comme ‘Florentina’.  Ces emprunts seraient aujourd’hui tout à fait incongrus !

Quoi qu’il en soit, il est remarquable de constater la grande variété des coloris décrits, même si la plupart relèvent de trois catégories majeures : les jaunes marqués de brun ou de pourpre,, ancêtres de nos modernes variegatas, les bleu veinés de blanc ou blanc veinés de bleu qui correspondent à ce qu’on appelle maintenant les plicatas, et les unicolores blancs.  Non moins intéressant est de découvrir que nombre de ces variétés se trouvent toujours dans nos jardins, 170 ans après leur apparition. Ce qui devrait faire taire ceux qui prétendent que les iris dégénèrent.

Illustrations :
·        ‘Edina’
·        ‘Victorine’
·        ‘Jacquesiana’
·        ‘Fries-Morel’.

(1) Ce nom, qui n’a pas été officiellement enregistré, a été repris, plus tard, par un autre obtenteur, ce qui crée évidemment une fâcheuse confusion.

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