29.8.14

COMMENT DIRE ?

Nos chers iris comportent au moins deux niveaux de description : le niveau officiel, celui de la description donnée au moment de l’enregistrement de la variété près de l'AIS et repris dans les check-lists, et le niveau commercial, celui qui se trouve dans la présentation des catalogues. Chacun a sa raison d'être et son utilité. Le niveau officiel tend à donner de la plante une description sincère et rigoureuse, avec un certain nombre de renseignements obligatoires, dont le fameux pedigree. Le niveau commercial est totalement libre. L'obtenteur peut se contenter d'une présentation sobre, proche de la description officielle, mais expurgée des informations trop techniques dont le client lambda n'a rien à faire. Il peut aussi laisser s'exprimer son enthousiasme pour l'iris qu'il met en vente, insistant sur tel ou tel caractère remarquable et susceptible de retenir l'intérêt d'un éventuel acheteur. Il lui arrive parfois de se montrer particulièrement lyrique, voire excessif comme pourrait l'être un vendeur de foire (c'est un peu le cas de certains producteurs américains qui, lors de la mise sur le marché d'une nouvelle variété, se laissent aller à des débordements dithyrambiques proches du ridicule à nos yeux d'européens). Quelques rares fois il peut enfin exprimer des sentiments personnels pas toujours d'une parfaite courtoisie envers quelque confrère !

Ayant fait le constat ci-dessus à maintes occasions, j'ai trouvé savoureux de rapporter les descriptions de quatre variétés. Ce sont celles dont le nom met au premier plan celui de notre pays tout en étant parfaitement représentatives de ce qui vient d'être dit.

Pour faire bonne mesure, et pour montrer que l'on peut situer ce travail de description à d'autres niveaux, j'ai imaginé pour chaque variété un petit quatrain en alexandrins parfaitement classiques, qui pourrait être la présentation qu'on aurait pu lire si les catalogues d'iris avaient existé au XVIe siècle !

ECHO DE FRANCE
(P. Anfosso, R. 1984) (85 cm), HM
Pétales blancs ; sépales jaunes, reflets verts sous les barbes or sombre. Snowlight X Champagne Braise.
En écho avec les travaux de l'hybrideur B. Blyth en Australie, un amoena jaune, moderne,sélectionné pour le rapport du blanc pur des pétales au jaune primevère des sépales. La barbe jaune-orange réveille cette harmonie. Forme moderne semi-horizontale, texture soyeuse. Bonne vigueur et multiplication. 
L'art des iris atteint aussi les antipodes, 
D'où nous revient l'idée d'associer sans efforts 
D'un côté le blanc pur et de l'autre les ors 
Et un peu d'orangé pour sacrifier aux modes. 

DOUCE FRANCE
 (P. Anfosso, R. 1988) (90 cm), HA
Bleu marine profond, veiné plus clair autour des barbes rouge vermillon, pointées de jaune ; ondulé. ((Flamingo Blues x Caro Nome) x Actress) X ((Caro Nome x Flamingo Blues) x Firewater).
 L'accord bleu rouge, celui qui se trouve le plus dans la peinture française. Une fleur d'un bleu outremer intense s'éclaircissant autour d'une barbe vermillon. La forme est large, arquée, ondulée, bien actuelle. 
Voici l'accord parfait, celui que l'on adore, 
Où l'outremer pâlit lorsqu'il atteint le cœur, 
Donnant au vermillon l'acmé de sa valeur, 
Comme chaque matin se réveille l'aurore.

VIVE LA FRANCE 
 (Jean Cayeux, R. 1993) (90 cm), MT
Pétales blancs ; sépales avec large bordure bleu moyen brillant, centre blanc ; barbes rouges. (Condottiere x Delphi) X (Alizes x (Condottiere x Lunar Rainbow)).
Plutôt que de sacrifier au Bicentenaire, nous avons préféré attendre deux ans de plus pour mieux tester cet excellent semis issu de nos études tricolores. Avec des pétales réellement blancs, des sépales bleu aniline vif à cœur blanc sur lequel se détache une fière barbe rouge orange, nous sommes très, très proches de nos trois couleurs d'où le nom. Ajoutez à cela que les fleurs sont grandes, élégantes, solides, impeccablement présentées sur de belles hampes ramifiées, et vous comprendrez notre joie. 
Ami, que voyez-vous dans ce brillant arroi ? 
Paris, en rouge et bleu, qui, fièrement, s'avance 
En marchant au combat pour que vive la France, 
Avec l'étendard blanc de notre noble roi.

TOUR DE FRANCE
(Keith Keppel, R. 2003) (89 cm), MO
Pétales blancs , centre infus de jaune de chrome; bras de styles blanc et jaune de chrome ; sépales jaune d'or profond, épaules marquées de jaune de chrome profond, texture veloutée ; barbes allant d'un jaune de chrome profond à un jaune cadmium, devenant orangé dans la gorge ; léger parfum doux. (Magharee x Overjoyed) X (Electrique x Romantic Evening).
Une version sombre du maillot jaune de Lance Armstrong. Un amoena surprenant avec des pétales blancs infus de jaune de chrome au centre, des sépales veloutés d'un jaune d'or sombre s'étendant jusqu'à la bordure. Barbes jaune orangé profond. Un champion. 
On peut imaginer un petit tour de France : 
Les falaises de Caux, le ciel blanc de l'Artois, 
Les blés mûrs de la Brie, le vin jaune d'Arbois, 
A moins que ce ne soit le soleil de Provence. 

On pourrait trouver bien d'autres manière de décrire un iris. Cela dépend de la sensibilité ou de l'humeur de celui qui décrit. Mais la description n'est qu'une présentation de la plante. Le mieux c'est encore de l'avoir elle-même sous les yeux et de faire son propre jugement.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Si jamais un de mes iris t'inspire un jour, ne te retiens surtout pas, tes quatrains sont charmants!

Loïc