10.7.20

FINALITÉS DIFFÉRENTES

On a coutume de dire qu'il existe deux sortes de compétitions dans le monde des iris : les concours à la mode européenne et la course aux honneurs telle qu'elle est pratiquée aux Etats-Unis. A bien y regarder je crois qu'on peut en comptabiliser quatre. Trois pour le modèle dit européen, et, en parallèle, l'incomparable course aux honneurs américaine. Pourquoi ces différences ? C'est ce que nous allons voir maintenant.

La course aux honneurs. 

Commençons par cette compétition que l'American Iris Society a organisée dès les années 1920, en fait dès sa création-même. Les années ont passé, plusieurs modifications dans le règlement sont intervenues au cours du siècle passé, mais le principe demeure. Elle est basée sur une épreuve par élimination, un peu sur le même principe que la coupe de France de football.

Toutes les variétés nouvelles enregistrées « introduites », c'est à dire mises sur le marché américain soit par inscription au catalogue d'une pépinière, soit par déclaration de mise en vente par une annonce dans le bulletin trimestriel de l'AIS, entrent automatiquement dans la compétition. Dès ce moment les nombreux juges agréés par l'AIS, lorsqu'ils auront l'occasion de voir ces variétés dans les jardins qu'ils visiteront leur attribueront une note d'appréciation. Toutes ces notes seront compilées par les membres du bureau de l'AIS chargés de cette mission et les récompenses attribuées en fonction des règles de la compétition. Avec quatre niveaux atteints par éliminations successives : HM (Honorable Mention), AM (Award of Merit), Médailles Catégorielles (une par catégorie d'iris) et DM (Dykes Medal), récompense suprême décernée chaque année à une seule variété non seulement mise sur le marché américain mais encore obtenue sur le sol américain (ce qui exclut tous les iris importés).

Le but de cette compétition est à la fois horticole (les qualités physiques de la plante sont primordiales), commercial (une variété primée jouit d'un surcroît de notoriété synonyme de meilleures ventes) et honorifique. C'est aussi un moteur certain pour l'amélioration des iris hybrides. Les récompenses sont scrutées par tous les amateurs d'iris de par le monde et considérées par les pépiniéristes comme signes de qualité et vantées comme telles auprès de leur clientèle.

En matière horticole la course aux honneurs peut se glorifier d'avoir été (et d'être toujours) un moteur pour l'amélioration des iris. C'était officiellement son but principal, dès sa création, et elle a effectivement joué ce rôle. Il n'y a pas de comparaison possible, au plan du développement de la plante, entre un iris des années 1920/30 et un iris contemporain. Solidité de la tige, nombre et disposition des boutons floraux, consistance et résistance des fleurs au vieillissement sont autant de thèmes qui illustrent les perfectionnements apportés au fil du temps.

En Grande-Bretagne, pays qui finance les Médailles de Dykes, il existe une compétition un peu semblable à celle des Etats-Unis, basée sur l'exposition dans quelques jardins sélectionnés d'iris de toutes catégories, qui aboutit à l'attribution par les juges anglais, d'une BDM (British Dykes Medal). La finalité de la compétition est la même que pour les USA, mais le manque actuel de candidats fait que depuis quelques années il arrive souvent que la médaille ne soit pas décernée...

Dans la partie de l'hémisphère sud de culture anglo-saxonne (Australie, Nouvelle-Zélande) les compétitions pour les Médailles de Dykes qui leur sont propres se déroulent à la manière britannique. Mais il n'est pas certain qu'elles reflètent l'abondance et la qualité de la création d'iris dans ces pays.

Les concours « à l'européenne ». 

Pendant de nombreuses années il n'y eut qu'un seul concours en Europe : le « Concorso » de Florence et son prestigieux « Fiorino d'Oro ». Son principe est le suivant : les variétés que leurs obtenteurs entendent faire concourir sont mises en culture pendant trois ans et jugées anonymement lors de la floraison de la troisième année. Le jugement est effectué par un panel de juges internationaux choisis par les organisateurs en fonction de leur compétence en matière d'iris. Le prix est attribué après un examen sévère des qualités (ou des défauts) de chaque plante, en gardant à l'esprit qu'il doit être décerné à un cultivar qui, au moment de la compétition, fait montre à la fois de qualités horticulturelles et esthétiques remarquables.

Ces principes ont fait leur preuve et les récipiendaires du « Fiorino d'Oro » ont toujours été d'excellentes plantes de jardin ; qui plus est, nombre d'entre elles obtenues aux U.S.A. ont également été couronnées par la Dykes Medal américaine.

Avec l'extension de l'intérêt pour les iris en Europe, d'autres concours ont vu le jour. Le plus apprécié est le concours FRANCIRIS©, organisé par la SFIB depuis l'année 2000, avec des fortunes diverses. Les deux premiers concours se sont déroulés en Bretagne, puis, à partir de 2005 les suivants eu lieu en région parisienne. Il fonctionne exactement sur le modèle de celui de Florence, à ceci près que la période de culture n'est aujourd'hui que de deux ans.

Un système un peu différent régit les autres concours européens. Le jugement des variétés en compétition n'y est pas le fait de juges internationaux, mais ce sont des jurys populaires qui expriment leur avis. La conséquence est un choix porté davantage vers la beauté et le coloris de la fleur plutôt que vers ses qualités horticoles. L'avantage est que les frais d'organisation du concours sont nettement plus réduits et mieux à la portée de sociétés organisatrices aux ressources modestes. Les concours de Munich, en Allemagne, Moscou et Krasnodar en Russie sont les plus appréciés.

En 2020, à l'occasion de son centenaire, l'AIS avait mis en chantier un concours à l'européenne, avec jury international, qui devait se dérouler dans le cadre du célèbre Presby National Garden situé à Montclair, dans le New Jersey, à environ soixante kilomètres à l'ouest de New York. Les événements sanitaires actuels ont stoppé cette initiative qui aurait eu l'intérêt de permettre aux Américains de juger d'une forme de compétition inconnue chez eux. Peut-être cet événement se tiendra-t-il l'année prochaine ?

Ce type de compétition est très adapté à la structure européenne du monde des iris. Il est en effet inconcevable, compte tenu des diversités géographiques, politiques, culturelles et linguistiques, de mettre en place une compétition où ce sont des juges agréés (par qui?) qui notent les variétés sur une très longue période. Quoiqu'il en soit, les amateurs d'iris ont acquis la conviction que les variétés mises à l'honneur dans ces concours méritent à tous points de vue leur récompense.

Les expositions en lien avec les « Conventions » de l'AIS.

Il ne faut pas oublier ce qui se passe chaque année à l'occasion de la « Convention », c'est à dire l'assemblée générale, de l'AIS. Chaque fois dans un Etat différent, cette assemblée générale donne lieu à un vaste rassemblement de grands amateurs d'iris. Les participants rendent visite à un certain nombre de jardins où sont rassemblés des iris envoyés par les hybrideurs de tout le pays. Ils sont appelés à voter pour désigner ce qui leur semble être les meilleures de ces variétés et de sacrer quatre d'entre elles : une pour un iris obtenu sur le territoire de la Région (1) organisatrice de la Convention, la « President's Cup » ; une pour un iris provenant d'une Région autre, la « Franklin-Cook Cup » ; une spécialement pour un iris médian, c'est à dire autre que TB, quelle que soit sa Région d'origine, la « Ben Hager Cup », et une quatrième pour distinguer un semis, non encore enregistré mais présenté à la Convention, la « Lloyd Zurbrigg-Clarence Mahan Seedling Cup ».

Ces coupes font partie de ces récompenses dont les Américains sont particulièrement friands (2). Leur caractère national leur confère une grande notoriété, gage de satisfaction pour les obtenteurs qui sont ainsi distingués, mais aussi constituant un petit plus, commercialement parlant.

Tel qu'il est, le système des récompenses tant américaines qu'européennes, malgré ses imperfections, fournit à tous ceux qui s'intéressent aux iris des références de qualité et aux hybrideurs des sujets d'émulation propices au perfectionnement des plantes et à l'apparition de nouveaux coloris et de nouveaux modèles.

Illustrations : 

'Chivalry' (J. Wills, 1943) – première Médaille de Dykes des temps modernes (1947). 


'Rehobeth' (F. deForest, 1953) – premier Fiorino d'Oro (1957). 


'Zantha' (O. Fay, 1947) – première Franklin-Cook Cup (1947). 


'Lestnitsa V Nebo' (S. Loktev, 2003) - vainqueur du Concours de Moscou de 2006. 


 (1) Pour l'AIS, une Région est un ensemble d'Etats géographiquement voisins qui constitue la base fédérale de l'association. Il existe 24 Régions qui regroupent les 50 Etats de l'Union et les 18 Provinces canadiennes. Quelques Etats forment une Région à eux seuls ; la Californie est scindée en deux Régions.

(2) Les très nombreux clubs locaux d'amateurs d'iris organisent le plus souvent une ou plusieurs compétitions locales très prisées, généralement jugées sur des plantes coupées.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Dear Sylvain,
It seems that you are mistaken concerning the Dykes Medal trials in Great Britain. It is a bit more complicated than what you wrote. I invite you to consult the following link and maybe give a correct version of what is going on there:

https://www.britishirissociety.org.uk/trials/

As you will see, these competitions are certainly more thorough than Firenze or the American Dykes!

Cheers,

AK

Sylvain Ruaud a dit…

Thank you !

Acorrection will be published on next week.