30.10.21

EN PASSANT PAR LA LORRAINE

Dans notre pays on assimile souvent la culture des iris avec la partie sud. En fait l'origine de cette culture s'est située en Région Parisienne avant de gagner le Centre ou le Sud. Et de nos jours elle s'est étendue à l'ensemble des régions. L'Est compris. D'ailleurs, plus à l'est encore, il y a de formidables pépinières et jardins d'iris. Le sillon rhénan, notamment, se distingue avec, du sud au nord, le superbe Merian Park de Brülingen dans la banlieue de Bâle, qui possède l'une des plus belles collections d'iris anciens ; le jardin de Fritz Lehmann à Brennet, un peu au nord de Bâle, est une des plus belles collections d'Allemagne ; quant à la pépinière de la comtesse von Stein-Zeppelin, à Laufen, encore un peu plus au nord, c'est la plus célèbre d'Allemagne, et peut-être la plus importante. 

 Du côté français il faut venir jusqu'en Lorraine pour trouver une réelle activité iridistique. En Alsace, près de Strasbourg, cependant, Nathalie Kacza a ouvert une pépinière spécialisée il y a peu de temps qui s'appelle « L'Iriseraie », et qui est située à Kuttolsheim, petit village à l'ouest de la grande métropole. Mais c'est en Lorraine que les choses ont pris une tournure plus importante. 

 Cela a commencé par l'apparition de Richard Sérafinovski, un amateur très entreprenant qui a transformé son jardin en mini-pépinière. Mais cette aventure n'a pas duré : emporté par un cancer, son initiateur s'est éteint quelques années plus tard... 

 C'est alors que le nom d'Antoine Bettinelli est apparu. Ce professeur est un amateur éclairé qui se passionne pour les iris autant que pour les hémérocalles et qui hésite entre ces deux passions. Il n'a enregistré jusqu'à présent qu'une seule variété de grand iris, 'Chaux Neuve', un joli variegata descendant de 'Edith Wolford'. Plusieurs semis issus de ce 'Chaux Neuve' ont été obtenu mais leur hybrideur ne les a sans doute pas trouvé assez réussis pour leur donner une vie officielle. 

 A Nancy, Jean-Luc Rémy pratique l'hybridation depuis de nombreuses années. Il envoie régulièrement certaines de ses obtentions au concours FRANCIRIS. Ce sont des fleurs qui ont belle allure sur les photos et que le public remarque. Mais dans ces compétitions la concurrence est sévère puisque les meilleurs hybrideurs mondiaux y envoient leurs plus belles nouveautés. Il faut donc une part de chance pour parvenir à s'y distinguer ; celle-ci n'a pas encore souri à Jean-Luc Rémy mais il a raison de persévérer. A noter cependant que son semis 157-G s'est classé dans le top 10 du concours de 2017. Sans doute pourrait-il enregistrer certains de ses semis. Cela contribuerait à les faire connaître pour peu qu'un pépiniériste ayant pignon sur rue ait la curiosité de s'y intéresser. Mais il ne l'a pas encore fait... 

 La chance dont il vient d'être question a permis que Martin Balland remporte le concours FRANCIRIS de 2017. La chance, c'est un concours de circonstances favorable qui fait qu'une belle plante connaît au bon moment une croissance parfaite, en bonne santé, et se trouve en pleine fleur juste au moment du concours et se présente dans toute sa splendeur au milieu d'autres qui réunissent en même temps tous les critères permettant de triompher ! C'est ce qui explique qu'une variété, par ailleurs universellement admirée, se trouve surclassée par d'autres aux mérites comparables. Au moment de sa consécration Martin Balland n'était pas un inconnu. Depuis quelques années il s'était fait connaître par de nombreuses réalisations qui apportent la preuve de son talent d'hybrideur et de la rigueur de ses sélections. Dans son petit jardin de Crève-cœur, à St Dié des Vosges, il cultive ses obtentions dont il enregistre les meilleures depuis 2012. Il s'intéresse particulièrement aux iris sombres, « rouges » ou violet influencé de rouge, et ceci depuis 2013 et 'Madame Pilou', une variété dans les tons de pourpre avec des barbes orange agrémentées d'éperons. En 2014 on note 'Antonio Farao's Piano', un violet très foncé, puis en 2016 son frère de semis 'Black Inside' ainsi qu'un rouge acajou de toute beauté 'La Grande Mademoiselle' qui porte ce nom puisqu'il est le vainqueur d'un appel d'offre destiné à constituer l'étendard de la collection de Champigny sur Veude, dont la cousine de Louis XIV était la châtelaine. En 2018 sont apparus 'Red Moon', enfant de 'Antonio Farao's Piano' et 'Sylvain Ruaud', frère de semis de 'La Grande Mademoiselle' et presque son jumeau. 2019 est l'année du superbe 'A Bout de Souffle', violet d'une teinte qui sort de l'ordinaire, petit fils de 'Hello Darkness'. Ces derniers temps les recherches de Martin Balland ont pris une nouvelle orientation portée vers les plicatas et variegata-plicata, avec semble-t-il beaucoup de réussite. Mais la grande fierté de Martin Balland c'est 'My Red Drums' (2016) puisque c'est le vainqueur de FRANCIRIS 2019. Ce produit de 'Rio Rojo' X 'Palace Symphony' est en effet un bel exemple d'application réussie du principe d' inbreeding » qui a déjoué tous les pronostics des amateurs présents à Vincennes ce printemps-là. Souhaitons à Martin Balland d'autres succès de ce genre. 

 Avec ces sérieux hybrideurs la Lorraine s'affirme donc comme étant devenue une belle vitrine des progrès de l'iridophilie dans notre pays. 

 Illustrations : 


 'Chaux Neuve' 


semis Rémy 157-G 


'Antonio Farao's Piano' 


'My Red Drums'

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