LE SYNDROME DE LA TOUFFE AGÉE
Sous ce titre un peu pittoresque se cache un phénomène dont je constate cette année les effets. Au cours de l’été dernier j’ai déplacé intégralement ma collection d’iris. Il y avait des années que je voulais faire cette transplantation, mais je ne disposais pas de la place nécessaire. Mes iris en étaient arrivés à se mêler les uns aux autres, à se marcher dessus puisque les nouvelles pousses s’installaient par-dessus de plus anciennes, bref un méli-mélo déplaisant et surtout beaucoup moins florifère. Une opportunité s’étant présentée, j’ai pu enfin récupérer les rhizomes intéressants et les transférer dans un espace nouvellement dégagé, bien cultivé et convenablement traité et engraissé. L’opération n’a pas été simple cependant et j’imagine quel peut être le travail quand un grand obtenteur américain décide de se déplacer d’un coin à l’autre du continent, comme l’a fait Paul Black pour échapper aux maladies qui infectaient sa pépinière dans le Nebraska et se réinstaller dans l’Oregon. En ce qui me concerne je n’avais qu’environ 300 variétés à identifier et déplacer, ce qui n’est rien à côté de ce que Black a du empoter puis dépoter !
A l’automne j’étais satisfait : ma plantation avait bonne allure, les rhizomes étaient suffisamment écartés, dans des bordures bien nettes, dépourvues de toutes mauvaises herbes. Vint l’hiver puis les premières pousses du printemps. Tous mes iris – à l’exception d’un – avaient correctement repris, les pousses nouvelles étaient fortes et saines oui, mais au lieu des trois bouquets de feuilles annonciateurs d’une floraison, la plupart des touffes ne se présentaient qu’avec un seul bouquet ! Je me suis aussitôt dit que j’avais certainement fait quelque chose qu’il ne fallait pas faire. Avais-je mis trop, ou pas assez, d’éléments nutritifs ? Avais-je réalisé la transplantation trop tard dans la saison ? Je me suis un peu consolé en constatant que des rhizomes que j’avais donnés à un jardinier de métier, replantés par lui au même moment que moi, dans un terrain très différent mais aussi sérieusement préparé, présentaient les mêmes symptômes que les miens : un beau bouquet de feuilles, mais un seul !
Sur ce je reçois le bulletin de l’AIS d’avril 2005. Page 14 je lis la réponse de Terry Aitken à un amateur qui lui demandait la règle à suivre en matière de division des touffes. Et voici ce qu’il écrit : « Quand vous effectuez la division de touffes établies (deux ans ou plus), il y a de bonnes chances pour que les rhizomes prélevés ne fleurissent pas ma première année après la transplantation. (Je ne sais pas pourquoi.) Ils seront beaux la deuxième année. … La plupart des producteurs transplantent leurs grands iris chaque année : de la sorte, leurs clients auront des plantes prêtes à fleurir dès la première année. (Encore une fois, je ne sais pas pourquoi c’est comme ça.) Mais la conséquence, c’est que les iris (de même que beaucoup d’autres plantes) ont tendance à rester courts et avec un faible nombre de boutons la première année. »
Ouf ! Je respire ! Je n’ai pas commis d’erreur et je peux m’attendre à une superbe floraison l’année prochaine. Il reste que je vieillis, et que perdre une année de floraison, à mon âge, cela compte ! Mais il faut rester humble devant les exigences de la nature et admettre que nous ne maîtrisons pas tout lorsque l’on travaille avec elle.
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