1.9.05

David F. HALL

C’était une belle journée d’été, mais il avait 93 ans et était un peu sourd. Quand il a traversé le passage à niveau, tout près de chez lui, à Wilmette, dans la banlieue nord de Chicago, il n’a pas entendu le train qui arrivait. C’est ainsi qu’est mort David Hall, l’un des plus grands obtenteurs d’iris de tous les temps.

Il était né en 1875 à Blenheim, dans l’Ontario, au Canada. Il n’avait que cinq ans quand son père a été tué dans un accident provoqué par les chevaux emballés du fourgon qu’il menait. Curieuse coïncidence que de voir le père puis le fils tués dans des accidents de la circulation, à plus de 80 ans d’intervalle ! Quand sa mère s’est remariée, il a été pris en charge par ses grands-parents maternels qui l’ont élevé jusqu’à ses quinze ans. Son grand-père a eu sur lui une influence prépondérante et il semble que ce soit de lui qu’il tenait son caractère rustique mais carré, aux convictions bien ancrées, tempéré par un humour solide et ravageur.

A 21 ans, David Hall est entré à la compagnie de téléphone ATT, dans laquelle il a fait toute sa carrière, notamment en charge de ce qu’on appellerait de nos jours le service après vente, jusqu’à la retraite, en 1940. La passion pour les iris remonte chez lui au début des années 20 et il y a consacré, dès lors, une bonne partie de ses loisirs. Mais ce n’est qu’après sa vie professionnelle qu’il s’y soit entièrement investi.

Il s’est intéressé en priorité aux iris roses. Mais ses premiers semis furent particulièrement décevants. A l’époque il pratiquait aussi l’élevage des chevaux et du bétail dans une ferme du côté de Calgary, au Canada. Il se rendait compte qu’en cette matière les résultats tangibles n’apparaissaient guère avant la troisième génération. C’est pourquoi il en a déduit que les lois génétiques applicables aux animaux devaient valoir aussi pour les plantes. Il a donc repris son travail sur les iris à zéro et ses premiers résultats appréciables sont apparus en 1927. Il a poursuivi ses travaux d’amélioration de générations en générations et on peut sans se tromper lui attribuer le titre de père de l’endogamie. En 1942, après 17 ans de persévérance et d’acharnement, sont apparus les premiers iris valables en rose à barbe orange. Ce furent le bien nommé OVERTURE, qui est aussi le plus clair, DREAM GIRL, le plus vif de ton, mais le moins costaud, et FANTASY, plus nettement teinté de mauve. A ce nouveau coloris d’iris, Dave Hall donna le nom général de « Flamingo Pink ». De FANTASY descend CHERIE (48), qui fut le premier rose à obtenir la Médaille de Dykes, en 1951. Jusqu’à la fin Dave Hall introduisit de nouveaux roses : parmi les plus remarquables figurent VANITY FAIR (50), BALLERINA (50), HAPPY BIRTHDAY (52) et MAY HALL (52), puis LYNN HALL (56) et FASHION FLING (65), l’un des tout derniers.

Au gré des croisements, cette lignée a donné naissance à des variétés d’autre coloris qui ont été à leur tour des étapes décisives de l’hybridation :
RADIATION, dans les tons de violet, à l’origine de ENCHANTED VIOLET (Hamblen 57), rose violacé ;
FROST AND FLAME (56), célèbre blanc à barbes rouges ;
LIMELIGHT (52), jaune teinté chartreuse, premier d’une longue lignée de jaunes ;
PALOMINO (51), aux pétales roses sur des sépales blancs bordés de rose, avec barbe orange, très utilisé par la suite ;
WINE AND ROSES (63) bitone rose sur pourpre.
Les roses de Hall ont très vite acquis une renommée mondiale, grâce, en particulier, aux photos en couleur reproduites dans le catalogue Cooley.

Cependant ce n’est pas seulement dans les iris roses que David Hall s’est illustré. C’est ainsi qu’avec GOLDEN GARLAND (56), il a été le premier à présenter un iris aux pétales or, au-dessus de sépales blancs liserés d’or, un modèle qui a, depuis, fait florès et qui est celui de JOYCE TERRY (Muhlestein 74), universellement connu, et de DEBBY RAIRDON (Kuntz 65), premier du genre à décrocher la D.M., en 1971. Notons encore l’apparition de MELODY LANE (49), premier iris abricot digne de recevoir un A.M. Dave Hall n’a pas négligé non plus le modèle plicata, à commencer par FIRECRACKER (43), marqué d’acajou, jusqu’à DOT AND DASH (59), richement violacé.

Enfin il faut rendre hommage à David F. Hall pour avoir introduit dans nos fleurs favorites cette dentelle qui frise si joliment les bords des pétales d’un grand nombre des variétés d’aujourd’hui. Le précurseur s’appelle CHANTILLY, et il est apparu en 1940 ! C’était tout au début de la seconde vie de son obtenteur, celle qu’il a vouée aux iris et aux hémérocalles, et qu’il devait mener jusqu’à son dernier jour, sous les roues d’une locomotive aveugle.

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