3.3.06

UNE AUTRE FAÇON D’OBTENIR DU ROUGE

Décidément la recherche de l’iris rouge devient de plus en plus d’actualité ! Après Richard Ernst et les milliers de dollars investis dans une tentative de manipulation génétique, après Don Spoon et ses avancées pragmatiques par saturation de l’orange, voici Neil Mogensen et son approche par la biologie moléculaire.

Dans une communication sous le titre de « Another Approach to Red Irises », publiée dans le bulletin de l’AIS n° 340, de janvier 2006, Neil Mogensen, de Arden, en Caroline de Nord, démontre qu’il peut exister une troisième voie pour obtenir du rouge. Il explique que la couleur rouge pure, qui est produite par la pélargonidine (pigment présent dans les géraniums) fait partie de la même série que la delphinidine (pigment qui colore en bleu les delphiniums …et les iris). Ces deux pigments, ainsi que beaucoup d’autres, sont des éléments de la grande famille des pigments anthocyaniques, hydrosolubles, et présents dans le liquide intercellulaire des fleurs. Ils ne se différencient que par le nombre et la position de radicaux OH attachés à l’un des anneaux de base des anthocyanines. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre, parce que je n’ai aucune notion de chimie, et que j’essaie seulement de transcrire ce que l’auteur du texte a dit. Toujours est-il que, d’après les schémas illustrant l’article, la delphinidine a trois radicaux OH, et la pélargonidine seulement un. D’où l’idée, pour obtenir de la pélargonidine au lieu de la delphinidine, de réussir à retirer deux des radicaux OH de cette dernière. On sait cela depuis les travaux de L. F. Randolph, dans les années 50 et 60. Mais le problème n’est pas de savoir ce qu’il faut faire, mais de trouver comment le faire !

Mogensen, très savamment, expose aussi que l’on sait, désormais, où se situe sur les chromosomes de l’iris, l’enzyme qui détermine le nombre des radicaux OH et l’emplacement où ils s’attachent. Il envisage donc la manipulation qui pourrait aboutir à transformer la delphinidine et pélargonidine. Parfait ! Mais rien n’est simple ! Parce qu’aux pigments de base, s’ajoutent des co-pigments et des variations du taux d’acidité du liquide intercellulaire qui rendent l’opération infiniment complexe et très aléatoire dans ses résultats. D’autant plus que, paraît-il, le processus de transformation pourrait être bloqué par une réaction de la plante qui, constatant une anomalie dans les cellules, rétablirait automatiquement la normalité !

Autant dire que la transformation décrite n’est pas pour demain. Mais on peut toujours en rêver. D’ailleurs Neil Mogensen fait justement remarquer qu’il y a cinquante ans on n’imaginait pas que l’on pourrait un jour manipuler les gènes au point où on le fait maintenant.

Après la stratégie adoptée par Richard Ernst, et son idée de transplantation de gènes de lis dans les chromosomes de l’iris pour tenter de lui donner la couleur éclatante d’un poivron, après l’initiative de Donald Spoon de saturer le lycopène des iris roses ou oranges et d’y ajouter une pointe de violet pour donner l’illusion du rouge pompier, vient la troisième approche, celle de la production d’une grande quantité de pélargonidine pour atteindre le rouge du géranium zonale.

L’iris rouge risque donc de ne pas provenir d’une seule source ; mais, au train où vont les choses, il est à peu près sûr qu’il n’est plus loin d’apparaître. Avec toutes les questions que son apparition vont poser : Quel sera le prix de ces plantes transgéniques ? Quelles seront les contraintes imposées aux acheteurs ? Quels seront les risques de dissémination de la mutation génétique pour les variétés de l’avenir ? Celles-là et bien d’autres feront des iris rouges des phénomènes à la fois intéressants et inquiétants.

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