21.7.08







LA VÉRITÉ SUR I.aphylla

Parmi les espèces d’iris qui interviennent dans les hybrides modernes, figure I. aphylla, un petit iris de la série Elatae, qui ne mesure guère que 30 cm, mais qui a eu une importance considérable.

On ne mesure pas forcément ce que cette espèce a apporté aux iris qui font la gloire de nos jardins. Après les « grands » tétraploïdes qui s’appellent I. cypriana, I. illyrica ou I. trojana et les fameux ‘Amas’ et ‘Ricardi’, au même titre que I. reichenbachii ou I. imbricata dont je parlerai sans doute un jour, I. aphylla est un élément primordial de la joyeuse salade que constituent les iris hybrides, petits et grands.

I.aphylla pousse naturellement en Europe Centrale, de l’Allemagne jusqu’au Caucase. Les fleurs, relativement grosses – mais c’est un iris tétraploïde, ceci explique cela – d’un joli violet foncé avec des barbes blanches ou blanc bleuté, s’élèvent à peine au dessus du feuillage, très acéré. Compte tenu de ses origines géographiques, c’est une plante rustique et supportant l’humidité hivernale. Du coup, elle ne pose guère de problèmes de culture et les mateurs d’iris botaniques lui disent pour cela merci.

Mais ils ne sont pas les seuls ! Ceux qui préfèrent les iris horticoles lui doivent aussi beaucoup de reconnaissance. En effet cette espèce a apporté des qualités devenues indispensables :
Elle a le pouvoir d’intensifier les couleurs des variétés qui portent ses gènes ; les noirs sont plus noirs, les roses plus vifs, les jaunes plus brillants, les bruns plus rutilants ;
Elle provoque un branchement puissant et partant bas sur la tige, ce qui permet de multiplier les fleurs sur une même hampe, et, par là, d’allonger la durée de floraison ;
Dans le même domaine, étant très florifère, elle participe à la multiplication des boutons, ce qui va dans le même sens que la caractéristique précédente ;
Elle est naturellement remontante et, à ce titre, améliore cette caractéristique appréciée par beaucoup d’amateurs ;
Elle contribue a donner des plantes assez trapues, donc moins sensibles à la verse dans les jours de gros temps ;
Sa bonne résistance au gel est un gage de robustesse des variétés qui en sont issues.

Mais ce dernier trait s’accompagne de la disparition des feuilles en hiver. C’est la raison pour laquelle beaucoup de variétés modernes ne présentent plus, dès l’entrée en dormance, que des moignons de plante, de quelques centimètres seulement, denses et drus, mais qui ne reprendront leur végétation qu’au retour de jours plus longs. A partir de ce moment, c’est à dire en général au début de mars, les variétés à base d’aphylla vont croître à toute vitesse puisqu’en deux mois elles vont grandir d’environ 80 cm ( du moins pour les grands iris).

Les variétés – grandes, moyennes ou petites – qui comportent les gènes d’Iris aphylla sont devenues largement majoritaires, au gré des croisements en tous sens réalisés par les hybrideurs.

Il semble que ce soit Paul Cook qui se soit aperçu le premier des capacités d’I. aphylla. Ce grand hybrideur a en effet exploré en profondeur la constitution génétique des espèces entrant dans la « fabrication » des hybrides. Il a expérimenté de nombreuses associations d’espèces pour tirer de ces combinaisons tout le parti possible, et dans ce sens, son ‘Blue Boy’, hybride d’aphylla, se trouve derrière ses iris sombres comme ‘Sable’ (1938) . Un cheminement semblable a été effectué par les Schreiner qui ont obtenu par I. aphylla l’ancêtre ‘Harmony’ (1939) qui se trouve à l’origine de ‘Black Forest’, lequel, après un long chemin passant par ‘Storm Warning’ (1952), ‘Licorice Stick’ (1961), ‘Tuxedo’ (65) et ‘Midnight Dancer’ (91) a abouti au noir profond de ‘Hello Darkness’ (92 – DM 99). La même progression pourrait être recherchée à l’égard d’autres couleurs, elles aussi renforcées par l’apport des gènes de I. aphylla.

Alors, tous les progrès que cette espèce a apportée au monde des iris valent bien l’inconvénient d’une absence de feuilles au cours de la période des frimas, pendant laquelle, au demeurant, l’amateur d’iris fréquente assez peu son jardin.

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