30.3.12

UNE ÉTUDE EN BLANC


Pour les iris, le blanc n’est pas une couleur, mais plutôt, si l’on peut dire, une non-couleur. On atteint le blanc quand tous les pigments sont inhibés.
A l’origine c’était presque une anomalie : une forme récessive de Iris pallida voire même de Iris variegata, donc diploïde. Les véritables blancs, plus grands et plus solides, ne sont apparus qu’après l’introduction en Europe des iris tétraploïdes venus du Moyen-Orient. Nos pauvres petits diploïdes ont vite abandonné le terrain !

C’est l’Anglais Sir Michaël Foster qui introduisit les premiers grands iris blancs. Il y a une controverse à ce sujet : Foster lui-même a écrit que ses premiers iris tétraploïdes blancs étaient issus de I. kashmiriana, ce qui est aussi l’avis de l’Américain Robert Sturtevant, mais d’autres, dont W.R. Dykes en personne, affirment que Foster s’est trompé et que l’espèce originelle est en fait I. cypriana. A vrai dire, cela importe peu pour le simple amateur d’iris. Nées de I. kashmiriana ou de I. cypriana, deux variétés ont laissé leur nom dans l’histoire des iris blancs : ‘Miss Wilmott’ (1910) et ‘Kashmir White’ (1912). Le premier est à l’origine de ‘Gudrun’ (Dykes, 1934) qui a obtenu la Médaille de Dykes anglaise en 1931. Cependant c’est essentiellement le second qui s’est acquis la qualification de père fondateur des iris blancs.

Pour « The World of Irises » K. Keppel a établi une « flow chart » (arbre généalogique simplifié) qui note les variétés les plus marquantes issues de ‘Kashmir White’. Pour faire encore plus simple, j’ai résumé ci-dessous le cas des variétés dont on parle encore aujourd’hui et j’ai poursuivi sur la flow chart la liste avec les variétés apparues après la travail de K. Keppel (1978). Au total l’étude s’étale sur quinze générations, et 90 ans !


Première génération
· ‘Argentina’ (W. Mohr, 1923) (Caterina X I. mesopotamica). C’est la base de tous les blancs qui descendent de ‘Kasmir White’.
Deuxième génération
· ‘Wambliska’ (J. Sass, 1930), superbe iris blanc, mais plus important dans l’histoire des iris jaunes que dans celle des blancs.
· ‘Purissima’ (Mohr-Mitchell, 1927). Le premier blanc sans traces jaunes aux épaules ; présent maintenant dans presque tous les blancs.
Troisième génération
· ‘Snow Flurry’ (Rees, 1939) (Purissima X Thaïs). Les qualités des diploïdes associées à celles des tétraploïdes ont donné cet incontournable succès, qui est l’autre voie de passage pour les blancs, avec l’adjonction des ondulations.
Quatrième génération
· ‘Spanish Peaks’ (Loomis, 1946). Un cocktail où l’on a mélangé le blanc de ‘Purissima’ et celui de ‘Gudrun’, ainsi que le bleu de ‘Dominion’ ; le résultat est un blanc absolu, y compris la barbe.
· ‘Celestial Snow’ (Reckamp, 1957). La première génération des enfants de ‘Snow Flurry’.
Cinquième génération
· ‘Swan Ballet’ (Muhlestein, 1953). ‘Spanish Peaks’, ‘Santa Barbara’, ‘Great Lakes’ : que des parents extraordinaires pour cette Dykes Medal de 1959.
· ‘Cliffs of Dover’ (Fay, 1952) (New Snow X Cahokia). Blanc + bleu = blanc. Un blanc à barbes jaunes, archi-classique.
Sixième génération
· ‘Henry Shaw’ (Benson, 1959). Aussi traditionnel que son ascendant ‘Cliffs of Dover’, mais rustique et florifère, des qualités qui n’étaient pas évidentes auparavant.
· ‘Winter Olympics’ (O. Brown, 1963). A fait le détour par ‘Rehobeth’, un fameux bleu, pour provenir de ‘Snow Flurry’, remporter la DM de 1967 et faire le tour du monde.
· ‘Angel Choir’ (Schliefert, 1970). Moins connu par lui-même que par ses enfants comme ‘Bous Lite’ (Sutton G., 1997) ou ‘Heavenly Rapture’ (Schreiner, 1989) indiqués ci-dessous.
· ‘Angel Unawares’ (Terrell, 1970). A la quatrième génération après ‘Snow Flurry’, de même que son cousin ‘Flight of Angels’ (Terrell, 1968).
· ‘Wedding Bouquet’ (Buttrick, 1951). Vient rapidement (3eme génération) de ‘Snow Flurry’ dans une lignée peu productive.
Septième génération
· ‘Angel’s Dream’ (Smith E., 1960). Une carrière discrète pour ce blanc pur qui se situe à la septième génération après ‘Kashmir White’.
· ‘Arctic Fury’ (Benson, 1964). Fils de ‘Heny Shaw’, d’une génération qui ne possède pas de variété vraiment marquante, mais en précède une autre, plus intéressante.
· ‘Jill Rosalind’ (Dodsworth, 1976) a obtenu la BDM en 1981.
· ‘Bonus Lite’ (Sutton G., 1997). Descend aussi de ‘Skating Party’.
· ‘Heavenly Rapture’ (Schreiner, 1989). D’un blanc un peu bleuté.
· ‘Geometrics’ (DuBose, 1975). N’a pas fait beaucoup parler de lui, mais ses enfants, oui !
Huitième génération
· ‘Madeira Belle’ (Quadros, 1970). Fils de ‘Angel’s Dream’. On aborde les temps modernes avec cette variété mondialement appréciée.
· ‘Cup Race’ (Buttrick, 1963). De ‘Purissima’, par la moins spectaculaire de ses lignées. Mais une variété partout très appréciée.
· ‘Bonus Mama’ (Hager, 1990) ((Ice Sculpture x Geometrics) X I Do). Association de trois lignées de blancs, dont une donnant des iris remontants.
· ‘Leda’s Lover’ (Hager, 1980) (sib bleu de Geometrics X Ice Sculpture). Un « must » parmi les blancs, universellement connu et apprécié.
Neuvième génération
· ‘Emmanuel’ (Boushay, 1978) ((Henry Shaw x Winter Olympics) X Madeira Belle) ; triplement blanc !
· ‘Missy Yorktowne’ (Innerst, 1984) (Lemon Mist X Madeira Belle) n’a eu qu’un instant de gloire : le jour où il a obtenu le Florin d’Or à Florence en 1987.
· ‘Lunar Whitewash’ (Innerst, 2003) ((Bonus Mama x Twice Delightful) X semis). Par qui les blancs de ‘Kashmir White’ sont devenus d’excellents remontants.
· ‘Enchanteur Merlin’ (Laporte, 2004) (Sky Hooks X Leda's Lover). Parce qu’il fallait bien qu’un petit français s’invite à la fête !
Dixième génération
· ‘Skier’s Delight’ (Schreiner, 1982) un des meilleurs blancs modernes.
· ‘Wedding Vow’ (Ghio, 1972). Ce descendant de ‘Miriam Steel’ et, bien plus tôt, de ‘Purissima’ a parcouru 10 générations en 45 ans seulement.
Onzième génération
· ‘Pray for Peace’ (Plough, 1982) (Carrara Marble X Wedding Vow). Dans une génération où l’on ne trouve pas grand chose de remarquable, cette variété unit deux blancs de deux générations éloignées : ‘Carrara Marble’ est de la 6eme et ‘Wedding Vow’ de la 10eme.
Douzième génération
· ‘Social Whirl’ (Ghio, 1974). D’une autre génération « creuse ». Un excellent parent.
Treizième génération
· ‘Bubbly Mood’ (Ghio, 1984) (Social Whirl X Ruffled Ballet). Un blanc superbe, pas assez répandu.
· ‘Fine China’ (Gatty, 1986) (Social Whirl X Dream Affair). Physiquement très voisin du précédent, son cousin, mais doté d’une descendance plus intéressante.
Quatorzième génération
· ‘Christmas’ (Gatty, 1991). Une splendeur en blanc pur.
Quinzième génération
· ‘Arctic Express’ (Gatty, 1995) (Christmas X Ocean Pacific). Digne fils du précédent : tout aussi ondulé et immaculé.

Ces 90 ans ont vu s’accomplir un travail énorme au cours duquel les iris blancs ont acquis toutes les qualités que l’on recherche : rusticité, floribondité, ondulations, frisures, remontance… Mais cette étude des iris blancs pourrait être faite également pour toutes les autres couleurs, cependant celle-ci suffit à faire apprécier tout le chemin parcouru.

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