16.2.13

MADE IN POLAND

« Y a t il des hybrideurs et/ou producteurs du coté des pays de l'est ? » C’est cette question, posée il y a quelques temps sur le forum de la SFIB qui m’a donné l’idée de faire un tour du côté de la Pologne. Il faut dire que dans le courant de 2012 un hybrideur polonais, avec qui j’ai des relations par Internet depuis plusieurs années, m’a présenté son travail sur les hybrides de I. sibirica, et que j’en ai fait un article pour la Revue Iris & Bulbeuses. Retourner en Pologne pour parler des grands iris n’était pas pour me déplaire. Depuis la fin de l’ère soviétique et le retour dans le concert des nations démocratiques des pays constituant le glacis de l’URSS, il y a eu dans ces pays un immense engouement pour la culture de l’iris. En Pologne, ce fut la même chose qu’en Russie ou en République Tchèque. Vingt ans après l’ouverture des frontières, la Pologne a rattrapé son handicap et ses obtenteurs peuvent maintenant se mesurer avec ceux des pays dits « de l’Ouest ».

 A vrai dire ils ne sont pas si nombreux puisque je n’en trouve que sept dans les Check-Lists de l’AIS. J’ai enquêté à leur propos et voici ce qu’on peut en dire aujourd’hui.

 Zbigniew Kilimnik est un charmant vieux monsieur (77-78 ans), qui a produit un grand nombre de grands iris de qualité et en a enregistré une quarantaine Il habite un peu au sud-ouest de la grande ville de Rybnik, en Silésie (Sud de la Pologne), un secteur qui héberge plusieurs autres hybrideurs.

 Il y a une cinquantaine d’année que Henryk Polaszek cultive les iris et les glaïeuls. C'est, lui aussi, un vieux monsieur. Il habite à Grudziądz, une grande ville sur la Vistule au nord-ouest de Varsovie, dans la province de Poméranie-Cujavie. Cette cité, très ancienne, a connu le destin compliqué de toute la région. Henryk Polaszek a certainement connu le temps où elle faisait partie de l’empire allemand et se nommait Grudenz. En tout cas ses iris ont une excellente réputation.

 Franciszek Stania fait partie de ces hybrideurs âgés qui caractérisent le monde des iris polonais. C’est un citoyen de Rybnik en Silésie. Il a enregistré quelques TB mis en vente chez son collègue Wozniak. Rybnik, cette grande ville, métropole d’une agglomération qui avoisine les 700 000 habitants se situe près de la frontière tchèque dans une contrée qui a fait longtemps partie de l’empire allemand (ou plutôt prussien) et qui n’est polonaise que depuis la fin de la dernière guerre.

Józef Koncewicz est un nouveau venu dans la société des iris de Pologne. Il a enregistré jusqu’à présent seulement quatre variétés (deux TB et deux BB). C’est un citoyen de Zielona Gora, (connue en français avant 1945 sous son nom allemand : Grünberg), chef-lieu de la province de Lubusz, limitrophe de l’actuelle Allemagne (Saxe). Cette ville est notamment connue comme la capitale du vin en Pologne car c'est la seule région de ce pays où l'on cultive la vigne. L’apparition des iris va lui fournir un nouveau domaine d’activité.

 Robert Piątek, a une quarantaine d’années, il a rejoint la MEIS il y a peu de temps, c'est un homme dynamique et décidé. Il demeure à une trentaine de kilomètres de la ville d’Opole, en Silésie. C'est lui qui s'occupe désormais de l'édition du bulletin de la Société. Il dispose depuis quelques mois d’un site Internet où il présente les iris qu’il commercialise, non seulement des variétés internationalement connues, mais aussi ses propres obtentions et celles de quelques-uns de ses collègues polonais. Si l’on se fie aux photos qu’il y publie, ses propres produits ont l’air très intéressants.

 Agé d’une soixantaine d’années, Jerzy Wożniak, est la personnalité la plus influente de la Société des iris de l’Europe Centrale. Il a enregistré un SDB, mais son affaire, ce sont les TB, qui sont au nombre de 16, à l’heure actuelle, dans les registres de l’AIS. Il est considéré comme le plus habile hybrideur de son pays et sa réputation s’étend bien au-delà dans toute l’Europe de l’Est et maintenant également en Europe de l’Ouest. Il dispose de sa propre pépinière où il fait le commerce des iris, les siens et ceux de ses voisins, dans la grosse ville minière de Rybnik, en Haute Silésie. Cette vieille ville a connu toutes sortes de tribulations au cours des siècles, dans une région politiquement instable et revendiquée longtemps par l’Autriche, la Prusse et la Pologne.

 Il ne faut pas oublier de parler de Lech Komarnicki, non seulement pour l’originalité de son parcours, mais encore pour son activité dans le monde des iris. Il s’est longtemps intéressé aux grands iris, mais les déboires subis en raison des conditions climatiques de la région où il est installé (Wielgie, un coin de la région de Torun en Poméranie-Cujavie, marécageux et où les hivers sont cruels) l’ont incité à se tourner davantage vers les iris de Sibérie et leurs hybrides interspécifiques. C’est dans ce domaine que maintenant il excelle. Il est considéré dans son pays comme le patriarche de l’iris et son autorité dans ce petit monde est évidente ; La MEIS a d’ailleurs édité un opuscule signé de lui, « Iris » qui aborde tout ce qui concerne les iris apogons. L’AIS a reconnu l’importance de son travail et lui a décerné la Médaille des Hybrideurs (Foster Medal) en 2011.

 Apparemment l’intérêt pour les iris ne touche que cette partie de la Pologne qui fut jusqu’en 1945 partie intégrante de l’Allemagne. C’est peut-être le fait du hasard. En tout cas toutes ces personnes animent et font vivre la MEIS, cette société iridophile unique en son genre puisqu’elle est supranationale et rassemble les amateurs des pays de ce que nous appelons en France l’Europe de l’Est. Le fait qu’elle existe et qu’elle prospère devrait être un encouragement pour tous ceux qui militent en faveur d’une Europe de l’iris, qui ferait le pendant dans notre partie du monde de ce qu’est l’AIS en Amérique.

En tous cas, une chose est certaine, c’est que les hybrideurs polonais ne sont pas à la traîne dans leur travail, et que les amateurs européens, échaudés par les obstacles mis à l’importation des iris d’Amérique et d’Australie, peuvent tout à fait commander en Europe de l’Est, où ils trouveront des variétés parfaitement compatibles avec leurs exigences de qualité et d’originalité.

Illustrations : 
- ‘Motylek’ (Kilimnik, 2004) ; 
- ‘Pomorze’ (Polaszek, 2000) ; 
- ‘Jazwin’ (Piatek, 2011) ; 
- ‘Krakowianka’ (Wozniak, 2008) ; 
- ‘Staromodna Dama’ (Komarnicki, 2008).

Aucun commentaire: