2.11.18

L'ECHELLE DES IRIS

Il ya des rosiers nains, des rosiers buisson, des rosiers tige, des rosiers grimpants. Chez les iris, c'est à peu près la même chose. On peut facilement en dresser l'échelle.

MDB 

Les plus petits s'appellent « nains miniatures », en anglais « miniature dwarf bearded » ou MDB. Ce sont les plus petits, mais aussi les premiers à fleurir, au début d'avril chez nous. Voici comment les décrivent les deux rédactrices du chapitre qui leur est consacré dans « The World of Irises » : « les MDB sont petits et délicats, utiles comme plantes de bordure dans un massif de plantes vivaces en mélange ou à l'avant d'iris plus grands et plus tardifs. (…) Bien qu'ils soient d'apparence fragiles, les nains miniatures sont extrêmement résistants. Même en fleur, ils sont assez peu endommagés par un gel léger, cependant il faut si possible les protéger d'un froid intense. Leurs besoins en terme de culture sont ceux de tous les iris barbus, mais en raison de leur réseau radiculaire peu profond, leur protection pendant les périodes de gel intense pose plus de problèmes que pour leurs parents plus grands. » C'est à peu près dans les mêmes termes que s'exprime Richard Cayeux dans « L'Iris, une Fleur Royale ». Ce sont des iris vraiment nains puisqu'ils ne doivent pas mesurer plus de 21cm de haut et avoir des fleurs en proportion, de 5 à 7,5cm de diamètre. Chaque rhizome n'a qu'une seule hampe florale, très courte et sans ramifications. Mais ils compensent ce handicap par une forte multiplication des rhizomes, ce qui génère rapidement de larges tapis de fleurs. A l'origine, au début du XXeme siècle, c'était des hybrides à base de I. chamaeiris, mâtinés de I. olbiensis et I. italica. Mais pour enrichir le panel des coloris disponibles d'autres espèces d'iris nains européens ont été progressivement ajoutées, notamment I. arenaria et I. flavissima. Ces espèces sont diploÏdes. Un grand pas en avant a été franchi avec l'utilisation de I. pumila qui est une espèce tétraploïde aux couleurs variées, vigoureuse et florifère. Dès lors le groupe des MDB s'est affirmé comme celui de plantes de jardins élégantes, robustes et bien utiles pour leur précocité. D'ailleurs l'intérêt du public pour ces plantes s'est nettement accru ces dernières années. Dans la hiérarchie instituée par l'AIS pour la course aux honneurs chère aux Américains, les MDB disposent d'une récompense spécifique, la Carpane-Welch Medal qui a été attribuée à de nombreux grands noms de l'iridophilie (1), ce qui prouve quel intérêt ceux-ci portent à ces petits iris.

SDB

Dans l'échelle établie par l'AIS, le groupe suivant est celui des iris nains standards (SDB ou Standard Dwarf Bearded) aussi appelés lilliputs. «The World of Irises » dit à leur propos : « partout où ils poussent et fleurissent bien, les lilliputs sont devenus une des plantes vivaces qui a connu une faveur sans rivale dans leurs 25 ans d'existence (2), en raison de la facilité de leur végétation et de la rapidité de leur croissance, du charme et de la diversité de leurs fleurs et de leur généreuse fertilité ». Si on ajoute qu'on trouve parmi eux, en plus d'une résistance particulière aux aléas climatiques, des coloris qu'on ne rencontre pas chez les grands iris et un parfum exceptionnel, on explique pourquoi ces petits iris sont devenus si populaires.

Génétiquement ce sont des iris d'origine naine, comme I. pumila, croisés avec des grands iris barbus, ce qui leur confère une taille un peu plus élevée. Ils ne doivent pas dépasser 40cm de haut et le diamètre de leurs fleurs doit se situer entre 7 et 9cm. Leur période de floraison se situe après celle des MDB, c'est à dire au cours de la deuxième quinzaine d'avril sous nos climats. Leur création remonte au début des années 1950, grâce à l'initiative de Paul Cook, et ils reçurent leur classification officielle en 1959. Ils peinèrent néanmoins à s'imposer sur le marché, sans doute à cause de leur moindre attractivité, mais depuis une vingtaine d'années ils se sont créé une niche richement remplie. La Médaille qui leur est particulière se nomme la Cook-Douglas Medal. Elle a couronné des variétés devenues archi-célèbres et les plus grands hybrideurs se la disputent chaque année (3). Parmi eux, de nos jours, Paul Black est considéré comme un grand maître d'une catégorie qui n'a pas encore décroché la Médaille de Dykes, mais à qui l'on peut prédire pour un jour prochain cette prestigieuse récompense.

 MTB 

A ne pas confondre avec les MDB ! Les MTB, autrement désignés « Iris de Table » sont ni plus ni moins que des grands iris...nains. Ce nanisme n'est pas accidentel mais volontaire. Il a été recherché pour obtenir un iris destiné à la fleur coupée, c'est à dire moins encombrant que les grands iris de jardin et plus léger pour être mis en vases. Il est apparu corrélativement qu'ils étaient appropriés à la taille modeste de bien des jardins modernes, bien qu'ils conservent la plupart des qualités des grands iris. Jean Witt, qui a rédigé l'article de « The World of Irises » à leur sujet, confirme ces propos :  « Il n'y a à faire aucune concession à la nostalgie, les MTB sont justement populaires auprès des jardiniers d'aujourd'hui ; leur rôle s'étend largement au-delà de leur premier usage dans les décorations florales. Ils ajoutent de la variété à une collection d'iris et leurs petits rhizomes, ainsi que leurs touffes denses et florifères sont un avantage décisif dans l’espace limité des jardins de ville. » Elle ajoute qu'ils tombent approximativement dans la même taille que les iris intermédiaires (4), mais qu'ils s'en distinguent par la période de floraison (plus tardive) et une plus grande profusion de minces hampes florales. Pour le reste ils ressemblent tout à fait à de grands iris en modèle réduit.

Ils sont apparus dès 1929 dans le jardin d'Ethel Peckham, dans l'Etat de New York, on peut dire par hasard, au milieu de grands iris. La dame, bien inspirée, décida de les garder, mais elle fut longtemps bien seule à s'intéresser à eux ! C'est seulement au cours des années 1960 que les lybrideurs américains ont commencé à les cultiver pour de bon et à les sélectionner. Ils sont cependant restés assez confidentiels pendant de longues années et ce n'est que récemment qu'ils ont pris une certaine importance. La Williamson-White Medal leur est dédiée, mais il n'y a toujours pas foule pour se la disputer ! Une anecdote concerne cette médaille : la variété 'Bumblebee Delite' (Norrick, 1985) se l'est vue attribuée en 1993 alors qu'elle avait déjà obtenu son équivalent en 1991 avant une modification du règlement ! Elle a également frôlé par deux fois le Médaille de Dykes, récompense suprême : en 1992, derrière 'Dusky Challenger' (Schreiner, 1986) , et en 1994 derrière 'Silverado' (Schreiner, 1986). Elle avait, il faut le reconnaître, affaire à forte partie, mais sans doute également l'opinion n'était-elle pas prête, il y a vingt-cinq ans, à couronner un MTB, catégorie encore peu répandue. Il a fallu attendre 2014 pour qu'elle accepte cette situation, et c'est ainsi que 'Dividing Line' (Bunnell, 2004) a apporté aux MTB leur première Médaille de Dykes. Pour la plus grande joie des amateurs de ces petits iris.

(à suivre) 

1 – Pour ne citer que ceux-là : Paul Cook, Ben Hager, Melba Hamblen, Bennett Jones, Paul Black, Thomas Johnson, Keith Keppel, Terry Aitken...

2 – On est en 1978.

3 – Paul Cook, Bee Warburton, Melba Hamblen, Bennett Jones, Ben Hager, Dave Niswonger, Paul Black, Keith Keppel, Thomas Johnson …

4 – hauteur = de 40 à 65cm ; tiges minces et flexueuses ; diamètre des fleurs = 7,5cm.

Iconographie : 

'Bumblebee Delite' (MTB, Norrick, 1985) 


'Dividing Line' (MTB, Bunnell, 2005) 


'Open your Eyes' (SDB, Black, 2010) 


'Sapphire Jewel' (SDB, Hamblen, 1978)


'Fission Chips' (MDB, Keppel, 2004) 


'Tingle' (MDB, Black, 2000)

Aucun commentaire: