Lloyd AUSTIN
Les jeunes amateurs d’iris ignorent peut-être ce qu’ils doivent à un homme comme Loyd Austin. Si ce nom n’a jamais atteint les sommets de la renommée, c’est une cruelle injustice. Mais les iris qu’il a obtenu était sans doute trop révolutionnaires, et l’individu trop modeste pour mettre suffisamment en avant ce qu’il faisait, de sorte que ses contemporains ne l’ont pas particulièrement honoré. On peut cependant dire que sans son travail les iris à éperons ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui. Car c’est bel et bien Lloyd Austin qui a été le premier à en obtenir à grande échelle et à les commercialiser, dès le début des années 60, bien avant qu’ils ne deviennent à la mode.
Lloyd Austin est né dans le Massachusetts en 1898. C’est après la guerre de 14 qu’il a traversé les Etats-Unis pour venir enseigner au Collège d’Agriculture de l’Université de Californie. En 1925 il s’est installé à Placerville en n’en a plus bougé. Son intérêt pour les iris remonte aux débuts de son amitié avec Carl Salbach, un hybrideur des années 30 qui fut l’un des premiers à s’intéresser aux iris roses. En 1946, il choisit de se consacrer essentiellement aux iris. Cette passion le tiendra jusqu’à la fin de ses jours, brutale, au début de 1965.
Plusieurs sortes d’amateurs d’iris peuvent se référer à Lloyd Austin. Parce qu’il ne s’est pas contenté d’agir dans la voie des grands iris. Il a même commencé par se consacrer aux arils, ces iris d’Asie dont la culture a toujours été difficile. Il en a fait venir de partout, et s’est efforcé d’en découvrir tous les secrets et ses écrits concernant les exigences et les modes de culture des arils ont longtemps été la bible des amateurs de ces plantes.
A partir du début des années 50 il a un peu mis de côté son intérêt pour les regelias et les oncocyclus, afin d’accorder plus d’attention aux iris proprement dits. Par nature, il était attiré par la nouveauté, le peu connu, tout ce qui ouvre le champ à des recherches dans un monde peu exploré. C’est ainsi qu’il s’est tout d’abord penché sur les iris remontants, s’efforçant de les rendre compatibles avec le climat plutôt chaud de la Californie. Parmi les trente quatre variétés de cette sorte qu’il a enregistrées il faut noter THANKSGIVING FIRELIGHT (50), variegata, DECEMBER ROYALTY (51), deux tons de pourpre, BLUE SURPRISE (56), bleu marqué de blanc sous les barbes, tout comme AUTUMN PRINCESS (59), en deux tons de rose indien.
Mais quand Lloyd Austin a vu les premiers iris présentant des extensions étranges à l’extrémité des barbes, il s’est dit qu’il y avait là quelque chose qui méritait d’être profondément étudié. Toujours son goût pour ce qui sort de l’ordinaire. Il a dès lors entrepris un énorme travail de recherche et de croisement afin d’exploiter ce qui n’était alors qu’une anomalie, et d’apporter à ces nouveautés toutes les améliorations qui étaient possibles, de manière à ce que les éperons et autres pétaloïdes, confèrent aux fleurs une personnalité excitante mais aussi esthétique. C’est lui qui a inventé l’expression « Space Age » pour désigner ces nouveaux iris, leur attribuant du même coup une identité synonyme de modernité. Le premier des SA qu’il a enregistré s’appelle UNICORN (52), et c’est aussi un plicata. A partir de 1959 il n’a plus produit que des SA, dont les noms font toujours allusion aux appendices qui les décorent : FLOUNCED MARVEL (60), SPOON OF GOLD (60), LEMON SPOON (60), HORNED FLARE (63), SPOONED BLAZE (64)…
Dès lors le goût pour les iris à éperons s’était installé et bien d’autres hybrideurs se sont lancés dans l’aventure, utilisant les cultivars de Lloyd Austin comme base de leur recherches. Manley Osborne, Henry Rowlan ont été parmi les premiers à reprendre le flambeau. Tout le monde connaît MOON MISTRESS (Osborne 76), iris de couleur pêche, ou BATTLE STAR (Osborne 78), bicolore chamois et fuchsia, HULA MOON (Rowlan 78), chamois marqué de violet, ou SPACE DAWN ( Rowlan 82) blanc influencé de jaune citron. Ce sont des variétés qui sont à l’origine des SA actuels, avec les descendants de MOON MISTRESS que sont TWICE THRILLING (Osborne 84), mais surtout SKY HOOKS (Osborne 80), et les SA de Monty Byers, dont CONJURATION (89), THORNBIRD (89) et MESMERIZER (91), les trois Médailles de Dykes issus de SKY HOOKS.
De tout cela Lloyd Austin n’a guère tiré de profit, ses SA étaient trop inhabituels pour espérer décrocher une médaille et lui-même n’a reçu de l’AIS aucune reconnaissance particulière. Cela fait partie des anomalies qui émaillent l’histoire des iris… Mais aujourd’hui chacun reconnaît le rôle primordial qu’il a joué dans cette histoire, et si cette chronique peut quelque peu réparer l’injustice qui lui a été faite, elle aura servi à quelque chose.
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