17.2.23

A COMME ANFOSSO

C'est fini ! « Iris en Provence » c'est fini ! Tous les amis des iris ont été péniblement surpris d'apprendre il y a quelques semaines que la célèbre pépinière de Hyères fermait définitivement ses portes. Tout le monde considérait que cette institution était indestructible et personne n'envisageait qu'elle puisse disparaître. Cependant, comme toutes les choses humaines, Iris en Provence, après près de 50 ans d'existence, a quitté l'univers des amateurs d'iris. Un moment de réflexion teintée de nostalgie s'avère maintenant nécessaire. 

Un artiste peintre d'un certain renom, Pierre Anfosso, dans son village de La Crau, près de Toulon, collectionnait des iris dans son jardin. Son épouse Monique partageait cette seconde passion et elle a approuvé son désir de faire de celle-ci l'activité principale de la famille. Comme ils voulaient faire les choses en grand et sérieusement ils ont pris contact avec l'AIS et ce qui se faisait de mieux en matière d'hybridation : les obtenteurs Joseph Ghio, Keith Keppel ou Ben Hager, furent leurs professeurs pour leur enseigner le métier. Ils ne pouvaient rêver meilleurs maîtres. Ils ont appris non seulement les gestes nécessaires mais aussi les éléments de génétique indispensables pour agir avec un maximum de réussite. C'était au début des années 1970, et 1974 est née la pépinière « Iris en Provence ». Au début elle proposait essentiellement des variétés américaines. Il est vrai qu'à l'époque les obtentions françaises étaient peu nombreuses. Mais les Anfosso ont commencé à créer leurs propres variétés. Et tout le monde s'y est mis, parents et enfants ! 


Un premier succès est arrivé en 1978 avec 'Lorenzaccio de Medicis', création de Pierre-Christian Anfosso (fils) enregistrée l'année suivante ainsi que quelques autres variétés maison : 'Évasion', 'Bateau Ivre', 'Sanseverina', 'Nuit Blanche', 'Calamité', 'Maldoror' et 'Sonate D'O'. Ce bouquet splendide a surpris et séduit les collectionneurs français, mais également les grands hybrideurs américains qui ont pressenti qu'ils avaient affaire à des gens bourrés de talent. Désormais, et jusqu'en 1990 date à laquelle Pierre et Monique se sont retirés, on attendait chaque année avec avidité la sortie du catalogue d' « Iris en Provence ». Pour les nouveautés qui y étaient présentées, mais aussi pour le catalogue lui-même, véritable création d'artiste. 'Echo de France' (1984), 'Bar de Nuit' (1986), 'Voleur de Feu' (1988), 'Draco' (1988), 'Citoyen' (1989), 'Fondation Van Gogh' (1989) sont autant d'étapes dans une course familiale à la perfection qui n'est pas celle du nombre mais celle de la qualité. 



La retraite de Pierre Anfosso a marqué une pose dans la progression de l'entreprise. Son décès en 2004 a profondément affecté la famille qui cependant à poursuivi l'exploitation en la modernisant et l'enrichissant de variétés nouvelles tant françaises qu'étrangères. Un renouveau s'est fait jour en 2018 quand, après ses grands-parents Pierre et Monique, son oncle Pierre-Christian et sa mère Laure Anfosso, Marin Le May a présenté ses premières hybridations, des variétés très réussies – voir 'Terre d'Ocre' (2016) - qui ont réjoui les inconditionnels de la maison, heureux de constater cette sorte de renaissance.


 Quelques années plus tard, la pépinière a abandonné la vente d'iris racines nues, ce qui laissait présager ce qui c'est produit en 2022 : la fermeture pure et simple de l'entreprise, avec la retraite de Laure Anfosso... 

Il ne reste plus dans notre pays que deux pépinières majeures consacrées aux iris. Bourdillon a depuis longtemps ajouté d'autres activités à son activité mais poursuit la vente d'iris et même s'enrichit des obtentions maison signées de Nicolas, ce qui fait plaisir. Cayeux S.A., l'entreprise familiale qui a maintenant plus d'un siècle, maintient la production d'iris à un haut niveau, avec un développement international indispensable. Elle met avant tout l'accent sur les obtentions « maison », qui occupent maintenant une grande partie de l'offre. S'il n'existe plus que deux grandes pépinières vouées aux iris, auxquelles s'ajoutent deux ou trois affaires de moindre importance, c'est peut-être parce que la plupart des obtenteurs (et ils sont de plus en plus nombreux), grâce à la commodité du commerce en ligne, vendent leurs obtentions directement. Cela permet aux amateurs de disposer d'un choix assez considérable de variétés tant françaises qu'étrangères. On peut trouver des variétés américaines, mais aussi européennes et même ukrainiennes ou russes, ce qui est un net progrès par rapport au temps ou le choix se limitait aux américaines et au rares françaises de l'époque. En quelque sorte le choix s'est accru en même temps que le nombre de marchand diminuait ! Il faut s’accommoder de cette nouvelle situation qui correspond à l'évolution générale du commerce. 

La disparition de Iris en Provence reste néanmoins un événement majeur, et un peu triste, dans l'histoire du monde des iris.

2 commentaires:

gerard a dit…

Toute fin est triste, et si toutrs les choses ont une fin, certaines sont plus tristes que d’autres.
Merci à toi, Sylvain, merci à toi Laure.
Une histoire s’achève. On attend qu’une autre commence

Anonyme a dit…

Même si la fin est triste , comme le disent Sylvain et Gérard, une nouvelle vie est en marche mais les Iris restent dans mon cœur et dans les jardins, je ne les quitte pas pour autant. Merci Sylvain pour cette belle conclusion et cet hommage à ma famille. Notre association est une grande famille et j'y reste avec vous tous. Laure