11.2.23

MAUVAIS JOUEURS

Tous ceux qui cultivent des iris savent qu'il y en a qui poussent vite et bien et d'autres qui ont un développement capricieux, lent, voire inexistant. C'est le cas pour toutes les plantes, mais les iris sont particulièrement sensibles à ces sautes d'humeur. Dès le début de ma vie d'irisarien j'ai fait ce constat et je me disais alors que je n'avais sans doute pas fait ce qu'il fallait. J'avais un peu honte de mes mauvais résultats. Et puis un jour je suis aller rendre visite à la pépinière Cayeux, et j'ai constaté que, entre deux touffes vigoureuses, il y avait un « trou », qui correspondait à une variété, dûment notée sur l'étiquette mais qui n'avait pas ou peu poussé. Ce fut une consolation, mais cela ne me donnait pas d'explications ! D'explications en fait il pouvait y en avoir plusieurs, qui parfois s'additionnaient. La plus simple, et même simpliste est celle qui vient à l'esprit immédiatement : « J'ai commis une erreur au moment de la transplantation ». J'ai appris que cela en effet pouvait être exact, mais j'ai appris aussi que les iris sont le plus souvent résistants et qu'ils pardonnent bien des maladresses ou des négligences ! Je raconte souvent le comportement de ces variétés oubliées un mois durant sur une table, racines nues, par un été chaud et sec, qui sont arrivées chez moi complètement desséchées, … et qui sont toutes reparties et ont fleuri l'été suivant. Cependant il est évident que tous les iris n'ont pas cette volonté de vivre. J'ai en mémoire bien des cas de reprises rachitiques et aussi d'échecs patents et inexplicables... En ce qui concerne les reprises laborieuses, en dehors de celles qui peuvent s'expliquer par des circonstances météorologiques peu favorables, les autres sont en général liées à la génétique de la plante. Il y a aussi des échecs qui paraissent inexplicables : la plante reprend, pousse doucement puis végète ; parfois après une belle reprise et un comportement automnal normal elle ne profite pas du printemps pour grandir et reste malingre, quelque fois pendant plusieurs années ! Je qualifie ces iris de mauvais joueurs et dans ma collection, qui a duré trente cinq ans, j'en ai connu un certain nombre ! 

 Par exemple 'Rustic Dance' (J. Gibson, 1979) ainsi d'ailleurs que de nombreux plicatas de cet obtenteur qui, après un démarrage normal et une première floraison intéressante, ont cessé de pousser et ont fini par disparaître après quelques années de galère . Ce fut le cas de 'Burgundy Brown' (1979), 'Mod Mode' (1970), 'Osage Buff' (1973)... 

 Les iris de Joë Ghio ont une réputation de fragilité qui s'est confirmée chez moi avec 'Financier' (1979) ou 'Wedding Vow' (1970). Tandis qu'un de mes préférés l'adorable 'Babbling Brook' (K. Keppel, 1965) n'a jamais voulu s'implanter sérieusement dans mon jardin ! Je l'ai renouvelé trois fois, mais il a disparu trois fois ! Et l'une des variétés les plus capricieuses que j'ai tenté de cultiver est 'Spellbreaker' (Schreiner, 1991) qui a végété pendant sept ou huit ans avant de fleurir magnifiquement ! 

 Une végétation capricieuse n'est pas l'apanage des iris « made in USA ». Aucune origine n'est à l'abri de ces caprices. Par exemple je me souviens de la pousse hasardeuse de 'Pretty Edgy' (Blyth, 2002), de 'Terra del Fuoco' (Bianco, 2005), de 'Ouragan' (R. Cayeux, 1995), de 'Bonte Kermis' (L. Tasquier, 2010) et même de ma propre obtention 'Kir' (2003) que j'ai perdu deux fois et récupéré grâce à une touffe exportée chez un ami, à 5 kilomètres de sa terre d'origine, où elle a prospéré allègrement. 

 Tout ceci ne répond pas à une quelconque logique. C'est à peine si certaines productions sont connues pour les fragilités de leurs obtentions. La nature peut se montrer capricieuse et les amateurs d'iris doivent accepter cette situation avec la patience qui, de toute façon, caractérise les bons jardiniers. 

 Illustrations : 


'Rustic Dance' 


Financier' 


'Spellbreaker' 


'Pretty Edgy' 


'Kir'

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